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lundi 23 mai 2022

Musée Jacquemart : Gallen-Kallela Mythes et Nature

Gallen-Kallela : Nuit de printemps 1914 (collection particulière)
 

Akseli Gallen-Kallela est un peintre finlandais né à Pori, en 1865, dans le sud-Ouest de la Finlande, alors sous domination russe. Après avoir suivi les cours des Beaux-Arts d'Helsinki il fait trois séjours parisiens de 1884 à 1889 où il fréquente les cours de Bouguereau et de Cormon.

L'exposition du Musée Jacquemart réunit des oeuvres des musées des Beaux-Arts d'Helsinki et de Epoo, mais aussi de musées d'autres pays et de collections privées. C'est une exposition riche, variée, qui donne à voir  toutes les facettes de ce peintre Finlandais et des tableaux magnifiques (surtout ceux sur la Nature qui sont mes préférés) que l'on ne peut voir même en allant en Finlande.

Le naturalisme

Ces débuts sont marqués par le naturalisme, mouvement qui, en peinture comme en littérature  (Zola),  présente des scènes de la vie de tous les jours, du travail des ouvriers, des paysans, en un mot des classes populaires, et témoignent de l'évolution et des changements de la société. C'est dans son pays que Gallen-Kallela  voyageant jusqu'au coeur de la Carélie, trouvera ses sujets, des paysans. Il  exposera ces oeuvres  à Paris en 1889. 


Souffrance muette

Dans ce tableau, Gallen-Kallela s'inspire du peintre français naturaliste Julien Bastien Lepage. Ici, il  s'intéresse à cet homme victime d'une blessure,  la main bandée, avec son regard fixe, replié sur sa douleur.

Les mythes nordiques

Akselis Gallen Kallela  : Aino échappe à Vaïnämoïnen

Le Gallen-Kallela que j'ai découvert au musées des Beaux-Arts en Finlande à Helsinki est surtout celui des mythes. Le peintre puise son inspiration dans Le Kalevala, une épopée qui relate les faits et gestes des Dieux et des Héros de la mythologie finlandaise. Ce long poème épique a été publié par Elias Lönnrot qui a recueilli des légendes populaires ancestrales auprès des paysans dans toute la Finlande. Publié en 1835, ce poème  est ensuite paru dans une autre édition réaugmentée en 1849. Elias Lönnrot, médecin, écrivain, linguiste, folkloriste, a voulu donner au peuple finlandais, libéré de la domination suédoise, une oeuvre unificatrice, susceptible de réunir toutes les classes sociales autour de la notion de patrie et d’une identité commune qui redonne à la langue et à la littérature finnoises ses lettres de noblesse.. Quand je suis revenue de Finlande en 2019, j'ai voulu lire Le Kalevala, intriguée par les tableaux de Akseli Gallen-Kallela. Il faut un peu s'accrocher car l'épopée compte pas moins de cinquante chants et 22 795 vers. J'ai parfois flanché sur certains épisodes mais dans l'ensemble j'ai beaucoup aimé ces récits fantastiques, la poésie et la musicalité des vers du moins dans la traduction de Jean-Louis Perret. J'ai écrit trois billets sur le Kaleval ; Ici   Ici et Ici

Dans le tableau ci-dessus, la jeune fille, Aino, choyée par ses parents, attire l'attention du vieux Vaïnämoïnen, un héros aux pouvoirs presque divins, qui la demande en mariage. Ses parents l'obligent à l'épouser mais elle préfère se jeter dans la rivière pour se noyer. Elle sera transformée en truite.

Le cosmos

Gallen-Kallela : Cosmos 

Gallen-Kallela se passionne  pour l'observation des étoiles. Son goût de l'astronomie conjugué à une pensée spirituelle va donner une dimension mystique à son  oeuvre et amener une réflexion sur la place de l'homme dans l'univers ainsi qu'à des interrogations sur la vie et la mort.


Cosmos : détail


Ad Astra : Vers les étoiles

Dans Ad Astra : Vers les étoiles, la jeune fille arbore les stigmates du christ sur les paumes de la main. C'est une image assez singulière :  Une femme présentée comme une figure christique ?  Faut-il trouver l'explication de ces stigmates dans l'expression latine complète : "Ad astra per Aspera" : "Vers les étoiles et à travers les difficultés" montrant que l'aspiration de l'âme vers le cosmos ne peut être réalisée qu'à travers les souffrances du corps, que le passage est une porte étroite ?


Akseli Gallen-Kallela : La rivière des morts

Dans ce tableau, on aperçoit les corps des défunts emportés par le flot, migration cosmique des âmes. La figure que l'on voit par transparence représente les traits du compositeur Robert Kajanus que  le peintre désignait comme son maître à penser.

Kalela, la maison-atelier

Mary tissant

Gallen-Kallela désirait avoir un atelier à lui. Après avoir parcouru la Carélie et la Laponie, il se décide à acheter un maison au bord du lac Ruovesi, au nord d'Helsinki. Il y fait construire sa maison-atelier baptisée Kalela dont il conçoit l'architecture et la décoration intérieure. Elle devient  un lieu d'échanges artistiques mais aussi un lieu de silence et de recueillement selon les désirs de l'artiste.  Une source d'inspiration aussi car Kallela la prend souvent pour motif et la peint à toutes les saisons de l'année.

