Pages

lundi 17 novembre 2014

Antony Marra : Une constellation de phénomènes vitaux




Une constellation de phénomènes vitaux, -organisation, irritabilité, mouvement, croissance, reproduction, adaptation, c'est la définition de la vie dans Le dictionnaire médical des médecins soviétiques. Chercher des définitions dans le dictionnaire, c'est ce que fait Natasha pour fuir ses souvenirs, traumatisée par la guerre en Tchétchénie et par son horrible expérience des réseaux de prostitution en Italie quand elle a voulu fuir son pays.


Tchétchénie 1994 source

Antony Marra explore dans son roman Une constallation de phénomènes vitaux, un pays déchiré par deux guerres depuis 1990. La première de 1994 à 1996 : lorsque la Tchétchénie se déclare état indépendant et souverain et refuse de signer le traité constitutif de la Fédération de Russie, elle est envahie par les troupes russes; la seconde de 1999 à 2009 (mais est-elle totalement terminée?) lorsque des chefs de guerre islamistes tchétchènes radicaux désireux de reconstituer le Caucase islamique en regroupant plusieurs républiques perpètrent des attentats en Russie et mettent à nouveau le feu aux poutres.
Le récit fait des va-et-vient entre les deux guerres avec des retours du passé au présent et du présent au passé. On y voit toute l'horreur des bombardements, la destruction systématique des villes, la pénurie dans les magasins comme dans les hôpitaux, mais aussi les exactions, les crimes de guerre commis par des combattants des deux bords fanatisés, qui n'ont que faire des droits de l'homme. Et entre les deux, la situation désespérée d'un peuple qui, s'il souhaite l'indépendance de son pays, n'adhère pas à l'islamisme vit dans la peur, la précarité

 Nous suivons la vie de ces hommes et de ces femmes pris dans la tourmente, s'attendant à tout moment à être dénoncés, arrêtés, torturés, tués, cherchant à subsister au milieu de cette boucherie. L'écrivain crée de beaux personnages, très forts, devenus hors norme bien malgré eux, tant il faut se transformer, se faire une cuirasse pour continuer à avancer. Il y a Sonja, médecin chef dans un hôpital déserté qui cache Havaa, une petite fille recherchée par les russes qui ont amené son père.  Akhmed, musulman, un homme juste, mauvais médecin mais bon dessinateur, qui a pris Havaa sous son aile et est prêt à se sacrifier pour sauver l'enfant qu'il aime comme un père. Khassan un professeur d'université, auteur d'un traité sur la Tchétchénie, père d'un fils devenu collabo.

Au milieu de cette désespérance, le récit aux fils embrouillés nous réserve bien des surprises : les personnages qui semblent n'avoir aucun rapport entre eux finissent par voir leur route se recouper. Un thème, celui de la  mémoire, de la lutte contre l'oubli, est récurrent car c'est pour les habitants, en effet, une manière de résister, de préserver leur dignité. La soeur de Sonja, Nastasha, dessine, avec le plus de réalisme possible, leur ville détruite sur les murs de l'hôpital  pour donner l'illusion qu'elle est toujours là.  Akhmed, lui, fait le portrait des disparus et l'accrochent aux arbres du village.
Malgré la mort qui rôde, l'écrivain introduit aussi des moments d'humour  : l'infirmière Deshi déteste les hommes et en particulier les médecins depuis qu'elle a été trahie par un oncologue et terrorise Akhmed, le grand costaud.

En résumé un beau livre riche, avec des moments de pure poésie, où l'amour inspire des actes qui redonnent confiance à la nature humaine. Un sujet qui interpelle et qui ne peut laisser indifférent.




Rentrée littéraire 2014 : il s'agit du premier livre d'Antony Marra,


 Merci à Dialogues croisés et aux Editions JC Lattès

dimanche 16 novembre 2014

L'enfant sauvage de TC Boyle et Mémoire et rapport sur Victor de l'Aveyron de Jean Itard

L'enfant sauvage de TC Boyle le livre de poche  image du film de François Truffaut
L'enfant sauvage de TC Boyle et François Truffaut

Le fait divers


En automne 1797 des chasseurs de l'Aveyron découvrirent dans la forêt un enfant nu, hirsute, sale et famélique, qui semblait insensible au froid et vivait comme une bête sauvage dans les bois, se nourrissant de racines, de baies et de petites proies qu'il mangeait crues. Ils le capturèrent et l'amenèrent au village mais il s'échappa. Il fut à nouveau attrapé en 1799 et confié à plusieurs personnes avant d'être remis au docteur Itard qui cherchera à l'éduquer. Le garçon avait vraisemblablement été abandonné dans la forêt et une cicatrice au cou prouvait que l'on avait cherché à l'égorger. Comme quoi l'histoire du Petit Poucet s'appuyait bien sur la réalité d'une époque où la famine décimait les familles de paysans à la progéniture nombreuse.
 Le premier son que l'enfant parvint à prononcer est le "O " c'est pourquoi le docteur l'appela Victor, voyant qu'il se retournait à ce prénom. Son premier mot est "lait".
Mémoires et rapport sur Victor de l'Aveyron est écrit en 1801 et en 1806 par Jean Itard pour témoigner de son expérience. Cet écrit va permettre de suivre peu à peu toutes les étapes de l'évolution de l'enfant sauvage avec ses moments de régression, de découragement, mais aussi de progrès. Le médecin a représenté pour Victor l'image du père qui éduque mais punit, comme on le voyait à l'époque, sévère et exigeant. C'est madame Guérin, la gouvernante à laquelle il fut confié, qui représente l'amour maternel.

L'enjeu philosophique

Jean jacques Rousseau et  Jean Itard : deux conceptions opposées de la nature de l'homme
Jean Jacques Rousseau

Tout est bien sortant des mains de l'Auteur des choses; Tout dégénère entre les mains de l'homme.
 Qu’il sache que l’homme est naturellement bon, qu’il le sente, qu’il juge de son prochain par lui-même ; mais qu’il voie comment la société déprave et pervertit les hommes.  (Discours sur l'origine des inégalités entre les hommes)

L'enfant sauvage a passionné les philosophes et scientifiques de l'époque car il pouvait répondre aux débats qui agitaient les savants sur la nature humaine.
L'homme est-il bon à l'état de nature? Pour Jean Jacques Rousseau, tout ce qui est inné chez lui serait perverti par l'acquis, par l'éducation et la société. Au contraire Diderot, dans sa Lettre aux aveugles à l'usage de ceux qui y voient, affirmait que nos idées ne sont pas de l'ordre de l'inné puisqu'ils dépendent de nos sens. Un aveugle n'appréhende pas le monde comme le fait celui qui y voit, il lui faut une éducation s'il recouvre la vue.

