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mercredi 15 décembre 2010

Pierre Very et Christian-Jaque : les disparus de Saint-Agil

Van Stroheim et Martin Squelette : Chiche-Capon!


Pour les fêtes de Noël, si vous cherchez une idée de cadeau originale et de qualité pour les enfants dans le style DVD ou roman et dans le genre policier sympa et plein d'humour, allez-voir le blog de Wens : En effeuillant le Chrysanthème  consacré aux romans, films noirs ou policiers.


mardi 30 novembre 2010

Lecture du mois de Novembre 2010

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Le Musée de peinture médiévale du Petit Palais (Avignon)


Paul Doherty : Le combat des reines Grands détectives 10/18 (347p.) traduit de l'anglais par C. Armandet et N. Markovic

Daeninckx-Tardi BD : Le der des Ders éditions Casterman (1997)

Dang Thuy Tang : Les carnets retrouvés (1968_1970) éditions Picquier  (276p) traduit du Vietnamien parJean-Claude Garcias

Benoît Charlat : Nenegle sur la Montagne éditions L'école des Loisirs  Adorable album pour tout petits (septembre 2008)

George Sand : L'orgue du Titan . Editions L'école des Loisirs classiques  (octobre 2009)

Louise Eldrich : La malédiction des Colombes éditions Albin Michel (Juin 2010) traduit de l'américain par Isabelle Reinharez (lecture en cours)

Géraldine Brooks : La solitude du docteur March Editions Belfond traduit de l'américain par Isabelle Philippe Septembre 2010

David Peace : Tokyo, ville occupée Editions Rivages: Thriller

Maïté Laboudigue : Bande de froussards Editions kaléidoscope Album pour enfants

samedi 27 novembre 2010

Le tag de l’amitié : lecture, cinéma, voyage …




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Mango et Gwenaelle m'ont taguée : en voici le résultat


1. Quand vous étiez petite, que répondiez-vous à la question : "Et toi, que veux-tu faire quand tu seras plus grande ?" ?

le-monde-du-silence.1290875033.jpgJe voulais être "étudiante"  (suite à une lecture, laquelle?)  mais aussi  Scaphandrier (Le monde du silence  : Louis Malle-le commandant Cousteau), éleveur de chevaux dans le Wyoming (Flicka de Mary O'Hara)  trappeur dans le Grand Nord (Bari chien-loup de Curwood, l'appel de la forêt de Jack London)

2. Quels ont été vos BD et dessins animés préférés ?
Le Peter Pan de Walt Disney et les BD de Vaillant un hebdomadaire pour enfants où de grands noms de dessinateurs de  BD ont fait leurs premières armes.

3. Quels ont été vos jeux préférés ?
Jouer avec mon amie aux héros de nos lectures communes (en se déguisant avec des couvertures et des jupes de nos mères) .

4. Quel a été votre meilleur anniversaire et pourquoi ?
Mes 15 ans, ma première montre et un grand bouquet de glaieuls chez ma soeur d'adoption.
Mes 16 ans et un voyage inoubliable en Italie, début d'un grand amour pour ce pays, avec ma mère.

5. Qu'est-ce que vous auriez absolument voulu faire que vous n'avez pas encore fait ?
Il y a encore beaucoup de pays que je voudrais visiter!

6. Quel a été votre premier sport préféré ?
La danse classique et la natation

7. Quelle était votre première idole de musique ?
Marcel Huylbrock, un ténor!  Si vous connaissez, faites-moi signe!!

8. Quel est le plus beau cadeau de noël (ou équivalent) que vous ayez reçu ?
Les patins d'argent! le livre, bien sûr! pas de vrais patins!

vendredi 26 novembre 2010

Maïté laboudigue : Bande de froussards!



