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dimanche 23 septembre 2012

Un écrivain breton/ Un lieu = Roger Vercel /Brest : Remorques

Un livre/ Un film :  Réponse à l'énigme n°40



Réponse à l'énigme n° 40
Le livre est Remorques de Roger Vercel. Le film qui porte le même titre est de Jean Grémillon, scénario de Cayatte et dialogues de Jacques Prévert.

Ceux qui ont deviné cette fois-ci et ont passé victorieusement leur brevet de pilote de remorqueur sont : Eeguab, Pierrot Bâton, Thérèse... Merci Keisha d'avoir gardé le silence!  Et merci à tous de votre participation.

Roger Vercel (1894-1957) né au Mans, professeur au collège de Dinan, obtint le prix Goncourt pour Capitaine Conan. Remorques parut en 1935. Le roman est différent du film de Jean Grémillon où Jacques Prévert a mis sa patte qui n'a rien de commun avec celle de Vercel. Deux univers très différents.

Le capitaine Renaud  commande un remorqueur, le Cyclone. Il est dehors par tous les temps pour venir en aide aux navires en détresse. Pour l'heure, il est très inquiet pour sa femme dont la santé décline et qui semble perdre ses forces. Cependant, lorsqu'un navire grec appelle à l'aide, Renaud, son second Tanguy et son équipage quittent le port pour se porter à son secours. Le roman raconte ce sauvetage particulièrement difficile et dangereux où chacun subit des épreuves et des souffrances inimaginables et risque sa vie pour sauver celles des autres. Risque sa vie, oui! Mais le navire sinistré devra payer car l'intervention du remorqueur à un prix et un prix fort! Le capitaine grec ne l'entend pas ainsi. Il veut bien être sauvé mais il refuse de payer, il coupe la remorque qui le relie au Cyclone, et prétend qu'il s'en est sorti tout seul. Sa forfaiture rapproche Renaud et la femme du capitaine qui hait son mari. Elle veut se venger et va obtenir la preuve qu'il a menti. Renaud est un instant attiré par elle, pourtant lorsqu'il rentre chez lui et comprend que sa femme Yvonne va mourir, il prend conscience de son amour pour elle, de tout ce qu'elle a fait pour lui, de tout ce qu'il lui doit. Il reste à son chevet pour l'assister dans ses derniers instants. Mais lorsqu'un matelot du Cyclone vient lui transmettre un nouvel SOS, que choisira-t-il? Rester auprès de la mourante ou partir en mer au secours des naufragés?

Le roman peut se lire comme un roman d'aventure au cours duquel les dangers vécus par l'équipage, le courage et l'endurance presque surhumaines des matelots au cours de la tempête, tiennent en haleine le lecteur. Le récit est bien écrit et bien mené et l'on reste suspendu à ce combat contre les éléments déchaînés. Le style est à la fois très réaliste car l'écrivain connaît ce métier et nous l'explique avec force détails. Le roman est de plus bien ancrée dans la région bretonne et le port de Brest. Mais le récit est aussi épique. La mer dotée d'une vie propre avec ses fureurs, sa violence, sa sournoiserie est une sorte de Divinité toute puissante et les sauveteurs qui s'opposent à elle, bien qu'ils soient des hommes très simples, se comportent en véritables héros du quotidien. Le sauvetage des matelots et de la femme dans une chaloupe, le passage de l'île de Sein réputé pour sa dangerosité près du phare d'Ar Men, entre les lignes de brisants semblables à de menaçantes mâchoires, pour ne citer que ces exemples, sont  des moments qui tiennent en haleine le lecteur et le passionnent. Ils me font penser à cet épisode de l'Odyssée où Ulysse ne peut échapper au monstre Charybde que pour tomber dans un autre Sylla!

La chaussée de Sein.. Une chaussée, oui, une route d'écume, cahoteuse, large de quatre milles et hérissée de milliers de cailloux noirs. Et là-dedans, les entrelacs incohérents des courants et des remous, une sorte de foisonnement de l'eau, d'enchevêtrements absurdes, de retours , de repentirs.
Quand le nord redevint clair, les brisants surgirent si proches que Renaud en reçut un choc, comme de retrouver présente, au réveil, la menace d'un cauchemar. Un moutonnement furieux y courait, d'est en ouest, et les recouvrait. C'était quelque chose de prodigieusement vivant, une galopade d'avalanches, des crinières démesurées qui s'échevelaient. Les roches parfois pointaient sous l'écume comme des engins difformes crachant à d'extraordinaires hauteurs des explosions tonnantes.

