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lundi 2 juin 2025

Sofia : La cathédrale Nevsky et le musée des icônes (1)

                                                                        La cathédrale Nevsky

 

Retour de Bulgarie... Peu envie d'écrire  ! Et ceci d'autant plus que je repars bientôt en Italie ! Oui, j'ai la bougeotte ! Mais je veux vous amener malgré tout faire une balade dans Sofia.

Le centre de Sofia est verdoyant, égayé de nombreux parcs et de  beaux monuments, églises et musées. A la périphérie que nous avons traversée pour aller au monastère de Rila une toute autre vision apparaît, de hauts immeubles laids, parfois tagués, aussi moches que ceux des quartiers Nord de Marseille mais sur une surface beaucoup plus étendue ! On impute ce genre d'urbanisme à la lourdeur soviétique mais on n'a pas fait mieux chez nous dans les quartiers populaires. (Mais fermons la parenthèse). C'est, bien sûr, le centre que je veux vous présenter en commençant par ces trésors que sont les édifices et les oeuvres d'art religieux qui couvrent des siècles.

 

Cathédrale Nevsky

 

La cathédrale Nevsky est un immense édifice construit pour commémorer la victoire des Russes dans la guerre qui les a opposés aux Turcs en 1878 et qui a entraîné la libération et l'indépendance de la Bulgarie alors sous la domination de l'empire Ottoman. La cathédrale rend hommage aux soldats morts dans cette guerre. Elle est un remerciement au Tsar russe Alexandre II dont le saint patron était le prince Alexandre Nevsky qui a triomphé des chevaliers teutoniques en 1242 et a été sanctifié par l'église russe. La Construction a débuté en 1882 et fut terminée en 1913. 

 

Cathédrale Nevsky : intérieur

Le trône royal se trouve sous un baldaquin soutenu par des quatre colonnes de marbre vert dont deux reposent sur des lions couchés.


Cathédrale Alexandre Nevski : fresque


 Icone : Vierge de la Tendresse, joue contre joue

 

Détail des petits pieds de l'enfant

J'aime ce genre de détails. La peinture des icônes byzantines est plus symbolique, allégorique, que réaliste ou naturaliste. Pourtant un détail comme celui-ci, les petits pieds potelés de l'enfant nous ramènent à l'humain. 

La cathédrale Nevski se dresse sur une immense place arborée, avec d'énormes et massives  statues, à côté de l'église Sainte Sofia, du musée national des Beaux-Arts, et de l'université de sciences avec son joli et odorant jardin botanique. 

 

Sofia Université jardin botanique

 

Sofia jardin botanique


Sofia jardin botanique


L'oeil était dans la tombe.... de je ne sais plus quel Tsar !


 
Et là Ivan Vazov

Ivan Vazov ! oui, celui dont je vous parle tout le temps! Sous le joug

 

Le musée d'art religieux : musée des icônes

  



La crypte de la cathédrale Nevsky est devenue un musée présentant une très riche collection d'icônes du XI au XIX siècle. 
L'iconographie est un art sacré pour l'Eglise orthodoxe, les icônes qui représentent les visages du Christ, de la Vierge et des saints sont les symboles de la vie après la mort. Elles sont vénérées dans les églises. Les foyers, jusqu'aux plus humbles, en possèdent et elles reçoivent les prières de chacun.
Elles sont peintes sur du bois, généralement du tilleul mais aussi du cyprès, du bouleau, du peuplier selon les régions. Elles sont parfois enduites d'un tissu qui rappelle symboliquement le linceul du Christ et parfois protégées d'un revêtement d'argent. Elles sont peintes avec des pigments naturels. L'iconographe doit accéder à un état du pureté spirituelle quand il peint une icône, observer le carême ou prier, réciter des psaumes.
 
 
Sofia musées des icônes :  Nativité

 
 
Sofia musées des icônes :   l'entrée du Christ à Jérusalem

 
 
Saint Georges  peintre Spiros Mikhail ( 1839)
 
 
 A noter l'influence grecque du vêtement.
 
Le Christ pantocrator 
 
 
Le christ pantocrator

 Le Christ Pantocrator se dit du Maître souverain du Monde. C'est une représentation propre à l'art byzantin, de Jésus en buste, tenant les Saintes écritures dans la main gauche et faisant un signe codifié de la main droite qui invite à entrer dans la Vie éternelle.  Les deux doigts symbolisent la double nature du Christ, divine et humaine et les trois doigts tendus représentent la Trinité.
 