Denis Diderot Lettres aux aveugles à l'usage de ceux qui y voient

 L'enfant sauvage  est une démonstration des assertions de Diderot : Victor qui a été éloigné de la société ne parle pas mais émet des sons gutturaux; il n'est pas sourd mais il ne perçoit pas les bruits de la civilisation comme les voix et la musique. Il ne fait pas la différence entre un objet réel et un objet représenté en peinture. Son odorat ne distingue pas les odeurs nauséabondes des autres. De plus, au niveau du toucher, il est insensible au froid de même qu'à la chaleur. Quant à ses idées, elles ne sont au service que de ses besoins primaires : manger et boire. Les expériences menées sur l'enfant sauvage aboutissent à cette évidence : en dehors des caractères biologiques communs, la nature humaine n'existe pas en soi. L'homme sans la civilisation est réduit à l'animalité. Il est donc le produit de son éducation et de son milieu social. Dès lors si l'on admet que la nature humaine n'est pas innée, l'idée d'un dieu créant l'homme à son image est mise à mal.

On comprend pourquoi le sensualisme de Diderot lui valut d'être enfermé à Vincennes; on comprend aussi pourquoi l'abbé Sicard, directeur de l'institut des sourds et muets qui avait pris en charge Victor avant le docteur Itard, préféra voir en lui un dégénéré, un idiot congénital, ce qui réglait tous les problèmes philosophiques et métaphysiques. Mais le mémoire de Jean Itard prouve que l'enfant sauvage est doué d'intelligence, qu'il a pu acquérir des savoirs malgré ses difficultés, mais qu'il a manqué de stimulation et de l'apprentissage en société à une époque cruciale de sa vie, l'enfance. Il y a des retards que l'on ne peut combler.

John Locke : contre les idées innées 

John Locke (1632-1704)

John Locke, philosophe anglais combat  la théorie des idées innées de Descartes. Il pense que l'esprit est une table rase c'est à dire une tablette de cire vierge sur laquelle on écrit.Celui-ci tire ses connaissances de l'expérience qui s'appuie sur les sensations et la réflexion.

Supposons donc qu'au commencement, l'Âme est qu'on appelle une Table rase, vide de tous caractères, sans aucune idée, quelle qu'elle soit. Comment vient-elle à recevoir des idées ? Par quel moyen en acquiert-elle cette prodigieuse quantité que l'imagination de l'Homme, toujours agissante et sans bornes, lui présente avec une variété presque infinie ? D'où puise-t-elle tous ces matériaux qui font comme le fond de tous ses raisonnements et de toutes ses connaissances ? À cela je réponds en un mot, de l'Expérience : c'est le fondement de toutes nos connaissances, et c'est de là qu'elles tirent leur première origine.  John Locke (Essai philosophique concernant l'Entendement humain.)

Jean Itard et Son Mémoire

Jean Marc Gaspard Itard médecin spécialiste de la surdité et de l'éducation spécialisée, a étudié le cas de Victor l'enfant sauvage
Jean Marc Gaspard Itard
Jean Itard (1774_1838) est médecin à l'institut des sourds et muets quand on lui confie Victor. Gagné aux théories de Locke et de Diderot, il pense que l'homme est un produit culturel, un être construit et non pas inné. Empirique, il va essayer de le démontrer en observant les progrès de l'enfant qui, pour être lents et limités, n'en sont pas moins probants..

Quand on lit  Mémoire et rapport sur Victor de l'Aveyron on est d'abord étonné par la qualité du style. Dans sa préface, le médecin a des accents véritablement pascaliens (le Pascal des deux infinis) mais qui se révèlent un hommage non pas à Dieu mais à la civilisation et à l'influence de la société.

Jeté sur ce globe sans forces physiques et sans idées innées, hors d'état d'obéir par lui-même aux lois constitutionnelles de son organisation, qui l'appellent au premier rang du système des êtres, l'homme ne peut trouver qu'au sein de la société la place éminente qui lui fut marquée dans la nature, et serait, sans la civilisation, un des plus faibles et des moins intelligents des animaux : vérité, sans doute, bien rebattue, mais qu'on n'a point encore rigoureusement démontrée... Les philosophes qui l'ont émise les premiers, ceux qui l'ont ensuite soutenue et propagée, en ont donné pour preuve l'état physique et moral de quelques peuplades errantes, qu'ils ont regardées comme non civilisées parce qu'elles ne l'étaient point à notre manière, et chez lesquelles ils ont été puiser les traits de l'homme dans le pur état de nature. Non, quoi qu'on en dise, ce n'est point là encore qu'il faut le chercher et l'étudier. Dans la horde sauvage la plus vagabonde comme dans la nation d'Europe la plus civilisée, l'homme n'est que ce qu'on le fait être ; nécessairement élevé par ses semblables, il en a contracté les habitudes et les besoins ; ses idées ne sont plus à lui ; il a joui de la plus belle prérogative de son espèce, la susceptibilité de développer son entendement par la force de l'imitation et l'influence de la société.

Les méthodes du docteur Isard

Lenfant sauvage de T.C. Boyle, d'après les mémoires de Jean Itard  et avec François Truffaut dans le rôle de Jean Itard: l'apprentissage de l'alphabet
François Truffaut dans le rôle de Jean Itard : l'apprentissage de l'alphabet
Quant aux méthodes du docteur Itard , il les expose en début de son mémoire :

Sous ce dernier point de vue, sa situation (celle de Victor) devenait un cas purement médical, et dont le traitement appartenait à la médecine morale, à cet art sublime créé en Angleterre par les Willis et les Crichton, et répandu nouvellement en France par les succès et les écrits du professeur Pinel.

Guidé par l'esprit de leur doctrine, bien moins que par leurs préceptes qui ne pouvaient s'adapter à ce cas imprévu, je réduisis à cinq vues principales le traitement moral ou l'éducation du Sauvage de l'Aveyron.

