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lundi 13 juin 2011

Venise, une brassée d'images: l’acqua alta avec T. Scarpa et P. Sollers


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Le lendemain de notre arrivée à Venise, c'est l'acqua alta "très alta" qui est annoncée; elle envahit même le hall de notre hôtel.

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Les Vénitiens appellent bragha acqua alta les pantalons trop courts, inélégants, avec les chevilles lissées à découvert, comme s'ils avaient été coupés exprès pour ne pas mouiller les ourlets.
Les sirènes qui sonnaient l'alarme durant les raids aériens de la la Seconde Guerre mondiale sont restées au sommet des clochers. Maintenant, elle signalent les incursions marines quand la marée monte et te réveillent à cinq ou six heures du matin. Les habitants  ensommeillés fixent des cloisons d'acier devant leurs portes et dressent des petite digues dans les encadrements en métal caoutchouteux des huisseries des maisons.(..;) Le plus souvent, il n'y a rien à faire, l'eau jaillit des bouches  d'égout, des fissures du sol, attaque les meubles, pourrit les murs, effrite le travail des peintres en bâtiment....
Des équipes spéciales d'éboueurs sortent à l'aube pour monter des passerelles en bois dans les callis inondés.
Venise est un poisson de Tiziano Scarpa

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La ville est à fleur d'eau, elle se laisse envahir par elle. On marche dans l'eau, on marche sur l'eau, c'est la fête. Les touristes sont débordés et poussifs, les habitants habitués et passifs, les enfants ravis, les cloches sonnent, la lagune fait sentir sa loi, la ville est un navire à venir.

Philippe Sollers dictionnaire amoureux de Venise

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Retour de Venise : Brassée d'images, texte de Henry James


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Le Palais des Doges, le campanile de Saint Marc

Chaque jour et à chaque moment Venise se pare d'un manteau nouveau. Parfois, la lagune est sombre et opaque, à d'autres moments, lavée par la marée, elle prend des teintes d'émeraude, de vert cresson. Sous le soleil couchant, elle est traversée de rayons, d'opalescence. Dans le petit matin, elle m'apparaît noyée dans le brouillard, bleutée, laiteuse et toujours mystérieuse.
Mais pour parler de la lumière à Venise, mieux vaut laisser la parole à Henry James.
La lumière ici est en vérité une puissante magicienne et, avec tout le respect dû à Titien, Véronèse et Tintoret, plus grande artiste qu'eux tous. Il faut voir sur place le matériau qu'elle traite : brique boueuse, marbre rosé et souillé, loques, crasse, délabrement. La mer et le ciel semblent se croiser à mi-chemin, mélanger les nuances avec une douce irisation, un composé scintillant de flots et de nuages, un centaine de reflets ponctuels et indéfinissables et puis projeter cette texture sur tout objet visible.


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Le quai des Schiavone

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L'église de la Salute

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En descendant le Grand Canal

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Le Pont du Rialto


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Vue du Pont de l'Académie  fin d'après midi


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Pont de L'Académie fin d'après midi : 1 heure après la précédente


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Nuit sur Venise

Tiziano Scarpa : Venise est un poisson

 

