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samedi 29 juin 2013

Un livre/un film : Enigme n° 72



 
L'énigme du samedi est aujourd'hui encore sous le signe du mois anglais initié par Titine et Lou et Hilde. Mais comme Un livre/ un film s'arrête pendant les vacances, c'est aussi la dernière énigme du samedi. Bon été à tous!

Pour les nouveaux venus : De quoi s'agit-il?

Wens de En effeuillant le chrysanthème et moi-même, nous vous proposons, le samedi, un jeu sous forme d'énigme qui unit nos deux passions : La littérature et le cinéma! Il s'intitule : Un livre, Un film.
Chez Wens vous devez trouver le film et le réalisateur, chez moi le livre et l'auteur.
Consignes :  Vous pouvez donner vos réponses par mail que vous trouverez dans mon profil : Qui êtes-vous? et  me laisser un mot dans les commentaires sans révéler la réponse pour m'avertir de votre participation. Le résultat de l'énigme et la proclamation des vainqueurs seront donnés le Dimanche.
Pendant les vacances, nous arrêtons le jeu Un livre/ Un film.
 
Enigme 72
 
Cette comédie anglaise a été publiée en 1600 et met en scène deux couples dont l'un vit une histoire qui pourrait devenir tragique et l'autre est son pendant comique. Cette pièce qui explore le thème de l'erreur, est une des plus appréciées de son auteur par les spectateurs contemporains alors qu'elle a connu un échec quand elle a été jouée pour la première fois sur scène en 1598.


Don P.
-Voulez-vous de moi, madame?
B.
- Non, monseigneur. A moins d'avoir un autre mari pour les jours ouvrables : Votre Grâce est trop magnifique et ne peut se porter que le dimanche... mais je supplie votre Grâce de me pardonner, je suis née pour plaisanter sans rime et raison.
Don P.
- Votre silence est ce qui vous offenserait le plus, et la gaîté ce qui vous sied le mieux : à n'en pas douter vous êtes née dans une heure de joie.
B.
- Non, certes, monseigneur, car ma mère criait... mais il y avait une étoile qui dansait, et c'est sous cette étoile que je suis née.
 
 
 

jeudi 27 juin 2013

Kate Summerscale : L'affaire de Road Hill House

Le mois anglais de Lou et Titine

Le livre de Kate Summerscale L'affaire de Road Hill House est une lecture très intéressante. J'attendais un roman, je découvre un reportage historique selon les mots d'une journaliste, sur un meurtre commis en 1860 et analysé par une écrivaine du XXI ème siècle.

En 1860, en effet, le corps d'un petit garçon, Saville Kent, est retrouvé, la gorge tranchée. Qui a pu commettre un acte aussi barbare dans une maison qui était fermée pour la nuit et d'où l'on ne pouvait pénétrer de l'extérieur? Seul un membre de la maisonnée peut être coupable. Les soupçons se portent tour à tour sur la nurse, le père, la soeur, les domestiques… Le célèbre détective de Scotland Yard, Jack Witcher qui a réellement existé, mène l'enquête. Mais  l'affaire est passablement embrouillée…

Le roman est intéressant parce qu'il nous fait pénétrer dans l'intimité d'une famille de l'époque victorienne et révèle ainsi l'envers du décor, les atteintes à la morale sous la respectabilité, les cruautés ensevelies sous le secret, la vérité sous l'apparence. Dans un siècle où la famille est considérée comme le fondement inaltérable de la société, où le mariage est une institution sacrée, l'affaire de Road Hill House lève le voile et la réalité qu'elle reflète crée un séisme dans le pays. Kate Summerscale s'appuie sur  les archives du procès, les rapports des détectives qui se sont succédés, les articles des journaux, des documents précis qui explorent les moindres détails même ceux les plus intimes concernant la vie de la famille et de son entourage.
Les procédés policiers donnaient nécessairement dans le sordide : on mesurait les tours de poitrine, on examinait le linge de nuit en quête de sueur et de sang, on posait des questions indélicates à des jeunes femmes respectables.
Une image bien trouble de cette société apparaît dans laquelle l'homme peut non seulement pratiquer l'adultère avec la gouvernante de ses enfants mais encore reléguer sa femme à un rang subalterne, la priver de l'amour de ses enfants et la faire passer pour folle si elle le dérange dans sa vie sexuelle, un monde où la gouvernante devenue la nouvelle épouse peut privilégier ses propres enfants au détriment des premiers nés comme la marâtre des contes. Kate Sumerscale ressuscite ainsi les protagonistes de l'histoire en brossant des portraits psychologiques complexes et tourmentés où les zones d'ombre recouvrent bien trop souvent les espaces de clarté.
Un meurtre tel que celui-ci pouvait révéler ce qui avait pris forme à l'intérieur du foyer claquemuré de la classe moyenne. Il apparaissait que la famille cloîtrée, tant vantée par la société victorienne, pouvait entretenir un refoulement nocif et nauséabond des affects, un miasme tant sexuel qu'émotionnel.
En même temps, Kate Sumerscale nous fait découvrir les balbutiements des méthodes des enquêteurs, le vocabulaire qui se crée pour donner un nom à ses nouvelles formes d'investigation; elle nous fait pénétrer dans le milieu des détectives de Scotland Yard, un corps de police qui vient d'être créé et dont certains éléments, brillants, (comme Jack Witcher que Dickens admirait) vont servir de modèle à la vogue des grands détectives de l'histoire de la littérature.
Ce qui ajoute, en effet, à l'intérêt de ce reportage historique, c'est que l'écrivaine met en liaison les différents faits de cette enquête avec la littérature : Ainsi Witcher inspira à Collins le personnage du sergent Cuff, le détective de Pierre de lune, amateur de roses. La première Mrs Kent considérée comme folle est enfermée comme l'épouse de Rochester dans Jane Eyre mais peut-être ne l'est-elle pas comme La dame en blanc de Wilkie Collins? Dans Bleak House, Dickens imagine ce que ressent sir Leicester Deadlock lorsqu'on fouille son domicile, en référence avec ce qu'a dû éprouver Mr Kent, le père de Saville. Le secret de lady Audley d'Elizabeth  Braddon est directement inspiré de l'affaire de Road Hill House avec le personnage de la gouvernante ayant épousé un homme de qualité et  un assassinat brutal et mystérieux :
Ses personnages étaient fascinés par le travail du détective et, terrifiés à l'idée d'une révélation publique. L'histoire de Braddon formulait l'inquiétude et le bouleversement suscités par le meurtre de Saville Kent.
Le roman de Kate Sumerscale dresse donc à travers l'enquête policière et le mystère un  panorama de la société victorienne et de ses moeurs et un portrait réussi de personnes disparues depuis longtemps mais représentatifs de cette société; elle peint aussi d'une manière plus générale - l'affaire Saville  Kent passionnera Freud en 1907-  les tourments  et les noirceurs de l'âme humaine.

