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mercredi 5 février 2014

Marina Tsvetaïeva : Mars et Poèmes sur Moscou



J'avais participé au jeu de la poésie sur facebook avec Mars, la poésie de Marina Tsvetaïeva que m'a fait découvrir Marylin. Marina Tsevtaïeva, figure importante de la poésie russe, méconnue de son vivant, s'exila en 1922 à l'étranger, où elle poursuivit son œuvre poétique. Elle regagna la Russie en 1939. L'hostilité à laquelle elle fut confrontée la poussa au suicide en 1941.

Picasso  : Guernica

 MARS

O pleurs d'amour, fureur !
D'eux-mêmes — jaillissant !
Ô la Bohème en pleurs !
En Espagne : le sang !
Noir, ô mont qui étend
Son ombre au monde entier !
Au Créateur : grand temps
De rendre mon billet
Refus d'être. De suivre.
Asile des non-gens :
Je refuse d'y vivre
Avec les loups régents
Des rues — hurler : refuse.
Quant aux requins des plaines —
Non ! — Glisser : je refuse —
Le long des dos en chaîne.
Oreilles obstruées,
Et mes yeux voient confus.
À ton monde insensé
Je ne dis que : refus.

15 mars-11 mai 1939.
(traduction Eve Malleret)

 Insomnie et autres poèmes

 Pour le jeudi d'Asphodèle j'ai choisi un des poèmes sur Moscou dans la recueil Insomnie et autres poèmes aux Editions Poésie/Gallimard


Edouard Gaertner : vue panoramique du Kremlin à Moscou(1839)
 

Poèmes sur Moscou


Nuages autour,
Coupoles autour.
Par-dessus Moscou
- De toutes mes mains ! -
Je te hisse au ciel, mon radieux fardeau,
Mon beau petit arbre
Qui ne pèse rien !

Dans la prodigieuse,
Paisible cité
- Où même défunte
J’aurai de la joie -
À toi de régner, et d’être affligé,
De porter couronne
Ô mon premier-né !

Jeûnant aux carêmes,
Sans khôl aux sourcils,
Honore toujours
La nuée d’églises.
Et parcours à pied – de ton jeune pas –
Les libres espaces
Sur les sept collines !

Il viendra ton tour
- Tendrement amer -
De donner Moscou
À ta fille un jour.
Moi j’aurai les songes, et le son des cloches,
Sur Vagankovo
Les aubes précoces.
31 mars 1916


 


Et voici la liste des participants au jeudi poétique d'Asphodèle :  Marie et Anne, Soène, Lili, Pyrausta, Jean-Charles, Claudialucia, Natiora, Modrone-Eeguab. Fransoaz , Luocine, et  Dame Mauve. Et Laurent Fuchs, un nouveau participant !










lundi 3 février 2014

Astrid Lindgren, une écrivaine suédoise : Ronya, fille de brigand et Fifi Brindacier



Dans le cadre Hiver en Suède, j'ai envie de parler de deux romans de la grande écrivaine suédoise pour la jeunesse : Astrid Lindgren

Ronya, fille de brigand

Ronya , fille de brigand, film de Tage Danielsson

L'enfance de mes filles a été bercée  par ce roman d'Astrid Lindgren : Ronya, fille de brigand, (1981) lu et relu un nombre incalculable de fois dès qu'elles ont su lire!

Ronya est née par une nuit d'orage en même temps que Birk, mais chacun d'un côté opposé de la forêt. Elle est la fille du brigand Mattis et se montre digne de lui par son intrépidité, sa vaillance, une vraie fille de brigands! Son père l'adore. Birk, lui, est le fils de Borka, chef du clan ennemi. Tout semble les séparer et pourtant le jour où Ronya rencontre Birk, ils vont se lier d'amitié. Une amitié qui n'ira pas sans difficultés et suscitera rejet et colère de la part des adultes. Ce beau sentiment sera-t-il assez fort pour réconcilier les  bandes rivales?
Ronya est un beau livre d'aventures, riches en péripéties. Il parle de liberté et d'amour de la nature. Il permet aux petits lecteurs de rêver en partageant la vie aventureuse des deux enfants, la pêche dans les torrents, la chasse à l'arc, le combat contre les elfes et les nains facétieux. Un adorable livre que je recommande aux enfants à partir de six ou sept ans.

Le roman a été adapté au cinéma par Tage Danielsson en 1983. Et le dessin animé japonais va sortir de studios Ghibli en automne 2014


Ronya, fille de brigand, studio Ghibly

Fifi Brindacier



Avec Fifi Brindacier, Astrid Lindgren crée un personnage  qui a connu un succès international et dont le surnom a eu des adaptations dans toutes les langues* : Pippi Långstrump en suédois signifie  Pippi longues chaussettes. Son véritable nom est Fifilolotte Victuaille Cataplasme Tampon Fille d'Efraïm Brindacier ou Pippilotta Viktualia Rullgardina Krusmynta Efraimsdotter Långstrump en suédois. 

On le voit ne serait-ce que par son nom, Fifi Brindacier n'est pas comme tout le monde! Sa maman est un ange dans le ciel et son papa que tout le monde croit noyé est le roi des cannibales sur une île déserte. Fifi vit seule dans la grande maison de ses parents et elle a pour amis, un singe Mr Nillson, un cheval et ses petits voisins Tommy et Annita. Son physique aussi sort de l'ordinaire : elle a deux petites tresses rousses dressées sur la tête, deux énormes chaussures, de longues chaussettes et une force phénoménale. Elle est capable de soulever un cheval!