J'adore Bande de froussards de Maité Laboudigue! Ce délicieux album pour enfants de trois à six ans raconte l'histoire d'un petit lapin, Isidore. Celui-ci veut traverser les bois pour aller jouer avec, euh! B... que dis-je? ... avec son copain Albert. Mais ni Yoyo, ni Gudule ne veulent l'accompagner! Bande de froussards!  Il faudra pourtant beaucoup de courage à Isidore pour affronter seul les dangers  de ce voyage mais il y parviendra muni de son "épée magique", une belle fleur rouge qui deviendra un beau cadeau pour B... euh! mais chut, ne révélons pas les secrets d'Isidore!
Ce livre présente de très belles illustrations stylisées tant pour les personnages que pour la nature, forêt, champs, massifs de roses, aux couleurs vives, chaudes et colorées, sans mièvrerie aucune : un régal pour les yeux.
L'histoire, elle, est pleine d'enseignement mais sans insistance et lourdeur. Elle raconte que la peur est un sentiment naturel et que le véritable courage est de parvenir à la surmonter. Elle montre que l'imagination joue des mauvais tours quand elle nous fait voir des monstres là où il n'y en pas. Par contre, elle vient à notre aide et elle est même précieuse quand elle nous aide à affronter nos terreurs. L'intelligence et la ruse peuvent nous permettre d'échapper à la brutalité symbolisée ici par les chasseurs. Enfin l'amour donne des ailes et nous fait accomplir des prouesses!
L'album est si riche que l'enfant ne remarquera pas tous les détails la première fois. Les illustrations des pages de garde nous permettent d'observer le territoire où se situe le récit  comme s'il s'agissait d'une carte : Où sont les maisons de Gudule, de Yoyo et d'Isidore? Où habite Albert ? Retrouvons la petite maison de la forêt? et les deux arbres rattachés par un lien rouge?
il faudra le lire et le relire avec lui pour découvrir leur signification. Par exemple, que porte Isidore à son poignet gauche et pourquoi? Qu'est-ce qui se cache réellement dans la forêt derrière les arbres?
Comme dans tout livre d'initiation, l'enfant s'identifiera au petit lapin. Lui aussi deviendra un preux chevalier, épée à la main pour rejoindre sa belle mais.. dans un pays où les armes sont des fleurs et où l'on préfère ignorer la violence!


dailogues-croises-capture-d_ecran-2010-05-27-a-10-14-261.1290792112.png Mes remerciements à la librairie Dialogues croisés et aux Editions Kaléidoscope

jeudi 25 novembre 2010

Simon Critchley : Les philosophes meurent aussi


Avec Les philosophes meurent aussi, Simon Critchley prend au mot Montaigne qui écrivait : Si j'étais faiseur de livres, je ferais un registre commenté des morts diverses.
En effet, si Philosopher, c'est apprendre à mourir, il est bien juste après tout que l'on s'intéresse à la façon dont ont disparu ceux qui font profession de regarder la Mort en face. Le britannique Simon Critchley, professeur de philosophie à la New School for Social Research de New York a relevé le défi en commentant les derniers moments de nombreux philosophes de l'antiquité à nos jours. Mais il ne s'agit pas pour lui en écrivant ce livre d'un passe-temps original ou d'un effet de style. Constatant le déni de la mort qui est propre à notre société, il se donne pour but de nous faire réfléchir à notre condition et accepter les limites de notre existence humaine.
Cela signifie-t-il que les philosophes ont tous une fin qui pourrait nous servir d'exemple et que tous ont su, l'heure venue, considérer leur propre disparition avec équanimité? Il est évident que non et le lecteur le découvre assez vite lors de cette lecture. Nous ne pouvons tirer aucune leçon de la diversité de ces expériences; en dépit de leur doctrine, les philosophes sont avant tout des hommes avec leurs forces et leurs faiblesses. Mais lire cet essai, c'est être amené à ne plus considérer la Mort comme un tabou. Car le livre n'est pas sinistre et présente même des aspects inattendus, saugrenues, involontairement comiques, des anecdotes étranges qui provoquent notre étonnement : Héraclite s'étouffa dans de la bouse de vache; Pythagore préfère se faire tuer par ses ennemis plutôt que de traverser un champ de fèves; Chrysippe est mort de rire; Rousseau est entré en collision avec un chien danois; La Mettrie fut emporté par une indigestion de pâté aux truffes...
En parlant de la mort écrit Simon Critchley et même en riant de notre fragilité et de notre mortalité, nous acceptons la limitation de notre état de créature qui est la condition même de la liberté humaine.