Lecture commune avec Lou, Miss Leo, Valou, Adalana, Syl, Titine

Dasola



Challenge d'Aymeline

dimanche 23 juin 2013

Raison et sentiment : Les détracteurs de Jane Austen ou pourquoi ils ne l'aiment pas ?

Le mois anglais initié par Titine et Lou
La réponse à l'énigme d'hier est : Raison et sentiment de Jane Austen.          

Jane Austen

 En lisant les commentaires laissés hier pour l'énigme du samedi, je m'aperçois combien les avis sur Jane Austen sont partagés : Il y a ses admirateurs inconditionnels (et j'en fais partie) et ses détracteurs qui ne l'aiment pas mais avouent parfois ne pas avoir lu ses livres!
Je me suis demandée pourquoi ce rejet d'une des plus grandes écrivaines de la littérature anglaise, admirée par rien moins que Virginia Woolf et Henry James… pourquoi ces préjugés?

Les films qui adaptent son oeuvre en sont peut-être en grande partie responsables car ils ne rendent qu'une infime partie du talent de Jane Austen. En fait, ils s'en tiennent à l'histoire et, pour les meilleurs, rendent compte du sens du roman mais en même temps ils véhiculent une image lisse, celle de jolies jeunes filles amoureuses malheureuses mais qui finiront par connaître le bonheur. Des images bien léchées, de beaux costumes, de beaux acteurs dont les spectatrices tombent amoureuses, et voilà le tour est joué. On aime Jane Austen mais pour de mauvaises raisons ou en tous cas pas pour ce qu'elle est vraiment en tant qu'écrivain.
Et bien si l'on croit que Jane Austen est juste un auteur de romans à l'eau de rose, on se met le doigt dans l'oeil jusqu'au coude!

Raison et sentiment de Ang Lee

Jane Austen  au début du XIX siècle constitue un trait d'union entre la littérature du XVIII siècle  et le roman moderne. Elle n'appartient pas au courant romantique et semble un peu un OLNI (objet littéraire non identifié) dans ce début du XIX ème siècle.
Voilà une jeune écrivaine, Jane,  qui va parler bien sûr de la condition féminine dans ses romans. Et quel est le seul  avenir de la femme à son époque? C'est évidemment le mariage puisque celle-ci n'a aucun autre droit, aucun autre espoir. Là, ses détracteurs pourront dire que l'univers de Jane Austen est étriqué et qu'elle ne raconte que des histoires d'amour! Et c'est vrai, l'on ne parle bien que de ce que l'on connaît!
Mais Jane Austen possède un talent subtil pour peindre les travers de sa société et de ses contemporains; elle manie l'ironie sans avoir l'air d'y toucher, sans paraître porter de jugement; c'est un art du sous-entendu, c'est malicieux, vivant, piquant, mais lorsqu'elle épingle quelqu'un, on peut dire que le trait est féroce et que la personne qui passe sous sa plume n'en réchappe pas!  Les vieilles dames ridicules, égoïstes et sans intelligence comme Mrs Bennett, ou les pasteurs pleins de componction, de servilité et de sottise en sont un exemple. Ces figures secondaires sont de vrais personnages de comédie. Quant aux bourgeois nantis ou aux nobles qui n'acceptent de considérer leurs voisins comme leurs égaux que lorsqu'ils se sont renseignés sur leur fortune, ils ne sont pas mieux traités, ainsi le frère de Mrs Dashwood qui fait serment à son père, sur son lit de mort, de veiller au confort de sa mère et de ses soeurs puis les laisse dans le dénuement. Une société où l'argent régit les rapports sociaux et où l'apparence prime sur la vérité, voilà ce qui apparaît dans l'oeuvre de Jane Austen. Sous la raillerie, le pessimisme! La plume sait traquer tous les défauts de ses semblables et nous donner à voir la comédie humaine :  bassesse, mesquinerie, avarice, frivolité, orgueil et elle le fait avec l'élégance dont elle coutumière mais un brin de cruauté sans hésiter à appuyer là où ça fait mal!

 Virginia Woolf  rapporte à ce propos les paroles d'une dame qui a rencontré Jane :

Ensuite vient l'amie .... qui lui rend visite et selon qui  "elle  (Jane) s'est pétrifiée dans le bonheur du célibat pour devenir le plus bel exemple de raideur perpendiculaire, méticuleuse et taciturne qui ait jamais existé; jusqu'à ce que Orgueil et préjugés ait montré quel diamant précieux était caché dans ce fourreau inflexible, on ne la remarquait pas plus en société qu'on ne remarque un tisonnier ou un pare-feu... Il en va tout autrement maintenant, poursuit la bonne dame, c'est toujours un tisonnier, mais un tisonnier dont a peur. Un bel esprit, un dessinateur de caractères qui ne parle pas est bien terrifiant en vérité!"

En même temps, sous l'humour, sous l'ironie, Jane Austen est une moraliste (sans jamais être moralisatrice) et son propos est sérieux et parfois grave. Ses romans sont une réflexion sur la manière dont l'être humain se laisse prendre au piège des préjugés sociaux et religieux qui parviennent à  fausser le jugement. Le personnage perd sa lucidité, et résiste à la force de ses sentiments comme Elizabeth Bennet et Darcy dans Orgueil et préjugés. Les héros de Jane Austen sont souvent aveuglés, qui vont apprendre à leurs dépens ce qu'est la réalité. S'ils se font une idée fausse de la vie, ils le paieront par beaucoup de souffrances et la perte de leurs illusions. C'est le cas de Catherine Morland dans Northanger abbey ou de Marianne Dashwood dans Raison et sentiments. Certes,  la société de Jane Austen et la condition féminine ont bien changé depuis Jane Austen, mais les caractères et les sentiments, eux, sont toujours universels.

Jane Austen rappelle le XVIII français, Voltaire pour le trait satirique, Marivaux pour la profondeur et la subtilité dans l'analyse des sentiments. Marivaux aussi subit les mêmes préjugés que Jane Austen. On le dit léger, mais l'on ne voit pas sous le marivaudage brillant et plein d'humour, la cruauté et la perte des illusions. Tous les deux méritent une lecture plus attentive. On n'aborde pas Jane Austen avec des préjugés ou à la va-vite, on la savoure sinon on risque de passer à côté de l'essentiel.

Je vous livre ici ce que m'a écrit Nanou (blog rue de Siam)  à ce propos :

J'ai découvert Jane Austen assez tardivement, grâce à l'engouement de la blogosphère. J'avais beaucoup de préjugés sur elle et j'ai été très surprise lorsque j'ai lu Orgueil et préjugés et Persuasion. Je ne comprends plus maintenant comment j'ai pu être une lectrice pendant environ 40 ans sans avoir lu Jane Austen ! Cela dit, j'ai tenté de la faire lire à ma dernière fille de 16 ans, mais pour l'instant, je n'ai pas réussi à la convaincre !

Je me souviens avoir fait la même erreur avec ma fille qui adore Jane Austen maintenant. Il ne faut pas l'aborder trop jeune car -contrairement aux préjugés- c'est un auteur difficile si l'on veut en tirer la substantifique moelle.!

