Dénicher à la bibliothèque un livre : L’extinction des espèces de Diego Vecchio, écrivain argentin, découvrir qu’il raconte l’histoire de sir James Lewis Smithson, un savant anglais qui a légué sa fortune aux Etats-Unis d’Amérique à charge de développer une institution destinée à promouvoir le progrès et la connaissance de la Science auprès de tous les hommes.
Et là, Tilt ! Tilt ! dans ma mémoire ! Les musées smithsoniens ou la Smithsonian Institution, à Washington, mais oui ! Bien sûr ! Et les souvenirs inoubliables des jours que j’ai passés dans cet espace extraordinaire qui réunit, à notre époque, pas moins de dix-sept musées, galeries, jardins de sculptures !
Et hop! Le livre aussitôt emprunté et … lu !
La création du premier musée d’histoire naturelle : le château
Le château : Smithsonian museum |
Si cet essai, raconte effectivement la vie de Sir James Lewis Smithson, il s’étend surtout longuement sur la création du premier musée d’histoire naturelle des Etats-Unis qui allait bien vite faire des émules et sur son premier directeur, Zacharias Spears*, lui aussi un scientifique.
Le musée créé par l’architecte James Hamilton en 1846 ressemble à un château de style gothique anglo-normand avec des motifs romans « inventant une architecture propre et typiquement Washingtonienne que certains visiteurs anglais mal intentionnés allèrent jusqu’à qualifier de « gothique bâtard ».
Château vers lequel afflua les collections entassées jusqu’alors dans les couloirs du département de L’Intérieur à New York, minéraux, végétaux insectes, invertébrés, mammifères, oiseaux et qui arrivèrent aussi d’un peu partout, restes de cabinets de curiosités, de collections dépareillées des différents états. De plus, des donations permirent de créer une galerie des Beaux-Arts et des portraits nationaux confiée à Annabeth Murphy Atwood.
Zacharias Spears* : Personnage fictionnel, je l'apprends en même temps que j'écris ce billet ! Du coup, je ne sais plus trop ce qui est vrai ou non dans ce livre, tant l'auteur est facétieux ! C'est un peu déstabilisant ! Et je me demande si c'est un essai ou un roman ! Mais je crois que si Diego Vecchio s'amuse au dépens de son lecteur, son livre n'en reste pas moins un intéressant aperçu de la naissance et de l'évolution de la muséographie, de l'art de mettre en valeur une collection, de la donner à voir à un public non averti. De plus, à travers l'humour de sa description fantaisiste et dramatisée - donc irrésistiblement comique- de l'évolution de la vie depuis la nuit des temps, il aboutit à une réflexion sur intéressant sur notre époque actuelle.
"Des mafias de poissons aux mâchoires acérées montaient la garde partout, prêts à planter leurs dents dans le moindre visiteur. Les assassinats au grand jour se multiplièrent, même dans les endroits les plus fréquentés, bien souvent gratuits, pour le simple clair de tuer. Cet accroissement de l'insécurité eut pour conséquence un des faits les plus importants de l'histoire de la vie : la conquête de la terre ferme."
La mode des musées : la concurrence
L'actuel musée d'histoire naturelle de Washington le château est à présent le siège de l'Administration de la Smithonian Institution. |
Le musée d’histoire naturelle de Washington connut un succès retentissant, on venait de loin, d’autres états, et on faisait la queue pour le visiter. La mode était lancée ! D’autres musées virent le jour, Chicago, New York, Boston, Philadelphie, Houston … chacun cherchant à récupérer les trouvailles ramenées des expéditions scientifiques plus moins lointaines à une époque où les découvreurs ethnologues ou paléontologues sont encore des béotiens ou des aventuriers sans scrupules! On se volait les découvertes, la fraude n'était pas rare. Un faux squelette de dinosaure fut même vendu au Smithsonian muséum.
Une guerre éclata, entre Spears et le directeur de musée de Chicago qui se disputèrent les fragments de Jonathan-Charles, un ptérodactyle ainsi baptisé, guerre fratricide qui conduisit ces hommes de sciences haineux devant les tribunaux.
