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mercredi 20 janvier 2016

Fiodor Dostoïevsky : Souvenirs de la maison des morts


La condamnation au bagne


Fiodor Dostoïevsky est arrêté en Avril 1849, accusé d’avoir comploté contre le tsar, et conduit à la forteresse Pierre et Paul. Il fait parti d’un groupe de jeunes gens aux idées progressistes, réunis autour de la figure de Petravesky, mais plus bavards que révolutionnaires. Il n’était coupable, en fait, que d’avoir conservé chez lui un écrit interdit et une presse à imprimer pour éditer des textes anti-gouvernementaux.. Il est condamné à mort avec ses compagnons en décembre 1849. Avec une perversité machiavélique, le tsar imagine alors une mise en scène macabre : le 22 Décembre, les condamnés sont alignés, la tête encapuchonnée, face au peloton d’exécution. Au dernier moment le tsar commue la peine de mort en quatre ans de  bagne.
 Bien longtemps après, Dostoievsky écrira dans L’idiot : Peut-être y-a-t-il de par le monde un homme auquel on a lu sa condamnation à mort, qu’on a laissé souffrir cette torture  et puis à qui on a dit : «  Va, tu es gracié. ». Cet homme là pourrait dire ce qu’il a éprouvé. C’est de cette douleur et de cette horreur que le Christ a parlé. Non, on n’a pas le droit d’agir ainsi avec un être humain. »
Le jour de Noël 1849, Dostoievsky part pour la Sibérie. Il y passera neuf ans, quatre au bagne, cinq dans l’armée comme simple soldat. Ce sont ces quatre années que racontent Les souvenirs de la maison morte traduit en français par Souvenirs de la maison des morts. 

Le bagne


L’écrivain commence la rédaction de ses souvenirs en 1855 en Sibérie. Pour des raisons de censure, le narrateur du récit est un personnage fictif, condamné pour un meurtre passionnel.  Mais c’est bien lui, Fiodor Dostoïevsky qui décrit le bagne et ses terribles conditions de vie, lui qui observe les bagnards autour de lui, la plupart du temps la lie de l’humanité, lui qui analyse ce qu’est la justice du tsar, qui s’interroge sur le mal et le bien, sur l’existence de Dieu.  Pendant ces neufs ans d’exil, se forge sa personnalité complexe, maladive, torturée, pleine de contradictions, déchiré entre Dieu et le Diable, qui fera de lui l’auteur que nous connaissons, le créateur des Frères Karamazov, de l’Idiot, de Crime et châtiment, le double…
Dostoievsky décrit la vie quotidienne des forçats, le travail qu’ils doivent accomplir, la hiérarchie des punitions corporelles, les brimades qu’ils subissent de la part de leurs chefs, l’organisation interne et clandestine des bagnards qui échappe au contrôle des gardiens. Malgré la dureté de cette vie, ce dont Dostoievsky a le plus souffert, plus encore que de l’enfermement et l’exil, c’est de n’avoir jamais été admis par ses compagnons d’infortune à cause de son origine. Noble et intellectuel, il était mis au ban de la société de plus misérables que lui.

 Des portraits terrifiants

Souvenirs de la maison des morts n’est pas un récit d’aventures, haut en couleurs, qui ménage des suspenses, mais un témoignage précis, à hauteur d’homme, de la vie quotidienne, de sa monotonie et de la routine. S’il y a de grands moments de fulgurance, ils sont dus au style et au talent de l’écrivain qui dresse des portraits inoubliables de ces hommes endurcis dans le crime : Sirotkine, «un être énigmatique à tous les égards » Gazine qui « était une horrible créature. Il produisait sur tout le monde une impression effrayante torturante. » ou encore Orlov « qui assassinait froidement jeunes et vieux » «  doué d’un force de volonté extraordinaire, il avait l’orgueil et la conscience de cette force. » Il y a  aussi le noble  Aristov « exemple le plus repoussant de la bassesse et de l’avilissement ». Tous ces personnages , on le comprend, nourriront l’oeuvre ultérieure de l’écrivain.
Mais au milieu de ces criminels, apparaissent parfois des personnages attachants comme Nourra, bon et naïf, ou Ali dont la nature franche et généreuse attire l’écrivain qui entreprend de lui apprendre à lire avec succès.