Première vue : L'attacher à la vie sociale, en la lui rendant plus douce que celle qu'il menait alors, et surtout plus analogue à la vie qu'il venait de quitter.

Deuxième vue : Réveiller la sensibilité nerveuse par les stimulants les plus énergiques et quelquefois par les vives affections de l'âme.

Troisième vue: Étendre la sphère de ses idées en lui donnant des besoins nouveaux, et en multipliant ses rapports avec les êtres environnants.

Quatrième vue : Le conduire à l'usage de la parole en déterminant l'exercice de l'imitation par la loi impérieuse de la nécessité.

Cinquième vue : Exercer pendant quelque temps sur les objets de ses besoins physiques les plus simples opérations de l'esprit en déterminant ensuite l'application sur des objets d'instruction.


Et chacune de ses expériences est passionnante et de même ses conclusions que je vous laisse découvrir mais qui aboutissent, vous vous en doutez, à  souligner le rôle de l'éducation de l'enfant dès le plus jeune âge mais aussi à prouver l'importance du développement des sens pour l'acquisition des facultés intellectuelles et morales. On comprend pourquoi cet écrit à servi de base à un film (Truffaut voir Wens) et à plusieurs textes - dont le roman de T.C. Boyle- mais aussi à le médecine, en jetant les bases de la psychiatrie infantile.

L'enfant sauvage de TC Boyle

TC Boyle : écrivain américain, auteur de L'enfant sauvage
TC Boyle
Dans ses remerciements à la fin  de son roman L'enfant sauvage, TC Boyle se dit redevable à deux ouvrages : The wild Boy of Aveyron  de Harlan Lane et The forbidden experiment de Roger Shattuck. Mais il cite aussi le mémoire d'Itard au cours du roman. Tous ces textes ont donc la même source : le rapport d'Itard, remarquable à la fois par le style, la clarté de l'exposition, la précision et la rigueur de l'analyse scientifique, l'intelligence de la déduction.
Le roman est agréable à lire et solidement documenté; Il prend, bien sûr, quelques libertés de romancier avec l'histoire, mais conserve fidèlement la trame, montrant en particulier les différentes étapes expérimentées par Itard. Il se lit avec intérêt surtout si l'on ne connaît pas l'original. Mais ce qui m'a surprise, c'est que l'écrivain se soit contenté de raconter une histoire, certes intéressante, mais sans chercher à en dégager les significations profondes. Il n'a pas mis en valeur le bouleversement que les recherches de Jean Itard constituent dans l'histoire de la pensée et ses répercussions dans le domaine de la philosophie et de la métaphysique. 
Je préfère donc garder pour cet écrivain le souvenir de Water Music, un roman que j'ai beaucoup aimé lors de sa parution.


 Enigme 102

Félicitations à : Aifelle, Asphodèle, Dominique, Eeguab, Dasola, Kathel, Keisha, Miriam, Nathalie, Somaja, Thérèse, Valentyne...  et merci à tou(te)s les participant(e)s.

La réponse est : L'enfant sauvage de Tc Boyle
le film :  L'enfant sauvage de François Truffaut
 l'origine : Mémoire et rapport sur Victor de l'Aveyron par Jean Itard
* on peut trouver le mémoire de Jean Isard sur le net en accès gratuit


Rendez-vous le 29 Novembre, cinquième samedi du mois

vendredi 14 novembre 2014

Enigme du samedi 102 : Un livre/Un film

Logo claudialucia /Wens Enigme du samedi Un livre/un film
Enigme du samedi : un livre/un film

Un  livre/un film

Pour ceux qui ne connaissent pas Un Livre/un film, notre énigme du samedi, je rappelle la règle du jeu.

Wens de En effeuillant le chrysanthème et moi-même, nous vous proposons, le 1er et le 3ème samedi du mois, et le 5ème pour les mois avec cinq samedis, un jeu sous forme d'énigme qui unit nos deux passions : La littérature et le cinéma! Il s'intitule : Un livre, Un film. Chez Wens vous devez trouver le film et le réalisateur, chez moi le livre et l'auteur. Eeguab ne nous relaiera pas cette année mais nous le remercions de tout le travail accompli l'année dernière.

Consignes  

Vous pouvez donner vos réponses par mail, adresse que vous trouverez dans mon profil : Qui suis-je? et  me laisser un mot dans les commentaires sans révéler la réponse pour m'avertir de votre participation. Le résultat de l'énigme et la proclamation des vainqueurs seront donnés le Dimanche

Prochain rendez-vous

Donc rendez-vous  le cinquième samedi du mois :  le 29 Novembre

Enigme 102

Aujourd'hui l'énigme du samedi est plus complexe, du moins à mon avis, parce qu'il ne s'agit pas d'une adaptation d'un roman mais de deux oeuvres, Roman et film, portant le même titre, traitant du même sujet,  un fait divers qui eau lieu à la fin du  XVIIIème siècle. Le film comme le roman ont pour base un Mémoire rédigé entre 1801 et 1806 par un médecin. Wens vous donnera les détails pour trouver le réalisateur français et le film. Ici, je vous donne un extrait du texte du romancier américain qui s'est intéressé à ce fait divers et à ses répercussions philosophiques quant à la nature de l'homme et au rôle de l'éducation. Quel est le titre de du roman? Le nom du romancier et si possible le nom de l'auteur du Mémoire?


Un soir d'automne, alors que les premières averses de la saison éparpillaient les feuilles au pied des arbres tel un tapis de billets, les branches luisant d'un noir éclat sur un ciel diminué, des chasseurs du village de…, qui rentraient chez eux, bredouilles et transis, aperçurent une silhouette humaine dans la pénombre devant eux. C'était, semblait-il, un enfant; un garçon. Il était entièrement nu et indifférent au froid.absorbé par quelque tâche-il essayait de casser des noix entre deux pierres, comprirent bientôt le chasseurs-, il ne les vit pas approcher.

mercredi 12 novembre 2014

Graig Davidson : Cataract City





Cataract City de Graig Davidson, c'est Niagara Falls, la ville des chutes. C'est là que vivent Owen et Duncan.