Ces anecdotes alternent avec la description de grandes souffrances et de beaux moments de courage que nous ne pouvons qu'admirer. Bien entendu je suis allée voir Montaigne. Mon Montaigne a beaucoup souffert de calculs rénaux (la gravelle dont il parle dans ses Essais) mais aussi d'une attaque d'angine phlegmoneuse qui lui ôta l'usage de la parole.
Ce que j'ai apprécié aussi dans cet essai c'est qu'il s'agit d'une histoire de la philosophie, certes peu approfondie car ce n'est pas le propos de Simon Critchley, mais traitée de manière à nous faire comprendre la manière dont ces philosophies concevaient la mort. C'est une belle récapitulation surtout pour moi qui n'ai qu'une vague et lointaine approche de la philosophie. Je me suis demandée par exemple quels étaient les philosophes dont je me rapprochais le plus dans l'idée qu'ils se font de la mort : Epicure et Hume, deux athées qui meurent bien car ils n'ont pas les angoisses liées à l'immortalité de l'âme :
Les épicuriens, explique Simon Critchley, contrairement aux pythagoriciens, aux platoniciens et aux stoïciens, considèrent donc la mort comme une extinction totale, l'âme n'étant rien de plus qu'un amalgame provisoire de particules atomiques.
Ceci contrairement à Voltaire qui accepte les derniers sacrements et meurt dans la religion catholique, ce qui peut passer pour un reniement de ses idées mais qui est bien compréhensible. Voltaire s'attaquait à l'Eglise, aux dogmes et au fanatisme mais il n'était pas athée. A partir du moment où l'on est en proie au doute et où l'on a peur de l'Enfer, mieux vaut assurer ses arrières. C'est du moins ce qu'il a dû penser!
 Et Montaigne, bien sûr, avec qui nous terminerons ce billet :  Qui a appris à mourir, il a désappris à servir.


logotwitter2.1290705399.jpgMerci à BOB et à François Bourin Editeur

James Herbert : Magic cottage


Depuis longtemps j'entends parler de James Herbert sans le connaître, cet écrivain dont The Sunday Time dit : Eblouissant. Un Steven Spielberg littéraire, aussi ai-je décidé de lire ce livre Magic Cottage paru aux éditions de Bragelonne.
Un couple d'artistes  - elle, Maggie, est peintre, lui, Mike, musicien-  achète un adorable cottage dans le Hampshire pour fuir la ville de Londres et ses inconvénients. Si la charmante maison Gramarye se révèle d'abord idyllique, les choses vont bientôt se gâcher, le rêve devenir cauchemar. On se doute dès le début que cette secte de Synergistes installée tout près de Gramarye et son machiavélique gourou Mycroft  en sont les responsables. Un  duel qui se révèlera un combat entre le Mal et le Bien opposera Mike à Mycroft .
Ce que j'ai trouvé le plus original et le plus réussi dans le roman c'est d'avoir fait de Mike un poltron et non un super héros; il a peur de tout, de se battre avec plus grand que lui, des petites bébêtes grimpantes, de pauvres chauves-souris inoffensives. C'est vraiment un homme de la ville transplanté à la campagne comme un Martien sur la Terre. Ce qui fait sourire. Mais le sujet est mince et pour créer le malaise Hebert est obligé d'étirer l'action sans grande conviction. Le fameux cottage ressemble un peu trop au début à celui de la Blanche Neige de Walt Disney et la bataille entre Mycroft et Mike au dénouement, tous deux détenant des forces magiques, rappelle d'une manière puérile celle de Merlin l'enchanteur et de la sorcière dans le dessin animé du même nom! Le grouillement de vampires géants, de milliers d'insectes infects au milieu d'explosions de toutes les couleurs, de cadavre en putréfaction est franchement ridicule. C'est d'ailleurs le terme choisi par Hebert lui-même : La situation était d'un ridicule achevé. Et c'est vrai, l'humour du héros tombe à plat face à ces tentatives avortées de convoquer pour nous la Magie.
Le style de l'auteur n'est pas à la hauteur du moins dans sa traduction française ni pour insuffler une poésie au récit, ni pour créer une noirceur qui nous emporterait, ni pour nous amuser franchement.  Ainsi lorsque le spectre de la vieille dame rend visite à Mike et se transforme devant lui en charogne, on peut lire : Ses chairs se sont affaissées, se sont mises à pendouiller...
J'avoue que je n'ai pas été très convaincue. Rien à voir avec un Tolkien qui dans le monde de l'imaginaire revisite la source des mythes, ni même avec Robin Hobb à l'imagination délirante et efficace.

mercredi 24 novembre 2010

Le bonheur selon Schulz-Snoopy



Tout ce dont on a  besoin, c'est  d'amour. Mais un peu de chocolat de temps en temps ne fait pas mal.



