Le syndrome de l’orangerie de Grégoire Bouillier
Claude Monet ; les nymphéas de l'Orangerie |
"J’ai mis du temps à comprendre mes nymphéas. Je les avais plantés pour le plaisir; je les cultivais sans songer à les peindre. Un paysage ne vous imprègne pas en un jour. Et puis, tout d’un coup, j’eus la révélation des fééries de mon étang. Depuis ce temps je n’ai guère eu d’autres modèles." Claude Monet
"Pourquoi des nymphéas ?
La question est moins stupide qu'elle en a l'air. Car Monet peignit énormément de nymphéas. Quand je dis énormément, je parle d'environ trois cents tableaux, voire cinq cents à en croire Clémenceau, disons quatre cents et n'en parlons plus (quatre cents tableaux ! ). Ce qui représente plus d'un quart de sa production totale. Sans compter tous ceux qu'il détruisit : au bas mot des dizaines et des dizaines... Ce sont quatre cents tableaux pendant trente ans." Grégory Bouillier
"La mort fardée des couleurs de la vie" Bachelard
Claude Monet les nymphéas de l'orangerie |
J’avoue que j’ai été d’abord un peu dubitative, n’ayant jamais lu aucun autre livre de Grégoire Bouillier, en abordant Le syndrome de l’orangerie commençant par deux prologues sur la Bmore investigations, l'agence de détectives littéraire de l’enquêteur Baltimore épaulé par son assistante Penny. Référence ? Son livre précédent Le coeur ne cède pas que je me propose de lire dans un proche avenir maintenant que j’ai lu et apprécié Le syndrome de l’orangerie.
Car dans ce bouquin, Grégory Bouillier, Baltimore, Bmore, (ou quel que soit le nom qu’on lui donne) nous entraîne à l’orangerie et là… Plouf ! Splash ! le voilà qui fait un malaise, tourne de l’oeil devant les tableaux de Monet, façon syndrome de Stendhal, mais non pas à cause de la trop grande émotion que procure un spectacle sublime (et pourtant dirais-je !), non, non, à cause de l’horreur qui se cache sous la beauté des fleurs. Et oui, derrière cette magnificence de couleurs, derrière les reflets des nuages dans le miroir de l'étang, dans ce splendide univers inversé, sens dessus dessous, qui nous enchante, (nous qui sommes "normaux"), et bien sachez-le, affirme l'auteur, Monet a planqué bien des « trucs louches » et "ces peintures puent la mort" ! Qui l’eut cru ? Pas moi, en tout cas, qui, bêtement, n'y voyais que des jolies fleurettes ! Ainsi nous partons avec Grégoire Bmore Bouillier, à la recherche du cadavre (des cadavres ?) qui se cache(nt ?) au fond de l’eau trouble, stagnante, des bassins de Monet.
Claude Monet : la robe verte Camille |
Ce qui nous entraîne fort loin, dans la boucherie de la guerre de 14-18, en passant par le camp de concentration d’Auschwitz et le jardin de Giverny, en remontant dans la vie de Monet, son époque, sa famille, ses deux épouses Camille et Alice Hoshedé, ses fils Jean et Michel, sa cécité, mais aussi par des détours vers Edgar Poe, le japonisme et les estampes d’Utagawa Hiroshige, Clémenceau, Tintin et Rackham le Rouge, le professeur Tournesol, Pline l'Ancien, Winston Churchill, le peintre suisse Ferdinand Holder, la Commune de Paris et… et… et j’en passe !
Mais sachez que Grégoire Bouillier s’est maîtrisé (si, si, il avait promis à son éditeur de faire court cette fois-ci, donc pas plus de 426 pages et trois lignes, un record de concision, (paraît-il) et je ne parle pas des parenthèses (et des parenthèses dans les parenthèses ( mais que cachent ces parenthèses ?) )).
Alors fou, Gregory Bouillier ? Alors, là oui, tout fou, bouillonnant même, avec une imagination délirante, on se demande où il va chercher toutes ces idées (lui aussi se le demande !) mais combien passionnant ! Car si vous entrevoyez, derrière la description des nymphéas de Monet, les cadavres que l’écrivain vous avait promis de vous révéler au cours d’une enquête menée tambour battant, ce dernier ne vous laisse jamais le temps de sortir la tête de l’eau (stagnante). Autant dire que l'on ne s'ennuie pas... si l'on en réchappe !
Claude Monet les nymphéas de l'orangerie |
Et tout ceci pour vous livrer une analyse très sérieuse, documentée et trépidante de l’oeuvre du peintre et de sa vie et une réflexion sur l'art. Sans compter que vous saurez tout sur la botanique et même la différence entre le nymphéa et le nénuphar ! Et toc !
Et en plus d’être géniale, cette enquête, elle est drôle car Gregory Bouillier ne manque pas d’humour et vous fait rire ! Passionnant ! vous dis-je ! De plus, inutile de vous demander s’il a raison de voir ce qu’il voit et qu’il nous fait voir sous ces pauvres nymphéas, car de toute façon, maintenant, quand vous irez à l’Orangerie, vous ne pourrez plus voir « la scène du crime » de la même manière !