Venise est un poisson de Tiziano Scarpa! Voilà déjà un moment que je regardais avec envie du côté de ce diable de petit livre mais je savais que si je le lisais, je serais tellement imprégnée par la ville que la nostalgie naîtrait! Et bien voilà! C'est fait! Quand je vous le disais qu'il était diabolique, ce Tiziano Scarpa!
Venise est un poisson se présente comme un guide de la ville mais un guide qui vous dit "Tu", qui vous prend par la main pour vous éloigner des sentiers battus, pour partir à la découverte d'une Venise qui n'est pas celle des touristes. Et pour cause! Tiziano Scarpa ( s'appeler Tiziano quand on est vénitien, avouez que c'est savoureux!)  raconte sa ville, celle de son enfance et de ses jeux, de son adolescence et de ses premiers émois amoureux, celle aussi des adultes qui n'est pas toujours facile à vivre. Il  donne ainsi les clefs pour mieux la comprendre, pour la voir avec des yeux neufs. Certes, il ne vous dit pas tout car il trouve bon de garder pour lui les petits coins discrets et authentiques de sa chère cité mais si vous faites un effort...  car Venise, la vraie, l'intime, se mérite!
Mais Venise est un poisson est bien autre chose qu'un guide! C'est aussi une invitation au voyage qui fait appel à tous vos sens. On y apprend que si l'on voit avec les yeux (méfiez-vous de la beauté radio-active de Venise qui risque de vous terrasser, du sublime qui ruisselle à flots des églises), on peut y "voir" aussi avec les pieds, les mains, les oreilles, la bouche, le nez...
On y entend le silence et le fracas de Venise, cette ville totémique habitée par des milliers d'allégories en chair et en os,du poil, des plumes, des palmes, des bestiaires symboliques, des animaux vivants plus chimériques que les lions de pierre. On y sent "la puanteur chronique" des canaux dont chacun a une odeur caractéristique. Et puis, on ne peut s'empêcher de la toucher, Venise : Tu l'effleures, la caresses, lui donnes des chiquenaudes, la pinces, la palpes. Tu mets les mains sur Venise.
Enfin, Venise est un poisson, c'est une langue belle, concrète, sensuelle, une langue évocatrice et riche, pleine d'humour aussi, qui sait faire voir, faire sentir, qui sait décrire la rugosité des pavés sous votre pied, le roulis du bateau sous vos jambes, la saveur des mots vénitiens qui roulent sous votre langue ou celle des rouleaux d'anchois, des pattes de crabe, des olives d'Ascoli qui fondent dans votre bouche. Un style qui rend sensible la profusion, le foisonnement, la luxuriance de cette ville hors du temps, un style qui rappelle l'étourdissement, le vertige qui s'emparent de vous, visiteur subjugué par la Serenissime : Tu es prise  à coups de façades, giflée, malmenée par la beauté. N'aggrave pas ton cas et cesse de courir derrière des statues et des peintures.. Et enfin la poésie est là qui surgit par exemple au détour d'une description visionnaire, celle de Venise bâtie sur pilotis : Les Vénitiens ont enfoncé dans la lagune des centaines de milliers et des millions de pieux... Tu es en train de marcher sur une immense forêt renversée, tu es en train de te promener sur un incroyable bois à l'envers.

Merci à Dialogues Croisés et aux éditions Christian Bourgois



Le syndrome de Stendhal à Florence


La Vénus de Botticelli
Qu'est-ce que le syndrome de Stendhal?  Dans son journal de voyage en italie, Stendhal consigne les sensations qu’il a éprouvées lors d’un séjour à Florence en 1854. En sortant de la basilique de Santa Crocce, il ressent  une émotion extrême liée, dit-il, à la contemplation de la beauté sublime. Un sentiment de panique s’empare de lui, accompagné de palpitations, de vertiges.
Stendhal

J'étais arrivé à ce point d'émotion où se rencontrent les sensations célestes données par les Beaux Arts et les sentiments passionnés. En sortant de Santa Croce, j'avais un battement de cœur, [...] la vie était épuisée chez moi, je marchais avec la crainte de tomber.
La psychiatre Graziella Magherina a observé les mêmes symptômes sur des touristes visitant Florence, hospitalisés dans ses services; elle a donné à cette maladie le nom de "syndrome de Stendhal" dans un essai où elle décrit les symptômes de la maladie. Il s'agit d'un syndrome psychosomatique déclenché par l’exposition à des œuvres d’art, évanouissements, tachycardie, crampes d’estomac, troubles neurologiques, angoisse, confusion. Un film d'après le livre de Graziella Magherini  a même été réalisé par Dario Argento.