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sur une idée de Chiffonnette

dimanche 21 novembre 2010

Boris Vian : La vie, c’est comme une dent


Jamais cité Boris Vian ici? ni comme romancier ni comme poète-chanteur-musicien? Une lacune qu'il me faut réparer  au plus vite!
La vie, c'est comme une dent
D'abord on y a pas pensé
On s'est contenté de mâcher
Et puis ça se gâte soudain
Ca vous fait mal, et on y tient
Et on la soigne et les soucis
Et pour qu'on soit vraiment guéri
Il faut vous l'arracher, la vie.


Les compagnons Troubadours du dimanche de Bookworm :

samedi 20 novembre 2010

Géraldine Brooks : La solitude du docteur March



Bien entendu le titre du livre de Géraldine Brooks : La solitude du docteur March* tient pour beaucoup dans mon envie de lire ce livre à tout prix.  En souvenir, bien sûr, du bonheur de cette lecture de mes jeunes années : Les Quatre filles du docteur March et ensuite parce que je trouvais de prime abord le sujet original. Jamais, en effet, je n'ai pensé au cours de mes lectures et relectures du roman de Louisa May Alcott que le docteur March avait une existence à lui, indépendante de sa famille; jamais je n'ai eu l'idée de me demander ce que pouvait éprouver cet homme pendant les combats de la guerre de Sécession, ce qu'il vivait au jour le jour, les convictions qu'il défendait. C'est donc avec une grande curiosité que j'ai abordé le roman. Pour écrire cette histoire de fiction, Geraldine Brooks dit s'être inspirée des journaux intimes laissés par Bronson Alcott, le père de Louisa May Alcott. On sait que cette dernière a pris pour modèle ses soeurs pour créer ses personnages, elle-même se cachant sous le nom de Jo. Cependant, Bronson Alcott reste éloigné par bien des points du personnage qui doit beaucoup à l'imagination de l'écrivain.
Au cours de l'intrigue, on retrouve donc the little women à travers les lettres de March quand il accuse réception des colis que sa femme et ses enfants lui envoient, quand il félicite l'une ou l'autre pour les progrès accomplis. Mais aussi à travers ses pensées qui s'envolent vers ses filles et qui nous permettent de retrouver les traits de caractère distinctifs de chacune, la timidité de Beth, le non-conformisme de Jo, les boucles blondes d'Amy, l'accomplissement de Meg... Nous retrouvons les évènements que nous connaissons, les cheveux coupés de Jo,  la maladie de Beth, le voyage entrepris par madame March lorsque son mari est blessé. De plus, nous complétons notre connaissance de la famille March, l'enfance pauvre du père, sa rencontre amoureuse avec celle qui allait devenir sa femme, son engagement dans la lutte anti-esclavagiste, son amour de jeunesse pour une belle esclave, Grace, qu'il va retrouver au cours de la campagne, un beau personnage qui est porte-parole du peuple noir accédant à une difficile émancipation...
Mais le roman n'est pas seulement écrit en référence avec le livre de Louisa Alcott. Il présente une réflexion profonde, porte sur la guerre et sur le monde un regard pessimiste et  désenchanté.
Ce qui intéresse Geraldine Brooks, c'est de nous montrer une réalité historique terrible, une guerre meurtrière, sans pitié, où les exactions ont lieu des deux côtés, où les véritables abolitionnistes, ceux qui se préoccupent réellement du sort des esclaves ne sont qu'une poignée. Le docteur March, aumônier, fervent idéaliste, va bien vite devenir un personnage dérangeant aux yeux des soldats et des officiers qui n'ont pas plus de considération pour les noirs que ce qu'en ont les sudistes. Ils les utilisent comme "prises de guerre" en les faisant travailler comme des bêtes dans les plantations pour un salaire dérisoire. Ce salaire est bien sûr la justification morale des yankees mais ne fait que remplacer une servitude par une autre. March découvre avec stupéfaction que les noirs ne sont encore une fois qu'un enjeu économique de part et d'autre et qu'ils sont toujours les victimes des deux côtés. L'assassinat par les confédérés des hommes, des femmes et des enfants noirs dans la plantation réquisitionnée par l'armée nordiste mais laissée sans protection va lui enlever toutes ses illusions sur la générosité des hommes.
Mais le pire, dans ce chemin de croix vécu par le docteur March, c'est aussi de se découvrir lui-même face aux tentations de la chair - n'oublions pas qu'il est pasteur -  mais, plus grave encore, face à la peur du combat, à la lâcheté, au désir de vivre quel qu'en soit le prix. Le pire, c'est de perdre le respect et l'amour de soi. Ainsi, lorsque le docteur March rentre dans son foyer, il n'est plus et ne sera jamais plus l'homme qu'il était quand il est parti.
Enfin, l'autre centre d'intérêt du roman intervient lorsque madame March, venue au chevet de son mari gravement blessé, prend la parole à son tour. C'est elle désormais qui donne son point de vue. Et l'on s'aperçoit combien cet homme et cette femme qui s'aiment pourtant d'un amour réel sont passés à côté l'un de l'autre, faute de se comprendre.
Un beau roman plein de gravité et de tristesse.