Giverny : sous les Nymphéas ... ? |
Le syndrome de l'Orangerie a été préselectionné pour de nombreux prix littéraires.
Yeeeeeees! Un bouquin repéré, forcément, après lecture de Le coeur ne cède pas! 900 pages, oui mais . https://enlisantenvoyageant.blogspot.com/2022/12/le-coeur-ne-cede-pas.html . Et le dossier M (j'ai lâché au tome 2, 900 pages. https://enlisantenvoyageant.blogspot.com/2023/08/le-dossier-m.html
RépondreSupprimerBon, ici il a fait court . ^_^
Peut-être l'occasion pour moi de découvrir l'auteur... parce que les 900 pages du précédent, non !
RépondreSupprimerEt si les 900 pages sont géniales, tu ne le lis pas ?
SupprimerComme tu dis, il a fait court ! Mais il a souffert !
RépondreSupprimerJe l'ai entendu à la radio. Franchement j'hésitais. Génial? pourquoi pas?
RépondreSupprimerMoi, je me suis régalée avec cette lecture !
SupprimerJ'en ai entendu parler et je ne le lirai pas. Les deux salles des Nymphéas de l'Orangerie, visitées si souvent avec mes élèves à Paris, sont pour moi un tel enchantement que je n'ai pas du tout envie d'y chercher des cadavres.
RépondreSupprimerMais Tania ce sont des "cadavres" métaphoriques si j'ose m'exprimer ainsi et l'écrivain analyse toutes les blessures collectives à l'échelle du pays, donc, et individuelles, dans sa vie, qu'a vécues Monet.
SupprimerJ'ai prévu de l'emprunter à la Médiathèque. Je ne sais pas si je le lirai en entier, mais je suis curieuse.
RépondreSupprimerCelui-ci est court et si l'on y entre, on ne veut pas le quitter !
Supprimer900 pages , oh je crois que je vais laisser passer
RépondreSupprimer900 pages c'est Le coeur ne cède pas. celui-ci 426 pages. Moi, je m'en fiche, j'aime les pavés !
SupprimerJe m'étais promis de ne plus revenir à cet auteur ayant bien peiné avec son précédent, Le coeur ne cède pas (trop tout fou, trop de digressions, trop long, très autocentré au final), mais j'avoue que son Syndrome de l'Orangerie me tente bien quand même à cause de son lien avec les Nymphéas de Monet.^^
RépondreSupprimerIl y a toujours les mêmes caractéristiques (autocentré, digressions, tout fou) mais j'ai beaucoup aimé et en plus il m'a amusée..
SupprimerJe l'ai reçu il y a une quinzaine de jours, comme j'ai hâte !!
RépondreSupprimerBonjour Claudialucia. Monet fait partie de mon pantheon personnel puisque je suis voisine de son jardin de Giverny. Je garde précieusement surtout un livre dédié à ce jardin sous l'aspect botanique surtout. Les Nymphéas de l'Orangerie ne m'ont pas fait me pâmer. Il faut dire qu'ils sont assez bourbeux puisque peints lorsque Monet souffrait de cataracte (il n'a accepté de n'être opéré que d'un oeil).
RépondreSupprimerJ'ai eu l'occasion de me rendre dans la pépinière qui a créé par hybridation en relation avec Monet des variétés de nymphéas colorés qui résistaient au froid
https://cergipontin.blogspot.com/2008/10/le-temple-sur-lot-47-latour-marliac-et.html
Peut être lirai je ce livre de Grégoire Bouillier qui me semble une somme. J'avais bien aimé "Nymphéas Noirs" de Michel Bussi, parce qu'il incitait à s'éloigner du jardin et à s'intéresser au village
RépondreSupprimerCe sont deux livres entièrement différents, l'un est un polar, l'autre... indéfinissable ! G Bouillet parle de la cataracte de Monetet j'ai appris ainsi (moi qui viens d'être opérée) qu'à l'époque c'était une opération souvent peu efficace et très douloureuse.
SupprimerJe te relis : je suis d'accord avec toi, il reste que des passages m'ont semblé être du vrai bavardage parfois un peu oiseux mais la lecture a été très agréable et passionnante. La citation "La mort fardée des couleurs de la vie" de Bachelard prend vraiment tout son sens...
RépondreSupprimerJ'ai éprouvé une fois l'impression de longueur mais pas longtemps sinon le livre m'a passionnée.
SupprimerOups, j'avais oublié, ton billet est parfaitement complet, et je te sens prête à te lancer dans Le coeur ne cède pas (soyons raisonnables, pour les pavés 2025?)
RépondreSupprimerJ'ai ajouté le lien, bien sûr, trop peu hélas ont découvert ce livre.
Tu as raison; Je vis le garder pour les pavés de de cet été !
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