A l'occasion de mon voyage à Lisbonne, je me suis mise à lire ou relire les grands écrivains portugais. J'ai voulu découvrir Les mystères de Lisbonne
 de Camilo Castelo Branco mais j'ai calé à la lecture : l'histoire de 
cette femme emprisonnée par son mari pendant des années est certes 
touchante mais le style trop mélo-dramatique m'a découragée mais j'y 
reviendrai peut-être. 
"Un homme meurt à Rio, laissant dans sa chambre un manuscrit qui 
commence ainsi : " J'étais un garçon de quatorze ans et je ne savais pas
 qui j'étais. " 
 En pleine Lisbonne du XIXe siècle, João, 
orphelin et interne dans un collège religieux, apprend de l'énigmatique 
Père Dinis le douloureux secret de sa naissance. Dès lors, entraîné dans
 une quête où ce qu'il tient pour acquis se révèle incertain, où les 
personnages endossent des identités multiples au gré des lieux et des 
époques, le jeune homme n'aura de cesse de démêler l'écheveau de son 
histoire... 
En attendant de me remettre à la lecture de Les mystères de Lisbonne,  je republie ici un billet consacré à cet écrivain du romantisme : Amour de perdition. 
 
 Amour de perdition
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| Camilo Castelo Branco 
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 Le livre de Camilo Castelo Branco, Amour de perdition, que j'avais découvert en 2011 m'avait beaucoup plu. Ce roman s'inspire de la vie de l'oncle de l'écrivain mais aussi de sa propre histoire et de son amour interdit pour Ana Augusta  qui l'a conduit en prison.  je republie ici le billet que j'avais écrit, tout étonnée à l'époque, que ce qui nous semble, à nous, lecteurs du XXI siècle, des poncifs du romantisme, corresponde, en fait, à la réalité et même à une réalité tragique. La vie de Camilo Castello Branco est un roman ! Les photographies qui illustraient mon billet en 2011 étaient  les miennes mais elles ont disparu, semble-t-il, irrémédiablement. Je cite donc les sources de celles que je publie ici.
 
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| Librairie Lello de Porto (intérieur)source | 
C'est dans cette librairie réputée de Porto, classée patrimoine national, que j'ai découvert Amour de Perdition de
  Camilo Castelo Branco, une des oeuvres romantiques  les plus célèbres 
 du Portugal. Porté plusieurs fois à l'écran, le roman a été adapté 
entre  autres par Manuel de Oliveira, film, paraît-il, magnifique.

Camilo Castelo Branco, écrivain portugais, écrit Amour de Perdition
  en prison. C'est sa passion pour Ana Augusta Placido qui le conduit 
là.  La jeune fille que Camilo Castelo Branco a rencontrée dans un bal à
  Porto est mariée par son père, et malgré son inclination pour le jeune
  homme, à un riche commerçant plus âgé qu'elle. Huit après ce  mariage,
  elle le rejoint à Braga et devient sa maîtresse. Les deux amants  
poursuivis pour adultère prennent la fuite. La jeune femme, à la demande
  de son mari, accepte d'entrer au couvent pour échapper à la justice et
  au scandale mais Camilo l'en délivre. Ana est arrêtée en 1860 et le  
jeune homme se rend à la police peu après. Ils sont tous les deux  
incarcérés à la Prison de la Relation à Porto.
A propos de Amour de Perdition, Camilo Castelo Branco dira plus tard : " J'ai écrit ce roman en quinze jours, les plus tourmentés de ma vie".
 