Et il fallut des années pour aboutir à ce qui peut se comparer à la signature d’un traité de paix :
« Mr Russell, directeur du Muséum Field de Chicago prit l’initiative en proposant à Mr Spears le prêt d’un Velociraptor en échange des momies », momies qui avaient conquis les foules et drainaient un public dense jusqu’à la Smithsonian institution.
La manière de l’auteur
Diego Vecchio |
Ce qui fait le sel de cet essai, c’est donc la manière dont l'écrivain traite de son sujet, l'évolution de la vie et des musées, une manière peu orthodoxe et un tantinet fantaisiste d’aborder les sciences, de présenter la création de notre planète et des espèces, dans un récit complètement surréaliste et vertigineusement accéléré à l'échelle des salles du musée, ce qui crée un effet comique :
Dès sa naissance cette sphère (la Terre) fut heurtée par une planète jumelle qui n’avait rien trouvé de mieux que de tourner autour du Soleil sur la même orbite, mais dans le sens inverse de la Terre, faisant preuve d’une totale irresponsabilité. La collision laissa notre planète sur un axe de rotation vacillant, incliné à vingt-trois degrés, handicapée à vie.
Ou visionnaire et poétique !
Pour résister à leurs attaques effrayantes, de nombreux dinosaures s’ingénièrent à modifier leur anatomie, alliant la beauté à La Défense. Certains se parèrent d’une crête dorsale. D’autres hérissés de pointes, ressemblaient à des chevaliers médiévaux en côte de mailles et en armure. D’autres encore nimbèrent leurs protubérances en forme de collerette, faisant songer aux pages de la cour de la reine Elizabeth à la représentation d’une comédie sanglante de Christopher Marlowe.
Les personnages qui constituent le personnel ce musée à la fois réel et imaginaire sont aussi traités avec humour et l’on s’amuse par exemple de la croisade entreprise par Annabeth Murphy Atwood pour sauver ses tableaux maltraités, la galerie d’art étant sacrifiée à l’histoire naturelle et au coeur sec de Mr Spears qui n’a pas la fibre artistique. Les deux femmes Miss Sullivan et Mrs Atwood sont d’ailleurs amusantes et sympathiques !
Ceci dit, un avertissement aux lecteurs est nécessaire : trop sérieux s'abstenir !
L’extinction des espèces
Et là, c'est sérieux ! Elle nous permet d’imaginer que lorsque l’homme aura fini de détruire toutes les espèces, y compris la sienne, la planète Terre continuera à rouler dans l’espace sans nous et s’ingéniera à se réinventer !
Quelle chouette trouvaille ! Je m'intéresse beaucoup aux musées, en particulier à mise en place en France fin XVIIIe début XIXe, je trouve la démarche passionnante. Je connais moins le processus aux USA, ce texte, roman ou essai, serait un bon moyen de le découvrir. J'ai lu un texte de Diego Vecchio il y a un bout de temps, "L'Ours" (il faudrait que je le rapatrie sur mon blog nouvelle version...).
RépondreSupprimerOh mais ça m'a l'air totalement à découvrir! Rien à la bibli...
RépondreSupprimerTu nous gâtes là en peu de temps après les astres le savant absolu, comme toi j'ignore tout de cet homme mais là tu as vraiment titillé ma curiosité
RépondreSupprimerBelle trouvaille ! Les musées de la Smithsonian Institution à Washington, ça me rappelle des souvenirs aussi. Et l'entrée est gratuite pour tout le monde.
RépondreSupprimermiriam : celui-là est tout à fait pour moi! Merci pour Binet, je me régale
RépondreSupprimerC'est passionnant ! Léguer un musée en héritage...
RépondreSupprimerVoilà un livre qui fait joliment écho à celui de Gerald Durrell que je lis en ce moment. J'ai reconnu la silhouette du Smithsonian à Washington, c'est vrai que ce Mall est un endroit fantastique avec tous ces musées. Le sujet m'intéresse, j'en prends note.
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