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samedi 19 décembre 2020

Olivier Norek : Impact

 

J’ai lu tous les romans policiers d’Olivier Norek et j’ai apprécié cet écrivain comme peintre de notre société dans ce qu’elle a de noir et de plus actuel, les cités du 93, la Jungle de Calais …  mais je commence à rendre compte de ces lectures par le dernier paru Impact. Son thème, l'écologie,  me paraît le plus urgent à découvrir !

Au début, j’ai cru qu’il s’agissait d’une dystopie tant le monde qui s’ouvrait devant moi était inimaginable : le delta du Niger, route des oléoducs, au sol imbibé de pétrole, empoisonné par les métaux lourds, la pollution qui gagne l’air, génère des maladies, provoque des pluies acides, s’attaque à tout,  la végétation, la faune et les êtres humains. Des dizaines de décès par semaine, des villages entiers qui se vident, des charniers de corps humains susceptibles de  provoquer des pandémies… Le pétrole prend quinze ans de leur vie à chaque individu
« Ils sont un million et demi, et comme, c’est la seconde génération qui subit cette pollution, ce sont en tout quarante-cinq millions d’années qui leur ont été volés.
L’image d’un vampire géant, insatiable, courbé au-dessus de ce point d’Afrique, aspirant d’un seul coup quarante-cinq millions d’années en une seule et même population alimenta l’écoeurement de Solal. »

Pirogues abandonnées, englouties dans la boue du pétrole

Et bien, non, ce n’est pas une dystopie, c’est ce qui se passe actuellement dans le monde. Voir Ici Voyage au coeur des marées noires en pays Ogoni. Le livre d'Olivier Norek est un immense cri d’alarme qui nous oblige à prendre conscience; certes, nous le savons, la planète est en danger, mais c’est une chose de le savoir, c’est une autre d’assister à la catastrophe de visu. Ce que ce roman nous oblige à faire.

Olivier Norek construit son roman sur des faits qui non seulement sont irréfutables mais sont chaque fois corroborés par des articles de journaux ou des études auxquels il nous renvoie à la fin du livre, preuve de la véracité et de l’actualité de ses dires. Nous y retrouvons aussi les déclarations des grands capitalistes responsables de cette mort programmée : le PDG de Total d’un cynisme écoeurant, les banques françaises qui réinvestissent massivement dans l’énergie fossile... Est dénoncée aussi la pusillanimité des politiques devant ceux qui détiennent réellement le pouvoir.
Mais n’allez pas croire que les capitalistes qui s’enrichissent au dépens de la survie de l’humanité ne sont pas conscients de ce qu’ils font :

Toutes les terres vierges sont en passe d’être achetées. Dans le Colorado, des centaines de tunnels souterrains accueillent des appartements à quatre millions de dollar l’unité. Au Kansas, les architectes ont érigé un immeuble de 15 étages dans un ancien silo à missiles. Les logements à trois millions l’unité sont partis en moins d’un mois. A Las Vegas pour dix-huit millions de dollars, vous pouvez vous offrir un bunker à huit mètres de profondeur avec piscine et forêt d’arbres. De même en Nouvelle-Zélande.
Le New York Times titre : le survivalisme, un business florissant pour les ultra-riches.


C’est pourquoi le personnage principal du roman, Virgil Solal, qui n’a plus rien à perdre à la mort de son bébé victime de la pollution, va imaginer un plan machiavélique pour attirer attention de la population sur les responsables de la  destruction de la planète ou plutôt - comme il est dit -  de la disparition de la race humaine, car notre bonne vieille planète continuera à rouler dans l’espace sans nous. C’est là qu’interviennent le capitaine Nathan Modis et Diane Meyer, psychologue et  profileuse, qui cherchent à empêcher Solal d'exercer sa vengeance médiatisée sur les coupables et de commettre des meurtres en direct. Il s’agit, bien sûr, d’un roman policier où le lecteur comme les policiers sont amenés à considérer Solal comme un assassin un peu particulier, dont on comprend les revendications sans toutefois être d'accord avec les méthodes.

Inutile de vous dire que c’est l’aspect écologiste qui m’a le plus intéressée, plus que l’histoire policière. Bien sûr, on peut trouver ce roman démonstratif. Il l’est et ne s’en cache pas ! Néanmoins, il est assez fort pour nous ouvrir les yeux et nous faire prendre conscience  du système dans lequel nous vivons et de l’immoralité totale des capitalistes qui dominent le monde.  