*La solitude du docteur March : prix Pulitzer 2006

vendredi 19 novembre 2010

La mort selon Thalès de Milet



Thalès de Milet

Diogène Laerce, auteur du III ème siècle avant J.-C rapporte cette anecdote sur Thalès dans ses Vies, doctrines et sentences des philosophes illustres.

Il disait que la mort ne diffère en rien de la vie.- " Et toi, demande quelqu'un, pourquoi ne meurs-tu pas?" - "parce que cela ne fait aucune différence" répond-il.

Cité dans le livre que je suis en train de lire :  Les philosophes meurent aussi de Simon Critchley François Bourin éditeur



Le Jeudi c'est citation Sur une idée de Chiffonnette

David Peace : Tokyo ville occupée


Dans Tokyo ville occupée, David Peace part d'un fait réel, le vol de la Banque Impériale à Tokyo, le 26 Janvier 1948, qui entraîne la mort par empoisonnement de douze des seize employés. En effet, un homme se présentant comme médecin leur fait croire que le Ministère de la Santé leur ordonne de prendre des médicaments (du poison en réalité) pour lutter contre une épidémie.
David Peace va nous faire découvrir l'identité et les motivations de l'assassin non en suivant le schéma classique d'une enquête policière mais en adoptant la structure du film du cinéaste japonais Kurosawa réalisé en 1950 : Rashomon. Dans ce film adapté de deux nouvelles de Ryunosuke Akutagawa, six témoignages donnent des versions complémentaires, parfois contradictoires, du viol d'une femme et du meurtre de son mari par un bandit de grand chemin. L'écrivain a vécu au Japon et on le sent imprégné par la  culture japonaise qui va transparaître dans le style et les images.
Dans Tokyo ville occupé, David Peace reconstruit les épisodes du massacre de la banque, les avancées ou les blocages de l'enquête policière en multipliant les points de vue, celui d'une survivante ou de l'assassin en passant par ceux des inspecteurs de police, des journalistes.... David Peace propose pour chaque récit une forme d'écriture différente : des notes à peine rédigées sur un carnet, des documents officiels, des textes proches du poème ou de chants funèbre. Parfois les pensées intérieures se confrontent à des données objectives. Cette construction du récit et les effets stylistiques donnent au livre un caractère étrange et fascinant.
L'arrestation d'un coupable acceptable aux yeux de la population met un terme aux enquêtes journalistiques et policières, elle évite de révéler aux yeux du monde une vérité beaucoup plus horrible, un pan noir de l'histoire du Japon, les crimes contre l'humanité commis par des militaires japonais en Chine. Pour les américains qui sont au lendemain de la guerre jusqu'en 1950 les véritables maîtres du Japon, il s'agit de reconstruire un pays en s'appuyant sur ses anciens cadres fussent-ils des criminels de guerre.
Sous couvert d'un enquête policière, David Peace présente comme dans tout bon roman noir une vision critique voire désespérée de la société puisque les victimes sont toujours les faibles, les plus démunis alors que les puissants même criminels continuent de régner à l'image de l'empereur Hirohito. Ce roman dérangeant tant au niveau de la structure que du fond est donc extrêmement pessimiste et noir. Il faut faire un effort pour y entrer et le lire lentement, en lui consacrant du temps, mais la récompense est au bout : la rencontre d'un véritable auteur.

capture-d_ecran-2010-05-27-a-10-14-261.1287673206.png Avec mes remerciements à Dialogues croisés et aux Editions Payot.

mercredi 17 novembre 2010

Vaucluse ou la vallée Close : François Pétrarque et René Char

 

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Rivière trop tôt partie, d'une traite , sans compagnon,
Donne aux enfants de mon pays le visage de ta passion.
René Char