L'art des icônes est très codifié  et obéit à des règles précises si bien que l'on ne distingue pas toujours une oeuvre très éloignée dans le temps d'une autre plus récente. Je devrais dire "je" ne distingue pas car les articles que j'ai lus sur le sujet m'ont montré l'étendue de mon ignorance.
 
 
Christ Pantocrator du  XIV siècle revêtement en argent de 1599
  
 
Christ Pantocrator du XVIII siècle
 
 
 
Les vierges byzantines
 

La vierge  Hodegretia (1566)
 
 
La Vierge Hodegretia tient Jésus sur son bras et de la main droite invite à la suivre. Hodegretia vient du grec et signifie : " celle qui montre le chemin". Elle a pour rôle de guider les croyants vers le Christ, la Foi, La Vérité. Les vierges Hodegretia sont souvent hiératiques et ont un air sévère, solennel. Elles inspirent le respect. 
 
 
Vierge Eleoussa :  détail du tableau Jérusalem (1871)

 
 La Vierge Eleoussa qui est la Vierge de la Tendresse tient son bébé contre elle, souvent la joue appuyée à la sienne. Elle représente l'amour maternel.
 
 
 
La Vierge zoodokos : Source de vie.

 
J'ai vu aussi de nombreuses  représentations de la Vierge ZoodokosSource de vie à Sofia et à Plovdiv.  C'est un thème fréquent dans la peinture religieuse byzantine. Cette tradition date du V siècle et raconte comment Léon Marcellus, futur empereur, menant un aveugle par la main entendit une voix qui l'incita à utiliser l'eau de la source. L'aveugle retrouva la vue immédiatement. Léon devenu empereur ordonna la construction d'une église pour célébrer le miracle. 
Dans le tableau ci-dessus vous apercevez Léon Marcellus conduisant l'aveugle aux yeux bandés vers la source de vie. Toute la société est représentée et vient s'abreuver à la fontaine miraculeuse dominée par la Vierge couronnée par deux anges et son enfant. A l'arrière plan la ville de Constantinople.  A notre droite les rois et les soldats, à notre gauche le clergé et les bourgeois, au premier plan le peuple, malades, blessés, infirmes.
 
 
Vierge zoodokos :  détail du tableau Jérusalem (1871)

 
  
Plovdiv musée des icônes : La Vierge Source de vie  peinte  par  Christo Dimitrov XIX siècle

 
 
Malgré la codification des scènes religieuses, les iconographes font souvent preuve d'inventivité et certaines scènes séduisent par leur beauté, leur vivacité, leurs couleurs ou émeuvent par la douceur d'un visage de la Vierge ou parfois par  une naïveté qui dévoile la sincérité de celui qui peint ces scènes parlant de Christ ou des saints et racontant leur vie.  On peut y voir aussi la représentation de toutes les couches de la société avec les différences sociales très marquées, vêtement somptueux des puissants, misère des pauvres. 

 
Plovdiv musée des icônes : La Vierge Source de vie 1838 Zakhari Zagraf

 
 
Plovdiv musée des icônes : La Vierge Source de vie (détail)

 
 
Plovdiv musée des icônes : La Vierge Source de vie (détail)

 
 
 
 Les deux saints les plus représentés de ces musées de Sofia et Plovdiv sont Saint Georges et Saint Demétrius. Ils se ressemblent beaucoup. Tous deux sont connus comme chevaliers, croisés, commandants des armées byzantines.  A cheval, vêtu comme des soldats d'une cotte de maille, la lance en avant, l'une plantée dans le corps d'un dragon, l'autre dans le corps d'un homme. Les deux saints sont considérés comme les protecteurs de l'empire byzantin.
 
 
 
 
Saint Georges terrassant le dragon

 
 Saint Georges arrive sur son cheval blanc dans un ville de Lybie ou sévit un dragon qui mange les jeunes filles et garçons du royaume. Ce jour là, c'est la fille du roi qui est donnée en pâture au monstre. Saint Georges  terrasse la bête, délivre la jeune fille et fait promettre aux habitants de la ville de se convertir. Il est l'Allégorie de la victoire de la foi chrétienne sur le démon ou plus généralement du Bien sur le Mal.
Sous le règne de Dioclétien, il est arrêté pour avoir détruit les tablettes d'Apollon et plusieurs fois torturé, ce que l'on peut voir sur les scènes de sa vie qui encadre le tableau. Par contre, je ne suis pas  arrivée à savoir qui était le petit personnage derrière lui qui semble tenir une aiguière ? Il meurt décapité au IV siècle. 
 