Fifi Brindacier (1945)  est un personnage qui a fait scandale. En France il a fallu longtemps pour que le livre soit traduit entièrement sans être édulcoré! C'est qu'il bouscule les stéréotypes filles-garçons (on dirait maintenant qu'il lutte contre la construction du genre et, en cela, il est toujours d'actualité). Fifi est tout le contraire de la petite fille modèle, douce et sage, craintive et qui a peur de salir sa belle robe!  Elle ne joue pas à des jeux de fille, elle fait du cheval et grimpe aux arbres. Elle aime avant tout sa liberté et son indépendance! 
Le roman bouscule avec humour toutes les conventions sociales et l'ordre bourgeois établi. Fifi ne veut pas aller à l'école et perdre sa liberté; elle n'ira pas et les gendarmes qui lui sont envoyés seront gentiment mais fermement remerciés grâce à sa force colossale! De même, les dames bien pensantes et bourgeoises se plaignant de leur bonne seront remises à leur place par la langue bien pendue de Fifi! Tout le contraire d'une petite fille bien élevée! Une héroïne anticonformiste mais toujours gentille, prenant fait et cause pour les faibles et les victimes, malicieuse et drôle! On comprend pourquoi les enfants aiment!

* En anglais : Pippi Longstocking, de son nom complet Pippilotta Delicatessa Windowshade Mackrelmint Ephraim's Daughter Longstocking





dimanche 2 février 2014

Glaz magazine numérique et collectif de Gwen : Participez!



Vous avez pu lire le n° 2  ICI du magazine numérique et collectif  de Gwen et l'appel lancé pour le numéro 3  :

Le thème du prochain appel à textes, pour le numéro 3 de printemps de Glaz! sera :

PASSAGE(S)

Allégorie de la tempête de Pierre Brault (source) le passage du vent


Passage à tabac, passage à niveau, passage piétons, passage d'une rive à l'autre, d'un pays à l'autre en bateau, en voiture, par les airs etc..., l'immigration, la frontière, le passage du vent, passage du temps, passage du désir, passage dans la classe supérieure, passage de l'enfance à l'âge adulte, passage secret, passage du réel au fantastique, passage dans l’au-delà… à vous de voir dans quel sens vous l’entendez. Pour nous, ce sera dans son acception la plus large!

Vous êtes appelés à participer selon vos envies, vos lectures, vos désirs d'écriture.  

Plusieurs façons de collaborer


- Si vous aimez écrire des textes de Fiction, prose ou poésie, envoyez vos écrits à Gwenaelle avant le 16 Février 2014.

- Vous pouvez aussi écrire des critiques de livres, de films, d'expositions, de peintres, photographes etc... sur le thème du passage jusqu'au début Mars (date et longueur du billet à préciser avec Gwenaelle)

- Envoyer des photographies ou des dessins à Gwen sur ce thème jusqu'au début Mars (date à préciser avec Gwenaelle)

adresse  : (glazmagazine@gmail.com)


Pont d'Avignon XVI siècle

Pour ma part, j'ai décidé d'écrire sur Le Pont d'Avignon, d'abord parce qu'il s'agit de ma ville, ensuite parce que le Pont, entre merveilleux et Histoire, a eu une importance vitale et est toujours paré d'une aura liée à sa légende.

Enfin parce que LE PONT en général est à la fois un passage réel, une frontière, mais il est aussi, bien souvent, investi d'un symbolisme qui dépasse la réalité. Il illustre donc les deux sens du passage, du concret à l'abstrait.

Donc si vous le pouvez envoyez à Gwen, des photographies de PONTS de tous les pays accompagnées de quelques lignes explicatives : pont de Londres, Pont des soupirs, pont Mirabeau, pont des Arcs, Pont de Millau,  Pont du Gard , Ponte Viecho de Florence, Pont de Prague, Pont de Brooklyn, de San Francisco etc.... et pourquoi pas aussi, des ponts moins connus, ceux de votre petit village!

Heinrich Von Kleist : Mikhael Kohlhaas



Le roman de Heinrich Von Kleist,  Mikhael Kohlhaas, récemment adapté à l'écran par Arnaud des Pallières, est paru en 1810. L'écrivain s'est inspiré d'une vieille chronique évoquant l'histoire du véritable Kohlhaas .

La véritable histoire Kohlhaas au XVI° siècle

Jean-Frédéric, électeur de Saxe

Un riche marchand de chevaux prénommé Hans Kohlhaas vit à Cölln, en Brandebourg. Il mène ses chevaux à Dresde, en Saxe, pour les vendre et il est arrêté à la frontière par le nouveau Junker qui lui demande un droit de péage, ce que n'avait jamais fait l'ancien seigneur qui vient de mourir. Kohlhaas paie les droits mais le seigneur l'accuse d'avoir volé deux chevaux. Kohlhaas les lui laisse en gage, le temps d'apporter la preuve de l'achat. A son retour, le marchand constate que son valet a été molesté et ses chevaux sont en mauvais état. Il décide d'attaquer le seigneur en justice. Mais malgré ses démarches aux tribunaux de Saxe, il n'obtient jamais gain de cause, le junker étant protégé par ses pairs. Alors Kolhaas décide de se faire justice et avec l'aide d'un armée de malheureux et de soudards, il mène la révolte, tuant, brûlant des cités, tant et si bien que l'électeur de Saxe est obligé de composer avec lui et de lui promettre justice. Mais il ne tient pas sa promesse et Kohlhaas reprend son combat. Finalement le maquignon est arrêté et justice lui sera faite :  les chevaux lui sont rendus en bonne santé mais il est exécuté en 1540 pour les crimes qu'il a commis..