 Duncan sort de prison où il a passé huit ans. Son ami d'enfance Owen vient le chercher. Commence alors un récit à deux voix où chacun va raconter son histoire mêlant passé et présent et divers temps intermédiaires. Et ce double récit nous donne à voir ce qu'est la vie dans cette petite ville industrielle de l'Ontario où il y a peu d'avenir pour les enfants qui y naissent. Peu d'avenir et aussi peu d'occasion de s'échapper. La ville, personnage à part entière du roman, exerce une sorte d'attrait négatif, entre amour et répulsion, qui freine l'initiative.

"Il m'était arrivé de haïr cette foutue ville. Le sentiment d'échec omniprésent me donnait la nausée, engendrait l'impression de vivre dans une prison aux murs élastiques.
Je finissais par la trouver sinistre et menaçante. Je n'aurais su dire en quoi précisément -comment une ville pourrait-elle être néfaste?"

Niagara Falls, je l'avais déjà rencontrée dans le grand roman de Joyce Carol Oates Chutes, mais du côté américain. Le fleuve y exerçait un attrait puissant; il y était représenté comme une sorte de Dieu maléfique, une force démesurée. Oates y dénonçait non sans virulence la pollution des quartiers réservés aux ouvriers dont sont responsables des industriels criminels.
Pas plus que JC Oates, Davidson n'a l'intention d'entraîner son lecteur dans une visite touristique de la jolie cité "romantique" des voyages de noces, ni de brosser un tableau pittoresque du lieu. Si l'on y sent la présence du fleuve c'est pour évoquer les jeux d'enfance dans la rivière, où les trafics de contrebande sur les eaux gelés du Niagara en hiver et le bruit constant et obsédant des chutes qui crée un effet hypnotique..
En fait, Graig Davison s'intéresse aux milieux populaires, il nous parle de la dureté de la vie, du travail dans les usines ou les biscuiteries où chaque ouvrier est imprégné de l'odeur du biscuit, une ville où les distractions sont rares et les enfants peu poussés à l'étude. Si Owen, d'un milieu un peu plus aisé, a l'opportunité d'aller à l'université, Duncan, lui, est marqué par le déterminisme de sa classe. Mais tous deux, le hasard, la malchance, l'annihilation de la volonté aidant, vont être des victimes, des prisonniers de Cataract City qui ne laisse pas facilement échapper ses proies. 

"Mon père comparait Cataract City à un réservoir d'air comprimé. La vie y est dure; d'une année à l'autre, les garçons deviennent des hommes, parce qu'ils n'ont pas le choix. La pression s'incruste dans les visages et les corps. On voit des gars de vingt ans aux mains noircies en permanence par la graisse pâteuse qui sert à lubrifier les rotatives de Bisk. Certains sont déjà voûtés à trente ans. A quarante ans, ils ont le front plissé des séquoias. On n'a pas le temps de vieillir ici, on devient vieux avant."

Dans l'enfance, Owen et Duncan sont rapprochés par leur amour du catch et leur admiration pour un catcheur qui les entraînera dans une sombre aventure. Plus tard, chacun évolue dans une sphère différente, à l'université pour Owen puis dans la police; Duncan, lui, nous fait pénétrer dans des milieux interlopes, courses de lévriers, et combats de chiens, rencontres de boxe clandestines, organisées par un truand sans scrupules, l'indien Drinkwater. Tout semble parfois séparer les deux amis mais ils sont toujours réunis dans les moments les plus difficiles de leur vie.
 Il y a des passages très forts, passionnants, dans Cataract City, même si mon intérêt pour le roman a été parfois inégal. Deux récits-clefs, haletants, où l'on ne peut se décrocher de la lecture, encadrent l'action : L'un au début du roman, celle où  les deux enfants sont perdus dans un paysage hostile, dans des tourbières de fin du monde, en proie à la faim, à la soif, menacés par des bêtes sauvages et où ils luttent pour leur survie;  l'autre à la fin du roman, une course-poursuite sauvage des deux personnages alors devenus adultes, une traque implacable sur les traces de Drinkwater, dans les mêmes paysages, cette fois-ci en hiver. Dans les deux cas  la mort joue à cache cache avec les héros, elle habille de sa présence menaçante chaque mot du roman. Si la première scène est un récit d'initiation violent, l'autre encore plus terrible provoquera un déclic pour Duncan. Les deux scènes forment une boucle, un recommencement qui amène pourtant au renouveau.

Je me suis demandé d'où venait parfois cette baisse d'intérêt de ma part. Je me suis aperçue que c'est lorsque Duncan part à la dérive et que nous sont décrits les milieux louches et crapuleux des combats de chiens ou d'hommes. Je pense que mes réticences viennent de mon refus de ces jeux de cirque violents et des personnages qui y participent mais que la qualité du roman n'y est pour rien.. Car les moments très forts, très puissamment décrits, abondent dans ces scènes de combats où tous les coups sont permis, où les parieurs sont avides d'argent et de sang versé. Si j'ai pu continuer ma lecture, c'est parce que Duncan reste toujours humain malgré ce qu'il fait :  s'il est capable du pire, il l'est aussi du meilleur comme lorsqu'il sauve le chien blessé, par exemple, en mettant en péril sa propre vie; il est capable d'amour et d'amitié véritables et de compassion. Et c'est pourquoi, les personnages déchus - qui sont une constante dans l'oeuvre de Graig Davidson-, aussi bas qu'ils soient tombés, finissent toujours par se racheter. Graig Davidson est un écrivain qui croit en l'Homme malgré toutes les erreurs et les faiblesses dont celui-ci fait preuve. Il écrit ici une très belle histoire d'amitié.



Club de lecture Dialogues croisés Librairie Dialogues à Brest
Merci à La librairie Dialogues et aux Editions Albin Michel
Challenge sous contrainte : le nom propre de lieu chez Philippe D

dimanche 9 novembre 2014

Clara Dupont-Monod : Le roi disait que j'étais le diable



Le roi disait que j'étais le diable de Clara Dupont-Monod couvre une courte période historique située entre le mariage d'Aliénor d'Aquitaine (elle a 13 ans) avec Louis VII, roi de France en 1137 et sa séparation d'avec lui, quinze ans plus tard, l'église acceptant de reconnaître la nullité du mariage pour motif de consanguinité (1152). Elle se remarie avec Henri de Plantagenêt. Elle a donc été reine de France et Reine d'Angleterre, mère de Richard Coeur de Lion et de Jean Sans Terre.