Les années 60 :

Quand, adolescente,  je suis allée à Florence, je n'ai pas éprouvé le syndrome de Stendhal, non! Mais quelque chose qui s'y apparentait, un coup de foudre absolu, un enchantement de tous les instants, un étonnement devant cette ville où le visiteur n'a pas à aller chercher les oeuvres d'art, où c'est L'Art qui vient à lui dans la rue, sur une place, partout...  C'était mon premier voyage hors de France et quel voyage!

Retour à Florence en 2005 :

Nous avons loué un appartement non loin de la basilique Santa Crocce, celle-là même où Stendhal eut son malaise ! C’est un quartier populaire, un peu éloigné des grands lieux touristisques même s’il est proche de la plus grande des églises de Florence. Le matin, nous y voyons les gens partir travailler en bicyclette, ou en  bus. Le marché San Ambrogio s’anime et nous allons y faire nos courses avec les ménagères du coin. De toutes petites boutiques à la devanture étroite et sombre, épiceries, boulangeries, drogueries, cafés s’ouvrent sur la rue, avec devant leur porte des groupes d’hommes discutant volubilement, le verbe haut, le geste éloquent. Près de la Basilique où se trouve l’école du cuir, les boutiques de sacs et vêtements en peau sont nombreuses.
 Nous reprenons contact avec Florence. Qui sait si nous la reconnaîtrons?
Elle a vécu l’uniformisation européenne. Quel que soit le pays d’Europe où je suis allée toute jeune, je sens, quand j’y retourne, que chacun de ces pays a perdu un peu de ce qui se faisait sa spécificité. Il ressemble  toujours un peu plus à l’autre, aux pays de l’Union. Pas complètement mais... on ne peut plus éprouver ce sentiment un peu magique de dépaysement, cette sensation d’être transporté ailleurs dans un monde différent du nôtre ! C’est cela l’Europe, et même si l’on peut en  éprouver du regret, au moins on ne se fera plus la guerre entre voisins. Les ouvriers de Pologne, de France, d’Italie ou d’ailleurs y seront encore plus durement exploités par un capitalisme triomphant qui a cessé d’être à l’échelle d’un pays.. mais comme l’a chanté Brassens "nos filles et nos garçons" y font "l’amour ensemble et l’Europe de demain".
De plus Florence subit une telle pollution que la circulation des véhicules à moteur y est sévèrement réglementée. Et puis, comme partout le tourisme de masse s’est encore élargi, les queues sont interminables, le temps de visite sévèrement minuté dans certains lieux ( chapelle Brancacci, Gozzoli..). Adieu le recueillement, la méditation devant l’oeuvre de votre choix. Stendhal n’aurait plus le temps d’éprouver son syndrôme!! Les italiens n’ont plus la chaleureuse attention  qu’ils portaient à leurs touristes même désargentés. Ils n’en ont ni le temps, ni l’envie ! Trop, nous sommes trop nombreux, nous déferlons sur la ville comme une nuée de sauterelles. Nous apportons des devises, certes, mais les rapports humains ne sont plus ce qu’ils étaient.
Désenchantement alors ? Nostalgie passéiste ?... Mais  Non ! Car le centre historique de la ville est là, immuable dans sa grave beauté, avec ses palais fortifiés, ses places où l’Histoire vit, ses oeuvres d’art qui vous happent au détour d’une rue. Les statues silencieuses  vous interpellent du haut de leur piedestal, vous contemplent sur les murs de l’église Orsan Michele, se mêlent à la foule dans la Loggia dell’Orcagna, dans la cour du Palazzo Vecchio, sur la  place de la Signoria. Partout, Verrochio, Donatello, Cellini, Ghiberti, Della Robia... viennent au-devant de vous, s’offrent à vos regards.