 Des réflexions  sociales et métaphysiques

Ces observations amènent l’écrivain à s’interroger sur la justice et le bien fondé du châtiment. Pour lui, même le plus réprouvé des hommes est à l’image de Dieu. On ne peut le sauver en l’humiliant. La rédemption ne peut venir que d’un exemple qui élève le condamné, qui réveille son sens moral. Et ceci d’autant plus que ces bagnards sont souvent des hommes du peuple qui n’ont connu que la misère et la violence, ce qui explique leur dégradation morale. Le châtiment, la rédemption et l'humiliation du peuple, on retrouve ici des thèmes qui deviendront récurrents dans l’oeuvre de l’écrivain.

Mon dieu! un traitement humain peut relever jusqu’à ceux chez qui l’image de la divinité semble le plus obscurcie! C’est précisément avec ces « malheureux » qu’il faut se comporter le plus humainement possible pour leur salut et pour leur joie. J’ai rencontré des chefs d’un grand coeur et j’ai vu l’effet qu’ils produisent sur les humiliés. Avec quelques mots affables, ils ressuscitaient moralement leurs hommes.

Dostoievsky s’insurge donc contre les châtiments corporels, il démontre que loin d’éduquer les hommes, ils les endurcissent dans le mal.
« Le droit à la punition corporelle qu’exerce un homme sur un autre est une des plaies de la société; c’est un moyen sûr d’étouffer en elle tout germe de civisme, de provoquer  sa décomposition »

Le travail aussi permet au bagnard  de donner un sens à sa vie mais un travail utile, auquel il peut s’intéresser, non des corvées absurdes et dénuée de sens.
« mais qu’on le contraigne, par exemple, à transvaser de l’eau d’une tine dans une autre, et vice versa, à  concasser du sable ou à transporter un tas de terre d’un endroit à  un autre pour lui ordonner ensuite la réciproque, je suis persuadé qu’au bout de quelques jours le détenu s’étranglera ou commettra mille crimes comportant la peine de mort plutôt que de vivre dans un tel abaissement et de tels tourments. Il va de soi qu’un châtiment semblable serait plutôt une torture, une vengeance atroce qu’une correction; il serait absurde, car il n’atteindrait aucun but sensé. »

 La complexité du personnage

On voit que Dostoïevsky a son idée sur la justice tsariste; il critique les méthodes, les abus des chefs, le dysfonctionnement.  (avec beaucoup de prudence et de mesure). Mais pourtant il finira par adhérer à sa condamnation, à la juger bienfaisante, porteuse pour lui aussi de rédemption.
Seul avec mon âme, je considérais ma vie antérieure, je l'analysais jusque dans les dans ses plus infimes détails, je me jugeais sévèrement, sans pitié. A certains moments même, je bénissais le sort qui m'avait octroyé cette solitude sans laquelle je n'aurais pu me juger ainsi ni faire ce grave retour sur mon passé. ».
Retourné en Russie, il jugera sévèrement les idées sociales qui étaient les siennes et soutiendra le pouvoir du tsar. Claude Roy écrira à ce propos, comparant le pouvoir tsariste et soviétique :  «La Russie d'hier et la Russie moderne sont exemplaires dans la science du "châtiment" sur deux points essentiels. Elles ont poussé plus avant peut-être qu'aucun peuple l'art de donner aux tortionnaires cette paix de l'esprit que procure la bonne conscience. Elles ont su simultanément contraindre un nombre important de leurs victimes, non seulement à subir sans révolte les épreuves infligées, mais à donner à leurs tourmenteurs un total acquiescement.»

Ce roman, très riche, témoigne de l’immense talent de Dostievsky, de la profondeur de ses analyses psychologiques. Il soulève des questions passionnantes sur l’être humain, sa nature profonde, sur le mal et le bien et la justice, sur la liberté, la force de l’habitude, le courage et la lâcheté... Il révèle les questions métaphysiques qui agitent Dostoïevsky. Bref, il contient en germe tout ce qui sera au centre de son oeuvre et permet de mieux comprendre l’homme derrière l’écrivain.