L'adaptation de Heinrich Von Kleist au début du XIX siècle

Heinrich Von Kleist

Heinrich Keist reprend la même histoire en s'inspirant de la chronique. Mais s'il  respecte les faits scrupuleusement malgré quelques libertés (l'épouse de Kohlhaas perd la vie en lui servant d'intermédiaire) il va leur donner un autre sens.
Au XVI siècle, à la Renaissance, la lutte pour la justice de Hans Khohlhaas montre l'ascension de la bourgeoisie qui ose se dresser face aux princes tout puissants qui gouvernent l'Allemagne divisé en duchés. Ce sont les premiers prémisses de l'ébranlement de la féodalité. Mais le combat de Mihkael Kohlhaas, le personnage de Kleist, une oeuvre qui paraît au début du XIX siècle, est celui du siècle des Lumières. Le personnage est un homme du peuple qui ne doit sa fortune qu'à lui-même, qu'à ses mérites. C'est un homme intelligent, qui sait lire, un protestant qui puise son savoir et sa sagesse dans la bible, un homme pieux, intègre et travailleur.
Il se heurte aux privilèges d'une classe sociale, d'un homme, le Junker, qui n'a aucun mérite, aucune qualité morale, dépravé, cupide, lâche et qui exerce un pouvoir arbitraire. Il ne s'est donné que " la peine de naître et c'est tout " pour reprendre les mots de Voltaire!  Mikhael Kohlhaas, épris d'un fort sentiment de justice, se sent donc investi d'une mission par rapport aux hommes victimes eux aussi de l'arbitraire.

Mais un sentiment opposé et d'aussi haute valeur parlait en lui, prenant des racines de plus en plus profondes, dans la mesure, où, poursuivant son voyage, il entendait parler, partout, où il entrait, des injustices journellement commises à l'égard des voyageurs (…)Dans le cas où, comme il semblait bien, tout cet évènement eut été une pure machination, il n'était plus qu'un homme voué au devoir d'employer ses forces, et toutes ces forces, à la réparation d'une telle offense et, pour l'avenir, à la sécurité de ses concitoyens.

 De là, à en faire un révolutionnaire, il n'y a qu'un pas qu'il ne faut surtout pas franchir! Car Kleist ne va pas jusque là !

Le sentiment de la Justice chez Kleist

Josse Lieferinxe: L'archange saint Michel terrassant le dragon (~1500)

Heinrich Von Kleist ne supportait pas l'injustice à un tel point qu'il a démissionné de l'armée parce qu'il se sentait incapable d'appliquer à ses hommes des punitions légales mais qu'il ne jugeait pas conformes à sa morale. Lui-même a été souvent confronté à l'injustice, empêché de publier par la censure, rejeté par certains contemporains comme Goethe qui a en horreur son oeuvre. Autrement dit, par ce trait de caractère, il crée dans son personnage un double de lui-même mais jusqu'à un certain point.. Il ne sera jamais un révolté et il se suicidera à l'âge de 34 ans.
Kohlhaas, loin de l'idéal du révolutionnaire, va s'incarner comme un justicier de Dieu, l'archange Saint Michel. D'où le changement de prénom par rapport au personnage historique Hans Kohlhaas. Mikhael a la pureté de l'archange, son intégrité, sa force morale; mais il en a aussi le bras vengeur, tenant le glaive de la justice, tel "un ange exterminateur". Cela signifie-t-il que Kleist pense que  l'homme à le droit de se faire justice lui-même?


La condamnation de l'auto-défense

Martin Luther

En se faisant justice lui-même, Kohlhaas commet des crimes innombrables, il met à mort des innocents, ruinent des villes en les assiégeant et en les brûlant. Il se met au ban de la société. Le fait de se considérer comme l'archange Saint Michel est un signe de démence. Le révolté incarne la démesure comme le font souvent les héros romantiques mais alors que Hugo ne dénonce pas Hernani devenu un réprouvé, un brigand pour mener un juste combat, Kleist condamne son héros sans appel. La rencontre de Kohlhaas et de Luther le montrent bien. Si Luther accepte d'intervenir pour le maquignon parce qu'il a le droit pour lui aux yeux des hommes, il a tort devant Dieu;  il lui demande en vain de renoncer à sa vengeance pour sauver son âme.

Kohlhaas, son chapeau entre les mains, dit avec émotion :
- Ainsi très révérend seigneur, je ne puis être admis au bienfait de cette réconciliation que j'ai sollicitée de vous? (l'absolution)
Luther répondit sèchement :
-avec ton sauveur, non! Avec ton souverain, tout reste suspendu à une tentative dont je t'ai fait la promesse.

Kohlhaas ne pardonnera jamais puisqu'on le voit, au moment où il va monter sur l'échafaud, exercer une ultime vengeance envers l'électeur de Saxe. Mais malgré son apparente défaite, la justice est rétablie puisque ses chevaux lui sont rendus intacts et que ses fils sont armés chevaliers. Kholhaas aurait-il donc eu raison, même s'il le paie de sa vie, d'avoir mené ce combat?