 
Scène de la vie de Saint Georges (détail)

 
 
 
Saint Démétrius combattant un soldat romain.

 
 
 Saint Démetrius est mort en martyr sous le règne de l'empereur Dioclétien. Il est ici représenté terrassant un soldat romain
 
 
 
 
Sofia Musée des icônes : Jerusalem

 
 
Jerusalem :  Le jugement  des âmes (détail)

 
 
Jerusalem :  La nativité (détail)

 
Sofia Musée des icônes : Jerusalem

 
 
En dehors de tout sentiment religieux, moi qui suis athée,  je trouve ces oeuvres fascinantes et cette visite du musée des icônes de Sofia comme de celui de Plovdiv, plus modeste, m'a procuré beaucoup de plaisir. J'aime observer tous les détails surtout quand ils nous racontent des histoires. On peut dire qu'il s'agit parfois d'un équivalent de la bande dessinée pour ceux qui ne savent pas lire, une mise en images de la Bible qui devait nourrir la foi des plus humbles.
  
 

Miriam : Voir musées des Icones à Sofia
 
 
 

 

lundi 12 mai 2025

Challenge Bulgarie Bilan 1

 

Nicolaï Raïnov : peintre Bulgare Le royaume enchanté

 

 Je suis en ce moment en Bulgarie, d'abord à Sofia puis à Plovdiv. Voici le premier bilan de nos lectures à la découverte des écrivains bulgares.

 

Claudialucia

 Challenge Bulgarie : Littérature Histoire Art qui se joint à moi ?

Les Héros nationaux bulgares : Hristov Botev, Vassil Levski, Hadji Dimitar

 Les peintres bulgares : Vladimir Dimitrov Le Maître et Radi Nedelchev

Elena Alexieva : Le prix Nobel  

Anton Dontchev : Les cent frères de Manol

 Elitza Guieorgieva : Les cosmonautes ne font que passer

Kapka Kassabova : Elixir 

Victor Paskov : Ballade pour Georg Hanig

Yordan Raditchkov  : Le poirier/ Les noms

Yordan Raditchkov : les récits de Tcherkaski

Ivan Vazov : sous le joug

Jules Verne : Le pilote du Danube 

Jules Verne : Kereban le têtu 

Yordan Yolkov Un compagnon mon billet 

Yordan Yolkov Soirée étoilée mon billet

 Wagenstein Abraham : Abraham Le poivrot (1)

Wagenstein Abraham : Abraham le Poivrot :  Plovdiv (2)


Sofia la cathédrale Nevsky et le musée des icônes

Sofia : les édifices religieux : églises, mosquée synagogue

 

Fanja

Le pays du passé de Gueorgui Gospodinov 

 

Je lis je blogue
 

Elitza Guieorgieva : Les cosmonautes ne font que passer 

 Kapka Kassabova : Lisière

Viktor Paskov Ballade pour Georg Henig  

 

Keisha : 

Le roi d'argile de Dobromir Baïtchev

 

Miriam 

Carnets bulgares 

Theodora Dimova : Les dévastés 

Anton Dotchev : Les cent frères de Manol

Kapka Kassabova Elixir ou la vallée de la fin des temps

Kapka Kassabova : L'esprit du lac 

Kapka Kassabova : Lisière 

Kapaka Kassabova : Anima 

René Kabestan : La vierge jurée 

Marie Kassimova-Moisset :  Rhapsodie balkanique 

Alexandre Levy : Carnets de la Strandja : d'un mur à l'autre 1989-2019 

Paskov Victor : La ballade pour Georg Henig

Jules Verne : Kereban le têtu 

Jules Verne : Le pilote du Danube 

Angel Wagenstein :  Adieu Shangaï

Angel Wagenstein : Le pentateuque ou les cinq livres d'Israel



Rappel du challenge :

A partir du mois de Mars jusqu'à la fin septembre, je propose que l'on découvre la littérature bulgare mais aussi l'histoire du pays et les arts, peintures, icônes, fresques, architecture...

 Laissez vos liens ici.

 

Nicolaï Raïnov : peintre bulgare Le royaume enchanté




 

dimanche 11 mai 2025

Bulgarie : Le poète et révolutionnaire Hristo Botev et les héros bulgares : Hajdi Dimitar et Vassil Levski

 

Vassil Levski et Hristo Botev en exil  de Vassil Goranov

 Parmi les héros nationaux que je rencontre depuis que je lis pour ma visite en Bulgarie, il y a des noms qui reviennent toujours, célébrés comme des héros qui ont fait l’histoire et ont oeuvré pour la liberté de la Bulgarie sous la domination de l'empire ottoman. J’ai cherché à mieux les connaître. Or, les articles sur le net sont nombreux.