Extrait 1: L’arrivée dans la maison des morts :

Notre maison de force se trouvait à l’extrémité de la citadelle, derrière le rempart. Si l’on regarde par les fentes de la palissade, espérant voir quelque chose, – on n’aperçoit qu’un petit coin de ciel et un haut rempart de terre, couvert des grandes herbes de la steppe. Nuit et jour, des sentinelles s’y promènent en long et en large; on se dit alors que des années entières s’écouleront et que l’on verra, par la même fente de palissade, toujours le même rempart, toujours les mêmes sentinelles et le même petit coin de ciel, non pas de celui qui se trouve au-dessus de la prison, mais d’un autre ciel, lointain et libre. Représentez-vous une grande cour, longue de deux cents pas et large de cent cinquante, enceinte d’une palissade hexagonale irrégulière, formée de pieux étançonnés et profondément enfoncés en terre: voilà l’enceinte extérieure de la maison de force. D’un côté de la palissade est construite une grande porte, solide et toujours fermée, que gardent constamment des factionnaires, et qui ne s’ouvre que quand les condamnés vont au travail. Derrière cette porte se trouvaient la lumière, la liberté ; là vivaient des gens libres. En deçà de la palissade on se représentait ce monde merveilleux, fantastique comme un conte de fées: il n’en était pas de même du nôtre, – tout particulier, car il ne ressemblait à rien; il avait ses mœurs, son costume, ses lois spéciales : c’était une maison morte-vivante, une vie sans analogue et des hommes à part. C’est ce coin que j’entreprends de décrire.

Extrait 2 : L'inhumain dans l'humain

Cette réflexion sur la tyrannie est de tous les temps. Je la lis en pensant aux nazis, aux gardiens des camps de concentration. Elle me paraît terriblement vraie. Elle explique qu’un homme « normal » - un être humain semblable aux autres- puisse être amené à des actes monstrueux. C’est la conclusion du livre de Gita Sereny, Au fond des ténèbres, la thèse de Robert Merle dans Un métier de Seigneur ; La démonstration de Jonathan Littel dans Les bienveillantes.

Celui qui a, même une fois, exercé un pouvoir illimité sur le corps, l’âme de son semblable, sur le corps de son frère selon le loi du Christ, celui qui a joui d’avilir au suprême degré un autre être fait à l’image de Dieu, celui-là devient incapable de maîtriser ses sensations. La tyrannie est une habitude douée d’extension, elle peut se développer, devenir à la longue une maladie. Je soutiens que le meilleur des hommes peut, grâce à l’habitude devenir une bête féroce. Le sang et la puissance enivrent, engendrent la brutalité et la perversion, si bien que l’âme et l’esprit deviennent accessibles aux jouissances les plus anormales.

mardi 19 janvier 2016

Je suis taguée : Mes péchés mignons



Et oui, je suis taguée et par ma fille... en plus! dont vous pouvez aller voir les péchés mignons sur Résonances ICI , blog d'enseignante pour une école de vampires. Si, si, j'ai bien dit ... de vampires! Allez voir plutôt! Pendant que moi, je m'y colle!

Quel livre pourriez-vous lire et relire et re-relire (même si vous le connaissez par coeur)?

 

Je cherche. Je donne les titres de mon enfance : Mon amie Flicka  Mary O’Hara et Bari chien-loup de Curwood  et Croc blanc de Jack London quand j’avais six, sept, huit, neuf etc… ans. Je remonte dans le temps : Jean Christophe de Romain Rolland  quand j’avais douze ans , treize, quatorze etc…
 Mais je comprends bien qu'un péché mignon, c'est un livre que j'ai eu un peu honte à lire! Enfin, j'ai trouvé  :  J'ai lu et relu Angélique, Marquises des anges quand j'étais ado! J'ai honte mais j'ai pas de regret!

Quelle chanson-honte connaissez-vous par coeur ?


« J’avais cinq ans et j’étais amoureux de ma maîtresse d’école. » de Claude François. J’avais 14 ou 15 ans. il y a prescription. C’était pour danser dans le grenier.

Dans le même genre, quel est votre film inconditionnel ?



Le film inconditionnel de ma jeunesse, c'est Autant en emporte le vent. Mais si c'est un péché,  il est très, très mignon surtout Rhett Butler et les robes de Scarlett!! 