La transposition de Mikhael Kohlhaas par Arnaud des Paillères

 
De magnifiques paysages

Arnaud des Pallières transpose l'action qui se déroule au XVI siècle en pleine guerre de religion dans les Cévennes, dans des paysages somptueux et magnifiquement filmés qui donnent force au récit,  magnifique épopée rythmée par le changement des saisons, le passage du temps.
L'électeur de Saxe devient la princesse Marguerite de Navarre qui promet à Kohlhaas réparation des torts subis et qui tient parole, tout en le condamnant à mort pour ses exactions. 
Le rôle de Luther est dévolu à un ministre protestant, traducteur de la bible, qui, comme dans le roman, ne parvient pas à obtenir le repentir du marchand.


Mikhael Kohlhaas et sa fille

Une autre liberté prise par rapport au livre, c'est le personnage de la fille de Kohlhaas qui a ici une présence étonnante. Les enfants dans le livre existent (il y en cinq) mais n'ont pas un rôle déterminant. Si le réalisateur donne une telle importance à la fillette, on est en droit de se demander pourquoi. Peut-être symbolise-t-elle la dureté de cette époque ravagée par la violence de la guerre. Peut-être aussi, et c'est ce que je pense, juge-t-elle son père et le condamne-t-elle? Elle cherche, en effet, à comprendre pourquoi il agit ainsi et ne reçoit pas de réponse. Aussi à la fin, quand elle vient lui dire adieu, elle part sans verser une larme et sans se retourner comme si elle éprouvait de la colère et de la rancune envers lui.

Mikhael Kohlhaas, dans le film, est un maquignon allemand, protestant, installé dans le pays. Allemand, peut-être pour expliquer l'accent du remarquable acteur danois Mads Mikkelsen qui  interprète le personnage et a dû apprendre le français pour les besoins du film.  Il incarne à merveille la pureté, l'intégrité du personnage. Un homme qui paraît sans faille. On peut se demander si Arnaud des Pallières condamne son personnage, comme le fait Kleist, ou si, au contraire, il le justifie en le magnifiant!



Les valeureux combattants de l'énigme qui ont  découvert la vérité : Aifelle, Dasola, Dominique, Miriam, Pierrot Bâton, Syl..

Le roman : Mikhael Kohlhaas de Heinrich von Kleist

Le film : Mikhael Kohlhaas de Arnaud des Pallières







samedi 1 février 2014

Un livre/ Un film : Enigme 85




Wens de En effeuillant le chrysanthème et moi-même, nous vous proposons, le 1er et le 3ème samedi du mois, un jeu sous forme d'énigme qui unit nos deux passions : La littérature et le cinéma! Il s'intitule : Un livre, Un film. Chez Wens vous devez trouver le film et le réalisateur, chez moi le livre et l'auteur.

Chez Eeguab, le 2ème et 4ème samedi du mois vous trouverez l'énigme sur le film et le livre

Consignes :  Vous pouvez donner vos réponses par mail que vous trouverez dans mon profil : Qui êtes-vous? et  me laisser un mot dans les commentaires sans révéler la réponse pour m'avertir de votre participation. Le résultat de l'énigme et la proclamation des vainqueurs seront donnés le Dimanche.

Samedi 8 Février la prochaine énigme, N° 86, aura lieu chez Eeguab.


Enigme 85

Le roman que vous avez à découvrir est devenu un classique de la littérature allemande. Publié en 1810, il raconte une histoire vraie qui s'est déroulée au XVI siècle. Son auteur a été rejeté de son temps et son oeuvre brutale, violente, qui met en scène des personnages hors norme, a choqué ses contemporains.


Il raconta ensuite à Lisbeth sa femme, en suivant point par point les détails, il  lui déclara qu'il était tout à fait résolu en appeler la justice de son pays et il eut la joie de voir qu'elle approuvait ce projet de toute son âme. Elle dit en effet  que plus d'un autre voyageur, peut-être moins endurant que lui, passerait encore par ce château et que ce serait faire une oeuvre pie que d'en finir avec de pareils désordres; enfin qu'elle saurait bien réunit le montant des frais que causerait la conduite du procès. Il l'appela sa vaillante compagne, passa dans la joie ce jour et le lendemains auprès de ses enfants, et, aussitôt que ses affaires lui donnèrent un moment de liberté, il se mit en route pour Dresde afin de déposer sa plainte au tribunal.

vendredi 31 janvier 2014

Les plumes d'Asphodèle : Hommage à Andy Goldsworthy

Land Art : Andy Goldswothy



Le Land Art est la réponse en Europe au mouvement du Earth Art américain. Jugeant ce mouvement artistique assez agressif envers la nature qu'il défigure parfois, les artistes du Land Art décident d'utiliser les matériaux naturels trouvés sur place pour créer des oeuvres éphémères appelées à disparaître lentement au gré des saisons.

Né en 1956 en Angleterre, Andy Goldsworthy  est  devenu le chef de file incontesté du Land Art.
Goldsworthy travaille avec les matériaux les plus divers que lui offre la nature, sa source d'inspiration unique. Au cours de ses promenade,  il utilise des pierres, de la glace, de la neige, du sable, de l’argile,  de la mousse, des feuilles, du bois ou des fleurs. Seule la photographie permet de garder des traces de ses créations.

