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mardi 7 juillet 2015

Le roi Lear Shakespeare/ Olivier Py Un coup de rage!

Dans la Cour d'Honneur du Palais des papes décor du Roi Lear de Shakespeare mise en scène d'Olivier Py
Le roi Lear mise en scène Olivier Cour d'Honneur Avignon 2015
Je ne voulais manquer pour rien au monde Le roi Lear dans la cour d’Honneur! Quelle déception! Trois heures d’ennui et de ras-le-bol au cours de laquelle Olivier Py assène son égo, ses fantasmes, ses délires, sans égard aucun pour le grand dramaturge qui a écrit la pièce! Voilà déjà deux fois que je vois le Roi Lear dans le In à Avignon 2013 ICI avec toujours le même résultat : des metteurs en scène qui ne parlent que d'eux-mêmes et qui oublient que c’est Shakespeare le Dieu, pas eux!

Au jeu des squelettes, dans la mise en scène de Olivier Py, Lear enfonce Hamlet! Qui dit mieux?  (Source Le  Monde)
Je veux bien, moi, que le silence de Cordélia représente « une faillite de la parole » qui engendre la « dévastation » « la catastrophe politique » « prophétisant ce qui s’est passé au XX siècle »(Olivier Py). De là à en faire une danseuse en tutu qui ne prononce pas un mot pendant tout le spectacle, elle qui porte le sens de la pièce!
Je veux bien que Régane (ou Goneril) défèque sur scène et jette le contenu du seau sur Gloucester, que l’une ou l’autre renifle leur petite culotte, que Edmond et Cornouailles, s’envoient en l’air derrière les palissades mais ce sont des petites provocations qui n’apportent rien à la mise en scène, ne donnent aucune profondeur, ne témoignent d’aucune lecture du texte. C’est juste une mise en scène gros sabots qui aurait fait scandale il y a trente ans mais qui ne fait même plus frémir le public avignonnais qui en a vu d’autres!
Je veux bien aussi que Lear et Edgar se vautrent dans la boue, nus comme des vers, et courent dans les gradins du théâtre, le sexe à l’air, mais ce qui me gêne c’est qu’ils sont ridicules! Certes, les pièces de Shakespeare pratiquent le mélange des genres si cher à Victor Hugo et certains personnages grotesques du dramaturge ne font pas dans la dentelle, les fous en particulier, mais cela signifie que le comique et le tragique coexistent, non que le comique tue le tragique! Et ridicules ils le sont, ces acteurs, au point de faire ricaner le public au moment où celui-ci devrait être saisi par l’émotion dans cette grandiose scène de la folie, au milieu des éléments déchaînés (la tempête est figurée par un tuyau d'arrosage qui déverse de l'eau sur les acteurs) qui portent à son comble le sentiment de déréliction du monarque déchu, du père outragé.  Mais d’émotion il n’y en a pas! Tout au long de la représentation, les acteurs vocifèrent, en particulier le roi Lear (Philippe Girard), monocorde et peu convaincant, exception faite, peut-être, du comte de Gloucester (Jean-Marie Winling) dont l’acteur souligne les faiblesses et l’humanité.

Quant aux symboles, ils sont d’une telle lourdeur qu’ils provoquent aussi l’hilarité du public comme cette « méditation scénographie sur le cercle, le trou, la béance, ce vide qui aspire les personnages et l’histoire »(Pierre-André Weitz, scénographe) qui désigne un trou pratiqué au milieu de la scène où chaque personnage va s’engloutir! On a rêvé plus subtil comme symbolisme!
Les réactions du public?  Certains sont partis en cours de spectacle mais c’est habituel, il y bien eu deux ou trois huées à la fin, un bravo tonitruant et un ensemble d'applaudissements modérés et polis. Les comédiens ont salué deux fois, c’est peu! Mais ni colère, ni vindicte, ni enthousiasme délirant. Certes, j’ai entendu certains se moquer des lourdeurs de la mise en scène, deux jeunes filles discuter des mérites respectifs de l’anatomie d’Edmond et d’Edgar (au moins, elles ne se seront pas ennuyées, elles!). Finalement, ce qui m’a surprise, c’est la tiédeur! 





28 commentaires:

  1. voilà qui ne me donne pas de regrets de ne pas être déjà à Avignon!
    Dommage...

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    1. Je suppose que tu dois y etre maintenant? J'ai vu beaucoup de pièces pour enfants avec ma petite fille donc de belles réussites; à partir du 16 commence pour moi, le festival sans enfant! Mais j'ai tout de même vu, à ce jour ,deux pièces du In et 7 pièces du Off pour adultes. Pas trop pas à plaindre!
      Le tout c'est de trouver le temps d'en parler dans mon blog, de venir vous voir et de vous répondre! Ce n'est pas évident!