Mais à d'autres thèmes viennent interférer. La maladie de sa femme, Yvonne, trouble Renaud et lui pose un problème moral. Alors qu'elle a toujours été d'un dévouement exemplaire avec lui comment va-t-il se comporter avec elle maintenant qu'elle est handicapée par la maladie et qu'elle a perdu sa beauté. Il se sent déjà plein d'impatience  de devoir jouer le garde-malade, il sent bien qu'il ne pourra pas assumer ce rôle longtemps si la situation s'éternise. Pourtant le véritable courage ne serait-il pas là? Ne serait-il pas lâche malgré son héroïsme en mer? Un combat se livre dans sa conscience entre son égoïsme et son devoir par rapport à Yvonne.

Et il sentait grandir une inquiétude anxieuse : lui qui avait tant aimé la force, la sienne et celle des autres, comment se tiendrait-il, maintenant qu'il allait être, à son tour, le maître responsable d'une épave? Car c'était là, mieux que sur les bateaux solides, qu'on voyait les hommes et les salauds.

L'autre combat est celui entre l'amour  qu'il porte à Yvonne  et  l'amour de son métier. Il veut qu'elle vive, il lui promet d'abandonner le remorqueur.  Mais peut-il laisser des équipages en détresse, ne pas répondre au SOS des navires qui risquent de se perdre sans lui?


Si le film reprend certains thèmes, la tempête, le combat contre la mer, l'amour du métier en concurrence avec l'amour de la femme, il y a cependant une certaine différence entre le roman et le film. Ce dernier est avant tout une histoire d'amour impossible, thème cher à Prévert qui a écrit les dialogues et il a pour but de réunir le couple mythique Gabin/Morgan  après le succès de Quai des Brumes.. Renaud, (Jean Gabin) tombe amoureux au premier regard de la femme du capitaine (Michèle Morgan) après l'avoir sauvée du naufrage et elle devient sa maîtresse.. Amour impossible car si elle est mariée, lui doit soigner sa femme (Madeleine Renaud). Il est torturé, déchiré entre son devoir pour Yvonne et son amour pour la belle naufragée mais aussi son métier qu'il ne peut abandonner. Dans le roman,  par contre, il n'y a même aucune relation amoureuse entre eux même si Renaud a la tentation d'avoir une liaison avec elle. Par son attitude, elle symbolise à la fin l'ingratitude de la plupart des naufragés envers les remorqueurs et elle a un rôle relativement secondaire puisqu'elle n'apparaît que très tardivement dans le roman.


samedi 22 septembre 2012

Un livre/un jeu : Enigme n°40







Notre jeu énigme reprend donc aujourd'hui, samedi.  Pendant que vous vous torturez pour savoir de quel livre et de quel film il s'agit nous sommes sur les routes, après un dernier au revoir à la Bretagne et nous regagnons notre chez nous, Avignon. Nous ne pourrons donc pas répondre à vos questions mais vous aurez la réponse dimanche comme chaque fois!

Pour les nouveaux venus : De quoi s'agit-il?

Wens de En effeuillant le chrysanthème et moi-même, nous vous proposons, le samedi, un jeu sous forme d'énigme qui unit nos deux passions : La littérature et le cinéma! Il s'intitule : Un livre, Un film.

Chez Wens vous devez trouver le film et le réalisateur, chez moi le livre et l'auteur.
Consignes :  Vous pouvez donner vos réponses par mail que vous trouverez dans mon profil : Qui êtes-vous? et  me laisser un mot dans les commentaires sans révéler la réponse pour m'avertir de votre participation. Le résultat de l'énigme et la proclamation des vainqueurs seront donnés le Dimanche.
Pendant les vacances, nous arrêtons le jeu Un livre/ Un film



Enigme 40
L'action se passe dans un port français, sur un bateau dont le personnage principal est le capitaine. Celui-ci est passionné par son métier mais tourmenté par la maladie de sa femme. Devra-t-il abandonner son bateau pour elle? Voici un extrait qui vous mettra sur la piste!