Je reprends ici ce que j'avais écrit il y a quelque temps sur Raison et sentiments :



Dans Sense et Sensibility (Raison et Sentiment) Marianne Dashwood la jeune héroïne incarne le sentiment  alors que sa soeur Elinor représente la raison. Les deux jeunes filles sont pourtant toutes deux pleines de sensibilité mais l'une, Elinor  pense que celle-ci ne doit pas nous gouverner. Marianne apprend à ses dépens, lorsqu'elle s'enflamme pour le brillant Willoughby, que le mariage est un  marché où les considérations financières ont plus d'importance que l'amour. Le sentiment ne doit pas prendre le pas sur la raison. Marianne épousera un homme qu'elle considérait comme vieux au début du roman, le colonel Brandon, mais dont elle découvre la valeur morale. Un amour fondé sur le respect et l'estime. La raison triomphe ... à l'opposé de la passion romantique qui emporte tout sur son passage. C'est un dénouement assez pessimiste et désabusé, une morale un peu triste et résignée. Et vous avez dit "eau de rose"?

Editions archipoche : Raison et sentiments et les autres romans de Jane Austen

La réponse à l'énigme de ce samedi 22 Juin :


 
  l'énigme n°71


Le roman : Raison et sentiment de jane Austen


le film : Raison et sentiment de Ang Lee


Les vainqueurs du jour  : Asphodèle, Dasola, Eeguab, Keisha, Nanou, Pierrot Bâton, Somaja. ..  Merci à tous et à toutes et bon dimanche!

samedi 22 juin 2013

Un livre/Un film : Enigme 71




 
L'énigme du samedi est aujourd'hui sous le signe du mois anglais initié par Titine et Lou et Hilde.
Pour les nouveaux venus : De quoi s'agit-il?

Wens de En effeuillant le chrysanthème et moi-même, nous vous proposons, le samedi, un jeu sous forme d'énigme qui unit nos deux passions : La littérature et le cinéma! Il s'intitule : Un livre, Un film.
Chez Wens vous devez trouver le film et le réalisateur, chez moi le livre et l'auteur.
Consignes :  Vous pouvez donner vos réponses par mail que vous trouverez dans mon profil : Qui êtes-vous? et  me laisser un mot dans les commentaires sans révéler la réponse pour m'avertir de votre participation. Le résultat de l'énigme et la proclamation des vainqueurs seront donnés le Dimanche.
Pendant les vacances, nous arrêtons le jeu Un livre/ Un film.
 
Enigme 71
 
Le titre de ce roman du début du XIX siècle écrit par une romancière anglaise avait pour titre deux prénoms qui ont été remplacés par deux mots opposant deux manières d'appréhender le monde. Quel est ce titre et qui en est l'auteur?

... cette fille aînée dont les conseils furent si efficaces, possédait une vigueur de compréhension et une froideur de jugement qui la qualifiaient, bien qu’elle n’eût que dix-neuf ans, pour être la conseillère de sa mère, et lui permettaient de neutraliser à leur avantage à tous, cette ardeur d’esprit chez Mrs....  qui eût en général conduit nécessairement à quelque imprudence. Elle avait excellent cœur, son caractère était affectueux, et ses sentiments étaient vifs; mais elle savait les gouverner; c’était là une connaissance que sa mère avait encore à acquérir, et que l’une de ses sœur était résolue à ne jamais se faire enseigner.

jeudi 20 juin 2013

Anne Brontë : La dame du manoir de Wildfell Hall





Quatrième de couverture : La dame du manoir de Wildfell Hall de Anne Brontë
 L'arrivée de Mrs Helen Graham, la nouvelle locataire du manoir de Wildfell, bouleverse la vie de Gilbert Markham, jeune cultivateur.
Qui est cette mystérieuse artiste, qui se dit veuve et vit seule avec son jeune fils? Quel lourd secret cache-t-elle? Sa venue alimente les rumeurs des villageois et ne laisse pas Gilbert insensible. Cependant, la famille de ce dernier désapprouve leur union et lui-même commence à douter de Mrs Graham... Quel drame s'obstine-t-elle à lui cacher ? Et pourquoi son voisin, Frederick Lawrence, veille-t-il si jalousement sur elle?
Publié en 1848, La Dame du manoir de Wildfell analyse la place des femmes dans la société victorienne.

Décidément les soeurs Brontë  ont toutes du talent et ce n'est pas le roman d' Anne La dame du manoir de Wildfell Hall qui me fera changer d'avis. D'Anne Brontë, j'avais lu Agnès Grey, un premier roman prometteur. Celui-ci qui est le second, paru en 1848, est bien supérieur, plus élaboré, et, s'il ne se hisse pas au rang de chef d'oeuvre comme Les Hauts de Hurlevent et  Jane Eyre, il faut lui reconnaître de solides qualités. Il n'y aura pas de troisième roman. Anne meurt à son tour de la tuberculose en 1849. Si La dame du manoir connut un immense succès, il provoqua un scandale car il montre une jeune femme mariée à un homme alcoolique et dépravé qui décide de se séparer de son mari, se heurtant ainsi aux lois sociales et religieuses de la famille victorienne. A la mort d'Anne, Charlotte, elle-même, empêchera la republication de ce roman, ce qui en dit long sur le caractère et les préjugés de la "grande" soeur.  Emily meurt en Décembre 1848. Heureusement que Charlotte ne nous a pas fait "ça" avec Les Hauts de Hurlevent!

 
Anne Brontë dessin de Charlotte

La technique romanesque

Dès son deuxième roman, Anne Brontë maîtrise la technique romanesque à un tel point qu'elle ne suit pas le schéma narratif habituel et multiplie les points de vue  :

Gilbert Markham, maître d'une grosse ferme, raconte son histoire à un ami. Il décrit la jeune dame du manoir de Wildfell Hall, Helen Graham, qui vient d'arriver dans le pays et c'est par ce regard extérieur - jamais neutre pourtant - que nous l'apercevons. Il commence d'abord par la trouver antipathique puis peu à peu tombe sous son charme. La jeune femme  nous apparaît donc comme un être mystérieux qui veille jalousement à ce que l'on ne sache rien de son passé. Le lecteur est placé à l'intérieur  de la conscience du jeune homme et suit de près l'évolution de ses sentiments, l'admiration, l'amour puis les doutes qui l'assaillent, la jalousie qui va finir par le dévorer. A travers l'observation du jeune homme apparaît aussi toute une société campagnarde, sa mère, sa soeur et son frère, le pasteur, Michaël Millward et sa jeune fille à marier, toute une société avec ses faiblesses, ses petitesses d'esprit, son amour des commérages et des médisances qui ne permettent pas à Helen Graham de vivre en paix .