Hommage à Andy Goldsworthy

 

Andy Goldsworthy

Land art! tu lèves le voile brillant
De la nature, tu explores ses dessous
Falbalas. Tu nous grises du vin de sa vigne
Loin du visible
Tu traverses ses mondes inconnus,
Tu danses avec ses Fantômes .



Invisible, dans l'innocence de l'aube 
Etoile, fantaisie de lumière, dentelle,
Introuvable dans ton brouillard de cristal
Tu brilles, délicate, fragile, honnête
Et forte sur tes pattes de cristal 




Brindilles, toiles d'araignée, Nudité
Vraie dans votre vérité  insignifiante
L'eau du lagon reflète la psyché
Et votre armature de dentelle
semble être celle d'étoiles déchues 
 



Cercles de glace, grandes bouées de blancheur
 élevées loin des ombres de la cité
Vous vous dressez, Diaphanes,
dans un paysage de Vapeur
lumière qui peu à peu s'éteint...



Atelier d'écriture d'Asphodèle : les mots imposés étaient :

Invisible, fantôme, innocence, introuvable, voile, dentelle, brouillard, psyché, honnête, insignifiant, dessous, eau, politique, nudité, diaphane, visible, cristal,  lumière, lagon, briller, vérité, fantaisie, traverser, vagabonder, vapeur, vin.




mercredi 29 janvier 2014

Tracy Chavalier : La dernière fugitive



Avec La dernière fugitive, Tracy Chavalier signe un livre charmant, vivant et chaleureux. Nous suivons son héroïne Honor Bright, une jeune anglaise, quaker, qui émigre aux Etats-Unis avec sa soeur Grace. Celle-ci doit se marier avec un anglais installé dans l'Ohio mais elle meurt dès son arrivée. Honor continue seule le voyage pour rejoindre le fiancé de Grace mais elle  s'aperçoit bien vite qu'elle n'est pas vraiment la bienvenue.
Nous sommes en 1850 et  c'est l'occasion pour  Tracy Chevalier de nous présenter ce pays en pleine ébullition, toujours en mutation, et les problèmes liés à l'esclavage. Si Honor trouve un mari assez rapidement dans la personne d'une jeune fermier, Jack Haymaker, le bonheur n'est pas au rendez-vous dans la ferme où règne en maîtresse de maison Mistress Haymaker, la mère de Jack. Et lorsque Honor découvre l'existence du "chemin de fer clandestin" qui aide les esclaves en fuite à passer au Canada, Honor se met en danger et toute sa famille avec, pour venir en aide aux malheureux.  Elle se heurte aussi Donovan,  un chasseur d'esclaves sans scrupules. Des thèmes qui ne peuvent laisser indifférents.

Eastman Johnson : Esclaves fugitifs (source Wikipédia)

Comme d'habitude Tracy Chevalier crée un personnage féminin attachant et qui n'a pas froid aux yeux, doté d'un courage certain. Honor sait prendre son destin en main malgré sa fragilité apparente et l'épreuve qu'elle vit en se retrouvant seule après avoir quitté son pays et sa famille à tout jamais. Sans renoncer à sa foi et à son éducation quaker, elle tire son épingle du jeu et fait preuve d'un grand pragmatisme quand il s'agit de se chercher un prétendant. Nous sommes loin de la romance traditionnelle! De plus, la jeune anglaise comme les autres héroïnes de Tracy Chevalier, a un don particulier qui lui permet de se débrouiller dans la vie : elle coud avec minutie et adresse de splendides quilts en patchwork aux motifs traditionnels, à une époque où ces courtepointes représentaient souvent la dot indispensable de la jeune fille à marier et avaient une valeur symbolique dépassant ainsi le simple objet utilitaire.


Motif traditionnel : l'étoile de Bethléem (source)

Tracy Chevalier s'est très bien documentée sur ses différents sujets, les quakers, l'Amérique abolitionniste et le chemin de fer clandestin, les mentalités, l'Ohio et bien sûr les quilts pour lesquels elle a poussé sa recherche jusqu'à en fabriquer un elle-même! Elle nous fait voyager dans l'espace et le temps sans jamais laisser ses connaissances prendre le dessus et alourdir l'action. Elle sait faire vivre ses personnages, notamment, à côté de Honor, son amie Belle, modiste dans la ville de Wellington, tout en évitant les pièges du sentimentalisme et de l'eau de rose!
Pas un chef d'oeuvre, non, mais une lecture très agréable!

Voir le billet de Dominique ICI 
Chez Hélène 



mardi 28 janvier 2014

Mudwoman de Joyce Carol Oates


Mudwoman, le dernier roman de Joyce carol Oates est une grande réussite, un roman puissant et haletant que l'on ne peut lire qu'avec passion.

Mudgirl est une petite fille maltraitée que sa mère, folle, jette dans les marais des Adirondacks. Tandis qu'elle s'enfonce dans la boue, promise à une mort terrible, elle est sauvée par une jeune homme faible d'esprit qui prétend avoir été guidé vers la fillette par le roi des corbeaux. Mudgirl est ensuite placée en famille d'accueil puis adoptée par des quakers qui lui donnent beaucoup d'amour. Mais peut-on guérir d'une telle enfance? Il le semble bien puisque Meredith Neukirchen, brillante philosophe, chercheuse de renom, devient la première femme présidente d'une université prestigieuse malgré le machisme du milieu. Pourtant il va suffire d'un voyage sur les lieux de son enfance pour que le passé resurgisse. Mudgirl n'a jamais cessé d'exister, elle est devenue Mudwoman.