Le jour ne se leva vraiment qu'à sept heures, et la première chose qu'ils virent, ce fut que leur bateau dégouttait d'écume ainsi qu'un cheval fourbu. Elle s'était collée partout où le jet de la mer ne lavait pas, en gros tampons jaunes troués comme par des doigts. La lumière semblait dissoute dans la mer et battue dans son eau sale, car l'on n'en voyait pas la trace dans l'air opaque qui ruisselait dans ce que l'on continuait, par habitude, d'appeler le ciel. Les embruns giclaient parmi le déluge des averses et bouchaient toute la vue. A peine si parfois, du haut d'une lame, on entrevoyait, à un demi-mille, le mur noir et mouvant des grains qui crevaient sans répit. (...)
Et le Grec, depuis trois heures, appelait comme un enragé. Il appelait surtout, sans la moindre pudeur, les autres remorqueurs concurrents....


vendredi 21 septembre 2012

Brassée d'images : Rencontre entre blogueurs à Dinan

Jeneeen, Wens et Sateen à Dinan (photo prise par Claudialucia)

Notre voyage en Bretagne se termine donc avec la rencontre à Dinan de Jeneen. Son blog Livre d'Eden est animé non seulement par la maman mais aussi par sa fille Jenna absente sur la photo car elle était allée prendre un cours de musique. Il manque donc une petite blogueuse à l'appel! Quant à Sateen, le petit bout de chou qui est dans les bras de Jeneen, elle n'en revient pas encore d'avoir rencontré le vrai père Noël (Wens) qui avec sa barbe blanche a endossé le rôle sans difficulté. Rencontre sympathique et animée. Décidément, on rit bien dans les blogs mais aussi hors blogs!

Sateen, Claudialucia, Jeneen, Wens (photo prise par Jeneen avec déclencheur. Un exploit sportif!)

Et voilà quelques images de la ville où habitent nos amies-blogueuses :

Dinan, vieilles maisons

Dinan

L'église des Cordeliers

Vitrail des Cordeliers : La reine Anne de Bretagne

Dinan : La Rance vue de la vieille ville

La cathédrale Saint Sauveur

Dinan : vieille maison

Merci Jeneen de nous avoir si sympathiquement accueillis, Wens et moi!

jeudi 20 septembre 2012

Ernest Renan, philosophe breton : la vérité sera un jour la force




Le jeudi, c'est citation, est aujourd'hui illustré par un écrivain, philosophe, historien breton Joseph Ernest Renan qui est né à Tréguiers (Côtes d'Armor) en 1823 et est mort à Paris en 1892.  Passionné de sciences, il a adhéré aux thèses de Darwin sur l'évolution des espèces, s'est intéressé aux origines ethnico-géographiques de la religion :

"Une part essentielle de son œuvre est d'ailleurs consacrée aux religions avec par exemple son Histoire des origines du christianisme (7 volumes de 1863 à 1881) et sa Vie de Jésus (1863). Ce livre qui marque les milieux intellectuels de son vivant contient la thèse, alors controversée, selon laquelle la biographie de Jésus doit être comprise comme celle de n'importe quel autre homme, et la Bible comme devant être soumise à un examen critique comme n'importe quel autre document historique. Ceci déclenche des débats passionnés et la colère de l'Egise catholique.
Ernest Renan  dans Qu'est-ce qu'une nation  (1882)  formule l'idée qu'une nation repose sur un réel passé commun et sur une volonté d'association : ce qui constitue une nation, ce n'est pas parler la même langue, ni appartenir à un groupe ethnographique commun, c'est "avoir fait de grandes choses ensemble, vouloir en faire encore dans l'avenir. "(Wikipédia)
Son intérêt pour la Bretagne natale a été constant :  L'Âme bretonne (1854) et son texte autobiographique Souvenirs d'enfance et de jeunesse (1883).

Voici trois pensées auxquelles j'adhère entièrement :

La vérité sera un jour la force. « Savoir, c'est pouvoir. » est le plus beau mot qu'on ait dit.

Nous avons des idées arrêtées dès que nous cessons de réfléchir.

Rien de grand ne se fait sans chimères.

lundi 17 septembre 2012

Brassée d'images: Bretagne : Perros Guirec et la côte de granit rose

Perros Guirec

Notre voyage en Bretagne continue. Nous venons de passer une semaine à Perros Guirec dans un des maisons que l'on voit accrochée à la colline au-dessus de la plage de Trestaou, tout près du sentier des douaniers. De belles balades sur la côte de granit rose dont voici quelques photos. Nous sommes à l'heure actuelle à Evran près de Dinan. Il nous est difficile de nous connecter, c'est pourquoi je viens très peu vous voir. Retour à Avignon samedi 21 Septembre.