Domenico Ghirlandaio : La naissance de Saint jean Baptiste



Simone de Martine musée des Offices


Eglise San Miniato Florence

Alors, je suis allée à mes rendez-vous. j’ai revu la fine silhouette dansante de la dame en bleu peinte par Domenico  Ghirlandaio sur le mur de Santa Maria Novella; elle s’avance d’un pas léger, toutes voiles dehors dans la chambre où vient de naître la Vierge; elle porte d’un air altier un panier sur la tête; elle est belle comme le sont ses compagnes autour d’elle; elle est ma préférée. J’ai revu l’Homme aux yeux gris du Titien  dans le désordre indescriptible du palais Pitti. Les tableaux montent toujours à l’assaut du mur jusqu’en haut, tout en haut là où il vous faudrait une échelle pour les contempler. Et lui, le beau jeune homme d’un autre temps, il est là, à la  même place depuis plus de quarante ans. C’est fou ce que les conservateurs des musées sont ...conservateurs! J’ai revu les ailes des anges de Fra Angelico et l’air triste de ses vierges auréolées sur les murs du couvent de San Marco, le visage d’enfant boudeur de la Vierge siennoise de Simone di Martini aux Offices, les rois Mages chamarrés de Gozzoli, le tourment d'Adam et Eve chassé du paradis de Masaccio, et  l’éveil de l’Aurore dans les chapelles médicéennes ... J’ai revu la silhouette du Vieux Pont, les jambes plongées dans l’Arno où  s’ébattent des loutres, et l’adorable petite église San Miniato  perchée sur sa colline au-dessus de la Piazzale Michel Ange. De là, j’ai contemplé Florence.



L'homme aux yeux gris : Le Titien



Adam et Eve chassés du paradis de Masaccio

 
 

 Challenge de Nathalie  blog : Chez Mark et Marcel invitation au Voyage en italie ICI

Texte écrit et publié en 2005 pour Voix Nomades, site de voyage aujourd'hui disparu

Rome, la chapelle Sixtine redécouverte de Robin Richmond

  La sybille de Delphes

Adieu à la chapelle Sixtine

Mon dernier voyage à Rome remonte à Septembre 2007. J'avais lu tous les avertissements dans les guides,  j'avais écouté tous les conseils de mes amis : il fallait arriver avec au moins une heure d'avance  par rapport à l'ouverture des musées du Vatican pour être parmi les premiers (milliers?) à entrer. Ainsi vous pourriez avoir l'espoir  de profiter de la chapelle Sixtine et d'apercevoir ne serait-ce que le pied de la Sybille de Delphes (ma préférée!) .

 Et voilà que je suis arrivée juste à l'heure et qu'il y avait déjà deux kilomètres de queue soit, après calcul, quelque dix mille personnes avant moi! Plus de vingt cinq mille touristes allaient défiler dans ces lieux en cette journée de Septembre. Rien d'extraordinaire, la banalité quotidienne! Alors j'y ai renoncé.

 
 
 
La sybille de Lybie

 
J'ai eu la chance de voir la chapelle Sixtine (et les stanze de Raphaël) quatre fois dans ma vie et je ne voulais pas gâcher le souvenir que j'en avais. Chaque fois que je suis venue à Rome, en effet, je suis allée admirer les fresques de Michel-Ange. Je me souviens de l'émerveillement de la première fois, je me souviens que l'on pouvait  alors rester dans la chapelle le temps qu'il fallait pour être ivre d'images, de couleurs, de formes, d'histoires. 

Même alors il n'était pas facile de la visiter car, s'il y avait peu de visiteurs (relativement), être face à ces milliers de personnages peints au plafond et qui vous dominent dans un mouvement tumultueux donne le tournis. Au bout d'un moment le cou, les épaules, les yeux deviennent douloureux. Mais on pouvait se servir d'un miroir pour regarder le plafond sans se tordre le cou et des gardiens pleins de sollicitude en procuraient à ceux qui n'en avaient pas. J'ai même vu une personne étendue de tout son long sur le sol, d'autres assises par terre pour contempler à leur aise la Création  du Monde.