Quel petit plat tout simple ou plus élaboré vous cuisinez-vous pour vous redonner le sourire ?


Euh! Cuisiner un plat ne peut me redonner le sourire et me ferait plutôt grincer des dents! Mais le manger, si on le cuisine pour moi, oui! Alors disons : des îles flottantes, des gaufres, des crêpes, du Kouign amman, du kougelhopf!  Miam! Et maintenant j'ai faim!


Mais je me soigne! Je fais du sport ou du moins j'y pense!

Vous grattez et vous gagnez, quelle est la chose futile-inutile que vous achetez ?


Des fleurs! Mais dire que c’est futile-inutile, non!

Quelle est l’odeur qui vous donne le sourire ?




Le parfum des fleurs d’oranger ou de citronnier parce que l’odeur me rappelle notre voyage en Crète, le parfum du  mimosa  parce que cette fleur est un merveilleux soleil en plein hiver et  celui de la violette parce que c’est mon enfance en Cévennes… puis l’odeur neuve et douce d’un bébé… propre!

L'odeur d'un bébé propre

Quelle est cette petite manie qui fait rire vos collègues ?

Qui fait rire mes filles plutôt!


Citer Victor Hugo (ou un autre) à tout propos! 













Marcher dans le tas de poussière accumulé par terre quand elles sont en train de balayer;  pas par méchanceté mais parce que je ne le vois pas!

Moi, en col roulé!

Porter des cols roulés même quand il fait chaud! Enfin! chaud? C'est ce qu'elles disent! J'y ai gagné un surnom : Soeur Claudine Visitandine!






 

Quelle est votre plus grand moment de solitude/votre plus grosse gaffe qui vous fait bien rire maintenant?

Quand j'étais prof!
Quand j’étais prof et maman de petites filles qui avaient peur de Pierre et le loup, des sorcières, des ogres, des monstres dans le placard, de Blanche Neige, des araignées, des fourmis volantes, de l'enfant et les sortilèges, de leur ombre, de …  je suis allée à l’école avec une paire de chaussures dépareillées. Je n’avais presque pas dormi la nuit et le matin je m’étais habillée et chaussée à l’aveuglette, sans avoir le courage d’ouvrir les yeux.

Moi, en mère courage et prof gaffeur

Quelle est la bonne résolution que vous allez prendre pour 2016 et que vous savez pertinemment que vous ne tiendrez pas ?




Ne pas acheter de nouveaux livres avant d’avoir fini ceux de ma PAL : Pile (de Livres) A Lire)

Si vous pouviez vous offrir une journée pour vous, quelle serait-elle ?

Sogneford vu de  Flam : Norvège
Je la partagerai avec mon mari : une journée dans un beau musée ou devant un paysage de Norvège… ou d’ailleurs!

Quel(s) mot(s) vous fait/font rire ou sourire ?



ossicône parce que mon petit-fils Liam (2 ans1/2) m’a appris ce mot, étonné et même indigné par mon ignorance. Moi, qui jusqu’alors disais sottement : « les cornes de la girafe. » Et vous?


et bus cassé : parce qu’il fait allusion à une tragédie presque racinienne (passion contrariée) vécue par le petit Liam.




Modestie



Modeste  : Parce que ma fille Amandine, qui avait alors 4 ans, a un jour déclaré : « Moi, je suis belle, gentille, intelligente et pas modeste!



 Connard :  parce que ma fille Aurélia (2ans 1/2), premier jour de maternelle  à ses grands parents qui lui demandent :
- Alors? qu’as-tu appris à l’école? » 
- Et Pédane! (pédale), connard! »






Juguler : parce que ma fille Aurore (2 ans) plaquant violemment sa poupée par terre : « je gugule, je gugule »
ébaubi parce que ma petite fille Léonie déclare souvent : « oh! je suis toute ébaubie »!

Dans quel magasin ne devriez-vous jamais entrer avec votre carte bleue dans la poche ?




Deux magasins : Une librairie et le magasin Botanique.

Pour finir, citez 5 mots doux espérés pour 2016.