Aliénor d'Aquitaine, reine de France puis d'Angleterre
Aliénor d'Aquitaine

Petite-fille de Guillaume IX le Troubadour, Alienor d'Aquitaine a reçu une éducation raffinée, nourrie de poésie et de musique dans cette cour d'Aquitaine où naît, sous la plume des troubadours, le fin Amor, l'idéal de l'amour courtois, témoin d'une civilisation plus portée aux subtilités de l'amour qu'aux contritions religieuses. On le voit bien, la reine est un personnage de légende et occupe une place d'un telle importance pour une femme, au Moyen-âge, qu'elle a inspiré beaucoup d'historiens et de romanciers.
Si Clara Dupont-Monod s'appuie sur des faits historiques précis, elle a choisi de meubler les vides de l'histoire en donnant la parole tour à tour à la reine et au roi pour mieux souligner les divergences profondes des deux personnages. Alienor représente la culture d'oc, poésie, musique, troubadours, contre la culture d'Oil plus austère; la sensualité et les couleurs du Sud contre l'ascétisme et les grisailles du Nord. Si elle est "le diable" pour son mari, elle dira de lui : "j'ai cru épouser un homme, j'ai épousé un moine."

Aliénor d'Aquitaine et Louis VII miniature du XIV siècle
Aliénor d'Aquitaine et Louis VII

Mais que penser maintenant du roman? j'avoue que j'ai eu beaucoup de mal à y entrer et je ne me suis intéressée aux personnages et à leur histoire que tardivement.
En choisissant de présenter les personnages de l'intérieur, par leurs pensées intimes, Clara Dupont-Monod a choisi la difficulté. Etant donné notre éloignement de la période médiévale, il est moins difficile de présenter le Moyen-âge en narrateur extérieur plutôt que de chercher à en rendre les mentalités. En lisant ce roman, je n'ai jamais eu l'impression de rencontrer vraiment des personnages du Moyen-âge.

Mais le roman est très bien écrit. On peut même dire que les belles phrases frappées comme des maximes, ciselées, abondent; on peut les collectionner :

"le roi est mon mari. Ce n'est pas un homme de colère mais de mots"

"L'épée, le livre : voilà les objets sacrés disait mon grand père. La première défend la terre, le second chante l'amour."

En parlant de Philippe, frère aîné de Louis qui devait régner : Mais cet idiot mourut fracassée contre les faubourgs de Paris. Un cochon s'est jeté dans les pattes de son cheval. N'est-ce pas un magnifique résumé du royaume de France. Ce sont des porcs qui décident de son destin.

Dans le quartier des boucheries  : Dedans parmi les étals, je devine la mort simple et rapide, donnée sans autre but que celui de manger. La mort utile, la plus belle.
La langue est donc très travaillée mais trop esthétique à mon goût même dans ses descriptions réalistes des quartiers des boucheries et des remugles de la  cité médiévale. Une recherche de la forme qui me détourne des personnages et me laisse froide. Ceux-ci me semblent factices, seulement vecteurs de belles pensées exprimées dans un style impeccable.. 
Je crois que je ne me suis intéressée au récit qu'au moment de la croisade parce qu'il y a alors un souffle épique qui apparaît. On part reconquérir la Terre Sainte comme à une fête, les femmes accompagnent les maris, emportant avec elles tous les objets de luxe pour reproduire le confort de la cour. Et là, oui, la folie de la foule, me paraît rejoindre la chanson de geste, l'épopée, et être à la hauteur de la foi du moyen-âge et de sa démesure.

En bref!! un livre dont je reconnais les qualités d'écriture mais qui n'est pas pour moi.

Merci aux éditions Grasset et à Price Minister



les matchs de la rentrée littéraire Price minister 2014



Voir Liligalipette  qui aime beaucoup ce roman.

LIVRE VOYAGEUR

Alexandre Dumas : Les trois mousquetaires



 Les Trois mousquetaires

Les trois mousquetaires (1844) est le premier livre d'une trilogie avec Vingt ans après, le Vicomte de Braguelonne.
J'ai relu la préface de Alexandre Dumas quant à la genèse de Les trois mousquetaires et j'ai trouvé intéressant de connaitre sa démarche.
Mais avant de vous en parler je vous fais part de la remarque que j'ai lu sur le site d'Alexandre Dumas  une réflexion que je ne m'étais jamais faite et qui m'a amusée et surprise :
Ce qui est étonnant, c'est que l'on fasse lire à notre belle jeunesse une oeuvre aussi joyeusement amorale (si l'on raconte l'histoire du point de vue de Milady, elle se résume ainsi : Athos a tenté de l'assassiner et l'a ratée, d'Artagnan la viole, puis ils se mettent à six hommes pour l'assassiner et ne la ratent pas). Elle est de surcroît antipatriotique : Milady travaille pour Richelieu, c'est-à-dire pour la France, alors que les mousquetaires travaillent pour Anne d'Autriche et Buckingham, c'est-à-dire pour l'étranger!*
 
Les trois mousquetaires : Milady
Milady


Le vrai d'Artagnan

Charles de Bat - d'Artagnan- par Gatien de Courtliz de Sandras
Charles de Batz : D'Artagnan

 

Je rappelle que les trois mousquetaires sont Athos, Porthos et Aramis. D'Artagnan ne deviendra mousquetaire que plus tard, à la fin du roman. Notons que le vrai d'Artagnan se nommait Charles de Batz, né vers 1611 au château de Castelmore en Gascogne, dans l'actuel département du Gers. Il part à Paris en 1640 et entre ces les cadres de la Garde française avant de devenir mousquetaire en 1644. D'Artagnan meurt tué par une balle de mousquet à Maastricht lors de la guerre de Hollande (1673)

Les trois mousquetaires ont-ils existé?

 

Les trois mousquetaires ont-ils existé?
D'Artagnan et Aramis, Athos, Porthos 
Alexandre Dumas a trouvé son sujet dans les Mémoires de M. d’Artagnan, capitaine lieutenant de la première compagnie des Mousquetaires du roi, contenant quantité de choses particulières et secrètes qui se sont passées sous le règne de Louis le Grand, par Courtilz de Sandras.