 Le poète et révolutionnaire Hristo Botev ( 1848-1876)

 

Hristo Botev

Chaque 2 Juin, la mémoire de Hristo Botev est célébré dans le pays  ainsi que de tous ceux qui sont morts pour la Liberté. Les sirènes retentissent  pendant trois minutes et l’on observe le silence quel que soit l’endroit où l’on se trouve. Cette année ce sera l'anniversaire de la 149 ième année de sa mort.

Hristo Botev est né à Kalofer en 1848 et est mort à Okolchitsa (près de Vratsa, dans les montagnes du nord-ouest de la Bulgarie) en combattant contre les Turcs à la tête d'une troupe de volontaires bulgares venus de Roumanie qui était alors un grand centre d’émigrés bulgares chassés hors de leur pays par les Turcs. Botev s’y était réfugié en 1867.  

Le 16 Mai 1876, après l’échec de l'insurrection mal préparée qui eut lieu en Avril 1876 et qui fut impitoyablement écrasée par les Ottomans (lire le très beau Sous le joug de Ivan Vazov), le voïvode Hristo Botev s’illustre par un coup d’éclat. A la tête d’une petite troupe, il embarque avec les siens sur le bateau Radetsky. Ils feignent d'être des ouvriers et cachent leurs uniformes et leurs armes dans de grandes caisses censées contenir leurs outils de travail. Le 17 mai,  Botev dévoile son identité au capitaine et se fait débarquer sur les côtes bulgares du Danube à Kozlodouï. Il pense que lui et sa troupe vont être rejoints pas des centaines de paysans révolutionnaires mais il n’en est rien. Aucun renfort ne vient les épauler au cours de leur marche à travers les villages bulgares. Réfugiés sur le Mont Okolchitsa, ils combattent les Turcs, un combat démesuré quant aux effectifs. Le 20 mai du calendrier Julien, c’est à dire le 2 Juin du calendrier grégorien, Botev est tué par une balle.

 Ivan Vazov recevant la nouvelle de la traversée du Danube sur le Radetsky effectuée par Botev écrit le poème qui a pour titre « Radetzki » à un moment où l'espoir est encore possible. Ce poème mis en musique est connu de tous les Bulgares comme « Le doux Danube blanc s’agite… ». 

 




"RADETZKI" de Ivan Vazov  (extraits)

Le doux Danube blanc s'agite,
      

bruit gaiement et fort


et "Radetzki" fier va vite
      

sur les ondes d'or.

 

Mais sitôt que l’on entendit :
      

"Kozlodoui lа-bas !",
 

l 'écho de corne retentit,
     

 un drapeau flotta.
 

Des jeunes bulgares vaillants
    

 y paraissent ardents 

-
au front - signes de lion brillants,
  

   les yeux éclatants.
 

Le bateau approche vite
      

la rive espérée,


le Danube blanc s'agite -
     

 les flots jouent, très gais.
 

Il y avait beaucoup de temps
     

 qu'il n'avait porté


de tels braves hommes luttant
      

pour la liberté.
 

 (…)

Mes frères! - Botev déclara
     

 D’une voix de tonnerre 

-
le peuple nous accueillera
      

d'une joie fière!
 

Bientôt d'un tir nous saluerons
      

notre grand Balkan

 -
une bataille de sang ferons
      

contre les tyrans!
 

Nous ne sommes point une armée,
    

  experts militaires,


mais nos âmes sont enflammées
      

pour mener la guerre.
 

Bientôt le Turc éprouvera
      

notre force noire,


et le lion brave guidera
    

  nos plus grands espoirs.
 

Et partout retentit un cri
      

vers le grand Balkan:


"Que vive notre Bulgarie,
      

à mort les tyrans!"

 

Hadji Dimitar

 

Hajdi Dimitar

 

Je n’ai  pu lire que des extraits de la poésie de Botev qui célèbre les exploits et la mort des héros nationaux. Les poésies les plus populaires de Botev sont celles dédiées à  Hadji Dimitǎr et Vassil Levski (La Pendaison de Vassil Levski). 

" L'aigle, le faucon, les bêtes sauvages s'approchent fraternellement de Hadji Dimitǎr gisant dans son sang, et des sylphides de blanc vêtues viennent panser la plaie et baiser les lèvres du jeune voïvode, qui entre dans l'immortalité. Car, écrit Botev, « celui qui meurt en combattant pour la liberté, celui-là ne meurt pas »".