 La plage de Trestaou Perros Guirec


Le sentier des Douaniers


 La côte de granit rose

La côte de granit rose rose




Poète breton : René-Guy Cadou, l'enfant précoce


 René Guy Cadou par lui-même


René Guy Cadou est né en 1920 à Sainte-Reine-de-Bretagne et est mort en  1951 à 31 ans à Louisfert également en Loire-Atlantique.



Jacqueline Duhême illustration pour l'enfant de la haute mer de Jules Supervielle

L'enfant précoce

Une lampe naquit sous la mer
Un oiseau chanta
Alors dans un village reculé
Une petite fille se mit à écrire
Pour elle seule
Le plus beau poème
Elle n'avait pas appris l'orthographe
Elle dessinait dans le sable
Des locomotives
Et des wagons pleins de soleil
Elle affrontait les arbres gauchement
Avec des majuscules enlacées et des cœurs
Elle ne disait rien de l'amour
Pour ne pas mentir
Et quand le soir descendait en elle
Par ses joues
Elle appelait son chien doucement
Et disait
« Et maintenant cherche ta vie ».

dimanche 16 septembre 2012

Challenge Shakespeare : Bilan 3 Pièces, sonnets, biographies...


Voici le troisième bilan du challenge Shakespeare organisé par Maggie et moi, qui vous donnera peut-être envie de continuer des lectures shakespeariennes... car avec Maggie, nous avons décidé de continuer ad vitam aeternam ce challenge... Qui aime Shakespeare, nous suive !
De plus nous vous proposons une lecture commune Antoine et Cléopâtre pour le 30 Octobre.

Généralités sur Shakespeare

-Dominique qui n'est pas inscrite au challenge a eu la gentillesse de nous permettre de citer son billet sur une biographie du dramaturge :

Flora : Spot the quote : words, words, words..

Miriam : challenge Shakespeare c'est parti

Dominique : La biographie de Bill Bryson

Maggie : Shakespeare : biographie de Bill Bryson

Theoma : Antibiographie de Bill Bryson

Dominique : traduire la poésie, les sonnets

Wens : Qui est Shakespeare?  Woody Allen

Claudialucia : Le théâtre du Globe


Shakespeare au cinéma

Lou : Anonymous Robert emmerych Was Shakespeare a fraud?

Maggie : To be or not to be  Lubitch
 Maggie : Shakespeare in love 

Miriam : Hamlet to-be-or-not-to-be-lubitsch-mel-brooks/

Miriam : Hamlet de Laurence Olivier (1948)
Miriam :Le film de Michale Radfort : Le marchand de Venise

Wens : La mégère Apprivoisée (Zeffirelli) 
Wens : Hamlet de Zefirelli  

Shakespeare et la danse contemporaine



Quand les écrivains parlent de Shakespeare

Claudialucia : Michel Quint : Les Joyeuses

Claudialucia :
Gérard Donovan dans Julius Winsome

Wens : Extrait de Bill James : Skakespeare et le polar  


Océane : Dumas et Shakespeare 



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Antoine et Cleopatre



Irrégulière  : Antoine et Cléopâtre

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Beaucoup de bruit pour rien



 Lewerentz: Beaucoup  de bruit pour rien ( film de Kenneth Branagh)

Titine : Beaucoup de bruit pour rien 

 
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Hamlet



 Claudialucia : Rimbaud : Ophélie 
Hamlet : en guise d’introduction(1), 

Ophélie (2) 

Hamlet et Ophélie (3)


Wens : Hamlet de Zefirelli


Theoma :   Hamlet


Miriam : Hamlet de Laurence Olivier (1948)

Droopy vert : Hamlet

 
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La Mégère apprivoisée


 Océane : La mégère apprivoisée
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La Tempête



Miriam :

Claudialucia :

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Le conte d'hiver



 Claudialucia : Le conte d'hiver

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Le marchand de Venise


Miriam :
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 Le roi Lear

  




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Le songe d'une nuit d'été 

 Droopy vert

Maggie 1001 classiques

Lou : Le songe d'une nuit d'été 

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Macbeth




  