Un mot très doux  :  Grand-Mère

Grand mère : c'est moi!
 et son corollaire, Enfant


Un autre, Tendresse

et aussi Tolérance

Enfin :  Paix



et voilà la liste de mes péchés mignons, vous savez tout!
Je ne vous tague pas mais je vous invite à reprendre le flambeau ou plutôt le stylo ou plutôt le clavier!

lundi 18 janvier 2016

Elizabeth McGregor : la jeune fille au miroir vert



Le titre du livre de Elizabeth McGregor La jeune fille au miroir vert fait allusion à un personnage d’un étrange tableau de Richard Dadd, peintre de l’époque victorienne, intitulé The fairy feller’s master stroke.

Cet artiste est en fait au centre du roman : on le voit peindre dans l’asile où il est enfermé, c’est lui qui rapproche, dans le présent, les deux personnages, Catherine et John, unis par l’amour de l’art.
Catherine, en effet, est une experte en art, à la recherche de tableaux et d’objets pour sa galerie de vente. L’engouement de Catherine pour Richard Dadd  a son origine dans une visite à la Tate Galery quand elle aperçoit le tableau dont le personnage donne son titre au roman. Elle devient, au cours de ses études, une spécialiste de Richard Dadd.
Peu après son divorce elle rencontre John, un architecte, dont elle va tomber amoureuse. Lui aussi a des liens profonds avec le peintre victorien. Le personnage détient des secrets sur Dadd, ce qui va permettre de piquer la curiosité de Catherine et aussi du lecteur. 

Le roman est construit en alternance entre le présent et l’époque victorienne qui permet de découvrir la vie et l’oeuvre de cet artiste hors norme.

Richard Dadd

Photo de Richard Dadd à l'asile
Photo de Richard Dadd à l'asile

Richard Dadd, atteint de troubles mentaux, a passé la majeure partie de sa vie dans un asile où il a été interné en 1844 après avoir tué son père. Il obéissait à la voix d’Osiris qui lui ordonnait de le tuer. C’est à l’asile qu’il a continué son oeuvre. Il y peint des personnages étranges du monde des fées et du Petit Peuple mais aussi des portraits, des scènes illustrant les pièces de Shakespeare, des paysages, souvenirs de ce voyage en Orient, en particulier en Egypte, d’où il n’est revenu que pour sombrer dans la folie. Toute son oeuvre porte l’empreinte du meurtre initial et reflète l’univers mental qui est le sien, soit qu’il cherche à s’en échapper, soit que ses fantasmes et ses visions le hantent.

Le roman est un témoignage de la vie dans un asile dans le milieu du XIX siècle et de l’impuissance de la psychiatrie qui n’en est qu’à son balbutiement. Le bain froid qui laisse le malade transi et à moitié noyé est une  thérapie bien inefficace mais est une des moindres violences que subit Richard Dadd. Dans le premier établissement, il est enfermé dans une cage, la nuit, et laissé pendant la journée, entassé avec tous les autres, dans un couloir long de trente mètres éclairé seulement pas une fenêtre à chaque extrémité!
« Prisonnier de ces cages résonnant de hurlements, de ce labyrinthe de couloirs et de cellules où divaguaient les âmes, profitant du rai de lumière qui tombait de minuscules fenêtres placées haut sur le mur, Dadd a peint la Syrie, Louxor, Damas. »
C’est aussi à une plongée dans l’oeuvre de cet artiste, à l’analyse de ses tableaux, que Elizabeth McGregor nous convie. Elle met en lumière les relations entre la maladie mentale du peintre et les thèmes qui le hantent.
 Pour ma part, c’est cet aspect du roman que j’ai vraiment apprécié. L’histoire du couple contemporain m’a moins intéressée si ce n’est dans leurs rapports avec l’artiste victorien.

De quelques tableaux commentés par Elizabeth McGregor

The fairy feller’s master stroke.