Dimitar Nikolov Asenov est né le   à Sliven dans une famille marchande. Âgé de 2 ans sa famille l’emmène en pèlerinage à Jérusalem. C’est pour cette raison qu’on le surnomme hajdi (titre aussi octroyé aux chrétiens orthodoxes de l'Est ayant fait le pèlerinage à Jérusalem). Il meurt  le ,  mortellement blessé pendant les combats.  Plus connu sous le nom de Hadji Dimitar il est l'un des plus importants voïvodes bulgares, ainsi qu'un révolutionnaire combattant la domination turque.

 

-bas dans le Balkan, il est toujours vivant.
 

Mais il gît et gémit,

 il est couvert de sang ;


Sa poitrine est percée d'une affreuse blessure.


Frappé dans sa jeunesse, il vit, notre héros.



Vassil Levski : l'apôtre de la liberté

 

 

Vassil Levski est considéré comme "l'apôtre de la libération bulgare", le plus grand de tous les héros bulgares.

Vassil Ivanov Kountchev, plus connu sous le nom de Vassil Levski,  (Levski : semblable au Lion) est né le 18 juillet 1837 à Karlovo et meurt le 18 février 1873 à Sofia. Il fut un révolutionnaire et idéologue de la révolution nationale bulgare dans la lutte nationale contre l'occupant ottoman. C'est un ami de Hristo Botev avec lequel il a partagé une vie d'exil et de misère en Roumanie en 1868.

 Il organise la révolution et incite toutes les couches de la Il fut arrêté en 1872 par les autorités ottomanes et condamné à la peine de mort par pendaison. Cinq ans après sa pendaison et après l'Insurrection d'la  guerre russo-turque de 1877-1878 permit la libération de la Bulgarie du joug ottoman. Le traité de San Stefano le mit en place un État bulgare autonome.

La pendaison de Vassil Levski de Hristo Botev

 

Vassil Levski de  Detchko Uzunov (peintre bulgare)

Oh, ma mère, chère patrie,     
 pourquoi pleures-tu si pitoyablement, si doucement ?      
Corbeau, et toi, oiseau maudit,      
sur la tombe de qui croasses-tu si laidement ?  



 Oh, je sais, je sais, tu pleures, mère,
parce que tu es une esclave noire,      
parce que ta voix sacrée, mère,      
est une voix sans aide, une voix dans le désert.  


 

 Pleurer ! Là, près de la ville de Sofia,
j'ai vu une potence noire,      
et l'un de vos fils, Bulgarie,      
y est pendu avec une force terrible.  



Le corbeau croasse de façon hideuse et menaçante,

les chiens et les loups hurlent dans les champs,      
les vieillards prient Dieu avec ferveur,     
les femmes pleurent, les enfants hurlent.  


     

L'hiver chante sa chanson maléfique,      

les tourbillons chassent les épines à travers le champ,      
et le froid, le gel et les pleurs sans espoir      
apportent du chagrin à votre cœur. 






vendredi 9 mai 2025

Victor Paskov : Ballade pour Georg Henig

 

 

Le livre de Victor Paskov, Ballade pour Georg Henig, autobiographique, est l’histoire d’une amitié qui lie le petit garçon,Victor, à un maître luthier tchèque dans un quartier pauvre de la ville de Sofia au début du communisme.  

Victor fait la connaissance de Georg Henig quand il a cinq ans et que son père commande au maître un  1/8 ième de violon pour lui apprendre à jouer. Le père de Victor est musicien et gagne difficilement sa vie en travaillant à l’Opérette. Sa mère, couturière, gratte péniblement quelques sous en fabriquant des cols. Elle vient d’une famille bourgeoise de propriétaires terriens, dont les biens ont été nationalisés par le régime communiste, mais qui ne s’en considère pas moins comme supérieure à la famille de Victor. Les parents refusent de parler à leur fille qui s’est déclassée, pensent-ils, en se mariant à un pauvre artiste qui appartient, de plus, à la minorité valaque ! Dédain qui provoque la colère de la mère qui ne cesse de se plaindre de sa pauvreté. Or, tous ses malheurs semblent s’être polarisés dans le fait qu’elle n’a pas de buffet pour ranger ses affaires. Le Buffet - ou plutôt son absence-  devient une affaire d’état, une idée fixe, une récrimination de tous les instants à tel point que, c’est décidé, le père va le construire, ce buffet, puisqu’il n’aura jamais l’argent pour l’acheter ! Un Buffet ! Les parents de Victor deviennent  presque des traîtres à leur classe sociale aux yeux des voisins ! Il faut dire que la mère  manque de modestie dans son  accession aux sphères supérieures en tant que riche détentrice de buffet ! Ce passage est traité avec beaucoup d’humour mais aussi avec beaucoup de compréhension et d’amitié pour les gens humbles qui vivent dans son quartier, qui peinent à joindre les deux bouts et s’empruntent mutuellement de l’argent dans une solidarité sans faille. 