Maggie : 1001 classiques : Macbeth
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Othello


Théoma : Othello

Eiluned : La tragédie d'Othello, le Maure de Venise
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Richard III



 Céline : Richard III dans son Blog Bleu


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Roméo et Juliette

Ellcrys : Roméo et Juliette

L'Irrégulière  Roméo et Juliette 
 
Flora : Jouer Juliet and Romeo à 76 et 66 ans
 



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Titus et Andronicus


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Sonnets



Dominique : Traduire la poésie. Les sonnets.

jeudi 13 septembre 2012

Félicité Lammenais : philosophe breton, le plus puissant de tous les leviers...




Hugues Félicité Robert de Lamennais est né à Saint Malo en 1782 et est mort à Paris en 1854. Philosophe, écrivain, il était aussi homme d'église. Son nom de famille est Robert et c'est en s'inspirant du lieu-dit « la Mennais », où son grand-père possédait une métairie, qu'il se nomma ainsi.


Le plus puissant de tous les leviers, c'est la volonté


Le cri du pauvre monte jusqu'à dieu mais il n'arrive pas à l'oreille de l'homme
 

Vous n'avez qu'un jour à passer sur la terre; faites en sorte de le passer en paix.
    

                                                          extrait de Paroles d'un croyant   
   

mercredi 12 septembre 2012

Joyce Carol Oates : Bellefleur




Bellefleur de Joyce Carol Oates paru en 1980 aux Etats-Unis est un roman fleuve de près de mille pages qui conte l'histoire d'une dynastie fondée par Jean-Pierre Bellefleur, aristocrate d'origine française, chassé de son pays au XVIII siècle et qui crée un immense empire en achetant des terres. Il  amasse une colossale fortune dont il ne reste que des traces (mais substantielles!) au moment ou Leah épouse son cousin Gideon et décide de restaurer la puissance et la richesse de l'orgueilleuse famille.
 Le récit court sur plusieurs générations de la fin du XVIII à la fin du XX  siècle et présente un nombre impressionnant de personnages et d'actions. La structure du récit qui refuse la chronologie, passe d'une époque à l'autre, d'un personnage à l'autre, est extrêmement complexe à l'image de cette famille absolument hors du commun. L'écrivain ouvre parfois des portes sur un évènement mais les referme bien vite, piquant notre curiosité qui ne trouvera satisfaction que bien des chapitres après. Bellefleur n'est donc pas de tout repos ni pour le lecteur ni pour l'auteur et ce n'est pas étonnant que Carole Joyce Oates ait déclaré que ce roman l'avait "vampirisée". Mais s'il semble partir dans toutes les directions, si les personnages paraissent impossibles à maîtriser dans leur folie et leur fantaisie meurtrières, il aboutit exactement là où l'écrivaine a voulu le conduire, lorsque tout nous a été révélé, que toutes les pistes se sont rejointes, et que le seul dénouement que l'on pouvait attendre pour une telle famille survient enfin!
 Le roman navigue entre réalisme et fantastique. Certes, la vie de la famille est bien ancrée dans les époques et la société et Oates décrit les jeux de pouvoir et d'argent d'une société inégalitaire et capitaliste mais il se passe de drôles de choses dans l'antique et ténébreux manoir des Bellefleur! Un des fils disparaît dans une chambre hantée et l'on ne le revoit jamais. Il n'est pas le seul! Yolande, une des filles d'Ewan, frère de Gideon, disparaît elle aussi  après avoir croisé un mystérieux chien jaune, incarnation maléfique d'un jeune garçon, voisin pauvre des Bellefleur. Germaine, la fille cadette de Gideon et Leah a des pouvoirs de divination et annonce les catastrophes. Un bébé Bellefleur est enlevé et dépecé par un oiseau d'une envergure démesurée et doté d'une intelligence machiavélique. Le nain, domestique de Leah, ne cesse de grandir et de se redresser… Mais, même lorsque le Merveilleux n'a pas sa part dans le roman, les personnages sont tellement exacerbés, excessifs, tordus, ou carrément déments que l'on croit rêver. Je pense à Jedediah, sorte de Fou de Dieu, ermite qui se retire en solitaire dans la montagne, à  Jean Pierre II  psychopathe et sérial killer a l'air innocent… ou Leah et son araignée géante perchée sur l'épaule qui régle le sort des prétendants de la jeune fille un peu trop entreprenants..! Bref! Lire ce roman de Joyce Oates, c'est aller de surprise en surprise! J'avoue que certains passages de ce roman m'ont fascinée et qu'il m'a été difficile d'échapper à ma lecture. Pourtant, il y a des moments où j'ai été moins captivée. Pourquoi? Une impression de surplace, des personnages qui m'intéressent moins, une fatigue passagère liée à un trop grand nombre d'évènements. Quoi qu'il en soit Bellefleur est un bon roman qui est le fait d'une écrivaine de caractère, en pleine possession de son art et qui frappe fort.