 Je comprends bien que l'on puisse désirer entrer à tout prix dans les musées du Vatican si on ne les connaît pas! Mais quant à moi, je ne verrai plus jamais la chapelle Sixtine.


Deux Américains à la Sixtine

Entendu cette conversation (que je traduis) entre deux américains de Boston.
-Vous avez vu la Sixtine?
-Oui it's awful (horrible) j'ai fait plus d'une heure de queue!
- Et ça vous a plu?
-Quand je suis arrivé à y pénétrer, je me suis senti poussé à l'extérieur en ayant eu à peine le temps de lever la tête! Je n'ai rien vu!
- It's awful! Et dire que chez nous non seulement les musées sont gratuits mais encore on peut y rester toute la journée.
-  Ici, on vous fait payer bien cher et on vous met à la porte!
 It's Awful !
-Yes, awful!
-mais enfin c'était beau?
-Perhaps! Peut-être!

Un livre en guise de consolation

 


 


Cependant pour me faire pardonner ma non-visite, je vous emmène faire un voyage dans ce livre : Michel-Ange, La chapelle Sixtine redécouverte de Robin Richmond paru en 1993 après la restauration de la Chapelle Sixtine qui avait, à l'époque provoqué un tollé de la part de certains amateurs d'art. Les couleurs fânées, délavées, de la chapelle allaient apparaître vives, rutilantes. Bref! comme elles l'avaient forcément été quand Michel Ange la peignait. Pas de quoi fouetter un chat! Quant à moi, je m'en suis fort réjouie!
 
Le prophète Daniel


Feuilleter cet album, c'est voir les personnages de Michel Ange comme vous ne les verrez jamais. De près! avec des vues d'ensemble qui montrent la composition de la voûte mais aussi des détails, la beauté d'une main, d'une chevelure, la fulgurance d'un regard, la majesté d'un geste. Robin Richmond après une rapide introduction sur la Renaissance et sur Michel-Ange (1475-1494), les influences qu'il a subies, nous décrit la genèse de l'oeuvre, de la commande à la réalisation. Elle nous explique la technique de la peinture à fresque et son extrême difficulté, les souffrances endurées par l'artiste. Elle nous montre les étapes de la restauration et ses résultats. Enfin, elle termine sur Michel-Ange, homme de la Renaissance, peintre, sculpteur, architecte de génie et aussi poète. Un très beau livre!



Michel Ange La création d'Adam




Le déluge Michel Ange la chapelle Sixtine


 
 
Michel-Ange, la chapelle Sixtine redécouverte  traduit de l'anglais par Denis-Armand Canal éditions  Herscher

Chambre avec vue : Edward Forster et James Ivory avec vue sur l’Arno

 



  Rappelons que le roman de Edward Morgan Forster Avec vue sur l'Arno raconte l'histoire d'une jeune anglaise Lucy Honeychurch, en voyage à Florence, accompagnée de son chaperon, sa vieille cousine célibataire Charlotte. Dans la pension de famille où elles descendent, George Emerson et son père leur cédent leur chambre avec vue sur l'Arno. C'est avec leur guide Baedeker, indispensable à toute anglaise en voyage en Italie, que les deux femmes visitent la belle cité toscane. C'est à Florence et dans sa campagne florentine que la jeune fille va éprouver ses premiers émois amoureux.

Sur les traces du film de James Ivory : Chambre avec vue




Le film de James Ivory, Chambre avec vue - adapté du roman de E.M Forster - fut pendant des années l’une des oeuvres cinématographiques  préférées de mes filles et heureusement pour moi je l'aimais beaucoup aussi car j'ai dû le voir en boucle je ne sais combien de fois!  C’est donc sur les traces de la charmante héroïne anglaise, la belle Lucy Honeychurch, en voyage à Florence, que nous avons marché lors d'un retour dans cette ville que je ne me lasse jamais de visiter. C'était en Novembre 1994*.
Places des Innocents


D’abord une visite obligée sur la place des Saints Innocents à la statue équestre de Ferdinand 1° de Médicis sous laquelle nous nous plaçons pour lancer à la cantonade comme le fait la compagne de Lucy : "Buon giorno, Buon giorno, Ferdinando! ".