La seconde partie du roman nous permet de découvrir le secret de la jeune femme par l'intermédiaire de son journal qu'elle confie à Gilbert pour se disculper. Il s'agit d'un roman dans le roman, une oeuvre en miroir, qui nous permet la fois de connaître son passé mais aussi de voir, de son point de vue, le récit conté par Gilbert à son ami. Une sorte de reflet inversé des personnages et des évènements. Le jeune homme reprend ensuite le récit entrecoupé cette fois par des lettres d'Helen qui ne sont pas toujours complètes, ce qui maintient des zones d'ombre autour du personnage. On voit que la technique d'Anne est extrêmement complexe et les personnages et l'intrigue en paraissent plus profonds, comme mis en abyme dans un miroir.

Les trois soeurs Brontë par Branwell


 Le féminisme de La dame du manoir de Wildfell Hall

Le roman d'Anne Brontë est résolument féministe. Elle dénonce une société où la femme n'a aucun droit, aucune liberté. Helen est obligée de fuir son mari avec son enfant  et  de se cacher si elle veut conserver le droit de garder son fils. Anne s'éloigne du romantisme exacerbé d'Emilie, du romantisme gothique de la Charlotte de Jane Eyre.  Le frère d'Anne, Branwell, a servi de modèle au personnage du mari de Helen, Arthur Huntington, et elle sait de quoi elle parle quand elle décrit les scènes de beuverie et d'adultère. Mais Anne a la finesse de ne pas tomber dans le manichéisme. Arthur, dit-elle,"n'est pas réellement mauvais" mais il se laisse aller à son goût du plaisir, à sa veulerie.Tout en écrivant le premier roman féministe et en dénonçant l'asservissement de l'épouse à son mari,  Anne Brontë montre aussi les perversions et les roueries des femmes à travers la figure d'Annabella, la maîtresse d'Arthur . Elle décrit aussi les faiblesses d'Helen qui a choisi Arthur pour époux alors qu'elle savait qui il était. La femme est donc responsable de ses propres choix. 

Pour ma part, j'ai trouvé Helen Graham un peu trop moralisatrice. Elle épouse Arthur malgré ses défauts parce qu'elle entend le réformer. Elle est souvent donneuse de leçon et par là même on comprend que son mari la fuit et la laisse à la campagne quand il va faire la noce à Londres!  Mais bien entendu, c'est une opinion personnelle. Anne Brontë est fille de pasteur, elle souffre trop de voir son frère détruire toutes ses capacités intellectuelles et sa santé physique . Elle veut donc montrer la vérité nue, dans toute son horreur, pour  la réformer : Si je puis empêcher la chute d'un jeune homme trop léger ou d'une jeune fille trop étourdie, alors je n'aurais pas écrit en vain, écrit-elle. Le roman est publié en Juin 1848.  Branwell meurt, alcoolique et tuberculeux, en septembre 1848.

Un style d'homme?
Le  roman  est écrit d'une plume ferme, sobre qui évite l'emphase et le pathétique et qui est même assez brutale. Un style d'homme? Le fait ce soit une femme qui ait écrit ainsi, avec autant de réalisme, sur l'alcoolisme et la débauche heurte d'autant plus les mentalités de l'époque victorienne.  Alors, laissons la parole à Anne Brontë qui répond ainsi à ses détracteurs :  Je suis convaincue que lorsqu'un livre est bon, il l'est quelque soit le sexe de son auteur. Tous les romans sont ou devraient être écrits pour les hommes comme pour les femmes. J'ai de la peine à concevoir comment un homme pourrait se permettre d'écrire quoi que ce soit qui puisse être véritablement déshonorant pour une femme, ou pourquoi une femme devait être censurée pour avoir écrit quoi que ce soit qui puisse être considéré comme approprié ou bienséant pour un homme.
Lecture commune  avec Gaëlle  ICI

Avec Alexandra

Chez Aymeline

lundi 17 juin 2013

Virginia Woolf : Nouvelles La robe neuve et la dame au miroir..




J'ai, sur mes étagères, depuis de nombreuses années, un volume très épais contenant plusieurs romans et nouvelles de Virginia Woolf. Il comporte sur la tranche le portrait de l'écrivaine, un visage aux traits fins, au nez droit comme découpé au cutter, de lourds cheveux noirs ramassés sur la nuque. Je l'ai ouvert plusieurs fois, j'ai essayé de lire un de ses romans, en vain.  On dit qu'un livre acheté, rangé sur les étagères de sa bibliothèque, est déjà un livre lu! Le premiers pas est fait… le reste suivra! 
 Ce jour est arrivé! A l'occasion du mois anglais, lancé par Lou et Titine, en Juin, je me suis inscrite pour la lecture commune d'un des romans de la  grande dame. Mais comme j'ai peur de Virginia Woolf, j'ai décidé de commencer doucement, à petites doses, par quelques unes de ses nouvelles afin de l'apprivoiser ou plutôt de m'apprivoiser… à elle!


Marcel Proust et Virginia Woolf
Je me suis toujours demandé pourquoi je pouvais lire Marcel Proust alors que les livres de Virgina Woolf me tombent des mains. Tous deux sont des écrivains réputés difficiles et tous deux écrivent sur la mémoire et sur le temps; les similitudes entre eux sont évidentes. Quant aux différences,  Pierre Nolon dans la préface qu'il a rédigée pour la collection classiques modernes du livre de poche affirme :
Mais la recherche proustienne s'attache à décrire avec un réalisme minutieux et pour ainsi dire pas à pas le cheminement de la mémoire. De son côté Virginia Woolf marque d'avantage l'impression qui fait naître le surgissement du souvenir et la façon toujours subjective dont ce surgissement affecte les rapports du personnage avec la réalité.

 Voilà qui n'est pas pourtant pas pour me déplaire! Ainsi dans la nouvelle La marque sur un mur  la narratrice (ou je devrais dire plutôt l'observatrice puisqu'il n'y a pas de narration proprement dite) remarque une tache sur le mur. C'est à partir de ces interrogations sur l'origine de cette marque que sa mémoire ressuscite ce moment précis du mois de janvier où elle a fait cette observation, le feu dans le cheminée, les chrysanthèmes dans le vase, la fumée de la cigarette.. et qu'elle remonte aux anciens propriétaires de la maison.

 La robe neuve et  La dame du miroir
Parmi les nouvelles que j'ai lues, je veux parler en détail de ces deux textes que j'ai trouvées éblouissants par le style et la technique :

La robe neuve  a été été écrite au moment où l'écrivain achevait la rédaction Mrs Dalloway. Mabel Waring  se rend à la réception de Clarissa Dalloway vêtue d'une robe neuve  qu'elle a fait faire pour cette occasion et qui est parfaitement hideuse et démodée. Elle prend conscience de l'image qu'elle donne d'elle-même en s'apercevant dans un miroir. Nous partageons ses angoisses et son humiliation face aux réactions des personnes qui la côtoient et la méprisent, nous ressentons sa solitude en pénétrant dans ses pensées intimes. A travers Mabel, Virginia Woolf ironise sur son apparence physique et son propre manque d'élégance. Dans La dame dans le miroir, les lieux et le personnage d'Isabella Tyson sont observés à travers un miroir. Mais lorsque la femme s'approche, elle apparaît telle qu'elle est dans ce miroir, dans sa vérité nue, dépouillée de l'apparence trompeuse.