Le personnage de Mudwoman est passionnant, complexe et attachant. Sous cette femme en apparence forte, sous la froideur, se cache un être fragile, naïf, qui croit encore malgré tout à la bonté des hommes, mais aussi très solitaire. Elle doit faire d'immenses efforts pour parvenir à assumer ses fonctions, à avoir des relations avec les autres,  à refouler le passé et l'angoisse qui montent en elle. Elle se fait appeler par ses initiales MR comme si elle voulait se cacher, ne pas s'impliquer en tant qu'être humain, nier sa personnalité, sa féminité aussi. Et d'ailleurs qui est-elle? Elle a porté deux autres noms avant de devenir MR.

Le fait d'adopter son point de vue, par un parti pris de l'auteur, nous pousse à épouser tous ses sentiments, à partager sa tension intérieure, et, en même temps, brouille la narration romanesque dite "normale".
La narration est, en effet, complexe mais très maîtrisée par Oates. L'on passe de la réalité à l'onirisme dans un glissement léger qui ne permet pas d'en saisir les frontières, ce qui est assez rare dans un roman occidental.  En effet, bien souvent le lecteur est dérouté car il ne sait pas si les évènements qui se déroulent sont vrais ou s'ils sont la projection des pensées de Meredith, de ses rêves, de ses cauchemars. Il s'ensuit que nous sommes entraînés avec elle dans une descente aux Enfers, un monde hostile, glacé où survivre demande des efforts. Un monde aussi où l'on perd ses repères, où l'on ne sait plus ce qui est réel ou imaginaire. Un récit haletant.

Les thèmes comme toujours chez cette écrivaine sont nombreux et riches et j'apprécie qu'elle ancre son personnage dans la réalité de l'époque et de son pays, sans que cela paraisse plaqué. Oates présente ses idées politiques généreuses que son personnage partage mais n'est pas libre d'exprimer dans un pays qui se dit pourtant démocrate!

Description du milieu universitaire hostile aux femmes et ostracisme qu'elles subissent au quotidien; il y a peu de temps que les femmes peuvent arriver à un tel poste; guerres intestines entre républicains et démocrates au sein même de l'établissement;  prises de position réactionnaires des républicains qui refusent l'accès de l'université aux boursiers comme ils le refusaient aux juifs, aux noirs et aux femmes il y a peu;  manque de liberté de la présidente d'université qui est soumise au diktat des riches donateurs de l'université et peut à tout moment si elle n'est pas politiquement et socialement "correcte" être destituée. Tout ceci sur fond de conflit menaçant. Nous sommes à la veille de la guerre en Irak, les mensonges politiques troublent les esprits, fomentant la haine et créant une atmosphère délétère, réveillant les actes fascisants.
L'amour, dans ce monde noir, ne semble pas apporter un grand soutien. L'amant "secret" de Mudwoman n'est jamais présent et ne la soutient qu'occasionnellement. Et Mudwoman s'efface devant lui, ne peut laisser cours à ses sentiments : prisonnière? de quoi? de la boue qui n'a jamais cessé de l'étouffer! Elle ne peut répondre entièrement à l'amour de ses parents, peut-être parce que ceux-ci ont essayé de lui faire jouer le rôle de la fillette qu'ils ont perdue avant de l'adopter. Ne lui ont-ils pas donné le nom de leur petite morte? Pourtant l'amour qu'elle porte à son père adoptif et réciproquement donne une lueur d'espoir au dénouement... semble-t-il? Un dénouement qui me paraît pourtant équivoque*.


Un très grand roman au même niveau pour moi que Chutes ou Nous serons les Mulvaney, mes préférés. Un coup de coeur!


* j'aimerais bien discuter du dénouement avec un lecteur du roman. HOU! HOU! il y a quelqu'un?


Lire George ICI

Sylire ICI

Dominique Un avis négatif



lundi 27 janvier 2014

Shakespeare : Le songe d'une nuit d'été


Titania, la reine des fées endormie :Arthur Rackam

La  pièce de Shakespeare Le songe d'une nuit d'été  était à l'origine intitulée Le songe de la nuit de la Saint Jean. Une bizarrerie puisque  Shakespeare place le déroulement de sa pièce au mois de Mai (mid summer).
 L'universitaire Ernest Schanzer donne une explication : il s'agit de la date de la première représentation du Songe donnée pour célébrer la nuit de la Saint-Jean. Ce qui reste étonnant, pourtant, c'est que le dramaturge ait tenu à placer l'action la veille du premier Mai. Certes ces deux nuits, dans les croyances élizabéthaines, étaient toutes deux considérées comme propices à la magie, à l'apparition des êtres surnaturels. Cependant c'est à la Saint Jean que les fleurs cueillies cette nuit-là ont un pouvoir magique capable de susciter des rêves amoureux et de frapper les gens de folie. Or, constate Ernest Schanzer  "la folie amoureuse n'est-elle pas, en effet, le thème essentiel du songe d'une nuit d'été?".
Quoi qu'il en soit, la pièce est bien nommée puisque toutes les scènes se déroulent la nuit sauf peut-être la première scène de l'acte 1 et encore est-elle placée aussi sous le signe de la lune..

L'intrigue 

La rencontre de Obéron et Titania Arthur Reckam
  La scène se passe à Athènes et dans un bois voisin.