Ferdinando
Le Ferdinando en question reste sourd à nos appels mais il attise notre curiosité.  Qui est-il ce Grand Duc (1519-1574) perché sur son monumental cheval au milieu de la place de la Santassima Annunziata? Il faut se plonger dans l’arbre généalogique de la famille de Médicis pour le découvrir  : fils de Cosme 1°, il fait partie de la branche de Laurent l’Ancien, collatérale à celle de son frère Cosme l’Ancien (1389-1464), ce dernier considéré par les Florentins comme le Père de la Patrie. La branche de Cosme l’Ancien porte des noms prestigieux : Laurent le Magnifique (1449-1492), le fils de ce dernier, le pape Léon X, Catherine de Médicis reine de France, épouse d’Henri II.  C’est dans la descendance de Cosme l’Ancien que naît Alexandre (1510-1537) qui sera assassiné par son cousin de la branche de Laurent l’Ancien, Lorenzino que Musset rend célèbre sous le nom de Lorenzaccio. Encore de la Littérature!
C’est clair, non? Non! Mais enfin l’amour du cinéma mène à tout et nous retenons surtout, chauvinisme oblige, que Ferdinando est l’oncle de Marie de Médicis, reine de France, épouse d’Henri IV. La vaste place, où il se dresse est splendide dans son élégante sobriété limitée par la basilique de la Sainte Annonciation et par la belle loggia de Brunelleschi qui orne l’hôpital des Innocents. Sur les arcades courent les médaillons en terre cuite bleue de della Robbia qui représentent les enfants orphelins ou abandonnés accueillis dans cet hôpital. Ces innocents qui étaient déposés subrepticement dans une "tour" à l’entrée de l’hôpital, recevaient, paraît-il, dans ces lieux, une éducation soignée, avec l’apprentissage du latin et de la musique.

Devant la Loggia della Orcagna

L'enlèvements des sabines de Jean de Bologne
C’est sur la Place du Vieux Palais della Signoria, que la jeune fille de notre film nous conduit ensuite. Là, devant la Loggia Dei Lanzi (ou della Orcagna) elle s’évanouit après avoir assisté à une rixe suivie d’un meurtre... le Persée de Benvenuto Cellini tendant vers nous la tête tranchée de la Méduse, les Sabines de Jean de Bologne se débattant dans les bras de leur ravisseur, forment l’arrière plan prestigieux de cette scène. Chaque fois que nous nous y promenons l'une de mes filles (et l'autre aussi!) se pâme en imitation de ce moment palpitant où la jeune héroïne tombe dans les bras de.... Il faut dire que c’est là qu’intervient le beau jeune homme qui prendra soin de Lucy  sur la rive de l’Arno, près du Ponte Vecchio.
Enfin une autre très belle scène nous amène à l’intérieur de la basilique Santa Crocce là où sont enterrés les grands personnages italiens, Dante, Galilée, Machiavel, Michel Ange, près de la chapelle ornée des magnifiques fresques de Giotto...

Un sonnet de Michel Ange : La Pieta de Saint Pierre de Rome

Michel Ange comme tous les grands artistes de la Renaissance est un homme de génie qui a plus d'une corde à son arc. Sculpteur, peintre, architecte, il fut aussi, même si c'est moins connu, poète. Ce sonnet est adressé à la Vierge de la Pieta que le sculpteur a fait naître du marbre. Cette naissance toute de beauté et de grâce est  prétexte à une réflexion sur la création artistique, sur la foi mais aussi sur la responsabilité de l'artiste et la mort.