L'impressionnisme de Virginia Woolf

Pierre Signac :  l'eau
Pierre Nolon poursuit : La relation est toujours vécue sur un mode insistant, parfois envahissant et obsessionnel. Ce choix commande la manière dont Virginia Woolf décrit le processus; elle pousse la technique impressionniste au point de la rendre pointilliste, elliptique et même, dans certains cas, déroutante.

Ces deux nouvelles ont en commun le miroir et illustrent très bien la technique impressionniste de Woolf. Mabel, tout en parlant, s'aperçoit "dans le miroir rond par petits fragments de robe jaune, grands comme des têtards ou des boutons de bottines" et son interlocutrice est saisie dans le même miroir comme "un bouton noir". La  description, effectivement, est poussée jusqu'au pointillisme; on pense au tableau de Seurat ou de Signac, ou au Monet de la dernière époque, à ces taches de lumières et de couleurs qui finissent par se rassembler pour former une image.  Mabel ainsi réduite à la  taille d'une piécette de trois pences… prend conscience de la disproportion entre les sentiments extrêmes qu'elle éprouve humiliation, souffrance, dégoût de soi-même et  elle-même, cette "chose" insignifiante qu'elle représente. Le miroir l'isole, la coupe des autres,  elle est "débranchée" face à  l'autre femme "détachée", toutes deux absentes l'une à l'autre, murées dans leur solitude.
 Mais l'impressionnisme ne réside pas seulement dans la description, elle est aussi dans l'éclatement des pensées intérieures qui partent dans tous les sens, qui reviennent lancinantes, se répètent, se fragmentent, tout en dressant un état intérieur du personnage. On a donc simultanément l'image extérieure vue dans le miroir et l'intériorité du personnage livré par les pensées. Avec La dame dans le miroir, Virginia Woolf pousse encore plus loin son exploitation du miroir qui cette fois-ci morcelle l'espace. Le miroir en effet, reflète le hall dans lequel il est placé mais il nous projette à l'extérieur, en reflétant aussi le jardin, l'allée, les tournesols.. Un manière de rendre sensible ce hors champ et de nous amener à Isabella qui n'est pas à l'intérieur mais à l'extérieur. Virginia Woolf a aussi recours à une technique qui n'est plus picturale mais photographique : les objets posées sur la table du hall sont d'abord vues comme "des plaquettes d'albâtre veinées de rose et de gris", flous, puis comme par un procédé de mise au point de l'objectif,  l'image se précise, les plaquettes deviennent des lettres.

Les insectes et les végétaux

Frantz H; Desh  Le kimono bleu
 Je me suis aperçue aussi que les insectes comme les végétaux tiennent une grande place dans les nouvelles de Virginia Woolf puisqu'elle se sert d'eux pour transmettre un état de conscience. Ainsi pendant la réception de Mrs Dalloway, Mabel est obsédée par l'image d'une mouche qui tombe dans une soucoupe de lait et cherche à s'en extraire jusqu'au moment où elle s'aperçoit qu'elle est cette mouche, symbole de la souffrance et de la mort mais aussi de l'inanité de la vie : C'est elle-même qu'elle voyait ainsi : elle était une mouche, mais les autres étaient des libellules et des papillons. Dans Kew Gardens, c'est la libellule qui signifie le désir amoureux et l'escargot dans son obstination à se frayer un chemin et à contourner les obstacles représente l'homme et sa lutte quotidienne et absurde et aussi son infini petitesse par rapport à l'univers. Le Volubilis qui cache la misère d'un vieux mur incarne Isabella Tyson mais lorsque le miroir la révèle, le volubilis disparaît et il ne reste plus que le mur nu et sale. Pour Mabel, le souvenir d'une "grande touffe d'ajoncs pâles emmêlés se détachant comme un faisceau de hallebardes" entraîne l'image  des "sagaies" qu'elle reçoit en pleine poitrine et qui sont le mépris, la méchanceté, les moqueries des invités à son égard.

Le thème du miroir

Pierre Bonnard : Miroir et table de toilette.
Solitude, détachement du monde, procédé impressionniste pour rendre compte du réel, le thème du miroir a encore bien d'autres significations. Il est aussi un jeu de mots sur le thème de la réflection/réflexion ( en anglais : reflection) puisqu'il amène à des découvertes sur soi-même :  celui de la dualité de l'être, de la vérité et de l'apparence. L'image que le miroir renvoie à Mabel quand elle est seule avec lui, est celle d'un jeune femme "ravissante, gris pâle, au sourire énigmatique", en fait "sa réalité profonde, essentielle." Mais la vérité d'Isabella , elle, se révèle toute différente : Debout, nue sous cette lumière impitoyable. Et il n'y avait rien. Isabella était totalement vide.  Enfin le miroir comme l'eau symbolise la mort, omniprésente dans l'oeuvre : Regardant sans cesse dans le miroir, se plongeant dans cette dévastatrice flaque d'eau, elle se savait faible et vacillante créature, condamnée, méprisée, reléguée en eau morte.
 Il y aurait encore beaucoup à dire sur ces nouvelles mais  je vais m'arrêter là!
A part Objets massifs, nouvelle que j'ai jugée intéressante mais moins originale, tous ces écrits sont très riches, d'une grande subtilité. La beauté et la poésie de l'écriture, la finesse de la technique de narration révèlent un grand talent. Un brillant exercice de style! Mais à l'échelle d'un roman, il me reste à découvrir si je pourrai m'intéresser à des personnages qui semblent souvent évanescents, en dehors de la vie, uniquement tournés vers leur nombril. C'est ce que je vais découvrir bientôt en me lançant, encore une fois, dans un roman "woolfien".

 Et pour finir une citation : ce beau poème en prose de Bleu et vert

Vert

Monet : Giverny

Les doigts de verre dardent leurs pointes vers le sol. La lumière coule sur le verre, s’étale en flaque verte. Et tout au long du jour les dix doigts du lustre lâchent des gouttes vertes sur le marbre. Plumes de perroquets – leurs cris rauques – feuilles acérées des palmes – vertes aussi ; vertes aiguilles scintillant au soleil. Mais le verre trempé sur le marbre s’égoutte, sur les sables du désert les flaques s’alanguissent, traversées par le pas incertain des chameaux ; sur le marbre, les flaques s’installent, cernées de joncs, semées de blanches floraisons, traversées par le bond des grenouilles; et la nuit, les étoiles s’y logent, intactes. Le crépuscule balaie d’ombres vertes la cheminée; l’océan s’ébouriffe. Pas une embarcation ; sous le ciel vide, le vain clapotis des vagues. La nuit, les aiguilles distillent du bleu ; le vert s’est estompé.

dimanche 16 juin 2013

Thomas Hardy : Jude l'Obscur

Le mois anglais initié par Lou et Titine

Thomas Hardy publie le roman Jude l'Obscur, un roman pessimiste, l'un  des plus noirs de toute son oeuvre, en 1895. Le livre fait scandale. On accuse Hardy d'immoralité et sa critique de la religion, de l'institution du mariage, soulèvent l'indignation à tel point que l'évêque d'Exeter fait publiquement brûler le livre.