Londres Richard  Dad : The fairy feller’s master stroke.  Tate gallery
Richard  Dad : The fairy feller’s master stroke.
C’était un petit tableau, d’une trentaine de centimètres environ,  d’un vert intense, intitulé The fairy Feller’s Master Stroke. Juste sous le centre du tableau se tenait un homme de dos, qui soulevait une hache. Par terre devant lui, on distinguait une tache ovale au-dessus de laquelle la lame de la hache dessinait un rectangle doré, l’un des seuls détails de vert et brun.
 Parmi elle on distinguait des pirates, des nains, des libellules, des visages et des mains difformes; des pieds minuscules, des jambes grotesques, des ailes repliées dans le dos de certains personnages. Des satyres embusqués dans le sous-bois touffu : un homme assis presque sous la lame. Des courtisans de toute espèce -insectes, êtres humains- étaient réunis autour d’un couple royal.
Elle relut le titre.  The fairy Feller’s Master Stroke. Le coup de maître du coupeur de fées.
L’espace d’un instant, elle se demanda si le vieil homme était la victime, avant d’apercevoir la forme sombre sur le sol. C’était une noisette ou une faine placée de sorte que la hache la casse en deux en tombant. Coup de maître, en effet, que de la fendre en un seul geste.




Richard  Dad : The fairy feller’s master stroke.détail
Richard  Dad : The fairy feller’s master stroke.détail

Hatred et Murder

Richard Dadd : Murder   Caïen terrassant Abel
Richard Dadd : Murder

 Il avait peint ces deux esquisses à quelque séjours d’intervalle. Elles étaient inséparables, mêlées, attachées l’une à l’autre dans son esprit. Murder, le meutre, avait été facile à peindre. Son pinceau courait sur la toile. Caïn se tenait au-dessus du corps d’Abel, un bâton à la main, leur deux corps n’en faisant pratiquement qu’un.
Richard Dadd  : Hatred

 Voici de quoi il n’avait jamais pu parler, pas même à Mr Hood qui s’était montré si compréhensif pour son travail. Son père et lui étaient unis comme les deux frères de la bible, une union scellée à jamais par un moment terrible.  Il se tenait au-dessus du corps de son père, attaché à lui à plus d’un titre par les liens du sang.  Il pensait souvent à cela : la main sur le poignard, le poignard contre la gorge. 
Ainsi vont les liens familiaux : étrangler, unir, tuer.



 

Contradiction

Richard Dadd : Contradiction détail la reine Titiana
Richard Dadd : Contradiction (détail) Titiana
Il n’arrivait pas à l’aimer. Sa Titiana était statique, bouffie d’avidité, repue de désir physique. (…) Elle incarnait la colère, était au coeur du différent entre le roi et la reine des fées. Il la détestait avec de plus en plus de force, éprouvait un besoin grandissant de se libérer d’elle. Et pourtant elle vivait là au centre de son esprit, vêtue d’une robe jaune d’or et d’une cape à traîne et incarnait toutes les difformités, tous les détails, tous les objets qui étaient venus le posséder. Il voulait se libérer d’elle. Il voulait se précipiter dehors et respirer l’air frais.

Richard Dadd : Contradiction
Richard Dadd : Contradiction

La vie de Richard Dadd

Richard Dadd

  "Richard Dadd est né à Chatham, Kent, en Angleterre. Son père était un chimiste. Ses dons pour le dessin s dès son plus jeune un âge, l'a conduit à l'Académie royale des beaux-arts à l'âge de 20 ans. Avec William Powell Frith, Augustus Egg, Henry O'Neil et d'autres, il fonde La Clique, dont il a été généralement considéré comme le principal talent.

En juillet 1842, Sir Thomas Phillips, l'ancien maire de Newport, a choisi Dadd pour l'accompagner, en tant que rapporteur, lors d'une expédition de l'Europe à la Grèce, Turquie, sud de la Syrie et enfin l'Egypte. En novembre de la même année, ils ont vécu une épuisante  expérience de deux semaines dans le sud de la Syrie, passant de Jérusalem à Jordan et retour à travers le désert d'Engaddi. Vers la fin de décembre, alors qu'il voyageait le Nil en bateau, Dadd a subi un changement de personnalité dramatique,  délirant et devenant de plus en plus violent. Il  croyait être sous l'influence du Dieu égyptien Osiris lui-même. Son état a été d'abord fait penser à coup de soleil.
À son retour au printemps 1843, il a été diagnostiqué comme sain d'esprit et a été accueilli par sa famille pour un repos dans le village de campagne de Cobham, Kent. En août de la même année, après avoir acquis la conviction que son père était le diable, Dadd le tua avec un couteau et s'enfuit pour la France. En route vers Paris, Dadd a tenté de tuer un autre touriste avec un rasoir, mais a été maîtrisé et arrêté par la police. Dadd avoue le meurtre de son père, est ramené en Angleterre, où il est enfermé  au département criminel de l'hôpital psychiatrique de Bethlem (également connu sous le nom de Bedlam). Là, puis à l'hôpital de Broadmoor nouvellement créé, Dadd a été pris en charge et encouragé à continuer la peinture par les Drs William Wood et Sir W. Charles Hood, médecins éclairés.
Dadd souffrait probablement d'une forme de schizophrénie paranoïde. Il semble avoir été génétiquement prédisposé à la maladie mentale ; deux de ses frères et sœurs étaient atteints de la même façon, alors qu'un troisième avait « un accompagnateur privé » pour des raisons inconnues." (source : wikipédia)