Thésée, le duc d'Athènes et Hippolita vont fêter leur mariage dans quatre nuits, à la nouvelle lune.  Mais Egée, un vieux courtisan,  vient se plaindre de sa fille Hermia qui refuse d'épouser Démetrius, le prétendant qu'il lui a choisi. Hermia aime Lysandre et veut se marier selon son coeur.  Héléna, la fille de Nedar, elle, aime Démetrius qui lui préfère Hermia. Telle est la situation, inextricable, lorsque les deux amoureux, Hermia et Lysandre décident de fuir.  Ils seront suivis, contre leur gré, par Héléna et Démétrius. Les quatre jeunes gens se perdent dans la forêt pendant cette nuit de folie et vont être les jouets des fées.

Pendant ce temps, des gens du peuple, artisans de la ville, décident de monter une pièce sur la mort de Thisbée et de Pyrame pour la représenter au mariage de Thésée et Hippolita. Ils espèrent s'attirer les bonnes grâces du roi. Ils s'éloignent dans la forêt guidé par Lecoin, le charpentier qui s'est improvisé metteur en scène. La troupe à l'intention de répéter à l'abri des regards et il va leur arriver à eux aussi bien des mésaventures.

Dans la forêt vit le peuple des fées : La reine des fées Titania, entourée de ses elfes, est en rivalité avec Obéron, le roi des fées. Il lui réclame un enfant qu'elle lui a volé. Elle refuse et Obéron jure de se venger avec l'aide de Puck ; il demande à ce dernier d'aller cueillir une fleur magique dont le suc déposé sur la paupière d'une personne la rend amoureuse du premier visage aperçu lors de son réveil.
Avec cette fleur commence la folie amoureuse de cette nuit d'été : Titania tombera amoureuse de Bottom (Navette), le tisserand, affublé d'une tête d'âne; les quatre jeunes gens eux aussi vont changer de soupirants, voir se nouer et dénouer leurs amours, au gré des caprices des fées.

Une comédie tragique

Film de Reinhart :  Titania, la reine des fées et Bottom

Le songe d'une nuit d'été est une comédie. Elle présente effectivement des personnages franchement comiques, en particulier la troupe de théâtre des artisans, ridicules à souhait dans leurs prétentions. Les personnages vont jouer une tragédie en se prenant très au sérieux; c'est ce qui va provoquer le rire car nous assistons à une parodie sans que les acteurs en soient conscients. Ils craignent même de faire peur aux dames! Ce sont des personnages de farce et celle-ci est à son comble quand Bottom se retrouve avec une tête d'âne. Shakespeare a toujours aimé mener une réflexion sur le théâtre dans ses pièces, soit pour révéler la vérité comme dans Hamlet, soit pour rappeler que la vie, le monde entier est un théâtre comme dans Macbeth ou Le marchand de Venise.  Ici, le théâtre dans le théâtre permet de jouer sur le grotesque tout en dénonçant la sottise et la vanité humaines. Il est aussi frappant de constater que le thème de Pyrame et Thisbé répond à l'intrigue du Songe, une histoire d'amour contrarié et d'amants séparés. A l'astre de la lune qui veille sur la pièce, répond la lune factice, une lanterne, des comédiens amateurs.

Cependant la pièce a un fond tragique et même si le spectateur rit, il reste conscient de la cruauté des jeux amoureux qui se déroulent devant lui. Quand le suc de la fleur magique détourne l'amour de Lysandre et de Démétrius vers Héléna, Hermia devient pour eux un objet de mépris. Il n'y aucune compassion pour la jeune fille qui doit essuyer des insultes :
"Moi me contenter d'Hermia! Jamais! Comme je regrette les heures d'ennui passées auprès d'elle. C'est Héléna que j'aime, non Hermia!  Qui ne voudrait changer une corneille contre une colombe?(...)
Va-t-en tartare moricaude, va t'en! au diable médecine répugnante, au diable vomitif dégoûtant!"
Les rapports entre  hommes et femmes sont donc d'une grande violence  même si leur caractère excessif nous rappelle que nous sommes dans la farce. Il n'en reste pas moins que Hermia soudainement délaissée est désemparée, humiliée et malheureuse. Héléna qui ne peut croire au revirement des deux jeunes gens, est tout aussi blessée par ce qu'elle croit être une raillerie. La souffrance des deux femmes est bien réelle.
Hermia : Jamais si fatiguée, jamais si malheureuse, trempée par la rosée, déchirée par les ronces, je ne puis me traîner ni avancer d'un pas.
Mais les relations féminines ne sont pas meilleures même si elles sont parfois plus subtiles. Hermia se fâche lorsque Héléna  dit et répète qu'elle est "petite"! Est-elle trop susceptible?La "gentille" Héléna  a-t-elle  une intention blessante ou, au contraire, dit-elle cela innocemment?!  Nous restons ainsi dans la comédie mais Shakespeare nous montre une nature humaine bien noire. Il est vrai que les personnages magiques eux-mêmes ne sont pas plus sages, témoins la dispute entre Titania et Obéron, les facéties de Puck, et ils ont, comme jadis les dieux de l'Olympe, tous les défauts des humains, à moins que ce ne soit le contraire! Cependant leur guerre, leur colère ou leurs décisions ont un retentissement sur l'ordre du monde et sur la destinée des hommes.
Pâle de colère, la lune qui préside aux inondations, a noyé l'atmosphère; les rhumatismes pullulent. Tous ces troubles provoquent des changements de saison ; les gelées blanches s'abattent au tendre coeur des roses cramoisies… Cette cascade de malheurs provient de nos discordes et de nos querelles; nous en sommes l'auteur, la cause originelle.