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  2. Pas envie... Et puis, ça commence à être un peu trop une habitude, les acteurs se dénudant. On a compris , il faut passer à autre chose...
    En tout cas j'ai mon billet pour Henri VI, huit heures, c'est la deuxième partie (en décembre près de chez moi), et là normalement je ne devrais pas être déçue!

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    1. Huit heures! Je ne pourrai pas (plus!)!

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    2. Quand c'est génialement fait comme ça, on en redemande! Trois entractes, dont une pour grignoter!

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  3. Voilà qui ne me fait pas regretter de ne pas aller au théâtre ... quand le règne des metteurs en scène tout puissants va-t'il se terminer ?

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    1. Et bien justement, depuis, je suis allée voir Richard III mise en scène de Ostermeier et c'était génial!

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  4. pour avoir vu certaines des mises en scène de M Py je ne doute pas que ce soit lui la vedette plutôt que Shakespeare, je crois qu'une retransmission est prévue dans les soirs prochains je n'avais aucune intention de la regarder et tu me confortes dans mon choix, bien mieux vaut regarder un bon dvd de cette pièce

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    1. Regarde Ran de Kurosawa (dont parle Eeguab)une belle transposition du roi Lear dans le japon médiéval (comme Le château de l'araignée du même réalisateur est une transposition réussie de Macbeth)

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  5. Moi qui suis en ce moment avec Olivier, Branagh et Kurosawa je préfère me taire sur ce sujet. Je pense que tu m'as compris. A bientôt.

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    1. Oh! Oui, je te comprends! Kurosawa, en particulier! Là, c'est une vraie et grande lecture du roi Lear!

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  6. J'ai vu un Cyrano qui se déroulait à l'asile... Alors un Lear à poil... Ça s'appelle la surenchère, non? Je préfère l'art quand il n'a pas besoin d'esbrouffe pour exister, et qu'il sait se défaire pour ne garder que l'essentiel.

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    1. A poil, cela ne m'a choqué que parce que je l'ai trouvé gratuit. Ce que je reproche effectivement à Py, c'est de ne pas se soucier de l'essentiel, le texte de Shakespeare.

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  7. Il me semble avoir vu passer une (très) courte présentation à la TV mais le peu que j'ai vu ne m'a pas mis l'eau à la bouche. Quand va-t-on se décider à redonner leurs lettres de noblesse aux classiques, à jouer simplement ce qu'a écrit l'auteur sans se "l'approprier" et fatalement en faire autre chose...d'incompréhensible, alors imagine ceux qui n'ont pas lu Shakespeare et qui assistent à "ça" ? Ce que tu dis est tragique de bout en bout , même la "tiédeur" finale des spectateurs... Ont-ils compris ?

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    1. Bien sûr qu'ils ont compris! mais ils ont jugé qu'il n'y avait pas de quoi s'énerver ni s'enthousiasmer! Chaque metteur en scène peut (et doit) avoir sa lecture de Shakespeare; c'est cela relire les classiques, en donner son propre éclairage mais.. à condition de ne pas tirer à soi le texte pour flatter son ego, de na pas le dépouiller de son intérêt et d'en avoir une lecture cohérente... pas du grand n'importe quoi!

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  8. Dommage ! Je te lis et j'imagine ta déception que j'aurais certainement partagée.

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    1. Déception et colère! et ennui! Tu ne peux pas savoir combien le beau texte poétique de Shakespeare est devenu plat, traduit par Olivier Py!

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  9. Bonjour claudialucia, je n'ai vu dans ma vie qu'une seule mise en scène d'Olivier Py quand il était directeur du théâtre de l'Odéon et cela m'a suffit. Je n'en reverrai plus jamais, cela ne m'intéresse pas. A part ça, je ne vois pas ce que viennent faire les squelettes dans l'histoire, et quid des filles de Lear? Bonne journée.

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    1. Dans Orlando (une pièce que j'ai trouvée trop longue, trop touffue ) Olivier Py parle de lui-même; il peut alors y mettre ses peurs, ses fantasmes, sa conception de la vie etc... Cela choque ou non mais c'est lui le créateur. Mais quand il déforme et appauvrit Shakespeare pour parler de lui-même, cela m'énerve car ce n'est pas lui qui m'intéresse!

