Par ces temps de coronavirus, il n’est pas inintéressant, en cette rentrée littéraire, de lire La fièvre de Sébastien Spitzer sur l’épidémie de fièvre jaune qui a touché Memphis en 1878. La fièvre jaune dont on sait de nos jours qu’elle est due à un flavivirus transmis par un moustique comme on l’apprend dans ce roman. Sébastien Spitzer nous dit qu’il commencé ce livre avant que ne se propage l’épidémie du coronavirus et qu’il a donc été rejoint par l’actualité au moment où il le terminait.
Là encore, comme dans La peste écarlate de Jack London, en l’absence de réponse médicale comme nous en avons de nos jours, la panique fait fuir la presque totalité de la population la vouant à une mort certaine. L’auteur raconte, à travers le personnage de la petite Emmy, métisse, et de sa mère, ce voyage cauchemardesque dans des trains bondés qui favorise la propagation de la maladie. Ceux qui cherchent à y échapper sont accueillis à leur descente du train par des hommes armés de fusils qui leur tirent dessus impitoyablement pour les empêcher de répandre la maladie. C’est ainsi que la mère d’Emmy est tuée. La fillette parvient à rejoindre Memphis où la vie s’organise tant bien que mal tandis que l’épidémie fait des milliers de morts en quelques jours.
Ce récit se fait autour de personnages principaux comme Emmy dont le père, blanc, est le premier à mourir de la fièvre jaune en venant retrouver sa fille après sa sortie de prison. Au drame de l’épidémie s’ajoute celui du racisme, des exactions du Ku Kux Klan et des exécutions sommaires des noirs dans une région encore marquée par la guerre de sécession et par la haine du Nord. Il y a aussi Keathing, journaliste, proche de ses amis racistes, touché par la maladie et qui va peu à peu évoluer devant tant de peurs et de souffrances. Puis un belle figure féminine, Anne Cook, maquerelle, tenancière d’une maison close, qui fait de son lupanar un hôpital et soigne les malades avec dévouement. Enfin, un personnage qui a réellement existé et à qui Sébastien Spitzer dédicace son livre, Raphaël T. Brown, ancien esclave noir, libéré par la guerre, qui prend les armes et organise une milice pour défendre les habitants des hordes de pillards qui volent, violent et tuent à la faveur du désordre et de la maladie.
Les personnages, leur humanité, nous permettent d’entrer dans ce récit et de vivre avec eux cette tragédie qui nous touche, au-delà des siècles, car toujours malheureusement actuelle. Un bon roman et qui devrait nous permettre de nous interroger sur la chance que nous avons, au XXI siècle, selon les pays où nous habitons mais aussi les milieux sociaux -car nous ne sommes pas tous égaux- d’avoir des hôpitaux à la pointe du progrès, des soignants compétents et dévoués, des chercheurs qui travaillent sans relâche sur les médicaments adéquats, des gouvernements, du moins ceux qui en ont le courage et la lucidité, pour nous protéger en prenant des mesures pas toujours populaires mais nécessaires malgré les grognements et les vitupérations des jamais contents !
Mes libraires préférés m'en ont dit beaucoup de bien !
RépondreSupprimerAh oui, épidémie et discrimination raciale, c'est très 2020 tout ça. Après, est-ce que j'ai envie de lire sur le sujet là tout de suite, malgré la tentation de ton billet? Je me le note pour 2021, quand TOUT ça sera dernière nous (je suis de nature optimiste ;-))
RépondreSupprimerJ'ai rencontré une auteure hier (Laurine Roux) qui sort un roman où il est question d'une pandémie qui a ravagé le monde. Commencé en 2018 donc bien avant le coronavirus. Le sujet était dans l'air ! Je n'ai pas encore lu Sébastien Spitzer, je verrai si je peux le prendre à la bibli.
RépondreSupprimerTout ce qui peut nous aider à comprendre, à vivre cette épidémie attire forcément l'attention.
RépondreSupprimerTu sais, et fort curieusement, ici les espagnols suivent les consignes, ne protestent pas même quand on confine leur quartier...
Sinon je lis une espèce de journal de confinement : "On dirait que l'aube n'arrivera jamais", de Paola Rumiz. Lui, et c'est vraiment intéressant, s'est centré sur comment les gens vivaient le confinement.
Merci, ce roman est noté, bon dimanche!
Le sujet m'intéresse (Ah bon????) je le note
RépondreSupprimerMerci pour ta présentation et pour le paragraphe de conclusion, Claudialucia.
RépondreSupprimerJe me suis intéressée à la fièvre jaune lorsque je suis allée en Guyane en 2008. J'ai fait refaire mon vaccin à l'aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle. Mon père lorsque nous étions enfant était hyper vigilant avec les vaccins, ce qui ne m'a pas empêchée de faillir mourir de la cochinchinette quand j'avais 2 ans. Revenir en France m'a sauvée.
RépondreSupprimerPour en revenir à la fièvre jaune, des médecins courageux s'inoculaient la maladie : ils offraient leur bras aux moustiques... et en mourraient.
Si tu veux voir ce qu'est la cochinchinette tu peux regarder la page 7 de ce document. J'imagine que c'est à l'hôpital central que mon père m'emmenait tous les jours
RépondreSupprimerLa page 4 parle du voyage. Je suis revenue en bateau de Saïgon à Marseille. Guère de souvenirs sinon une escale au Caire très bruyante à travers le hublot et l'escalier de l'hôtel où j'étais assise à Marseille ainsi que le port.