mardi 11 septembre 2012

Tom Bullough : Mécaniques du ciel, la vie deConstantin Tsiokolvsky :



La terre est le berceau de l'humanité. Mais peut-on passer sa vie entière dans un berceau? écrit Constantin Edouardovitch Tsiolkovski  (1857_1935) qui est considéré comme le père et le théoricien de l'astronautique moderne. C'est la vie de ce génial physicien, autodidacte et visionnaire, que nous conte Tom Bullough dans Mécaniques du ciel.

Le roman commence avec la découverte de l'univers du petit "Kostia" à Korostovo où le père de l'enfant, bûcheron d'origine polonaise, vit avec sa famille. Les paysages de neige, la rencontre avec un loup, les promenades en Kibitka, les courses folles sur les glaces de la rivière en dégel, les traditions religieuses et les contes hantés par Baba Yaga, la vieille sorcière, rythment l'enfance du petit garçon, recréant l'ambiance de la vieille Russie, ses coutumes, ses mentalités. Mais l'enfant va bientôt vivre deux évènements qui vont marquer sa vie : Il échappe de peu à la mort en contractant la scarlatine qui le laisse sourd et sa mère, Maria Ivanovna  meurt. C'est son imagination, l'irrésistible attrait qu'il éprouve pour le ciel et l'espace infini qui lui permet de vivre ces moments de souffrance.

Kostya imagina qu'il venait de quitter la surface courbe de la Terre et qu'il montait plus haut que la tour de l'église Vladimirskaya, à travers les épais nuages, dans les régions élevées où les oies traçaient une flèche ne migrant au printemps et à l'automne, et où La Viatka se réduirait à une tête d'épingle dans l'incommensurable forêt- à peine distincte, oubliée aussitôt que vue...

 Dans ce milieu modeste mais aimant, dans ce pays aux moeurs encore féodales, l'intelligence précoce de l'enfant éclate. Nous le retrouvons à Moscou où malgré sa surdité il enseigne la physique pour gagner sa vie. Son génie nourri de rêves combiné à son exceptionnelle intelligence lui permet d'élaborer des théories qui serviront de base, bien des années après, à l'envoi d'hommes dans l'espace.
Le récit suit un ordre chronologique, chaque chapitre correspondant à une date précise, ce qui donne lieu à des scènes fragmentées souvent conçues comme des nouvelles avec un début et une chute. La progression du récit n'est pas due à un déroulement linéaire avec une montée progressive de l'intérêt mais est assuré par le passage du temps  montrant Constantin Tsiolkovsky aux différentes époques de sa vie. J'ai beaucoup aimé les deux scènes qui encadrent le roman, l'une au début, l'autre à la fin,  l'une montrant l'enfant face à un loup dans la vaste taïga, l'autre décrivant l'atterrissage dans la forêt sibérien de deux cosmonautes russes dont l'un, Leonov, est le premier piéton de l'espace, et leur face à face angoissant avec une meute de loups. Ainsi à plus d'un siècle de distance la scène semble se renouveler confrontant ces deux hommes du XX siècle à l'enfant qui les as envoyés dans l'Espace.

Tom Bullough  réussit  à captiver son lecteur dans cette évocation à la Tolstoï d'une enfance russe -  c'est la partie que j'ai préférée- puis dans la description du jeune homme que sa surdité éloigne des autres, sympathique pourtant bien qu'un peu à part. Si le lecteur est admiratif de la grandeur d'un esprit qui peut voir aussi loin et aussi bien dans le futur, il s'intéresse aussi au personnage du roman, modeste, attachant, à ses amitiés et ses amours, ses recherches et ses intuitions, si bien que le roman est d'une lecture intéressante et très agréable.