 "Nous survivons dans un monde de financiers où les 1% les plus riches détiennent deux fois plus que le reste de l'humanité."  Et ils décuplent leur fortune au détriment de la planète.

Si Total et les autres investissent  timidement dans les énergies renouvelables, c'est pour se tenir prêts quand il n'y aura plus de pétrole à exploiter. En attendant, ils veulent utiliser les énergies fossiles jusqu'à la fin tant qu'elles leur rapporteront de l'argent.

 Dans trente ans, entre la pollution, le manque d'eau potable, les famines et la montée des eaux, cinq milliards d'êtres humains seront en péril, et nous sommes huit milliards.


15 commentaires:

  1. Vu comme cela, je peux m'intéresser aux romans de l'auteur, dont l'aspect policier ne m'attirait pas

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    1. L'aspect policier du roman, c'est le quotidien de la police dans le 93, c'est la réalité de notre société, c'est la corruption de certains politiques, c'est l'absence bien souvent de solution. La trilogie de 93, Entre deux mondes, de bons romans !

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  2. J'ai acheté son premier roman ces jours-ci. C'est un auteur qui a l'air de frapper fort sur les maux de nos sociétés.

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    1. Oui, il a été capitaine de la police judiciare du 93, alors il sait de quoi il parle. Et il écrit bien !

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  3. Je n'ai encore rien lu de cet auteur mais j'ai noté..;

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    1. Mon préféré c'est celui sur la jungle de Calais : Entre deux mondes. Les personnage sont attachants et l'horreur que vivent les immigrés et aussi les policiers au quotidien est très bien décrite.

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  4. Je n'ai encore jamais lu Olivier Norek, pourtant noté. Si tu lis et que tu aimes, ça me rassure un peu : ce n'est pas trop violent ?

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    1. Tu sais les cités du 93 et la jungle de Calais ne sont pas de tout repos ! C'est un euphémisme. Mais s'y enfoncer nous permet de mieux comprendre notre société, le métier de policier sans l'aura des séries TV, et le monde politique.

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  5. C'est drôle, le début de ton billet m'a rappelé la manière dont j'avais commencé celui sur "Les derniers jours d'un homme" de Pascal Dessaint :
    "Des gosses malingres, effarés, aux yeux grands comme des soucoupes, souffrant d'une plombémie élevée...
    Des façades rongées par les gaz, un air infestée de particules suspectes...
    Des habitants considérés comme des pestiférés...
    Des rues sans arbres, dans lesquelles circulent peu d'automobiles...

    S'agit-il d'un pays du tiers monde ?
    D'une zone sinistrée suite à un accident nucléaire ?
    Non, nous sommes simplement dans une ville sidérurgique du nord de la France."

    Je ne connais pas Norek, mais j'ai acheté Code 93 à la demande de mon conjoint suite à une interview de l'auteur à la radio.
    Je vais le lui emprunter !!

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  6. Bonjour Claudialucia, moi aussi, j'ai lu tous les romans de Norek que j'ai appréciés surtout ceux qui se passent dans le 93. Il sait se renouveler. Je note celui-ci pour le contexte écologique qui fait froid dans le dos. Bon dimanche.

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  7. Un auteur à découvrir pour moi. C'est très intéressant, ce questionnement sur l'écologie. Vraiment, je note et je vous remercie.
    Bonne journée !

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  8. On peut dire que cet auteur a du succès ! il faut vraiment que je le lise un jour :)
    Bonne journée

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  9. j"apprécie beaucoup cet auteur et son honnêteté intellectuelle.

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  10. Encore un livre que je pourrais mettre dans ma wish liste de Noël... J'aime quand la réalité sert de toile de fond à un récit. C'est ainsi que j'ai énormément aimé le film "La Terre des âmes errantes" du cambodgien Rithy Panh. D'autant que ma voisine d'origine cambodgienne a connu l'errance sur les routes pendant 2 ans durant lesquels elle a mangé des fourmis, et bien sûr le génocide et l'exil

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  11. Joyeuses fêtes à toi et à toute la famille dans cette ambiance particulière!

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