La littérature du Vaucluse, région  qui voit le jour dans la Vallis Clausa, la vallée Close, résurgence  de la Sorgue aux eaux vertes, est ancrée dans un "pays" géographique où les lieux sont nommés et tracent des itinéraires concrets. Cette  littérature, qui se nourrit de la "chair "d'une région, a pour cadre les grandes villes, Orange, Carpentras, Cavaillon, et Avignon, altière, dominant le Rhône... Elle évoque aussi les paysages colorés, odorants, changeants, soumis aux caprices de la nature : l'eau, le vent, le soleil ...  Elle s'imprègne de composantes  géographiques précises : rivières, plateaux calcaires et montagnes....
Vallis Clausa 

Avignon, c'est l'enfance et surtout l'obsession des eaux. Il y a là deux fleuves, le Rhône et la Durance. J'ai vécu longtemps à leur confluent.  j'ai connu leur violence, leur brutale personnalité, leur grandeur
écrit Henri Bosco dans ses Souvenirs d'enfance. Cette obsession caractérise la plupart des auteurs qui ont écrit sur le Vaucluse. Entre les bras de Durance et Rhône qui forment ses frontières naturelles, Vaucluse naît donc de l'eau, sources bruissantes des hauts plateaux de Sault, ruisseaux capricieux qui dévalent les pentes du Lubéron, filets argentés qui s'infiltrent dans les hauteurs des monts Ventoux ou du Vaucluse, de la montagne de Lure...
Et puis, dans la Vallée Close qui lui donne son nom jaillit à la lumière la source mystérieuse qui est, dit Georges de Scudéry, écrivain du XVIIème siècle, originaire d'Apt, en mesme temps et Fontaine et Rivière : La Sorgue. Elle se rue dans la vallée telle le serpent légendaire, la Coulobre, chassée par Saint Véran. Enfin guidée par l'homme, elle se ramifie et devient plurielle, les Sorgues, réseau hydrographique complexe comme une toile d'araignée que  l'Ouvèze recueille.
Lorsque poètes et écrivains célèbrent l'eau du Vaucluse dans leurs oeuvres, ils choisissent d'abord de l'évoquer comme source vie, rivières des frais ombrages  et des berges fleuries. La Fontaine du Vaucluse et les rives de la Sorgue avant de devenir des sites mythiques hantés par les fantômes de Laure et de Pétrarque sont d'abord, en effet, des lieux paisibles où promeneurs et poètes vont chercher refuge.
   François Pétrarque et René Char