La Pieta de Michel Ange (Saint Pierre de Rome)




L'artiste le meilleur n'a aucune idée qui ne soit déjà enfouie
Profondément dans le marbre.
Et le charme qui retient cette idée ne peut être brisé
Que si les mains obéissent à l'esprit.
Le mal que je fuis et le bien auquel j'aspire
sont cachés en vous, Dame de haut raffinement,
Et mon art n'est pas assez grand pour obtenir ce que je désire.
Votre beauté et votre sévérité ne  sont pas responsable de ma peine,
Pas plus que l'Amour ou le Destin.
Je suis seul comptable de ma destinée,
Car si vous portez la compassion et la mort
Dans votre coeur si digne,
Mon talent indigne ne connaît que la mort.

Les compagnons Troubadours du dimanche :
Edelwe, Mango, Abeille, Emmyne, Chrestomanci, Mariel, Laurence , Ankya, Herisson08, Anjelica , George, Uhbnji , Fleur, Esmeraldae, Armande, Satya, Zik, Lystig, Amos, Bookworm, Emma, Julien, Marie, Yueyin , Soie , Alex , Hambre , Katell , Mathilde, Schlabaya, Hilde, Saphoo, La plume et la page, Tinusia, Chrys, Roseau, MyrtilleD, Cagire, Caro[line], L’or des chambres, Violette, claudialucia, Séverine, Maggie, Sev, Azilis.

dimanche 12 juin 2011

Mary Elizabeth Braddon : Henry Dunbar




Avec Henry Dunbar, Mary Elizabeth Braddon concocte pour ses lecteurs une ténébreuse histoire dont elle seule semble avoir le secret avec un assassin machiavélique, rongé par la peur d'être découvert et en proie au remords,  une jeune héroïne décidée à aller jusqu'au bout pour connaître la vérité et un jeune homme qui parvient à dénouer les noeuds de l'intrigue avec l'aide d'un vrai policier.
Toute cette sombre affaire a son origine dans la faute de jeunesse commise par Henry Dunbar, héritier par son père et son oncle de la grande banque londonienne Dunbar et Baldebery, l'une des plus riches de la Cité. Henry Dunbar demande à son jeune ami Joseph Wilmot, modeste employé à la banque, de lui faire un faux en imitant une signature. La malversation destinée à couvrir les dettes de jeu d'Henry est découverte. Henry est expédié dans une succursale de la banque aux Indes orientales par son père et son oncle et en guise de punition devra apprendre le métier en partant au bas de l'échelle. Joseph Wilmot, lui, est renvoyé sans que Henry, lâche et égoïste, cherche à le défendre. Ce renvoi sera pour Joseph le départ vers une vie ratée et sa haine envers Dunbar ne cessera de croître. Aussi lorsque Henry Dunbar revient des Indes prendre possession de la fortune de son père à la mort de celui-ci, Joseph Wilmot décide d'agir et de se venger. Mais l'on apprend peu après que Wilmot a été sauvagement assassiné alors qu'il se trouvait avec Henry Dunbar.
Autour de ces deux hommes, clefs de l'intrigue, gravitent toute une série de personnages : La fille de Dunbar, Laura  qui n'a jamais vu son père ayant été élevée en Angleterre par son grand père et celle de Wilmot, Margaret. Jeune et belle musicienne qui gagne sa vie en donnant des leçons de piano,Margaret est très dévouée à son père. Elle n'aura de cesse de retrouver son meurtrier. Elle est persuadée que Henry Dunbar est le coupable. La jeune fille est aimée de Clément qui travaille à la banque Dunbar et qui, par amour, sacrifie son ambition et sa carrière prometteuse pour venir en aide à sa fiancée affligée.
Comme dans Le secret de Lady Audley, la romancière nous laisse tout de suite deviner la vérité, sans nous la révéler vraiment.  Aussi l'intérêt du récit n'est pas tant dans le mystère lui-même que dans la façon dont il va être levé et dans les différentes étapes de l'enquête policière qui va nous réserver maintes surprises et péripéties.
Henry Dunbar a de plus  le mérite de nous présenter la société  du XIXème siècle avec ses classes, ses inégalités sociales marquées,  sa conception du mariage basé sur l'argent et considéré comme un moyen de s'élever socialement. Le roman se lit avec plaisir et nous nous intéressons  non seulement à l'intrigue mais aussi aux personnages, en particulier aux jeunes gens, à leurs difficultés, leurs peines mais aussi leurs amours.
* Le challenge Mary-Elizabeth Braddon se termine ce mois-ci. Je l'ai rejoint en route et j'ai lu trois livres tous très agréables de cette auteure anglaise de l'époque victorienne douée d'une imagination débordante; Elle nous prouve  par son talent et son anti-conformisme que certaines femmes comme George Sand en France pouvaient échapper au carcan dans lequel elles étaient emprisonnées.
Henry Dunbar; Le secret de Lady Audley; Sur les traces du Serpent (mon préféré)
Il en est de même du challenge English Classics que Karine clôt avec la nouvelle année. Elle nous promet une récapitulation au mois de Janvier dans Mon coin lecture.

