Dans Le médecin personnel du roi, Per Lov Enquist raconte un moment de l’histoire du Danemark au XVIII siècle. Christian VII, roi du Danemark et de Norvège, a une intelligence brillante mais un gouverneur trop brutal le fait vivre dans la peur et la violence si bien que l’enfant devient instable souffre de troubles hallucinatoires, de crises de terreurs et de panique, avant de tomber progressivement dans la folie. Dès lors il n’est plus apte à gouverner, ce qui fait bien l’affaire des conseillers du Royaume qui peuvent ainsi gouverner à sa place.
Christian VII du Danemark |
Mais lors d’un séjour de Christian VII en Europe, on le confie au docteur Struensee qui gagne la confiance et l'amitié du malheureux souverain. Johann Friedrich Struensee va exercer une telle emprise sur lui qu’il devient son premier ministre, le seul autorisé à signer des documents sans avoir besoin de la signature royale. Autant dire que le médecin est l’égal du roi et même plus puisqu’il règne seul, le jeune malade ne pouvant comprendre ce qui se passe. Malgré la vindicte des conseillers, Struensee gagné aux idées philosophiques, de Voltaire à Rousseau en passant par Diderot, en profite pour entreprendre des réformes fondamentales, révolutionnaires, très audacieuses, qui suscitent le mécontentement non seulement des nobles mais du peuple. De plus, l’amour réciproque de Johann Friedrich Struensee et de la reine, Caroline Mathilde de Hanovre, soeur du roi d’Angleterre George III, épouse de Christian VII qui a peur d’elle et la délaisse, va être un des facteurs de sa chute…
Un complot fomenté par tous ceux qui souhaitent sa perte, en 1772, enlève son pouvoir au médecin qui sera exécuté…
je vous laisse découvrir les détails de cette extraordinaire histoire dont Per Olov Enquist tire un récit passionnant, réflexion sur le pouvoir, sur le rôle des Lumières, sur la vie…
Johann Friedrich Struensee portrait de Jens Juel |
Per Lov Enquist nous fait partager en particulier, l’intérêt qu’il éprouve pour ce personnage Johann Friedich Struensee, danois d’origine allemande, bourgeois qui à l’origine n’éprouve pas un attrait particulier pour le pouvoir. Il se sent pourtant pris dans un engrenage qui le pousse lui, médecin par vocation, vers un destin vertigineux qu’il ne peut ou ne veut refuser. Il y a quelque chose d’exceptionnel, dans cette révolution silencieuse, pacifique et douce, due à une seule personne. Johann Friedrich Stuensee a accompli une énorme travail de réforme pendant les deux années où il a « régné » à la place du roi, produisant 632 décrets, travaillant de jour comme de nuit dans son cabinet, s’attaquant aux inégalités, au servage, supprimant les privilèges, accordant la liberté de la presse, abolissant la censure, la torture, la prison pour dettes, réformant les cadres de l’administration, créant des orphelinats, des écoles! Une révolution qui doit tout aux idées des Lumières mais qui paradoxalement est fondée sur une usurpation, un abus de pouvoir, sur l’oeuvre d’un seul donc sur la tyrannie, tout le contraire de la démocratie. Et pourtant Struensee a amorcé une extraordinaire mutation de son pays par des réformes qui préfigurent la révolution française, et qui, après un retour en arrière lié à la réaction, finiront pas s’imposer.
Owe Hoegh Guldberg peint par Jens Juel |
L’écrivain oppose à Stuensee, une autre personnage Owe Guldberg, son double, qui représente la réaction et le parti des nobles. De petite naissance, arriviste, sans pitié, Guldberg prendra le pouvoir après Struensee en tenant le roi sous tutelle. Trois personnages masculins s'affrontent mais dont la force est inégale, Struensee trop bon, refusant la violence, le roi à l'esprit troublé, et Guldberg rusé et sans état d'âme. Face à eux la reine est un personnage féminin entier et de caractère.
Caroline-Mathidle, reine du Danemark, peinte par Jens Juel |
Le roman s’appuie sur des témoignages de l’époque, celui de Robert Murray Keith représentant anglais à Copenhague, sur les écrits de Reverdill, professeur d’allemand et de français du roi qui raconte les premières années du jeune Christian sous la férule perverse du comte Reventlow, son tuteur après la mort de ses parents, sur le courrier échangé entre Voltaire et Christian VII gagné lui aussi aux Lumières avant de sombrer dans la folie. Le roman de Per Olov Enquist tient donc à la fois du documentaire et de la fiction et il est très réussi.
Per OLov Enquist (1934) a écrit de nombreux romans (Le Cinquième Hiver du magnétiseur, Hess, L'Extradition des Baltes, Le Départ des musiciens...) des pièces de théâtre ( La Nuit des tribades, Pour Phèdre, L'Heure du lynx, Marie Stuart, Selma ) et des livres pour enfants. Il est journaliste. Il est à l'heure actuelle l'un des plus grands écrivains scandinaves de la littérature contemporaine. Actes Sud
super c'est l'occasion pour moi d'explorer les ressources des médiathèques de Lyon sur cet auteur et elles sont riches, j'ai retenu ce roman pour son sujet, il y a pas mal d'autres titres que j'ai mis dans mon panier virtuel pour mes prochaines lectures
RépondreSupprimerQuelle chance d'avoir une médiathèque avec de riches ressources! Ce n'est pas le cas d'Avignon!
SupprimerCe nom me dit quelque chose, bien que je sois persuadée de n'avoir rien lu mais ton voyage en Suède et tes autres "voyages" littéraires nordiques m'enchantent !!! :) Bises Claudia♥
RépondreSupprimerDe lui je n'ai lu que Le cercle celtique, un voyage en mer assez impressionnant! Bises à toi aussi.
Supprimeridéal pour prolonger ton voyage!
RépondreSupprimerOui, mais je vais arrêter avec les Suédois. Je suis encore en train d'en lire un mais ce sera le dernier. Le festival arrive et j'écrirai plutôt sur le théâtre.
SupprimerC ela me rappelle un film récent, mais je n'arrive pas à retrouver le titre
RépondreSupprimerIl y a un film qui raconte cette histoire avec le même titre, je crois.
SupprimerAprès vérification, non ce n'est pas le même titre, j'ai trouvé ceci chez Actes-Sud :
Cette histoire a inspiré le cinéaste Nikolaj Arcel pour son film Royal affair, récemment sorti en salles..
PS : il y a actuellement un docu sur christine de suède... pas vu mais concurrence féroce ( docu sur les dino, les guépards, Yves saint Laurent, HSBC... Trop de docu à voir !)
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