Ce qui le frappa d'abord ce sont les noms d'Athos, de Portoz et d'Aramis, que d'Artagnan dit avoir rencontrés lors de sa première entrevue avec monsieur de Tréville. Dumas crut ces noms inventés pour servir de pseudonymes à des personnages illustres.
L'écrivain entreprit des recherches qui finirent par aboutir lorsqu'il retrouva ces trois noms dans un manuscrit : Mémoires de monsieur le comte de La Fère.
C'est ainsi que Dumas rédigea sa préface "Dans laquelle il est établi que, malgré leurs noms en OS et en IS, les héros de l’histoire que nous allons avoir l’honneur de raconter à nos lecteurs n’ont rien de mythologique."
Dumas tient donc à établir son roman sur des bases historiques solides et pas seulement avec les personnages indiscutablement historiques comme Louis XIII, Richelieu, Anne d'Autriche mais aussi avec des personnages dont on pourrait douter de l'existence. Ainsi Athos, Porthos et Aramis  ont existé! Ils n'ont rien de mythologique! Soit!

Le vrai Athos

 Les trois mousquetaires  de Dumas : Armand de Sillègue d'Athos d'Autebielle, le vrai Athos
Le vrai Ahtos

 

Son nom est Armand de Sillègue d'Athos d'Autebielle. Il est né vers 1615 à Athos, village qui se situe entre Sauveterre-de-Béarn et Oraas. C'est son frère aîné, Jean, qui doit hériter des seigneuries d'Atos et d'Autebielle, c'est pourquoi Athos entre chez les mousquetaires du roi au début des années 1640 grâce à son oncle, monsieur de Tréville.

Le vrai Porthos

 
Isaac de Portau ou Pourtau : le véritable Pothos de les trois mousquetaires.
Porthos

Isaac de Portau (ou Pourtau) est né à Pau en 1617; Il était le fils d'un notaire aux Etats de Béarn qui acheta ses lettres de noblesse avec ses seigneuries. Lui aussi, en tant que cadet embrasse la carrière militaire dans les Gardes françaises; mais on n'a pas trouvé sa trace chez les mousquetaires.

Le vrai Aramis

Alexandre Dumas : Les trois mousquetaires
Aramis

 

Henri d'Aramis est né vers 1620 sur la terre dont il porte le nom, dans la vallée de Barétous en Béarn. Il est comme son lointain parent Athos apparenté à monsieur de Tréville et rejoint les mousquetaires du roi en 1640. Plus tard, il retourne chez lui et il prend la charge d'abbé-laïc. On situe sa mort entre 1673 et 1675.

Une mentalité romantique

Ceci dit le manuscrit de Courtil de Sandraz publié en 1700, qui a servi de base au roman de Dumas, était déjà très romancé. Nous sommes pour ainsi dire dans le roman d'un roman! Et de plus le récit d'Alexandre Dumas est marqué par l'idée que se font les écrivains romantiques du règne de Louis XIII, qu'ils considèrent comme la dernière époque de liberté avant que Louis XIV et Richelieu imposent l'absolutisme. Les héros de Dumas sont donc romantiques avant tout. Ils ont l'enthousiasme, la fougue et l'amour de la liberté. Ils contestent l'ordre social, s'inscrivent  en faux contre les autorités passéistes, les contraintes sociales, ils sont du côté de l'amour et de la passion et contre la sagesse bourgeoise et la morale.
Les problèmes quotidiens des mousquetaires - être bien mis à peu de frais, ne pas payer son loyer, avoir une maîtresse désintéressée voire généreuse - rappellent d'ailleurs fortement ceux de la bohême romantique du XIXe siècle.*  Donc, si Dumas sans contestation possible, s'intéresse des personnages qui ont existé, il n'en reste pas moins que Les trois mousquetaires se permet de grandes libertés par rapport à l'Histoire et reflète avant tout la mentalité de l'époque- mais aussi ses goûts.

Le goût de l'époque : feuilleton et dramatisation

Le roman de Dumas est paru en feuilleton en 1844. Pour maintenir en haleine ses lecteurs, il fallait que Dumas  joue sur les  ressorts du roman-feuilleton qui empruntait beaucoup au théâtre, rebondissements,  quiproquos et dramatisation de certaines scènes qui se devaient d'émouvoir le fidèle.  On sait que Les trois mousquetaires est un roman foisonnant. Dumas ne plaint pas les coups de théâtre, il invente des  intrigues, il multiplie les aventures, les duels, les complots, les échauffourées…  Ce  faisant, il aura beaucoup d'imitateurs et deviendra le père du roman de cape et d'épée dont les auteurs n'auront aucun intérêt pour l'Histoire, contrairement à lui, et se contenteront de la couleur locale.

(*Vincent Mollet site Alexandre Dumas)


 Enigme 101

Félicitations à : Asphodèle, Adrienne, Shelbylee, Nanou, Aifelle, Eeguab, Dasola, Parchcath, Somaja...  et merci à tous les participants.

La réponse est :
le roman:  Les trois mousquetaires d'Alexandre Dumas
le film : Les trois mousquetaires

samedi 8 novembre 2014

Enigme du samedi N°101 : Un Livre/un Jeu

Enigme du samedi : un livre/un film, un jeu qui allie deux passions : la lecture et le cinéma
logo Un film/un livre

Un  livre/un film


Pour ceux qui ne connaissent pas Un Livre/un film, notre énigme du samedi, je rappelle la règle du jeu.

Wens de En effeuillant le chrysanthème et moi-même, nous vous proposons, le 1er et le 3ème samedi du mois, et le 5ème pour les mois avec cinq samedis, un jeu sous forme d'énigme qui unit nos deux passions : La littérature et le cinéma! Il s'intitule : Un livre, Un film. Chez Wens vous devez trouver le film et le réalisateur, chez moi le livre et l'auteur. Eeguab ne nous relaiera pas cette année mais nous le remercions de tout le travail accompli l'année dernière.

Consignes  

Vous pouvez donner vos réponses par mail, adresse que vous trouverez dans mon profil : Qui suis-je? et  me laisser un mot dans les commentaires sans révéler la réponse pour m'avertir de votre participation. Le résultat de l'énigme et la proclamation des vainqueurs seront donnés le Dimanche.

La prochaine énigme a lieu exceptionnellement aujourd'hui samedi 8 Novembre et non le 1er Novembre puisque ce samedi  tombait pendant les vacances. Mais à partir de la semaine prochaine nous reprenons le rythme 1er/3ème/ et éventuellement 5ème samedi du mois.