études de son  voyage en Orient

dimanche 17 janvier 2016

Nicolas Vanier : Loup.



Toujours dans la catégorie : je-veux-des-romans-faciles avec des aventures qui se déroulent dans des pays enneigés, aux conditions climatiques extrêmes, (surtout si je suis au coin de la cheminée!) j’ai choisi  le livre de  Nicolas Vanier intitulé : Loup. 

Répartition des peuples Evènes

Le récit transporte le lecteur en plein coeur de la Sibérie pour partager la vie d’un peuple nomade, les Evènes, éleveurs de rennes attachés à leurs traditions ancestrales. Pour eux, l’ennemi suprême, c’est le loup qui ravage leurs troupeaux. Aussi Sergueï, jeune Evène de 17 ans, est très fier de se voir confier la tâche de gardien des rennes, ce qui est un hommage à ses compétences et son sérieux.
Pourtant, contre toute attente, Sergueï va se sentir ému par une portée de louveteaux, se faire accepter par eux et devenir leur ami. Il sera alors chassé de sa tribu, séparé de sa fiancée, et vivra en solitaire dans la forêt où il affrontera l’hiver sibérien. Ceci jusqu’au jour où un hélicoptère arrive dans la forêt apportant des hommes qui n’ont aucun respect pour la nature : chasse aux trophées, destruction des troupeaux qui assuraient jusqu’alors la survie des peuples nomades, défrichement des forêts. Sergueï va se révolter. Parviendra-t-il à éloigner le danger qui menace son peuple et le pays qu’il aime?

Femmes Evènes au début du XX siècle

Un récit classique, bien mené, dont l’aspect le plus intéressant me paraît être la découverte des coutumes de ce peuple nomade, de sa mentalité et la description des moyens de survie dans un climat extrême. L’introduction d’un étranger perdu dans cet univers hostile, que Sergueï va prendre en charge et sauver, permet à Nicolas Vanier de dénoncer les prétentions de ces peuples qui se disent « civilisés » et les insuffisances de la technologie face à la nature!
La lutte contre le monde moderne et le combat écologique sont un peu trop simplistes et utopistes mais le lecteur ne boude pas son plaisir! Il est heureux de voir Sergueï et les siens triompher même l’on sait bien qui l’emportera à la longue quand il est question d’intérêts économiques!

Un roman écolo, agréable à lire, pour de jeunes ados qui, je pense, pourront se passionner pour l'histoire d'amitié avec les loups et pour l'histoire d'amour de Sergueï et sa fiancée venue d'un autre clan. Quant au film ( très écourté par rapport au roman) avec ses belles images, ses paysages enneigés, ses aurores boréales, ses bons sentiments et sa fin heureuse, il est idéal pour les enfants même tout jeunes comme ma petite fille Léonie. Elle a pris avec véhémence le parti des loups! Une bonne chose, elle ne réveillera plus ses parents avec des cauchemars peuplés par ces bestioles!