Pour construire un buffet, le père de Victor va avoir besoin d’emprunter l’atelier du maître luthier. Mais lorsqu’ils vont le voir, le ton change. Le vieil homme qui a perdu sa femme s’est abandonné, souffre de malnutrition, de manque d’hygiène, d’abandon et de solitude. Une si grande détresse ! Dès lors, la famille le prend sous son aile et le petit garçon va nouer une relation très forte avec le vieil homme qui lui fait partager son univers toujours à la limite du fantastique. Les Esprits de sa famille viennent rendre visite au vieillard quand le soir tombe et parlent avec lui, saluent le petit garçon, le maître fabrique un dernier violon, ce sera le violon de Dieu, et surtout l’enfant y apprend que la véritable richesse n’est pas dans ce que l’on possède mais dans l’art, dans la musique, et aussi dans l'amour, la solidarité.

Le récit est conté avec une tendresse et un humour qui en font le charme et les personnages sont très attachants.

 

Miriam : ballade pour Georg Henig 

Patrice : Et si on bouquinait  Ici

Je lis je blogue Ici





jeudi 8 mai 2025

Villeneuve-lez-Avignon : Le Fort Saint André, l'abbaye et l'exposition Gustave Fayet en Provence

 Le fort Saint André : Office du tourisme Ici 






 

Le Fort Saint André : un peu d'Histoire

En face d’Avignon, sur le mont Andaon, de l’autre côté du Rhône, se dresse le Fort Saint André érigé en 1292, avec ses remparts et ses tours massives et impressionnantes. La construction de ce Fort ordonnée par Philippe le Bel pour tenir tête au pouvoir papal se fait autour de l’abbaye des Bénédictins qui s’y étaient établis dès le X siècle autour du tombeau de Sainte Casarie.

 

Le Fort saint André : les tours jumelles


AU XVI et XVIII siècle une communauté de moines de la Congrégation Saint Maur s’installe à Saint André et  agrandit le monastère qui se dote d’un nouveau bâtiment conventuel soutenu par de grandes voûtes.

 

Cour du palais Abbatial du XVIII siècle

 

Un délice de fleurs et de senteurs

Se promener dans ce joli jardin qui croule sous les fleurs, faire provision de couleurs et de senteurs... un délice ! 

Palais abbatial : de larges voûtes  glycines, seringa

 

A la révolution, les moines sont chassés, l’abbaye est vendue, en partie détruite et passe de main en main.

 


 

 Un panorama éblouissant

 

Pendant des années quand mes filles étaient enfants, l’abbaye était fermée, mais nous montions jusqu'au Fort pour admirer la vue splendide sur la plaine et sur le palais des Papes d'Avignon

 

Vue du Fort Saint André sur la plaine de l'Abbaye et Avignon, le palais des Papes dans le lointain

Le jardin à l'italienne 

 Au début du XX siècle, Gustave Fayet, artiste peintre et mécène,  rachète l'abbaye et l’offre en résidence à son amie Elsa Koeberlé, une poétesse alsacienne, qui l’entretient et crée avec une amie le jardin à l’Italienne.


Jardin de l'abbatiale à l'Italienne


Jardin de l'abbatiale à l'Italienne


Jardin à l'italienne : Diane chasseresse


Par la suite, l'abbaye est restaurée et entretenue par les descendants de Gustave Fayet, en particulier par Roseline Bacou, petite-fille du peintre, conservatrice du Louvre, qui restaure les vestiges et crée un jardin méditerranéen et par les arrière-arrière-petits enfants, Marie et Gustave Viennet..


Jardin de L'abbatiale : le jardin méditerranéen


Jardin de L'abbatiale : le jardin méditerranéen


L'exposition Gustave Fayet en Provence ( 1865-1925)

 

Gustave Fayet : Madame Fayet et sa fille Yseut

Pour le centenaire de sa mort, l'exposition Gustave Fayet est installée dans les corridors voûtés et l’ancienne cuisine du XII siècle du palais abbatial. D’origine languedocienne, Gustave Fayet naît le 20 mai 1865 à Béziers dans une famille de négociants en vin établie à Béziers depuis la fin du 17e siècle. Il est initié à la peinture et au dessin par son père Gabriel et son oncle Léon, tous deux artistes et amateurs d’art éclairés. Il meurt à Carcassonne en 1925.