Prochain rendez-vous

Donc rendez-vous la semaine prochaine pour le troisième samedi du mois :  le 15 Novembre 

Enigme n°101

Nous recommençons notre énigme par un classique qui est peut-être l'un des plus célèbres romans du XIX siècle, internationalement connu. Il y a eu maintes adaptations au cinéma. Mais quelle adaptation Wens a-t-il choisie? Je n'en dis pas plus, car  le texte ci-dessous vous permettra de retrouver le titre avec facilité, j'espère!

(Le héros), à moitié abasourdi, sans pourpoint et la tête tout emmaillotée de linges, se leva donc et, poussé par l’hôte, commença de descendre; mais,  en arrivant à la cuisine, la première chose qu’il aperçut fut son provocateur qui causait tranquillement du marchepied d’un lourd carrosse attelé de deux gros chevaux normands.
Son interlocutrice, dont la tête apparaissait, encadrée par la portière, était une femme de vingt à vingt-deux ans. Nous avons déjà dit avec quelle rapidité d’investigation (le héros) embrassait toute une physionomie; il vit donc du premier coup d’œil que la femme était jeune et belle. Or cette beauté le frappa d’autant plus qu’elle était parfaitement étrangère aux pays méridionaux que jusque-là il avait habités. C’était une pâle et blonde personne, aux longs cheveux bouclés tombant sur ses épaules, aux grands yeux bleus languissants, aux lèvres rosées et aux mains d’albâtre. Elle causait très vivement avec l’inconnu.

vendredi 7 novembre 2014

Atelier les plumes d'Asphodèle : Méduse…


La Méduse  du peintre symbolique et expressionniste Frantz Von Stuck
La Méduse de Frantz Von Stuck (1892)


Méduse…


Rêveur de l'ordinaire, Artiste, Berger
de moutons bleus, outrageux et furieux,
Dans le quotidien abandon de ta vie
Dans l'extravagance de ton ennui,
Dans la camisole de tes pensées
Aliéniste de toi-même, tu cherches...

Tu fuis comme un appel obsédant et étrange
de tes amours putréfiées, l'écho de l'ange
Amours de sirène aux doigts d'algues
aux doux bras de lianes insanes
Amours de Reine aux joues bleutées
Dont le sourire est vive plaie .

Escapade manquée, au goût de fruits amers
Au goût de fer, de feu, de foudre et puis de flammes
Conte de fées des amours mortes,
Tu perds la maîtrise du monde,
Tu ondules en nageur noyé dans l'univers.
Et la psychose au masque de Méduse
Et aux yeux ravageurs, éclat vert aquarium,
Peuple tes Nuits sans fond de rêveur nécrosé.

Nuits zinzin, zinzin, zinzolines
Tes nuits zinzolines aux larmes de sang
Tes nuits aux grains de rosée acide
Qui rongent et dévoilent l'arête
blanche et osseuse des idées,
Noir troupeau de brebis amères
Berger a perdu sa houlette
Sonne le glas des jours heureux.


Pour lllustrer le poème : Méduse,  La méduse de Laura Dreyfus Barney
La méduse de Laura Dreyfus Barney


Sur le Thème de La Folie les mots imposés dans l'atelier d'écriture Les plumes d'Asphodèle étaient cette fois-ci : Grain, conséquence, ordinaire, manquer, zinzin, camisole, extravagance, quotidien, douce, furieux, maîtrise, artiste, univers, abandon, psychose, conte, rêveur, bleu, aliéniste, bergère, escapade, onduler, outrageux, obsédant.
J'ai laissé de côté le mot conséquence.
Les plumes d'Asphodèle : atelier d'écriture

mercredi 5 novembre 2014

challenge Victor Hugo : les participants



Un des deux logos

 Victor Hugo n'est pas mort! Nombre d'entre vous le savent sans doute. Val l'avait bien compris en nous proposant, il y a déjà 3 ans, son challenge Victor Hugo. Elle a laissé à Moglug le soin de reprendre le flambeau et j'ai proposé de l'aider.

Le principe de ce challenge est simple : lire Victor Hugo et publier une chronique sur vos ressentis de lecture sur votre blog.

Théâtre, romans, poésies, pamphlets, discours, lettres, opéras, le choix est vaste ; et le temps infini – à l'image de la renommée de ce grand homme.

Pour les admirateurs les plus enthousiastes, il vous est également possible de corser le défi en l'élargissant aux films, livres, musées, lieux, etc. consacrés à Victor Hugo ou à l'une de ses œuvres. 

Pour les fidèles du challenge romantique de Claudialucia, ou d'autres challenges autour du XIXème siècle,  vous constatez que ce challenge Victor Hugo en recoupe d'autres. 

Pour participer, il suffit de laisser un commentaire au bas de cet article, ici ou chez Moglug, ICI,  et d'afficher sur votre blog ou sur les articles concernés l'un des logos du challenge proposés sur cette page. N'oubliez pas d'y joindre le lien de la présentation du challenge. Pour chaque chronique publiée, pensez bien à nous le signaler en commentaire de ce billet ou de celui de ma compagne hugolienne. Nous diffuserons ensuite régulièrement un récapitulatif de vos lectures. 





Pour vous rafraîchir la mémoire ou ouvrir quelques pistes, je reproduis ici la bibliographie de Val et vous propose quelques lieux de visite, références et adaptations sur l'auteur et ses écrits, dénichés par nos soins. Libre à vous de nous en faire découvrir d'autres !