 
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| Porto : Prison de la Relation en 1863 actuellement centre de la photographie 
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Le récit se situe au début du XIXème siècle, soit un  demi-siècle avant 
la détention du jeune homme à la prison de la  Relation, et a beaucoup 
en commun, on le comprend, avec la propre histoire de l'écrivain.
Il raconte l'amour contrarié de l'oncle de Camilo,  Simon Antonio 
Bothelo,  épris de sa jeune voisine, Thérèse  d'Alburquerque. Le père de
 Thérèse, Tadeu d'Alburquerque, est  ennemi de  celui de Simon, le juge 
 Domingos Bothelo à qui il voue une haine  farouche. Il lui reproche, en
 effet, de lui avoir fait perdre son  procès. Abusant de son pouvoir 
paternel, il veut contraindre sa fille à  épouser son cousin Balthazar. 
La jeune fille refuse de se plier à la  décision de son père. Tadeu 
décide de l'enfermer dans un couvent. Simon  pourrait enlever sa 
bien-aimée mais persuadé que le destin de sa famille  est de connaître 
le malheur à cause de l'amour, il décide d'accepter sa  destinée tout en
 restant le maître. Il  tue Balthazar, choisissant  ainsi la prison et 
la mort. La toute-puissance de son père commuera la  peine capitale en 
exil. Il mourra sur le navire qui l'amène au bagne et  qui a jeté 
l'ancre face au couvent où Thérèse est en train de  s'éteindre. En 
parallèle à cette héroïne noble, femme forte et  déterminée, Camilo 
Castelo Branco  brosse le portrait d'un autre  personnage féminin, 
Mariana. Elle aussi figure majeure du roman, Mariana  est issue du 
peuple. Servante de Simon, éprise de son maître sans rien  espérer en 
retour,  elle l'assiste sans faiblir dans le malheur,  acceptant même de
 le suivre au bagne, et se jette dans la mer pour ne  pas lui survivre.
Ainsi ce récit d'amour fou, de violence, met en scène  des êtres 
entiers, passionnés, qui ne veulent pas composer avec leur  destin et 
préfèrent la mort.
On a souvent comparé Amour de perdition à Roméo et Juliette.
  Mais le roman est bien ancré dans la société portugaise. Il faut lire 
 la préface de Jacques Parsi -qui est aussi le traducteur de l'ouvrage  
aux éditions Actes Sud - pour comprendre que tous ces évènements qui  
nous paraissent appartenir à la tradition un peu conventionnelle du  
romantisme sont non seulement rejoints mais dépassés par la réalité.  
Amour contrarié, mariage forcé, enfermement dans un couvent, sombre  
machination, enlèvement, duel, meurtre, ont été vécus par Camilo et par 
 plusieurs de ses amis. La noirceur du roman est le reflet de la 
jeunesse de cette  moitié du XIXème siècle qui sort perdante d'une 
guerre civile* où ses  idéaux ont été foulés aux pieds.
Au-delà de l'histoire d'amour, j'ai été frappée par   l'âpreté de la 
peinture sociale. Dans cette société, la loi du plus  fort est de 
mise. On n'hésite pas à se débarrasser de celui qui gêne et  on peut le 
faire impunément si l'on appartient à une famille puissante  et surtout 
si la victime est de condition modeste. Ainsi, lorsque Simon  tue  les 
sbires de son rival, avec  son complice, le maréchal-ferrant  Jean da 
Cruz, celui-ci lui fait remarquer que s'ils sont pris, Simon  s'en 
sortira blanchi grâce à son père, le juge, tandis que lui ira à la  
potence. La description du premier couvent où est enfermée Thérèse est  
d'une férocité incroyable. Les religieuses hypocrites et doucereuses,  
sont pleines de fiel les unes envers les autres. Elles dénigrent leurs  
compagnes dès que celles-ci ont le dos tourné, tout en cultivant leur  
propre vice : alcool, goinfrerie, amants. La Mère Supérieure couche avec
  le chapelain et s'endort en faisant ses prières. Thérèse en conclut 
que  si elle veut apprendre la vertu elle doit aller partout sauf dans 
un  couvent. On le voit, la peinture de la  société ne manque pas d'ironie et l'on comprend pourquoi Camilo Castelo Branco a pu passer du romantisme au réalisme dans ses derniers romans.
Je lis dans l'encyclopédie universalis : 
"Enfin, lorsque le réalisme triomphe au Portugal par la plume d'Eça de 
Queirós, Camilo sentant son prestige menacé, son domaine ébranlé, se 
défend par un pastiche truculent de la nouvelle littérature. Bien lui en
 prit ! Cela donna deux romans très différents de sa manière 
habituelle : Eusébio Macário (1879) et La Canaille (1880), puis, en forçant moins la note, La Brésilienne de Prazins
 (1882). Ce dernier livre, histoire d'un mariage forcé dont le 
dénouement est la folie de la femme, présente un point de départ et 
maintes situations tout à fait conventionnels et « camiliens », mais la 
façon de traiter le sujet, la nature des épisodes et la minutie des 
descriptions en font un véritable chef-d'œuvre de la littérature 
réaliste d'expression portugaise." ICI    Ceci me rappelle un peu dans Les Maia le
 pauvre poète romantique Alencar, un peu dépassé, un peu ridicule, dont 
Eça de Queiros ou plutôt ses personnages se moquent tout en l'aimant 
bien.  Mais à la différence d'Alencar, Castelo Branco a réussi à 
s'illustrer dans un genre tout différent de ses débuts.
*Révolte populaire de 1846 qui se prolongea par une guerre civile de neuf mois contre le gouvernement des frères Cabral
Camilo Castelo Branco : Amour de perdition  traduit du portugais par Jacques Parsi édit Actes Sud Babel  roman paru en 1861
 