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  10. Ca me fait mal au coeur qu'on maltraite shakespeare ! Ma pièce fétiche, celle qui 'ma fait aimer ce dramaturge ! Je ne suis jamais partie lors d'une représentation, mais je peux comprendre...Pfff trop de provoc, desfois les metteurs en scène veulent innover mais ce n'est pas une réussite.

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    1. C'est surtout que j'ai eu l'impression que cette pièce n'intéressait pas Olivier Py et qu'elle n'était qu'un prétexte pour faire de... l'Olivier Py!

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  11. Je ne serai pas aussi dur que toi. J'avais beaucoup aimé le travail de Py dans ses mises en scène d'Eschyle. Et j'ai retrouvé quelque chose de ce travail dans ce roi Lear. Le problème, c'est qu'en plaquant sur le texte de Shakespeare des préoccupations venues de sa lecture des tragiques grecs ou des jansénistes, il tord le texte. Et le simplifie (sa traduction qui prétend retrouver l'essence du texte de Shakespeare en oublie seulement l'essentiel : les métaphores poétiques.) Mais j'ai l'impression que Py a fait un peu évoluer sa mise en scène au cours des différentes représentations. Le soir où je l'ai vu, seul Lear était nu et ne criait pas. Edgar était enveloppé dans un linge brillant laissant parfois découvrir son anatomie. J'ai pensé à certains tableaux de st Jérôme ou d'ascètes au désert. Était-ce gratuit? Je ne crois pas. Py a voulu traduire l'image de ce roi chassé du paradis, par sa propre faute, sa descente aux enfers. Et reprend quelques belles images tirées de la peinture de la renaissance. Bref, l'idée de donner une vision non romantique de Shakespeare (travail commencé dans sa mise en scène de Roméo et Juliette à laquelle j'avais pour le coup totalement adhéré) ne me semble pas inutile. Ce qui m'a gêné c'est que cela passe par une simplification du texte, et surtout, comme tu le dis, par l'éviction du personnage de Cordelia. Ce qui m'a gêné donc, c'est que sa mise en scène, qui n'est pas nulle, mais intéressante par bien des aspects, est tout simplement misogyne.

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  12. Tu n'es pas aussi dur que moi mais... tu n'es pas très tendre, non plus! : "Il tord le texte" "il simplifie et oublie l'essentiel". C'est bien gentil de vouloir placer "ses préoccupations venues de ses lectures" sauf que cela n'a aucun intérêt puisque cela n'a rien à voir avec le roi Lear!

    Je suis entièrement d'accord avec toi sur la simplification et le manque de poésie du texte. C'est affreux! Quand je suis revenue chez moi, je suis vite allée lire la scène de la folie pour me réconforter. Quand il manque l'essentiel comment apprécier? Pour moi, c'était nul!
    Je suis entièrement d'accord avec toi sur la misogynie de Olivier Py! Cordélia en tutu avec un bâillon sur la bouche pour l'empêcher de parler = Sois belle et tais-toi! Quant au traitement des deux soeurs n'en parlons pas!

    Là où je ne te suis pas c'est dans ta comparaison avec Saint Jérôme et les tableaux de la Renaissance. Malgré tout ma bonne volonté et bien que j'aie souvent assez d'imagination pour adhérer à un parti pris de mise en scène, là, j'ai été complètement réfractaire. Je n'y ai vu que deux grands escogriffes gesticulant et vociférant à qui mieux mieux et un texte dépouillé d'intérêt, d'émotion, de sentiment; je n'y ai vu que des petits "gadgets" de mise en scène mais pas de point de vue global, de lecture de la pièce. Finalement la descente aux Enfers ce n'est pas Lear qui l'a vécue mais moi!!
    Pourtant, merci de m'avoir fait part de ton point de vue, même s'il ne m'a pas convaincue, il me permet au moins de comprendre pourquoi certains spectateurs ont aimé!
    Heureusement, par la suite j'ai vu le très bon Richard III d'Ostermeier qui est à la fois un travail très personnel du metteur en scène et un très belle lecture de la pièce sans qu'il lui soit besoin de la "tordre"! pas pu juger la langue, c'était en allemand.

    Quant à Olivier metteur en scène de ses propres pièces, j'avais été intéressée l'année dernière par son Orlando.
    http://claudialucia-malibrairie.blogspot.fr/2014/07/festival-davignon-2014-mon-bilan-dans.html

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    1. Je vais voir Richard III vendredi. Je t'en dirai plus à l'occasion.

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  13. Oh, dommage que tu n'ai pas aimé, surtout si tu te réjouissais. J'ose à peine dire que souvent, les événements dont on se réjouis le plus sont ceux qui nous déçoivent le plus...

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  14. Beau gâchis! Si cela se joue à Pais, j'éviterai

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