Roman
Théâtre
Poésie
Bug-Jargal
Han d'Islande
Le dernier jour d'un condamné
Notre-Dame de Paris
Claude Gueux
Les misérables
Les travailleurs de la mer
L'homme qui rit
Quatrevingt-treize
Cromwell
Amy Robsart
Hernani
Marion Delorme
Le roi s'amuse
Lucrèce Borgia
Marie Tudor
Angelo, tyran de Padoue
Ruy Blas
Les Burgraves
Torquemada
Théâtre en liberté (posthume)
Odes et ballades
Les orientales
Les feuilles d'automne
Les champs du crépuscule
Les voix intérieures
Les rayons et les ombres
Les châtiments
Les contemplations
La légende des siècles
Autres poèmes dispersés


 
L'histoire d'Adèle H. de François Truffaut

Quelques films :


·      Les misérables, réalisé par Richard Boleslawski, 1935

·      Les misérables de Raymond Bernard, avec Harry Baur, 1934

·      L'homme qui rit, réalisé par Paul Leni, 1928

·      La belle espionne, réalisé par Raoul Walsh (adapté de L'homme qui rit), 1953

·      L'homme qui rit, réalisé par Jean-Pierre Améris, 2012

·      L'exilé, réalisé par Henry Colomer, 2002

·      Victor Hugo, exil, réalisé par Axel Clévenot, 2002

·      L'histoire d'Adèle H , François Truffaut 1975 (récit du glissement vers la folie d'Adèle, fille de Victor Hugo)


Bandes Dessinées


·      Victor Hugo en B.D., Daniel et Hélène Martha, illustré par Pierre Frisano, Larousse, 1985
.     Victor Hugo BD de Swysen Joker Editions  2014



Léopoldine Hugo

Etudes et autres ouvrages sur Victor Hugo, son œuvre et sa famille :

      ·      Victor Hugo et Dieu, Emmanuel Godo, Cerf, 2002

·      Victor-Marie, comte Hugo, Charles Péguy, 1910, rééd. Fario 2014 ;)

·      Victor Hugo raconté par un témoin de sa vie, Adèle Hugo, Lacroix,1863 

·     Lettres à la fiancée 1820-1822, Victor Hugo, Bibliothèque Charpentier, 1901  
     Olympio ou la vie de Victor Hugo, André Maurois, Hachette, 1954  ( chargement sur Kindle)

·   Victor Hugo : tome 1 : avant l'exil 1802-1851 ; tome 2 : après l'exil 1851-1864  de Jean-Marc Hovasse, Fayard, 2001 : une biographie de référence de 1300 pages écrite par un spécialiste de V. Hugo. Le livre est cher mais vous le trouverez dans toute bonne bibliothèque ;)

·      Victor Hugo : tome 1 : je suis une force qui va ; tome 2 : je serai celui-là,1844-1885, Max Gallo, Poche, 2002 : certains reprochent à cette biographie romancée et controversée son manque de profondeur et d'analyse, mais la lecture est plaisante, agréable et documentée.

·      Histoire du romantisme, Théophile Gautier, Poche, 2011 : on y découvre l'admiration des jeunes romantiques envers leur idole Victor Hugo et la fameuse bataille d'Hernani.

·      Léopoldine, l'enfant muse de Victor Hugo, Henri Gourdin, Presses de la Renaissance, 2007

·      L'exilée, Adèle Hugo, la fille,  Marie-Louise Audiberti, La part commune, 2009

·      L'engloutie, Adèle, fille de Victor Hugo, 1830-1915, Henri Guillemin, Seuil, 1985







Lieux de visites


·      La maison natale de Victor Hugo à Besançon


·      La maison de Victor Hugo, Hauteville House, à Guernesey


Opéras



Ernani, Giuseppe Verdi, 1844

Rigoletto, Giuseppe Verdi, 1851, d'après Le roi s'amuse

Lucrezia Borgia, Gaetano Donizetti, 1833



N'hésitez pas à nous proposer d'autres titres !


Lectures communes

pour le 10 Décembre
Pour ceux qui le souhaitent, une lecture commune autour de Bug-Jargal est déjà prévue pour le 10 décembre 2014.

En janvier, chacun(e) pourra publier et illustrer son poème préféré de Victor Hugo.

En février, la lecture commune se fera autour d'une oeuvre biographique au choix : n'hésitez pas à piocher dans la liste ci-dessus ou à nous en proposer d'autres.

Et pourquoi pas en mars, Hernani, la pièce fétiche de Victor Hugo, celle qui a déclenché la fameuse bataille ?

Ensuite nous verrons...

Chaque étape est une proposition indépendante et n'est pas obligatoire, vous pouvez tout aussi bien participer au challenge en lisant à votre rythme les ouvrages qui vous tentent le plus ; ou ne pas être inscrit au challenge mais choisir de participer ponctuellement à l'une des étapes mensuelles.


Alors, vous êtes de la partie ?



Les participants : Claudialucia, Moglug, …




Un des deux logos



Les participants :
...................................................................................................

Aaliz blog Cherry livres



Annonce duchallenge Victor Hugo :

Nouvelles acquisitions et autres joyeusetés


..........................................................................................................................


Claudialucia  blog Ma librairie





Annonce du challenge Victor Hugo de Moglug et claudialucia


Victor Hugo : Souvenir de la nuit du 4


Victor Hugo : Exposition  Les arcs-en-ciel du noir(musée Victor Hugo)



Victor Hugo et les surréalistes : la cime des rêves (musée Victor Hugo)

Victor Hugo : Les misérables


Victor Hugo : L'homme qui rit


Victor Hugo : l'homme qui rit (citation) La vie n'est qu'un pied à terre...


Victor Hugo : L'homme qui rit (citation) C'est de l'enfer des pauvres...


Victor Hugo L'homme qui rit (citation) : le genre humain existe...


Victor Hugo : L'homme qui rit (citation) : une habitude idiote qu'ont les peuples...


Hugo : Les travailleurs de la mer


Victor Hugo : Quatre-vingt treize

.....................................................................................

 

Cleanthe blog Dans la bibliothèque de Cléanthe

 

................................................................................................................. 

 

Eimelle : Carnets de lecture

 

 

 

  

  L'annonce du challenge



Lucrèce Borgia
 
Ruy Blas
Le roi s'amuse
D'après les misérables: Tempête sous le crâne

L'homme qui rit

...................................................................................................................

 

  Margotte blog Le bruit des pages

 

............................................................................................................

 
Moglug  Blog Synchronicité et sérendipité

 

 

Annonce du challenge Victor Hugo de Moglug et de claudialucia

Emmanuel Godo : Victor Hugo et dieu

...............................................................................................................


Miriam  blog Carnets de voyage


 

Victor Hugo : Les travailleurs de la mer

Victor Hugo : l'homme qui rit

Victor Hugo : l'enfant grec

................................................................................................


Nathalie Blog Mark et Marcel

 

 

 

 


Extraits du discours prononcé aux funérailles de Balzac

Quatre-vingt-treize

Les Travailleurs de la mer