Quand François Pétrarque s'installe près de la Fontaine en 1537, au pied du château des évêques de Cavaillon, c'est pour chercher un refuge éloigné de la ville d'Avignon. De cet endroit, il écrit à ses amis italiens et avignonnais, des lettres restées célèbres, publiées dans un recueil Séjour à Vaucluse (Rivages-poche)
L'aspect troublé de la ville écrit-il à son ami, Gulielmo di Pastrengo, légiste et humaniste véronais, et le doux amour d'une campagne charmante m'avaient poussé à visiter les eaux transparentes et la source admirable de la Sorgues qui donne aux poètes un  puissant aiguillon et au génie de vaillantes ailes. .. Une partie est bordée par une rivière profonde et l'autre est entourée d'une montagne neigeuse aux roches escarpées dont les hauteurs s'opposent à l'Auster (mistral) brûlant; c'est là que se répand l'ombre vers le milieu  du jour.
Il y décrit sa vie avec son métayer pour tout serviteur et pour compagnon son chien fidèle. Là, il cultive son jardin où les fleurs printanières le ravissent. Il goûte les joies frugales et rustiques de la campagne au coin du feu, l'hiver, pendant les longues nuits froides, et sous la fraîcheur des feuillages en été où l'on se réfugie pour échapper à l'ardeur du soleil.  Il y apprend aussi à pêcher, à manier avec dextérité les filets et s'émerveille de son nouveau savoir :
Devenu pêcheur, je manie, au lieu d'épées, des hameçons recourbés munis d'appâts trompeurs..
Quelques siècles après une autre voix de poète s'élève dans ces mêmes lieux. C'est, en effet, ce charme calme et un peu hors du temps que célèbre René Char dont la vie a été baignée par la rivière aux eaux vertes :
J'avais dix ans. La Sorgue m'enchâssait. Le soleil chantait les heures sur le cadran des eaux (  Déclarer son nom)
La propriété familiale aujourd'hui disparue où coule un petit affluent de la Sorgue, les Névons, a été témoin de l'enfance du poète :
Dans le parc des Névons/Ceinturé de prairies/Un ruisseau sans talus/ Un enfant sans ami/ Nuancent leur tristesse/ Et vivent mieux ainsi (Jouvence des Névons)
C'est ainsi qu'à des centaines d'années de distance s'établit un dialogue entre les deux poètes les plus connus de la Sorgue :
De Pétrarque à Char ... Deux hommes si différents, éloignés dans le temps, les préoccupations, les mentalités. Et pourtant leurs voix s'entrelacent, se nouent, s'éloignent comme un soupir, pour revenir bientôt en écho, dans un même chant célébrant la Rivière :
Vous verriez les oiseaux aériens faire leur nid à la cime des branches verdoyantes ,les oiseaux fluviatiles bâtissant leur nid sur un écueil, les uns tapissant de mousse, les autres de feuillage; la faible couvée agitant sous des ailes amies et prenant sa nourriture d'un bec tremblant. Les voûtes  des grottes retentissent alors de chants harmonieux,  d'un côté la couleur appelle les yeux, de l'autre le son attire l'oreille écrit Pétrarque .
Je suis épris de ce morceau tendre de campagne, de son accoudoir de solitude au bord duquel les orages viennent se dénouer avec docilité, au mât duquel un visage perdu, par instants s'éclaire et me regagne. De si loin que je me souvienne, je me distingue, penché sur les végétaux du jardin désordonné de mon père, attentif aux sèves, baisant des yeux formes et couleurs que le vent semi-nocturne irriguait mieux que la main infime des hommes renchérit Char.
Pétrarque : L'automne vous fournit des fruits délicieux 
Char : L'automne! Le parc compte ses arbres bien distincts. Celui-ci est roux traditionnellement; cet autre fermant le chemin est une bouillie d'épines
Char : Tigron, mon chien, bientôt tu seras un grand cerisier et je ne saisirai plus la connivence de ton regard, ni le tremblement de l'anse de ton museau, ni se projetant de  droite et de gauche tes abois prévenants jamais ennuyeux.
 Pétrarque : De plus mon chien fatigue de ses sauts les collines et les rivières; il imite de sa voix criarde le chant des enfants et fait des choses risibles. Ennemi implacable des oies qui se plaisent dans les bas-fonds, il les poursuit sur le rivage et sur les écueils élevés.
Si pour Pétrarque Vaucluse représente un moyen d'échapper aux intrigues de la cour papale pour goûter la méditation et chanter son amour pour Laure loin des déchirements de la passion, la Sorgue est  tout aussi vitale pour Char.  Ce pays à la fois réel et mental est pour lui la Contre-Terreur qui lui permet de résister aux fureur et mystère d'une époque troublée :
La contre-terreur, c'est ce vallon que peu à peu le brouillard comble, c'est le fugace bruissement des feuilles comme un essaim de fusées engourdies, c'est cette pesanteur bien répartie, c'est cette circulation ouatée d'animaux et d'insectes tirant mille traits sur l'écorce tendre de la nuit, 
La Chanson pour Yvonne intitulée La Sorgue permet de découvrir  toute l'importance que cette rivière revêt pour lui, elle qui préside à sa vocation de poète et conserve l'homme adulte à lui-même en le gardant fidèle et pur à la création poétique :
Rivière  au coeur jamais détruit dans ce monde fou de prison
Garde nous violent et ami des abeilles de l'horizon.

Il serait facile de montrer les dissemblances existant entre les deux poètes, notamment dans leur univers mental, leur mode de pensée, mais j'ai préféré souligner la similitude de ces deux voix qui, se rejoignant au-delà siècles, me paraissent très pures et très belles .