Dans Mary tissant, l'artiste représente son épouse au milieu des roses, occupée à une activité calme avec en arrière-plan la vision splendide du lac Ruovesi. Tout ici, à travers la beauté du personnage, des fleurs, du paysage,  suggère, la sérénité, la douceur, le bonheur paisible.


La maison- atelier Kalela : automne
 

La maison-atelier Kalela hiver

Paysages de silence 

Vision de Février

C'est avec ces peintures de la Finlande et ces paysages que Gallen-Kallela renforce sa notoriété dans les salons parisiens et les expositions universelles. Il devient un peintre très recherché.

Il faut dire que ces paysages de lacs et de neige d'où l'humain disparaît ne laissant place qu'au silence et au recueillement sont d'une beauté exceptionnelle. Les photographies publiées ici en donnent une image bien terne par rapport à l'oeuvre exposée ! Ces peintures sont tellement lumineuses qu'elles donnent l'impression d'être éclairées de l'intérieur. Elles rendent compte des sensations que l'on éprouve -que j'ai éprouvées- en me promenant dans ces bois de bouleaux silencieux qui se déroulent à l'infini, semble-t-il, au bord de ces lacs aux reflets argentés par la glace qui se forme peu à peu, paysages de toute beauté qui provoquent des sensations de bonheur et de paix.

Automne : étude pour le mausolée de Sigrid Juselius

Paysage d'hiver (détail)

La tanière du lynx

On distingue les traces des pattes du lynx dans la neige.

La nature en majesté

Lac Keitele

Lorsque l'on arrive dans la section La nature en majesté, alors, là, c'est l'apothéose, que ce soit avec La Nuit de printemps ou le Lac Keitelé qui sont mes tableaux préférés ! mais aussi toutes les études de nuages sur les lacs et aussi la vision panoramique du lac qui donne une impression de profondeur et d'immensité avec ses petites barques. La nature y est sublimée, grandiose, majestueuse avec des jeux de lumière, des reflets, des ombres, peints avec une minutie et une précision étonnantes. Tout y est d'un art subtil.

Nuages formant des tours

Nuages sur le Lac




Si vous avez la chance d'être à Paris, courez voir cette exposition. Elle est encore en place jusqu'au 25 Juillet au musée Jacquemart.

Voir le billet de Miriam sur cette exposition


13 commentaires:

  1. Je ne connaissais pas ce peintre bien entendu j'aime ses paysages, ses maisons mais nettement moins les premiers tableaux de ton billet trop ésotérique à mon goût

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    1. Comme toi, ce que j'ai préféré, c'est tout ce qui a trait à cette nature qu'il sait peindre d'une manière aussi magistrale.

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  2. Bonjour Claudia Lucia
    Je ne vais plus dans les musées, j'avais la carte annuelle du musée d'Orsay et je prenais tous les ans la carte sésame du Gd Palais et musée du Luxembourg mais la Covid a rebattu les cartes. Toutefois mon mari et moi avons apprécié lorsque le Louvre a rouvert tout au début, il y avait très peu de visiteurs.
    Je ne suis allée qu'une fois au musée Jacquemart André, c'est un bel espace pas trop grand. J'avais regretté de ne pouvoir aller voir l'exposition consacrée à Botticelli même si elle avait été prolongée mais finalement j'ai vu les grandes oeuvres à Florence qui ne sortent pas de la galerie des Offices

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    1. Oui, les Offices, quand il s'agit de Boticelli, valent bien une exposition même parisienne ! Par contre pour Gallen-Kallela comme il y a beaucoup de tableaux qui viennent de collections privées et de plusieurs pays, c' est une occasion unique de découvrir cette artiste !

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  3. Ce peintre finlandais je le découvre et il me plait beaucoup. J'aime d'ailleurs tout ce que produit la Finlande. La série sur sa maison atelier me rappelle le film "Sarabande" d'Ingmar Bergman pour le cadre, surtout les intérieurs même si Bergman est suédois

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    1. C'est dommage ! Je ne peux pas comparer car je ne connais pas "Sarabande".

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  4. j'ai beaucoup aimé cette exposition, pas tellement le côté cosmique et ésotérique surtout la neige et les paysages d'eau somptueux

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    1. Comme toi, un coup de coeur devant ces paysages, neige, lacs, nuages, jeux de lumière...

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  5. Comment et remercier pour ce billet si beau, instructif, tu donnes envie d'aller voir ces paysages de près, de lire, une partie du moins de Kalevala, mais surtout de voir "pour de vrai" ces peintures si lumineuses
    Si j'aime moins celles du cosmos, le reste m'enthousiasme..

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    1. Oui, les voir "pour de vrai" car ces petites photos ne rendent pas la beauté de ces peintures !

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  6. Je devrais pouvoir y aller d'ici le 25 Juillet, malgré les mauvais tours de la SNCF (exemple, zéro train sur les quatre jours du week-end de l'Ascension, merci les travaux du Grand Paris). Et tout l'été des trajets rallongés. Ça va être infernal.

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    1. Va la voir, tu ne le regretteras pas ! A l'aller, le train avait 1h30 de retard mais au retour, étonnement, il était strictement à l'heure !

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