 
 
Biographie : extrait de l'article de 
 wikipédia   
"La vie agitée de Camilo, comme on l'appelle affectueusement, a été  
aussi riche en événements et aussi tragique que celle de ses personnages
  : fils naturel d'un père noble et d'une mère paysanne, il est très tôt
  resté orphelin. Marié à seize ans avec Joaquina Pereira, il connut  
d'autres passions tumultueuses, dont l'une le mena en prison : celle  
pour Ana Plácido qui devait devenir sa compagne. Fait vicomte de  
Correia-Botelho en 1885, pensionné par le gouvernement, il connut  
cependant une fin de vie des plus pénibles : perclus de douleurs et  
devenu aveugle, il finit par se suicider.
À travers son œuvre très féconde (262 volumes), Castelo Branco s'est  
intéressé à presque tous les genres : poésie, théâtre, roman historique,
  histoire, biographie, critique littéraire, traduction. On y retrouve 
le  tempérament et la vie de l'auteur : la passion fatale s'y lie au  
sarcasme, le lyrisme à l'ironie, la morale au fanatisme et au cynisme,  
la tendresse au blasphème.(...)
Cet écrivain à l'imagination vive, au style communicatif, naturel et  
coloré, au vocabulaire riche et nuancé, est un maître de la langue  
portugaise. Amour de perdition, publié en 1862, est, d'après Miguel de  
Unamuno le plus grand roman d'amour de la Péninsule Ibérique."
       
  
 
 
J'ai lu et apprécié Les Mystères de Lisbonne, mais j'étais dans une pièce fraîche en pleine canicule marseillaise, ce qui explique peut-être cela. Je note ce titre, qui a l'air tout à fait réussi et qui me plaira peut-être encore plus.
RépondreSupprimerMais je pense bien y revenir ! J e n'ailu que le début et c'est le style qui m'a gênée alors que je ne l'avais pas été pour Un amour de perdition.
SupprimerNous sommes décidément sur la même longueur d'onde! J'ouvre mon ordi pour écrire mon petit billet sur les Maia et passe chez toi et voici que tu postes sur Amour et Perdition que j'ai lu en 2015 lors de notre dernier voyage au Portugal. j'ai copié le lien vers mon billet d'alors si cela te dis de le lire :https://netsdevoyages.car.blog/2015/08/02/amour-de-perdition-camilo-castelo-branco/
RépondreSupprimerpar la même occasion j'ai retrouvé les deux articles sur Les Mystères de Lisbonne livre +film. Si le livre ne te dis rien essaie de retrouver le film qui est remarquable (et très long)
Je l'ai lu, c'est d'ailleurs pour cela que j'ai mis un lien vers ton billet. Il faudra que je vois le film mais pas avant d'avoir lu le livre.
SupprimerComme Nathalie, j'ai bien aimé Mystères de Lisbonne", même si j'en avais trouvé le style un peu "ampoulé" (je viens de relire mon billet). J'avais apprécié le personnage du prêtre (Dinis), et les multiples rebondissements de l'intrigue. Donc, pourquoi pas... ?
RépondreSupprimerOui, un style ampoulé, en tout cas au début avec toutes ces comparaisons de la femme avec les anges, et la piété, Dieu etc... Voilà qui m'a fatiguée mais il faut entrer dans l'histoire pour aller de l'avant. Et je le ferai à un moment ou à un autre parce que j'ai aimé Amour de perdition.
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