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Le roi Lear mise en scène Olivier Cour d'Honneur Avignon 2015 |
Je ne voulais manquer pour rien au monde Le roi Lear dans la cour d’Honneur! Quelle déception! Trois heures d’ennui et de ras-le-bol au cours de laquelle Olivier Py assène son égo, ses fantasmes, ses délires, sans égard aucun pour le grand dramaturge qui a écrit la pièce! Voilà déjà deux fois que je vois le Roi Lear dans le In à Avignon 2013 ICI avec toujours le même résultat : des metteurs en scène qui ne parlent que d'eux-mêmes et qui oublient que c’est Shakespeare le Dieu, pas eux!
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Au jeu des squelettes, dans la mise en scène de Olivier Py, Lear enfonce Hamlet! Qui dit mieux? (Source Le Monde) |
Je veux bien, moi, que le silence de Cordélia représente « une faillite de la parole » qui engendre la « dévastation » « la catastrophe politique » « prophétisant ce qui s’est passé au XX siècle »(Olivier Py). De là à en faire une danseuse en tutu qui ne prononce pas un mot pendant tout le spectacle, elle qui porte le sens de la pièce!
Je veux bien que Régane (ou Goneril) défèque sur scène et jette le contenu du seau sur Gloucester, que l’une ou l’autre renifle leur petite culotte, que Edmond et Cornouailles, s’envoient en l’air derrière les palissades mais ce sont des petites provocations qui n’apportent rien à la mise en scène, ne donnent aucune profondeur, ne témoignent d’aucune lecture du texte. C’est juste une mise en scène gros sabots qui aurait fait scandale il y a trente ans mais qui ne fait même plus frémir le public avignonnais qui en a vu d’autres!
Je veux bien aussi que Lear et Edgar se vautrent dans la boue, nus comme des vers, et courent dans les gradins du théâtre, le sexe à l’air, mais ce qui me gêne c’est qu’ils sont ridicules! Certes, les pièces de Shakespeare pratiquent le mélange des genres si cher à Victor Hugo et certains personnages grotesques du dramaturge ne font pas dans la dentelle, les fous en particulier, mais cela signifie que le comique et le tragique coexistent, non que le comique tue le tragique! Et ridicules ils le sont, ces acteurs, au point de faire ricaner le public au moment où celui-ci devrait être saisi par l’émotion dans cette grandiose scène de la folie, au milieu des éléments déchaînés (la tempête est figurée par un tuyau d'arrosage qui déverse de l'eau sur les acteurs) qui portent à son comble le sentiment de déréliction du monarque déchu, du père outragé. Mais d’émotion il n’y en a pas! Tout au long de la représentation, les acteurs vocifèrent, en particulier le roi Lear (Philippe Girard), monocorde et peu convaincant, exception faite, peut-être, du comte de Gloucester (Jean-Marie Winling) dont l’acteur souligne les faiblesses et l’humanité.
Quant aux symboles, ils sont d’une telle lourdeur qu’ils provoquent aussi l’hilarité du public comme cette « méditation scénographie sur le cercle, le trou, la béance, ce vide qui aspire les personnages et l’histoire »(Pierre-André Weitz, scénographe) qui désigne un trou pratiqué au milieu de la scène où chaque personnage va s’engloutir! On a rêvé plus subtil comme symbolisme!
Les réactions du public? Certains sont partis en cours de spectacle mais c’est habituel, il y bien eu deux ou trois huées à la fin, un bravo tonitruant et un ensemble d'applaudissements modérés et polis. Les comédiens ont salué deux fois, c’est peu! Mais ni colère, ni vindicte, ni enthousiasme délirant. Certes, j’ai entendu certains se moquer des lourdeurs de la mise en scène, deux jeunes filles discuter des mérites respectifs de l’anatomie d’Edmond et d’Edgar (au moins, elles ne se seront pas ennuyées, elles!). Finalement, ce qui m’a surprise, c’est la tiédeur!