Jo Nesbo avec ce roman Leur domaine signe un beau roman noir… très noir !
Roy et Carl Opgard sont frères. Roy est l’aîné et parce qu’il n’a pas su venir en aide à son petit frère dans son adolescence, il se sent coupable et ce sentiment de culpabilité ronge sa vie. Adulte, il devient le défenseur de Carl, celui qui est toujours là pour réparer ses erreurs, pour le venger, celui qui lui vient en aide dans les pires moments et cela va l’amener loin, très loin !
A la mort de leurs parents dont la voiture s’est abîmée dans un précipice, Roy est devenu mécanicien et a travaillé dans le garage de son oncle pour envoyer son frère à l'université. Celui-ci, après avoir terminé ses études part au Canada et ne donne plus signe de vie pendant quelques années. Mais quand il revient dans leur petit village norvégien, avec Shannon son épouse, c’est pour se lancer dans la construction d’un hôtel de luxe sur leur domaine familial, dans la montagne. Là, encore il va avoir besoin de l’aide de son grand frère. Les personnages sont entraînés dans une spirale infernale.
Le roman est un roman policier et c’est vrai qu’il y a des meurtres, nombreux, et une enquête qui piétine. Un jeu du chat et de la souris s’exerce entre le policier Kurt Olsen et les deux frères, l’un persuadé de détenir la vérité mais n’arrivant jamais à le prouver, les deux autres démontrant toujours qu’ils sont injustement soupçonnés.
Mais Leur domaine est aussi autre chose. C'est un roman, ancré dans la société, qui
montre comment en Norvège les villes meurent après la construction d’un
tunnel et d’une autoroute qui les coupent de la circulation routière.
La ville des deux frères a été pour l’instant épargnée : "Mais
le tunnel viendra. Aussi sûrement que le soleil pulvérisera notre
système solaire dans deux milliards d’années, et, bien plus vite que ça.
Ensuite, dans ce trou paumé, ce sera, bien sûr, la clef direct sous la
porte… ". Une sorte de huis clos à l’échelle de cette ville en sursis où
tout le monde se connaît et s’observe crée une atmosphère pesante et
s'installe tout au long de la narration.
La construction du livre est habile. Il se présente en en six parties dont la fin relance toujours l’intérêt en détruisant ce que l’on croyait avoir compris si bien qu’au début de chaque nouvelle division on se retrouve à devoir réviser son jugement et à repartir sur d’autres bases, dans une direction que l’on n’attendait pas. Ceci est d’autant plus passionnant que l’intrigue repose sur la psychologie des personnages. Nesbo explore le thème de la culpabilité et a le don de créer des personnages très forts, qui ont une personnalité marquante, et de leur donner de l’épaisseur. Il en est ainsi des deux frères irrémédiablement marqués par leur passé, mais aussi de Shannon, la femme de Carl, de Mari, l’ex-petite amie de Carl, la fille du maire, de Grete la coiffeuse malfaisante qui est amoureuse de Carl, du vendeur de voitures d’occasion inquiétant…
Enfin, le récit prend parfois une dimension fantastique avec le précipice bordant la
route qui grimpe, en virages, jusqu'à la ferme des frères Opgard, un gouffre toujours
prêt à avaler ses victimes, symbole de la mort, de l'échec, et d'un destin sans échappatoire.
Un très bon roman !
Leur domaine Jo Nesbo : Gallimard 687 pages
Je trouve que Jo Nesbo est un excellent auteur de polars mais c'est vraiment très noir, comme tu le dis dès le début.
RépondreSupprimerOui, effectivement c'est très dur et la violence n'est pas gratuite comme dans certains thrillers où l'on sent bien que l'écrivain renchérit dans l'horreur pour appâter son lecteur. Là tout est basé sur la psychologie des personnages, sur leur vécu, sur leurs condition de vie...
SupprimerJe fais confiance à Nesbo pour construire de bonnes intrigues et donner de bons personnages, je l'avais lâché car très noir, très dur...
RépondreSupprimerC'est vrai, les intrigues sont solides et les personnages vrais et forts. Il paraît que c'est son meilleur du moins d'après Wens.
SupprimerJe n'ai lu que L'homme chauve-souris mais je sens que j'ai eu tort de m'arrêter là...
RépondreSupprimerEtmoi, je n'ai lu que celui-ci mais il m'a convaincue !
Supprimerun auteur dont j'ai lu à peu près tous les polars, très noirs c'est vrai mais parfaitement construits en général, celui là m'attend je me réjouis de ton billet bien positif je vais me garder cet opus pour un moment où je perds l'envie de lire
RépondreSupprimerToi aussi il t'arrive de perdre l'envie de lire ? C'est assez déstabilisant comme impression, heureusement, ça passe vite. Un bon livre mais pas réjouissant !
SupprimerLe "pitch" de la construction d'un hôtel de luxe dans la montagne, ça me rappelle vaguement un album de BD de la série Lefranc titré Le repaire du loup...
RépondreSupprimerje n'ai jamais lu de Jo Nesbo, mais ce gros bouquin-là paraît avoir du succès: il a déjà inspiré, avec celui-ci, trois billets qui participent au challenge des épais de l'été (http://dasola.canalblog.com/archives/2023/06/10/39921971.html).
Bravo pour cette troisième participation en tout cas.
(s) ta d loi du cine, "squatter" chez dasola
Je ne connais pas la BD. Je vais aller voir les autres billets.
SupprimerVraiment epais! Il faut être motivée pourquoi pas un voyage dans un pays frais?
RépondreSupprimerL'un n'empêche pas l'autre ! Quant à l'épaisseur d'un livre, tu me connais, c'est ceux-là que j'aime ! J'ai du mal avec les petits bouquins, ce qui est parfaitement injuste mais... Ceci dit , j'en lis tout de même !
SupprimerJ'ai lu deux livres de cet auteur et je n'ai pas continué, à cause justement de la noirceur. Pourtant j'en lis d'autres, bien noirs, mais je ne sais pas, là ça n'a pas passé.
RépondreSupprimerMa foi, l'on atteint ses limites quand l'on ne retire pas de plaisir de la lecture quelle qu'en soit la raison. Mieux vaut ne pas se forcer !
SupprimerJ'aime bien la série, j'en ai lu 3 ou 4... Je note celui-là que je ne connaissais pas du tout
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