L'histoire
Jude Fawley, un orphelin vit à la campagne; il est très marqué par son instituteur qui lui ouvre les portes du savoir et lui donne l'ambition de continuer ses études. Il apprend tout seul le latin et le grec pour partir étudier à l'université mais il tombe dans les filets de la séduisante Arabella qui se dit enceinte et l'oblige à l'épouser. Le mariage est un échec, la jeune femme part en Australie et Jude à la ville pour y poursuivre ses études, cependant, il ne peut entrer à l'université qui reste fermée à un autodidacte sans le sou. Il devient tailleur de pierre et rencontre Sue Bridehead, sa cousine, qui est contre le mariage. Les deux jeunes gens vont s'aimer et décider de vivre ensemble mais un couple non-marié constitue un scandale dans la société victorienne puritaine. Ils devront en subir les tragiques conséquences.

Jude l'Obscur
Si Tess d'Uberville porte le sous-titre : Une femme pure, Jude est qualifié d'obscur au sens de humble, sans notoriété. Car c'est bien de cela qu'il s'agit! Jude est condamné dès le départ par sa naissance "obscure" et toutes les qualités qu'il manifeste, son intelligence, sa soif de savoir, ses capacités intellectuelles, son courage ne sont rien à côté de ce fait : l'on ne peut sortir de sa classe sociale. Ceux qui ont le pouvoir et l'argent font barrière.
L'autre tort de Jude, c'est de céder au désir sexuel dans une société qui réprouve le corps et la sexualité. En ayant des relations en dehors du mariage avec Arabella, il est obligé de l'épouser sans amour.  En divorçant puis en vivant sans être marié avec Sue, il se perd complètement.  Etre mis au ban de la société, c'est en effet, se condamner à ne plus trouver de travail ni de logement. La misère s'ajoute donc à l'isolement et à la souffrance morale. Ce sont donc les moeurs sexuelles de l'époque victorienne, le puritanisme et la rigidité de la société, le poids de la religion que dénonce Thomas Hardy. Ses positions contre le mariage et pour l'amour libre échappant aux notions d'obligation, sa critique sans concession de la religion, témoignent d'un esprit ouvert et libre, très en avance sur son temps comme ses personnages.

Sue Bridehead
Sue Bridehead est un personnage complexe; on comprend qu'elle ait provoqué le scandale et pas seulement à la fin du XIX siècle. C'est une femme extrêmement intelligente et instruite, d'esprit ouvert. Par la pensée, elle est très en avance sur les moeurs de son époque et elle cherche à s'affranchir des règles que la société impose aux femmes comme l'obligation du mariage. Mais la pression sociale, morale et religieuse qui s'exerce sur elle, la rend vulnérable. Mise au ban de la société parce qu'elle vit en femme libre, elle finira par être rattrapée par les préjugés et la morale. En se tournant vers la religion et en se persuadant qu'elle est coupable, qu'elle a vécu dans le péché, elle aliène ce qui faisait sa personnalité. Elle prouve tout comme le personnage de Jude  qu'il n'y a pas de possibilité pour la femme comme pour l'homme d'échapper au déterminisme social et à la religion présentée comme une drogue et une déchéance quand elle s'oppose à la liberté individuelle et qu'elle obscurcit les esprits.

Un immense roman, un des plus poignants, des plus cruels, écrit par ce grand auteur qui est un de mes écrivains préférés.

Voir Editions Archipel pour Jude l'Obscur


 
 Résultat de l'énigme n°70


Le roman Jude l'obscur de Thomas Hardy

le film : Jude l'obscur de Michale Winterbottom; l'actrice kate Winslet

Les vainqueurs du jour  : Aifelle, Asphodèle, Dasola, Pierrot Bâton, Marie Josée, Nanou, Somaja, Syl...  Merci à tous et à toutes et bon dimanche!




Chez Aymeline



samedi 15 juin 2013

Un livre/Un film : Enigme n°70 sous le signe du mois anglais




L'énigme du samedi est aujourd'hui sous le signe du mois anglais initié par Titine et Lou et Hilde.



Pour les nouveaux venus : De quoi s'agit-il?

Wens de En effeuillant le chrysanthème et moi-même, nous vous proposons, le samedi, un jeu sous forme d'énigme qui unit nos deux passions : La littérature et le cinéma! Il s'intitule : Un livre, Un film.
Chez Wens vous devez trouver le film et le réalisateur, chez moi le livre et l'auteur.
Consignes :  Vous pouvez donner vos réponses par mail que vous trouverez dans mon profil : Qui êtes-vous? et  me laisser un mot dans les commentaires sans révéler la réponse pour m'avertir de votre participation. Le résultat de l'énigme et la proclamation des vainqueurs seront donnés le Dimanche.
Pendant les vacances, nous arrêtons le jeu Un livre/ Un film.
Enigme 70

Ce roman est écrit par un écrivain anglais de l'époque victorienne qui nous décrit la condition ouvrière à son époque, la misère et la fatalité  auxquelles les hommes du peuple ne peuvent échapper. Quels sont le nom de l'auteur, le titre du livre?

Se trouvant le point de mire de tous ces gens curieux et railleurs, (...) il n'était pas disposé à reculer devant une déclaration franche dont il n'avait aucune raison de rougir. Bientôt il se sentit poussé à dire d'une voix forte à la foule qui l'écoutait:
- "C'est une question difficile mes amis, pour tous les jeunes gens -- question à laquelle je me suis attaqué, à laquelle des milliers d'autres réfléchissent actuellement, en ces temps nouveaux. Doit-on suivre aveuglément la voie dans laquelle on se trouve, sans considérer ses dons personnels, ou, au contraire, réfléchir aux aptitudes, aux goûts que l'on peut avoir, et changer la direction de sa vie? C'est ce que j'ai tenté de faire et j'ai échoué. Mais cet échec ne prouve pas que j'ai eu tort, je ne saurais l'admettre. De même qu'un succès n'aurait pas prouvé que j'avais eu raison : c'est ainsi pourtant que nous jugeons souvent de ces efforts, non d'après la valeur essentielle, mais d'après leur résultat accidentel

j'ajoute un indice, la photo de l'actrice dans le rôle féminin du film

l'actrice est devenue célèbre après ce rôle

mercredi 12 juin 2013

Françoise Guérin : A la vue et la mort


Avec A la vue, à la mort, je découvre le livre qui précède Cherche jeunes filles à croquer, lu récemment, où j'avais fait connaissance à la fois du commandant Lanester et de Françoise Guérin, son auteur.

Dans A la vue, à la mort,  j'apprends ce qui explique la fragilité du commandant Lanester et pourquoi il suit une analyse avec Jacinthe Bergeret  : prénom fleuri pour une psy et qui  lui va comme un gant,   parfum sucré, un peu frivole, à l'inverse de sa personnalité.