Sergueï et les louveteaux


Réponse à l'énigme n° 120 : 

le roman : Nicolas Vanier : Loup
Le film : Nicolas Vanier : Loup

Pas facile aujourd'hui ! Je sais bien que ce film n'est pas la tasse de thé de certains d'entre vous à commencer par Wens! Mais si vous avez des petits enfants, ne le boudez pas! Le dressage des loups est un exploit en soi!
Bravo à Aifelle, Aifelle, Asphodèle (qui trouvé le nom  de l’auteur) Dominique, Keisha , Florence Miriam, Sibylline, Syl.
je n'ai oublié personne?

samedi 16 janvier 2016

Un livre/un film : énigme du samedi


`
Pour ceux qui ne connaissent pas Un Livre/un film, l'énigme du samedi, je rappelle la règle du jeu.

Wens de En effeuillant le chrysanthème et moi-même, nous vous proposons, le 1er et le 3ème samedi du mois, un jeu sous forme d'énigme qui unit nos deux passions : La littérature et le cinéma! Il s'intitule : Un livre, Un film. Chez Wens vous devez trouver le film et le réalisateur, chez moi le livre et l'auteur.

Consignes  

Vous pouvez donner vos réponses par mail, adresse que vous trouverez dans mon profil : Qui suis-je? et  me laisser un mot dans les commentaires sans révéler la réponse pour m'avertir de votre participation. Le résultat de l'énigme et la proclamation des vainqueurs seront donnés le Dimanche.

La prochaine énigme aura lieu le premier samedi  du mois de Février , le 6.

Enigme N° 120
Ce roman écrit par un auteur français contemporain parle d'un pays très froid, situé au-delà du cercle polaire, et d'un des peuples qui y vit. Le héros du roman est une jeune garçon chassé de sa tribu et qui doit vivre dans la forêt, tout seul, dans des conditions de vie rigoureuses.


L'hiver touchait à sa fin. Déjà, le froid était moins rude et, quelques heures par jour, un pâle soleil diffusait une lumière rasante sur le lac gelé, les tentes du campement et la grande harde couverte de givre. Les bêtes et les hommes semblaient tout étonnés de sortir enfin des ténèbres, et conservaient dans leur allure, surgissant de la brume glacée, quelque chose d'hésitant et de fantomatique.
Comme chaque fois que c'était possible, le campement avait été installé près d'une réserve d'eau potable. Le lac, même gelé, constituait une source inépuisable, doublé d'une généreux garde-manger.

vendredi 15 janvier 2016

Les plumes d'Asphodèle : Liberté et ....


Van Gogh

Liberté

Tempête aux cheveux de fleurs
La liberté
Poésie retrouvée.


Et puis quelques petits poèmes au gré des mots...


Odilon Redon

Aube

Majuscule, l’aube.
fer de lance de ma vie.
Respirer la pluie.

 

 

 

Georges Braque : oiseau en vol

Humeur

Pingouin mélancolique
Mon humeur comme une farandole
Oiseau à l'aile blessée.




 
Odilon Redon : Réflexion

 Inspiration

Fantaisie olympienne
L’inspiration
comme un diaporama du bonheur







Léon Spilliaert
Léon Spilliaert



Insomnie 
Insomnie,
maison passe-partout de mes rêves,
Dilettante en habit de deuil.

 

 

 

Edvard Munch

 

Coeur

Mon coeur coupable,
Linge mouillé
serpillière essorée.

 




 Agacement

Minuscule, syncopé,
Agacement du moustique
Sur mon nez.








Les plumes d'Asphodèle : Pour cet atelier, Asphodèle a donné deux listes dans lesquelles j'ai puisé

Liste 1 : Jour, gentillesse, motivation, plaisir, almanach, visite, éclaircie, éparpillement, minuscule, agacement, chaleur, syncopé, coupable, fer, dilettante, farandole, insomnie, maison, passe-partout, poésie, tempête, mélancolique, serpillière,  respirer,

Liste 2 : Content, procrastination, pandiculation, passé, famille, pédestre, olympien, fantaisie, diaporama, bonheur,   Humeur, liberté, aube, pluie, inspiration, pingouin, mélancolie, oiseau, linge, coeur, majuscules, essorer.

Ma liste
minuscule, agacement, chaleur, syncopé, coupable, fer, dilettante, farandole, insomnie, maison, passe-partout, poésie, tempête, mélancolique, serpillière,  respirer, olympien, fantaisie, diaporama, bonheur,  Humeur, liberté, aube, pluie, inspiration, pingouin, mélancolie, oiseau, linge, coeur, majuscules, essorer.