Cuisine du palais abbatial


Cuisine du palais abbatial


 Viticulteur, il devient collectionneur et acquiert des oeuvres de Degas, Monet, Pissaro et surtout d'Odilon Redon et de Paul Gauguin qui étaient ses amis. Il possédait près d'une centaine d'oeuvres de Gauguin.

L'exposition présente des aquarelles sur le thème de la Provence, de la mer.

 

Gustave Fayet : Petite maison (aquarelle)

 

Gustave Fayet (aquarelle)

 

 

Gustave Fayet : Les falaises (aquarelle)

 

Gustave Fayet : rangée d'oliviers (aquarelle)

 

 

L'exposition nous permet aussi de découvrir de très belles peintures à l'huile qui reflètent l'influence de Van Gogh, de Gauguin, des impressionnistes puis, avec Odilon Redon, une évolution marquée vers le symbolisme.


Gustave Fayet : Les pins rouges


Gustave Fayet : Voiles latines

 

Gustave Fayet : cyprès et bord de mer
 

 

Gustave Fayet : feu du ciel


Du 01 mars au 30 octobre 2025

« GUSTAVE FAYET EN PROVENCE » ABBAYE SAINT-ANDRÉ, VILLENEUVE-LÈS AVIGNON

Exposition : 1 mars – 30 octobre 2025 VOIR ICI

L’exposition de l’abbaye Saint-André, en réunissant pour la première fois l’œuvre provençale de Gustave Fayet, interroge le regard que pose l’artiste sur cette terre d’élection qui, plus qu’un simple motif, brille par ses multiples résonances intimes, artistiques et littéraires. De ses racines beaucairoises à son attrait pour la littérature régionaliste ou l’œuvre de van Gogh, c’est au prisme de son histoire familiale, de son imaginaire littéraire et de sa culture visuelle que sera comprise la Provence de Gustave Fayet. A l’instar de Fontfroide ou d’Igny, l’abbaye Saint-André tient une place primordiale dans l’univers artistique de Gustave Fayet. Acquise en 1916, ce lieu devient le véritable point d’ancrage de ses séjours en Provence. Des Alpilles à Toulon, en passant par la Camargue, le paysage provençal et son soleil irriguent en motifs, couleurs et lumière le moment le plus fécond de sa carrière de peintre et créateur. Loin des affaires viticoles, il y consacre de longues périodes au moment précis où il commence à se faire connaître, dans les années 1920, dans le champ des arts décoratifs. Un riche ensemble de 122 dessins, aquarelles, peintures et livres illustrés sera présenté.

Commissariat d’exposition : Elodie COTTREZ, Historienne de l’Art. Gustave et Marie VIENNET


mardi 6 mai 2025

Anton Dontchev : Les cent frères de Manol

 

 

Les cents frères de Manol est un roman dans lequel Anton Dontchev décrit l’islamisation forcée des populations chrétiennes en Bulgarie, dans les montagnes des Rhodopes, à la fin du XVII siècle. 

Ce roman est aussi un hommage à la Nature, une ode à ces montagnes à la fois sauvages et protectrices pour ceux qui la connaissent et lui appartiennent, au plus près de la grotte d’Orphée où l’on jette les chiens errants qui hurlent à la mort de manière lancinante. Le printemps et surtout l’automne, somptueux, avec ses couleurs rougeoyantes que les femmes imitent pour tisser leurs tapis et teindre leurs vêtements, sont d’une beauté toujours renouvelée.

« La vallée d’Elindenya faisait penser à ces parures de verre coloré enrobé de cristal. L’air était si pur que j’avais l’impression de toucher la montagne en tendant la main. Là où il n’y avait que deux couleurs, on en voyait à présent flamboyer des dizaines… Sur la masse d’acier bleu noir des forêts de sapin apparaissaient çà et là les taches de rouille des hêtres aux feuilles rougissantes, mais seulement au bas des versants. Sur les hauteurs, la muraille sombre se dressait vers le ciel, réfractaire à l’automne et au pourrissement. Le soleil ne se levant plus assez haut pour éclairer les versants abrupts au nord, les forêts couvrant ceux-ci ne se départaient plus de la robe violette et noire de l’ombre. »

 Nous sommes à l’époque du siège de Candie (La Crète, ville Héraclion) commencé en 1648  qui oppose les Turcs aux Vénitiens et aux français venus leur prêter main forte. Le grand Vizir Ahmed Pasha Kropulu prend la ville de Candie en 1669 à la grande satisfaction du sultan Mehmed IV, portant l’empire ottoman à son apogée. Pour briser toute résistance extérieure, les chrétiens des montagnes des Rhodopes en Bulgarie, alors sous le joug turc, sont islamisés de force.