Challenges English classique de Karine et  M. E. Braddon de Lou

Mary Elizabeth Braddon : Le secret de Lady Audley

 


Le secret de Lady Audley est ma deuxième lecture après Sur les traces du serpent de Mary Elizabeth Braddon, écrivain anglais, contemporaine de Dickens et Wilkie Collins .
Dans Sur les traces du serpent Mary Elizabeth Braddon fait preuve d'une imagination débridée et m'avait amusée par son humour, ses personnages décalés et loufoques, son recul sur l'art de l'écrivain. De plus, elle y créait le personnage du détective qui allait connaître une grande vogue dans le roman policier.
Le secret de lady Audley est moins original mais bien mené et écrit d'une plume alerte: Lucy Graham, la très jolie gouvernante de de Mr et Mrs Dawson est une jeune fille simple, intelligente et vive, toujours de bonne humeur mais pauvre. Aussi quand Lord Audley la demande en mariage, elle n'hésite pas et accepte avec ravissement. Certes, elle n'aime pas son époux qui est plus vieux qu'elle et a une fille de son âge, Alicia, mais il est riche! D'autre part, il est en adoration devant elle et la fait vivre dans le luxe. Pourtant, quand Robert Audley, le neveu de son mari, vient leur rendre visite au château accompagné de son ami George Talboys qui rentre d'Australie, lady Audley a un comportement étrange. Elle refuse de les recevoir. George, très déprimé par le décès de sa femme qu'il a appris en rentrant en Angleterre, se conduit lui aussi d'une manière surprenante et insiste pour avoir une entrevue avec la châtelaine. Mais c'est seulement quand George disparaît après l'avoir rencontrée que Robert Audley va commencer à se poser des questions. Avocat de profession qui n'avait jamais exercé sa charge par nonchalance ou paresse, il se lance alors dans une enquête qui lui permettra de découvrir le secret de Lady Audley.
Le personnage de Robert Audley ne manque pas d'intérêt. Ce jeune homme si amorphe qu'il paraît dépourvu d'intelligence et de sentiments aux yeux des autres va sortir de sa léthargie pour sauver son ami. Il se révélera non seulement perspicace, courageux et énergique mais capable d'amitié vraie et découvrira l'amour.
Quant à l'intrigue, l'écrivain nous révèle rapidement qui est George Talboys et ce qui le lie à la jeune femme. Aussi Le secret de Lady Audley ne réside pas dans cette relation mais ailleurs... Le personnage de la jeune femme n'en est pas moins inquiétant même si je trouve sa reddition un peu rapide surtout au moment où elle avait décidé d'une stratégie qui la rendait encore plus machiavélique et qui pouvait aboutir. J'ai eu l'impression que la conclusion était un peu précipitée voire bâclée, ce qui m'a gênée.  Cependant le livre reste agréable à lire et inventif.