dimanche 14 novembre 2010

Herta Müller : la bascule du souffle


Dans La bascule du souffle, Herta Müller* écrit pour la première fois sur un sujet qui est resté longtemps tabou, l'internement, en 1945, dans des camps de travaux forcés russes, des hommes et des femmes appartenant à une minorité germanophone en Roumanie, pays qui jusqu'à sa capitulation devant la Russie en 1944  a soutenu l'Allemagne nazie.
Le personnage principal Léopold a dix sept ans. Il est envoyé en Russie où il restera cinq ans. Ces camps n'ont rien à envier aux camps de concentration nazis. Les conditions de travail à l'usine sont terribles, les conditions de vie des ouvriers aussi. Les prisonniers doivent survivre avec un ration de pain et deux soupes à l'eau claire par jour. La faim fait des ravages dans leur rang. Les internés souffrent des écarts de température excessifs entre l'hiver glacial et l'été torride contre lesquels rien ne les protège. Ils sont obligés de dépouiller les cadavres de leurs vêtements pour se protéger du froid.  Le manque d'hygiène, les poux, les maladies, les accidents du travail achèvent les autres.
Le récit est raconté à la première personne par Léopold. L'homosexualité du jeune homme, à une époque où celle-ci entraînait des peines sévères en Roumanie et la mort dans l'Allemagne Hitlérienne, fait déjà de lui un être en marge, qui doit exercer un contrôle continu sur lui-même. Dans le camp, pour se protéger, il refuse tout sentiment, cherche à s'insensibiliser. Il ne pleurera que deux fois : la première, le jour où il reçoit une carte de sa mère avec la photographie d'un petit frère né après son départ; celui-ci semble l'avoir remplacé dans le coeur de sa mère qui n'a aucun mot d'affection pour lui.  Et la deuxième fois, le jour de son retour au pays.
Le moyen le plus sûr de survie pour Léopold est sa manière de percevoir le monde. Les objets, la nature, les choses sont doués de vie : sa pelle en forme de coeur est vivante, elle règne en maître. L'outil, c'est moi, elle collabore pour qu'il parvienne à pelleter, le ciment est fourbe, il guette sa proie, prêt à l'ensevelir dans le silo au moindre faux pas. La faim est omniprésente, elle se présente sous la forme d'un Ange. L'Ange de la faim donne de mauvais conseils :  pourquoi ne pas lâcher prise..., il bouscule mon souffle. La bascule du souffle est un délire, et quel délire. On doit résister à l'Ange de la faim, ne pas écouter ses propos insidieux; on doit lui répondre même lorsque sa chair fond, que l'on devient de plus en plus léger : Mais je ne suis pas ma chair. Je suis autre chose et je ne vais pas lâcher prise.
C'est ainsi que le style de Herta Müller transfigure le réel, c'est ainsi que naît une poésie de l'horrible. J'ai été très sensible à cette transposition, à cette façon de prêter vie aux choses inanimées qui fait ressortir d'autant plus la déshumanisation des êtres vivants qui ont pourtant une grandeur certaine dans leur refus d'abandonner la lutte. Cependant, il y a une telle froideur dans le personnage du fait qu'il crée volontairement une distanciation par rapport à ce qu'il vit, que l'on se sent extérieur au récit. Nous sommes placés en observateurs, nous sommes pénétrés par l'horreur du récit mais jamais nous ne sommes partie prenante. C'est ce qu'a voulu l'écrivain mais ce qui m'a manqué, à moi, lectrice,  ce sont l'émotion et  l'empathie avec les personnages.
*Herta Müller est un écrivain  d'origine roumaine  appartenant à une minorité germanophone. Elle vit maintenant en Allemagne et a reçu le prix Nobel en 2009. Sa mère a été envoyée dans un camp de travail et c'est le poète roumain Oskar Pastior lui aussi déporté qui a fourni à l'écrivain les matériaux nécessaires pour écrire ce livre..
 
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Merci à Dialogues croisés et aux éditions Gallimard

samedi 13 novembre 2010

Paul Eluard, Je te l’ai dit pour les nuages…




Je te l'ai dit pour les nuages  
Je te l'ai dit pour l'arbre de la mer
Pour chaque vague pour les oiseaux dans les feuilles
Pour les cailloux du bruit  
Pour les mains familières  
Pour l'oeil qui devient visage ou paysage  
Et le sommeil lui rend le ciel de sa couleur
Pour toute la nuit bue
Pour la grille des routes 
Pour la fenêtre ouverte pour un front découvert
Je te l'ai dit pour tes pensées pour tes paroles
Toute caresse toute confiance se survivent.
 
Et quand tu n'es pas là
 Je rêve que je dors je rêve que je rêve.

  Premièrement (extraits)

Les compagnons Troubadours du dimanche :
Edelwe, Mango, Abeille, Emmyne, Chrestomanci, Mariel, Laurence , Ankya, Herisson08, Anjelica , George, Uhbnji , Fleur, Esmeraldae, Armande, Satya, Zik, Lystig, Amos, Bookworm, Emma, Julien, Marie, Yueyin , Soie , Alex , Hambre , Katell , Mathilde, Schlabaya, Hilde, Saphoo, La plume et la page, Tinusia, Chrys, Roseau, MyrtilleD, Cagire, Caro[line], L’or des chambres, Violette, claudialucia, Séverine, Maggie, Sev, Azilis.