Le récit nous amène à la suite du commandant Lanester et de son équipe sur les traces d'un tueur en série surnommé Caïn, allusion au dessin d'un oeil grand ouvert qu'il trace sur le lieu des crimes. Quand nous ouvrons le livre, l'enquête a commencé depuis un moment, deux cadavres avant...  mais nous, lecteurs, nous arrivons sur place seulement après le troisième, celui de trop pour Lanester qui en  perd…. la vue! Devenir aveugle pour des raisons fonctionnelles, alors qu'il n'a aucune lésion de l'oeil, est un coup dur pour notre personnage! Il va bien falloir qu'il accepte de fouiller dans son passé pour chercher à comprendre ce qui lui arrive. Nous sommes donc amenés à suivre en parallèle l'enquête policière et l'enquête psychologique qui permet de remonter dans l'enfance d'Eric Lanester mais aussi de son frère Xavier. Au fur et à mesure que nous découvrons ce qu'ils ont vécu nous sommes en mesure de mieux comprendre la cécité de Lanester. Mais pourquoi Caïn semble-il s'adresser particulièrement à lui? Comment expliquer les similitudes qui existent entre la mise en scène voulue par Caïn et ce qu'a vécu Lanester?

Françoise Guérin nous entraîne donc dans une histoire captivante où nous nous intéressons bien sûr à l'histoire policière mais tout autant à l'histoire de Lanaster : Comment recouvrera-t-il la vue? Sera-t-il un jour guéri de son enfance? Retrouvera-t-il son frère Xavier, malade mental, qui a disparu?  Les liens entre les deux frères sont-ils entièrement rompus? Va-t-il tomber amoureux de Léo? Ce sont toutes les questions que nous nous posons.

 Les personnages sont attachants parce qu'il y a, en eux, beaucoup de souffrance et de tristesse. Le roman parle de solitude, celle Lanaster et de son frère, du chauffeur polonais Jacek, (j'ai beaucoup aimé ce personnage et son chat Walesa ), celle de Bazin aussi et même de l'assassin. Ils sont tous secoués par la vie, vivent parfois à côté les uns des autres, sans se connaître vraiment et pourtant l'amitié et la solidarité se manifestent en cas de coup dur. Si vous ajoutez que l'humour est toujours présent et savoureux, vous comprendrez que ce livre m'a procuré un grand plaisir de lecture. Je voulais proposer que nous, lectrices, nous signassions (et oui, imparfait du subjonctif quand on s'adresse à un écrivain)  une pétition à envoyer à Françoise Guérin : Réclamons d'urgence la suite des aventures de Lanester! Mais j'ai appris chez Kathel ICI,  dans un commentaire, que c'est inutile : elle est déjà en train de l'écrire!

Picasso : la mère et l'enfant

Dans le roman, Eric Lanester trouve enfin le temps  de visiter le musée Picasso. Il s'arrête longuement devant un tableau qui lui rappelle sa mère et son frère Xavier. Je me suis demandée car la description me paraît bien correspondre si ce tableau était celui-là :

La mère et l'enfant de Pablo Picasso

Voir aussi les billets de   KeishaClara

Merci à Françoise Guérin pour le prêt de ce livre voyageur paru  aux Editions du Masque


PS : Je lis sur le site de Françoise Guérin que Cherche jeunes filles à Croquer est finaliste avec cinq autres titres du Prix Sang pour Sang Polar 2013 qui sera remis le 13 septembre 2013 dans le Nord-Isère :





mardi 11 juin 2013

Les lavandières de Brocéliande : Edouard Brasey



Avec Les lavandières de Brocéliande de Edouard Brasey nous explorons  les croyances de la Bretagne traditionnelle et les récits des chevaliers de la Table Ronde. Le titre doit d'ailleurs son nom à la légende des lavandières de sang, ces femmes infanticides, qui reviennent après leur mort chaque nuit pour laver éternellement les langes ensanglantés de leur bébé. Malheur aux voyageurs attardés qui les rencontrent sur leur passage car ils seront eux aussi battus à mort par ces terribles spectres!
Le roman combine habilement l'évocation de ces légendes qui hantent la forêt de Brocéliande où à lieu l'action, dominée par les personnages d'Arthur, de la fée Morgane et  de la Dame du Lac, et le récit policier, lorsque la légende et la réalité se confondent et débouchent sur un crime.


Forêt de Brocéliande (source)

Qui a tué, en effet, la jeune Annaïg, retrouvée noyée dans le lavoir des lavandières du village de Concoret? Sa mère, Dahud, surnommée ainsi par allusion à la fille du roi d'Ys responsable de la destruction de la ville par l'océan, à moitié sorcière, accuse les lavandières du sang, venues au lavoir en cette nuit du Samain (La Toussaint.  Gwenn, la jeune fille qui l'a trouvée, est suspectée. Loïc le charbonnier, bossu, dont tout le monde se moque et se méfie dans le village est lui aussi désigné par les habitants du village. Mais ne serait-ce par plutôt le jeune noble Philippe de Montfort qui aurait eu aussi des raisons pour se débarrasser de la jeune fille? De plus quel secret pèse sur la naissance de Gwenn et d'Annaïg?

L'Ankou
Le récit se déroule sur deux périodes : En 1914, juste avant la déclaration de la guerre, lors des fiançailles secrètes de Edern de Montfort et de  Solenn Josselin, en présence de leurs amis, à la fontaine de Baradon où la fée capricieuse et changeante exauce ou non vos voeux. Récit tragique qui s'interrompt pour celui d'une autre guerre celle de 1940-45 : occupation de la Bretagne par les nazis. Réfractaires au STO, résistants, nationalistes bretons, petits nobliaux terriens vivant encore dans un monde féodal, officiers nazis, SS, prêtres traditionalistes ou révoltés,  sont confrontés à l'Ankou et à la malédiction jetée jadis par la fée de Baradon sur les protagonistes de l'histoire et leurs descendants. J'ai apprécié ce mélange des genres dans ce roman qui a le mérite de nous décrire une Bretagne - pas si ancienne pourtant-  mais encore bien ancrée dans ses superstitions, mais aussi dans sa foi catholique et son obéissance à l'église. Quant à l'atmosphère de la forêt de Brocéliande, elle  est très bien rendue et l'on souhaiterait, à la suite de ce livre, partir à sa découverte!


                         
               Merci à Dialogues croisés et aux éditions Calman-Lévy




dimanche 9 juin 2013

Tag : Voyages dans le temps et l'espace, fleurs, peintures,musique...

Vuillard

Et voici un tag de Lilou Soleil... J'y réponds avec retard mais mieux vaut tard ...

1)     Puisque onze ; quelle équipe de foot tu supportes ?
Euh! Le foot et moi, ça fait deux!

2)     Es-tu lève tôt ou couche tard ?
Couche-tard! très tard! Lève tôt, l'horreur!