L'homme est-il libre?

Le Songe à la Criée de Marseille : metteur en scèneEdward Hall *

La pièce, à mes yeux, est donc aussi une réflexion et pas des moindres sur la liberté de l'homme face aux Dieux. Ce sont les Fées qui tirent les ficelles et les êtres humains apparaissent bien vite comme des marionnettes soumises à leurs caprices. Obéron tout puissant et Puck, en commettant des erreurs, tiennent entre leurs mains la clef de leurs sentiments et décident de leur avenir. Doit-on penser que Shakespeare penche vers le déterminisme? Ce serait peut-être aller bien loin et encore une fois, comme il s'agit d'une comédie, Shakespeare nous invite à ne pas nous poser de question et à considérer tout cela comme un rêve! (même si celui-ci vire parfois au cauchemar!)

La folie amoureuse 

 La reine des fées Titania et Bottom (Navette)

 Car le pessimisme de Shakespeare s'exprime dans cette peinture de la folie amoureuse. Lysandre peut passer de l'amour d'Hermia à celui d'Hélène puis revenir à Hermia ; Titiana s'énamoure d'un monstre à tête d'âne et le tient pour le plus beau des êtres.  Si l'on peut changer ainsi de partenaire, si l'on peut s'aveugler sur les mérites de celui qu'on aime, si le caprice préside au choix, si les êtres sont interchangeables, alors l'amour réel existe-t-il?
Il faut remarquer que c'est au moment où Lysandre agit avec le plus d'inconséquence qu'il invoque la raison pour expliquer qu'il n'est plus amoureux d'Hermia mais de Héléna : :
C'est la raison qui gouverne la volonté de l'homme et la raison me dit que vous êtes la plus précieuse.
La conclusion paraît évidente. L'amour n'est qu'une création de l'esprit, il s'apparente à la folie et l'un ne va pas sans l'autre.
La féérie, la fantaisie, l'humour de la pièce 

Arthur Rackam : Puck "Je suis ce joyeux vagabond"

Enfin la pièce est magnifique par ce mélange de poésie et de beauté lyrique parfois mêlé au trivial. Elle peint les sortilèges de la nuit :

Il nous faut nous hâter, seigneur des elfes, car les rapides dragons de la nuit fendent les nuage sen plein vol et voyez briller là-bas la messagère de l'aurore. A son approche les fantômes qui errent cà et là s'assemblent pour regagner les cimetières..

Elle est éclairée dès le début par un clair-obscur onirique, celui de la lune et la nuit; des ombres s'agitent, éphémères, dans l'obscurité. Rien n'est solide, rien n'est vrai et les fées qui peuplent la forêt sont "des esprits" qui s'évanouiront à l'approche du jour à l'exception, peut-être, d'Obéron, le Seigneur des elfes qui peut braver les rayons de l'aurore..

La fantaisie de la pièce est remarquable dans la façon de traiter le thème féérique avec ses personnages majestueux comme Titania ou Obéron,
Je connais un tertre où fleurit le thym sauvage, où croissent les primevères et les tremblantes violettes, le foisonnant chèvrefeuille, l'églantine, les douces roses musquées le recouvrent d'un dais; C'est là, parmi ces fleurs, que Titania s'endort un moment la nuit bercée par les danses et les délices.
avec ses  elfes au nom délicieux, entités de la Nature et qui participent à son entretien et à sa survie: Toile d'araignée, Phalène, Graine de moutarde, Fleur de pois 
Puis vous partirez durant le tiers d'une minute, les uns pour aller tuer les vers dans les boutons des roses musquées; les autres pour guerroyer contre les chauves-souris ….
et avec  Puck, ce Robin le diable, malicieux, farceur et un rien méchant :
Tu dis vrai? Je suis ce joyeux vagabond nocturne. J'amuse Obéron et le fais sourire quand métamorphosé en jeune pouliche, je hennis pour tromper le gros cheval bourré de fèves…"
par son humour aussi lorsque, par exemple, Titania vante la beauté de son amoureux Bottom ..

Une pièce très riche que j'ai déjà vue plusieurs fois et qui permet des mises en scène très différentes. Elle fait parti de mes comédies shakespeariennes préférées avec La nuit des rois et Beaucoup de bruit pour rien.

*Je vais voir Le songe d'une nuit d'été au théâtre de La Criée de Marseille cette année, le 13 Mars, mise en scène de Edward Hall voir ici

 Challenge Shakespeare



Lecture commune avec Eimelle, Miriam, Shelbylee sur deux pièces de Shakespeare au choix : Richard III ou  Le Songe d'une nuit d'été.


Eimelle : Richard III

 Miriam : Le songe d'une nuit d'été

Shelbylee : Richard III

 Je vous renvoie aussi à ces participations plus anciennes au challenge Shakespeare pour :

 

 Le songe d'une nuit d'été.


 Droopy vert

Maggie 1001 classiques

Lou 

  

 Lire aussi  hors challenge : Liligalipette chez Babelio 

 

Pour Richard III


 Céline : Richard III  

Miriam :
Richard III : une mise en scène contemporaine 
 Richard III : retour au texte