Librairie Lello de Porto (intérieur)
C'est dans cette librairie réputée de Porto, classée patrimoine national, que j'ai découvert Amour de Perdition de  Camilo Castelo Branco, une des oeuvres romantiques  les plus célèbres  du Portugal. Porté plusieurs fois à l'écran, le roman a été adapté entre  autres par Manuel  de Oliveira, film, paraît-il, magnifique.
Camilo Castelo Branco, écrivain portugais, écrit Amour de Perdition  en prison. C'est sa passion pour Ana Augusta Placido qui le conduit là.  La jeune fille que Camilo Castelo Branco a rencontrée dans un bal à  Porto est mariée par son père, et malgré son inclination pour le jeune  homme, à un riche commerçant plus âgé qu'elle. Huit après ce  mariage,  elle le rejoint à Braga et devient sa maîtresse. Les deux amants  poursuivis pour adultère prennent la fuite. La jeune femme, à la demande  de son mari, accepte d'entrer au couvent pour échapper à la justice et  au scandale mais Camilo l'en délivre. Ana est arrêtée en 1860 et le  jeune homme se rend à la police peu après. Ils sont tous les deux  incarcérés à la Prison de la Relation à Porto.
Prison de la Relation à Porto (aujourd'hui, Centre portugais de la photographie)
A propos de Amour de Perdition, Camilo Castelo Branco dira plus tard : " J'ai écrit ce roman en quinze jours, les plus tourmentés de ma vie".
Le récit se situe au début du XIXème siècle, soit un  demi-siècle avant la détention du jeune homme à la prison de la  Relation, et a beaucoup en commun, on le comprend, avec la propre histoire de l'écrivain.
Il raconte l'amour contrarié de l'oncle de Camilo,  Simon Antonio Bothelo,  épris de sa jeune voisine, Thérèse  d'Alburquerque. Le père de Thérèse, Tadeu d'Alburquerque, est  ennemi de  celui de Simon, le juge  Domingos Bothelo à qui il voue une haine  farouche. Il lui reproche, en effet, de lui avoir fait perdre son  procès. Abusant de son pouvoir paternel, il veut contraindre sa fille à  épouser son cousin Balthazar. La jeune fille refuse de se plier à la  décision de son père. Tadeu décide de l'enfermer dans un couvent. Simon  pourrait enlever sa bien-aimée mais persuadé que le destin de sa famille  est de connaître le malheur à cause de l'amour, il décide d'accepter sa  destinée tout en restant le maître. Il  tue Balthazar, choisissant  ainsi la prison et la mort. La toute-puissance de son père commuera la  peine capitale en exil. Il mourra sur le navire qui l'amène au bagne et  qui a jeté l'ancre face au couvent où Thérèse est en train de  s'éteindre. En parallèle à cette héroïne noble, femme forte et  déterminée, Camilo Castelo Branco  brosse le portrait d'un autre  personnage féminin, Mariana. Elle aussi figure majeure du roman, Mariana  est issue du peuple. Servante de Simon, éprise de son maître sans rien  espérer en retour,  elle l'assiste sans faiblir dans le malheur,  acceptant même de le suivre au bagne, et se jette dans la mer pour ne  pas lui survivre.
Prison de la Relation Porto
Ainsi ce récit d'amour fou, de violence, met en scène  des êtres entiers, passionnés, qui ne veulent pas composer avec leur  destin et préfèrent la mort.
On a souvent comparé Amour de perdition à  Roméo et Juliette.  Mais le roman est bien ancré dans la société portugaise. Il faut lire  la préface de Jacques Parsi -qui est aussi le traducteur de l'ouvrage  aux éditions Actes Sud - pour comprendre que tous ces évènements qui  nous paraissent appartenir à la tradition un peu conventionnelle du  romantisme sont non seulement rejoints mais dépassés par la réalité.  Amour contrarié, mariage forcé, enfermement dans un couvent, sombre  machination, enlèvement, duel, meurtre, ont été vécus par Camilo et par  plusieurs de ses amis. La noirceur du roman est le reflet de la jeunesse de cette  moitié du XIXème siècle qui sort perdante d'une guerre civile* où ses  idéaux ont été foulés aux pieds.
Au-delà de l'histoire d'amour, j'ai été frappée par   l'âpreté de la peinture sociale. Dans cette société, la  la loi du plus  fort est de mise. On n'hésite pas à se débarrasser de celui qui gêne et  on peut le faire impunément si l'on appartient à une famille puissante  et surtout si la victime est de condition modeste. Ainsi, lorsque Simon  tue  les sbires de son rival, avec  son complice, le maréchal-ferrant  Jean da Cruz, celui-ci lui fait remarquer que s'ils sont pris, Simon  s'en sortira blanchi grâce à son père, le juge, tandis que lui ira à la  potence. La description du premier couvent où est enfermée Thérèse est  d'une férocité incroyable. Les religieuses hypocrites et doucereuses,  sont pleines de fiel les unes envers les autres. Elles dénigrent leurs  compagnes dès que celles-ci ont le dos tourné, tout en cultivant leur  propre vice : alcool, goinfrerie, amants. La Mère Supérieure couche avec  le chapelain et s'endort en faisant ses prières. Thérèse en conclut que  si elle veut apprendre la vertu elle doit aller partout sauf dans un  couvent.