3)  Si tu pouvais vivre à un autre siècle (passé) lequel choisirais-tu ? Pourquoi?

Oh! je voudrais bien retourner vers certains siècles passés, l'espace d'un instant pour voir, par curiosité, mais surtout pas y vivre! 

Le XX siècle? j'y suis née mais assez tard bien heureusement pour échapper aux deux guerres mondiales et à l'holocauste! Aurais-je autant de chance si j'y retournais? 

Les slogans de mai 68

Mais retourner dans la maison de mon enfance au bord du Gardon avec ma soeur adoptive, revivre un jour de Mai 68 pour retrouver ma jeunesse à la fac ou assister à un spectacle avec Gérard Philippe dans la cour d'Honneur du Palais des Papes (ce que je n'ai jamais pu faire), le Cid, le prince de Hombourg ... ou revivre mes premiers voyages en Italie avec ma mère, ma meilleure amie ou mon mari, revoir l'enfance de mes filles, alors là OUI!



Le XIX siècle? et l'aliénation de la femme : dans les milieux aisés, toujours considérée comme une éternelle mineure, toujours sous tutelle, devant obéissance à son mari, n'ayant aucun droit pas même celui de conserver sa propre fortune qui devient légalement celle de son mari, interdite de travail, affreusement dépendante, mourant en couches la plupart du temps; et dans les milieux populaires, travaillant 16 heures par jour à l'usine ou à la mine ou mourant de faim dans les "caves de Lille"!


Edouard Manet
Mais assister à la première d'Hernani au milieu des jeunes romantiques déchaînés, à côté de Théophile Gautier en gilet rouge, en admiration devant le génie, Hugo, être sur les barricades du côté du peuple avec Gavroche, séjourner à Nohant avec George Sand et tous les grands artistes, musiciens, écrivains de ce siècle, participer aux soirées de Médan, voyager en Angleterre pour faire connaissance de Jane Austen ou d'Emily Brontë ou d'Elizabeth Gaskell, ou de Dickens ou.. Alors là, OUI.



 Et puis, soyons fou : revêtir l'espace d'un instant une robe à la Scarlett....

  Le XVIII siècle ? et subir le poids de la religion, l'Inquisition,  la privation des libertés, la tyrannie des nobles, l'injustice, les guerres,  les famines...

Mais quelques jours à Ferney, dans le sillage de Voltaire, aller aux comédiens italiens voir Marivaux ou Beaumarchais, être présente à une soirée  du salon littéraire de madame de Geoffrin et me faire toute petite pour y  écouter, Montesquieu, d'Alembert, Diderot... alors là, OUI! Je vous ramènerai des autographes!

 et Le XVII siècle? les XVI ème et le moyen-âge et l'antiquité?

La "librairie" de Montaigne

Hum! Allez, là je fais un lot et je les traite tous en même temps! Le XVII, Le XVI et tout ce qui précède,  sont des époques qui ne sont pas meilleures en ce qui concerne les guerres, les violences, les famines, la misère du peuple, les épidémies de peste, de choléra, les maladies de toutes sortes, les obscurantismes de la médecine et celles de la religion, la peur de l'enfer, du diable, de la mort, les superstitions, les intolérances de tous bords, le fanastisme  etc...
Giovanni Bellini
Bon alors... ne pas y vivre mais me faire petite souris pour hanter les ors de Versailles et voir de mes yeux Louis XIV et sa cour, rencontrer la marquise, bien sûr, de Sévigné, et vivre un jour dans la troupe de Molière et des Béjart... voir Michel Ange en train de sculpter son David, me promener dans les rues de Florence au milieu des fêtes fastueuses de Laurent de Médicis ou à Venise dans l'atelier de Giovanni Bellini au milieu de ses élèves, Giorgione et Le Titien, (mais pas l'année de la peste qui a vu mourir Giorgione), rencontrer du Bellay à son retour de Rome et faire un (long) séjour au château de Montaigne, admise dans sa "librairie", bien sûr! et ...


4)     Fais-tu partie de clubs associatifs ou cela t’est-il indifférent ? 

Non, je ne fais pas partie de clubs associatifs mais ils ne me laissant pas indifférente. j'admire les gens qui sont actifs, qui y  participent.

5)   Si on t’offre un billet open pour un voyage; quelle sera ta première destination ?

Un tour du monde avec de longs arrêts partout!

6)   Es-tu salé(e) ou sucré(e)?

Sucrée et gourmande!

7)   Es-tu Champagne ou Bordeaux ?

Champagne

8)  En musique où va ta préférence ?
La viole de gambe


Musique  et opéra du XVII siècle et du XIX siècle, baroque et romantisme. Pas très ouverte sur la musique contemporaine!






 
9) En peinture ton choix va à la Renaissance ou aux impressionnistes, ou autres :

Là, par contre mon choix est très large du moyen-âge à nos jours : j'aime les primitifs italiens, la renaissance italienne et française; la peinture flamande, hollandaise, néerlandaise du siècle d'or, les impressionnistes, les nabis, les fauvistes, le surréalisme, les futuristes, et bien d'autres... et de nombreux artistes et mouvements contemporains ....


Giorgia O' Keeffe

Mes artistes préférés dans le désordre : Vermeer, Chagall, Giotto, Rotko, Monet, Masaccio, Goya,  Matisse, Bonnard, Filippo Lippi, Boticelli, Caspar Friedrich, Van Gogh, Hopper, Bellini, Vik Menuiz, Fra Angelico, Miro, Twombly, Jean Fouquet, Simone Martini, Degas,  Paolo Ucello, Magritte, Georgia O'keefe, Munch, Vuillard,  Ghirlandaio, Mary Casatt, et puis le Land Art avec Goldworthy, Smithson, les installations de Claude Levêque, d'Annette Messager ou de Boltansky, les photographies d'Andres Serrano.. et bien sûr j'en oublie! j'adore faire ce genre de listes parce que cela fait défiler devant mes yeux des dizaines et des dizaines d'images, de tableaux que j'ai eu le bonheur d'admirer, mon petit musée personnel.

Le land Art : Goldworthy
10)  Préfères-tu  la tragédie classique ou comédie de boulevard ?

     Le Cid avec Gérard Philippe


Je préfère la tragédie classique  à la comédie de boulevard mais en fait ce que je préfère à tout, c'est le mélange des genres, donc le théâtre shakespearien! Et puis aussi les comédies de haut niveau : Molière, Beaumarchais, Marivaux, Goldoni, Dario Fo, Calaferte...







11) Si tu devais n’avoir qu’une seule fleur dans ton jardin laquelle planterais-tu?



Là, tu me mets au supplice, Lilou! Moi qui aime toutes les fleurs et qui n'ai pas de jardin, tu m'empêches de rêver! Alors, je désobéis et je ne choisis pas  : je rêve de lilas, de mimosa, de glycine, de fleurs de cerisiers, des fleurs de l'arbre de Judée, de roses de toutes les couleurs, de narcisses, de jonquilles, de tulipes, de pivoines, de lys, d'azalées, de violettes.....