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mercredi 4 mai 2022

Jake Hinkson : Au nom du bien


 

Jake Hinkson est fils d’un prêcheur baptiste et il a été marqué dès son enfance par son éducation religieuse étouffante. Alors quand il parle dans son livre Au nom du bien des formes d’oppression religieuse dans certaines régions des Etats-Unis et, ici, dans un petite ville de l’Arkansas, il sait ce dont il parle. Et cela le rend féroce !

Richard Weatherford est le pasteur de cette ville et il impose son autorité à tous, s’immisçant dans la vie privée des gens, surveillant leur participation au culte ou leur absence, jugeant de leur moralité jusqu’au sein de leur vie de couple, de leur sexualité, réprouvant le divorce, l'homosexualité, interdisant, culpabilisant, guidant de haute main la vie de ses paroissiens, une influence qui s’abat sur la cité, prend une forme pateline, insidieuse et exerce une violence certaine sur les esprits ! Pour l’heure, il intrigue avec ses paroissiens, notables vertueux, pour faire interdire l’alcool et faire fermer les débits de boissons. Considéré par tous comme un saint homme, il est l’exemple qu’il faut suivre pour gagner son paradis !

Son épouse Penny est la parfaite épouse de pasteur, assurant le catéchisme, dirigeant les prières, déjeunant avec les dames de la paroisse. Très attachée à ses prérogatives et à la supériorité que lui donne sa position sociale, elle laisse son mari diriger l’éducation de leurs enfants.

Une vie édifiante dans lequel le pasteur sage et respecté, pourrait couler des jours sereins  mais… Car il y un mais, bien sûr, un caillou qui va enrayer les rouages, et faire grincer la machine bien huilée jusqu’alors. Et ce caillou, s’appelle Gary Doane, jeune homme dépressif et suicidaire. Il a pour petite amie Sarabeth Simmons considérée par tous comme une fille immorale, dépravée. Tous les deux ne supportent plus le manque de liberté, les excès d’une religion fondamentaliste, conservatrice, les jugements des bien-pensants persuadés d'agir au nom du bien.
Que veut Gary Doane à Richard Weatherford ?  Pourquoi le fait-il chanter ? On le saura bien vite car la réponse à cette question n’est pas l’intérêt principal du roman. Non, l’intérêt réside dans la démonstration magistrale de l’écrivain qui scrute le personnage du pasteur avec un intérêt digne d'un entomologiste étudiant un scarabée. Comment va  réagir le pasteur ?  Va-t-il reconnaître la vérité ou, au contraire, essayer de la fuir, de s'en sortir ? Le récit adopte plusieurs points de vue, celui du pasteur, de Penny,  Gary et de Sarabeth mais aussi celui d'un autre protagoniste, Brian Harten. Péripéties haletantes qui nous mènent de surprise en surprise, suspense, retournements de situation au cours desquels s’exerce l’ironie acérée d’un Jake Hinkson qui décrit une société figée, radicale, hypocrite, et nous livre une vision noire et désenchantée d’une Amérique conservatrice et liberticide.

Un très bon roman !

14 commentaires:

  1. Figure toi que je l'ai emprunté samedi dernier à la bibli (mais avec bien d'autrs...) Merci pour ton avis.

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  2. je note immédiatement, cette Amérique si réactionnaire et puritaine d'un coté et si laxiste en matière d'égalité devant la loi, la justice, la maladie c'est stupéfiant et on a du mal à comprendre
    ce genre de roman est parfait pour ressentir cette dichotomie tout à fait singulière

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    1. Oui, je suis tout à fait d'accord avec toi;. On nous donne toujours, à nous, Européens, les Etats-Unis en exemple, mais je ne voudrais y vivre pour rien au monde !

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  3. D'actualité avec les menaces sur le droit à l'IVG qui planent! Et si en plus il y a des péripéties haletantes! Cela fait longtemps que je n'ai pas lu de polars américains, je le note!

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    1. Un polar américain qui donne une vision des Etats-Unis difficile à comprendre pour nous. Comme intégrisme, il n'y a pas mieux. Et dire que certains parlent de manque de liberté en France ! Tu as raison, tout à fait d'actualité avec les lois anti -IVG !

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    2. téléchargé dans la liseuse

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  4. Il me semble avoir déjà lu des billets positifs sur ce roman ; c'est tentant cette histoire. En plus, je vois qu'il est sorti en poche, c'est parfait.

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    1. Je l'ai eu à la médiathèque. Malheureusement, il n'y en a pas d'autres et c'est dommage car celui-ci m'a donné envie de continuer avec cet auteur.

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  5. Comme toi, j'ai beaucoup aimé ce roman très noir. Et j'ai récidivé avec Sans lendemain, qui est très différent, mais haletant aussi.

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  6. Fascinée et souvent terrifiée par ces habitants des États-Unis si contradictoires, je le lirai, sous forme de polar écris-tu, parfait.

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  7. Sarabeth Simmons me fait penser à la Petite Fadette de Georges Sand d'après ce que je comprends à te lire... J'avais deux tantes, l'une religieuse tolérante et compréhensive il faut dire qu'elle avait été infirmière au front durant la seconde guerre mondiale puis qu'elle avait été missionnaire travaillant dans un dispensaire d'une oasis en Algérie. Et l'autre qui ne vivait que pour préparer sa vie éternelle. Elle n'était pas facile à vivre cependant c'était ma tante, elle m'aimait et je l'aimais

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  8. Ca a l'air très riche au niveau thématique. Ca me tente bien !

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  9. Pas trop aimé... difficile à expliquer pourquoi. Peut-être est-ce à cause de notre demi pied aux US?
    J'y lis bien sûr les thèmes dont du parles. L'hypocrisie au sein de l'église qui déborde sur les américains dans bien des milieux où la notion "apparaître" est primordiale. J'y vois aussi la force du travail et la force de se relever du jour au lendemain que je continue à admirer à chacun de nos séjours là-bas et qui m'interroge sur la valeur donnée au travail ici dans certains cercles.
    Sûrement à cause de toutes ces situations qui se multiplient de jour en jour et qui font mon désespoir. (je suis bien pessimiste aujourd'hui
    🙂)

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