Dans Les cents frères de Manol, Anton Dontchev offre un récit à deux voix qui propose deux points de vue opposés. D’une part, celle du pope Aligorko qui raconte ce qui se passe dans la population bulgare. D’autre part, la vision de celui que l’on appelle le Vénitien qui accompagne l’armée turque venue convertir les bulgares. Le Vénitien est en fait un noble français islamisé, fait prisonnier par les Turcs au siège de Candie. Il a dû choisir lui aussi entre la mort et la conversion si bien que même s'il est du côté des Turcs, les sentiments que lui inspirent les chrétiens martyrisés transparaissent car rien, dit-il, n’a pu éradiquer la foi ancienne.
Le roman commence avec l’enfance de Manol, comme une légende issue pourtant d’une triste réalité   : de jeunes bulgares sont amenés par les Turcs loin de leur pays, les garçons pour devenir des janissaires, les filles pour servir dans les harems. Parmi elles, une jeune épousée avec son bébé qu’elle ne peut plus nourrir. Elle le dépose sur une branche d’arbres pour qu’une biche le nourrisse. C’est Karamanol, le Haïdouk*, traqué par les Turcs, qui le trouve et l’emporte  à travers les forêts : « Toujours est-il que Karamanol descendit en cent villages et cent mères nourrirent son petit protégé ». Karamanol, avant de mourir, confie l’enfant au père Galouschko qui « l’appela  Manol du nom de son père nourricier, et lorsque l’enfant eut grandi on commença à l’appeler Manol aux cent frères ». Une légende qui prend une dimension épique et dont les héros, nobles et courageux, Manol en tête, sont des bergers qui tiennent tête à l’oppression turque, choisissant le supplice et la mort plutôt que de trahir leur foi, certains se cachant dans les montagnes et échappant  à leurs  poursuivants. L’emprisonnement des chrétiens dans le Kanak*, leur résistance héroïque, les supplices qui leur sont réservés, donnent au roman un caractère dramatique grandiose mais les peurs et les défaillances des autres, la faim qui vrille les ventres, le froid qui transperce, la mort qui rôde autour d’eux, soulignent leur fragilité et nous touchent d’autant plus. 

 
Les cent frères de Manol compte un grand nombre de personnages que ce soit du côté bulgare, Manol et ses fils, le jeune Mirtcho  et Momtchil qui finira par incarner aux yeux des Turcs et à lui seul la résistance, la farouche et altière Elitza, Sveda séductrice et fourbe, le père Galouschko dont le fils est devenu janissaire … que ce soit du côté turc. Ainsi le Bey Karaïbrahim, complexe et tourmenté, à la tête d’une armée de cent cavaliers est, lui aussi, face à Manol, un homme hors du commun, et de même l’aga Suleyman, maître du Konak* de la vallée,  pragmatique et retors, qui comprend que, pris entre deux feux, les bergers et l’armée de Karaïbrahim, son temps est fini.  Ce sont des personnages pleins de vie, parfois de fureur, de cruauté, de doute,  de souffrance, mais aussi de joies, d’amour, des êtres humains que nous sentons proches de nous malgré leur dimension héroïque. Mais ce sont aussi des symboles. A travers eux, à travers les « cent frères », Anton Dontchev décrit tout un peuple attaché à sa culture, à ses racines, à ce qui fait son identité, tout un peuple résistant pour rester lui-même et conquérir la liberté mais qui n’est pas encore parvenu à mâturité pour y accéder.

« Karaïbrahim disait qu’être seul, c’est être fort. Selon moi, il aurait dû dire : c’est devenir une bête féroce. L’homme ne vit pas seul. Il lui faut choisir : vivre seul ou vivre avec son prochain. Karaïbrahim voulait être seul et rompre tous les liens avec les autres. Alors que les bergers faisaient tout pour rester ensemble. » La solidarité comme preuve d'humanité.

Un très beau livre, magnifiquement écrit !


*Haïdou : un hors-la-loi, ici, dans ce contexte, vu du côté bulgare, un rebelle, révolté contre les Turcs
 

*Konak : palais, résidence des riches turcs