*Révolte populaire de 1846 qui se prolongea par une guerre civile de neuf mois contre le gouvernement des frères Cabral
Camilo Castelo Branco : Amour de perdition  traduit du portugais par Jacques Parsi édit Actes Sud Babel 2000 roman paru en 1861
voir article ici
Biographie : extrait de l'article de wikipédia
La vie agitée de Camilo, comme on l'appelle affectueusement, a été aussi riche en événements et aussi tragique que celle de ses personnages : fils naturel d'un père noble et d'une mère paysanne, il est très tôt resté orphelin. Marié à seize ans avec Joaquina Pereira, il connut d'autres passions tumultueuses, dont l'une le mena en prison : celle pour Ana Plácido qui devait devenir sa compagne. Fait vicomte de Correia-Botelho en 1885, pensionné par le gouvernement, il connut cependant une fin de vie des plus pénibles : perclus de douleurs et devenu aveugle, il finit par se suicider.
À travers son œuvre très féconde (262 volumes), Castelo Branco s'est intéressé à presque tous les genres : poésie, théâtre, roman historique, histoire, biographie, critique littéraire, traduction. On y retrouve le tempérament et la vie de l'auteur : la passion fatale s'y lie au sarcasme, le lyrisme à l'ironie, la morale au fanatisme et au cynisme, la tendresse au blasphème.(...)
Cet écrivain à l'imagination vive, au style communicatif, naturel et coloré, au vocabulaire riche et nuancé, est un maître de la langue portugaise. Amour de perdition, publié en 1862, est, d'après Miguel de Unamuno le plus grand roman d'amour de la Péninsule Ibérique.
voir article ici
Biographie : extrait de l'article de wikipédia
La vie agitée de Camilo, comme on l'appelle affectueusement, a été aussi riche en événements et aussi tragique que celle de ses personnages : fils naturel d'un père noble et d'une mère paysanne, il est très tôt resté orphelin. Marié à seize ans avec Joaquina Pereira, il connut d'autres passions tumultueuses, dont l'une le mena en prison : celle pour Ana Plácido qui devait devenir sa compagne. Fait vicomte de Correia-Botelho en 1885, pensionné par le gouvernement, il connut cependant une fin de vie des plus pénibles : perclus de douleurs et devenu aveugle, il finit par se suicider.
À travers son œuvre très féconde (262 volumes), Castelo Branco s'est intéressé à presque tous les genres : poésie, théâtre, roman historique, histoire, biographie, critique littéraire, traduction. On y retrouve le tempérament et la vie de l'auteur : la passion fatale s'y lie au sarcasme, le lyrisme à l'ironie, la morale au fanatisme et au cynisme, la tendresse au blasphème.(...)
Cet écrivain à l'imagination vive, au style communicatif, naturel et coloré, au vocabulaire riche et nuancé, est un maître de la langue portugaise. Amour de perdition, publié en 1862, est, d'après Miguel de Unamuno le plus grand roman d'amour de la Péninsule Ibérique.
Billet paru dans mon ancien blog, rédigé  après un voyage au Portugal.

 
 
Bom dia Claudia.J'ai visité aussi ce haut lieu de Porto.Je n'ai jamais lui Castelo Branco mais le film de Ruiz Mystères de Lisbonne est une bien belle histoire que j'ai chroniquée déjà,digne des tourments du Romantisme.
RépondreSupprimerComme Eeguab je ne connais de cet auteur que Mystères de Lisbonne que j'ai lu et vu avec plaisir, on est bien dans un romantisme fou et attachant
RépondreSupprimerEeguab : de bons souvenirs de Porto, cette ville pleine de charme. Par contre je ne connais ni le film de Ruiz ni celui d'Oliveira.
RépondreSupprimer@ Dominique : Oui, un romantisme fou et ce qui m'a le plus étonnée en lisant la préface c'est de me rendre compte que cela correspondait à une réalité de l'époque et pas si rare en plus! D'ailleurs c'est ce qu'a vécu l'écrivain lui-même et son oncle aussi!
RépondreSupprimerje me souviens bien de ce billet! Cela donne très envie d'autant plus que les Mystères de Lisbonne ont été une des surprises de l'an dernier!
RépondreSupprimerQuelle beauté que cette librairie ! ça me fait rêver !
RépondreSupprimersuperbe librairie, je ne connais aucun des films et livres dont tu parles mais Porto est une des destinations dont nous rêvons !!!! euhhh, tu lis ce livre dans la langue ?! biz
RépondreSupprimerLireau jardin : Tu as raison, nous y avons fait plusieurs visites!
RépondreSupprimer@ Jeneen: Nous aussi nous avons beaucoup aimé Porto! Non je ne lis pas le livre dans la langue (hélas!) mais la librairie propose des livres en français et autres langues.
RépondreSupprimer