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Zoran Music : Venise |
Je suis allée à la médiathèque avec la liste de tous les titres que j’avais glanés dans vos blogs mais… Je n’en ai trouvé que deux. Seule Venise de Claude Gallay est un de ceux-là.
Ma première remarque concerne la minceur et le manque d’originalité de l’intrigue; je crois avoir lu cette histoire des dizaines de fois.
Un femme, la quarantaine, est « plaquée », pour reprendre ses termes, par son amant : souffrance insupportable, tentative de suicide, anéantissement proche de la folie … Alors, l’héroïne craque, casse sa tirelire et part à Venise pour une durée indéterminée. Elle s’installe dans une pension et se lie d’amitié avec un vieux prince russe qui a fui la révolution (en effet, il doit être vieux !) et elle rencontre un libraire qui lui prête des livres et dont elle tombe amoureuse…. Je ne vous en dis pas plus.
Bon, d’abord, bonjour les poncifs, le prince russe à Venise, le libraire obligatoirement séduisant … Aucun personnage n’a vraiment une épaisseur psychologique. Ce sont des figures que l’on peut désigner par leur titre ou leur métier, le prince, la danseuse, l’aubergiste etc.. mais ils n’existent pas, pas même elle, l'amoureuse désespérée, qui manque de vraisemblance : suicidaire mais prête à remplacer son grand amour une semaine après son arrivée à Venise ! Accompagnatrice dans des voyages en Italie, mais complètement ignare, elle semble n’avoir jamais rien lu. En dehors de cela, on sait peu de choses d’elle.
Donc, Seule Venise se révèle à mes yeux un roman bien décevant et creux. Heureusement, il y a Venise, la vieille cité que le texte nous invite à arpenter, des anecdotes, une foule de petits détails que nous saisissons au passage dans cette errance : la Fenice dont les vénitiens viennent récupérer les cendres après l’incendie, la bora au souffle glacial, le pont de l’Académie, Le Rialto, les reflets gris de la lagune, le cimetière San Michele, Torcello, la Ca’ Dario et ses mosaïques… Et là, j’aime ces passages tout simples, poétiques, par petites touches, ces phrases sans grandiloquence, au présent de narration, qui nous font voir la ville, ses beautés et sa mélancolie. Beaucoup de charme se dégage de ces promenades ! Finalement pourquoi un prétexte romanesque? Venise se suffit à elle-même !
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Zoran Music |
La Calle delle Capucine, une ruelle tout près de la pension, une passe étroite qui s’enfonce entre deux hauts murs et permet de rejoindre les quais de Fondamenta Nuevo. La pierre y est rongée, grattée. Le vent s’engouffre là-dedans comme dans un couloir. Tout au bout, la masse grise de l’eau. Les murs de briques rouges. L’île San Michele, l’île des morts. Tous les morts de Venise. Là-bas. Ensevelis.
On dit que les murs du cimetière s’enfoncent. Qu’un jour, des pans entiers glisseront dans la lagune et qu’ils emporteront les cercueils avec eux. Ce jour-là, on ne saura plus qui est qui, et alors la mort reprendra ses droits.
On dit que ce jour-là n’est pas loin.
On dit que les murs du cimetière s’enfoncent. Qu’un jour, des pans entiers glisseront dans la lagune et qu’ils emporteront les cercueils avec eux. Ce jour-là, on ne saura plus qui est qui, et alors la mort reprendra ses droits.
On dit que ce jour-là n’est pas loin.
Je retrouve à San Marco et je grimpe à la cime du campanile. En ascenseur.
Une rampe permet à un cheval de monter tout en haut de la tour.
C’est le gardien qui m’explique.
Aucun cheval n’est jamais monté mais la rampe existe. Et a été conçue pour ça.
Un chemin secret au-dedans de la tour.
Une petite chose inutile.
Précieuse.
Une rampe permet à un cheval de monter tout en haut de la tour.
C’est le gardien qui m’explique.
Aucun cheval n’est jamais monté mais la rampe existe. Et a été conçue pour ça.
Un chemin secret au-dedans de la tour.
Une petite chose inutile.
Précieuse.
Un pensionnaire qui était ici avant vous m'a raconté qu'autrefois les vieux gondoliers remontaient la ville par les canaux, ils longeaient ensuite les murs du cimetière et ils ramaient vers le large. Le soir, on les attendait... L'emplacement de la gondole restait vide.
(...)
Il y a tellement de façons pour mourir.
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Zoran Music : Ponta della Doggana |