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samedi 17 novembre 2012

Un livre/ Un film : Enigme n°48






Pour les nouveaux venus : De quoi s'agit-il?

Wens de En effeuillant le chrysanthème et moi-même, nous vous proposons, le samedi, un jeu sous forme d'énigme qui unit nos deux passions : La littérature et le cinéma! Il s'intitule : Un livre, Un film.
Chez Wens vous devez trouver le film et le réalisateur, chez moi le livre et l'auteur.
Consignes :  Vous pouvez donner vos réponses par mail que vous trouverez dans mon profil : Qui êtes-vous? et  me laisser un mot dans les commentaires sans révéler la réponse pour m'avertir de votre participation. Le résultat de l'énigme et la proclamation des vainqueurs seront donnés le Dimanche.
Pendant les vacances, nous arrêtons le jeu Un livre/ Un film.

 Enigme n°48

Ce roman d'un auteur  italien a obtenu deux prix littéraires en 2006 et 2008. Il parle d'un homme que le décès de sa femme plonge dans une sorte d 'hébétude qui va transformer le cours de sa vie.


Le même soir, peu après m'avoir demandé des nouvelles de cette "dame" alors qu'elle était déjà en pyjama dans son lit et que je m'apprêtais à lui lire un chapitre du livre qui la passionne, Claudia, m'a cloué sur place d'une question parfaite : "Tu sais, ma-t-elle demandé, ce qui m'avait le plus troublé dans ma vie?". Textuellement. Et avant que je ne commence à m'inquiéter encore plus en constatant combien était implicite le fait que l'histoire du sauvetage se reliait au verbe troubler et combien impitoyablement l'emploi de l'imparfait, "m'avait" pouvait laisser entendre "jusqu'à la mort de maman" mais aussi plus subtilement "jusqu'à ce que j'apprenne ce que tu faisais pendant la mort de maman", avant que je plonge dans tout ça, c'est à dire juste après qu'elle a formulé la question, elle m'a donné la réponse : " c'est quand j'ai découvert que ma mamie  était aussi ta maman" avec un sourire de tendresse envers elle-même

mercredi 14 novembre 2012

Anatole Le Braz : Le gardien du feu ou l'amour impossible d'un Léonard et d'une Trégorroise


La pointe du Raz et le Phare de Gorlébella




Anatole Le Braz  (1859_1926) est né en Bretagne dans les Côtes-d'Armor à Saint-Servais dans une famille d’instituteurs publics, défenseurs de l’idéal républicain. Il a vécu une partie de sa jeunesse en Bretagne avant d'aller faire des études lettres-philosophie à la Sorbonne. Poète et écrivain, il se passionne aussi pour le folklore de sa région et collecte de nombreuses légendes, des témoignages de la vie quotidienne. Il a été le disciple d’Ernest Renan et de François-Marie Luzel,  folkloriste.  Il s’est insurgé très tôt contre la politique d’étouffement de la langue bretonne. Féministe convaincu, véritable père fondateur du Mouvement breton dès 1898, il a toujours privilégié la plus large ouverture possible sur le monde, conjuguée à l’obsession constante de l’Au-delà et de l’Ailleurs. Son oeuvre la plus célèbre reste : La légende la mort en basse-Bretagne (1893). Il a publié de nombreux écrits sur la Bretagne : Au pays des Pardons (1894)  Au pays d'exil de Chateaubriand (1909) des contes et nouvelles : Vieilles histoires du pays breton (1897), Contes du soleil et de la brume (1905) Le sang de la sirène (1901), Les noces noires de Guernaham, Le Gardien du feu (1900)...





Je vous l'ai dit à propos du roman de Rachilde La Tour d'amour, les phares bretons inspirent aux écrivains des romans sombres et tourmentés tout comme le sont les personnages qui y vivent! Dans Le gardien du Feu d'Anatole Le Braz, c'est le phare de Gorlébella en plein Raz qui sert de décor pour cette histoire d'amour et de jalousie proche de la folie.

Le phare de Gorlébella est resté éteint toute une nuit. Ce fait insolite et inquiétante attire une équipe de secours qui découvre deux cadavres, un homme et une femme, enfermés dans une chambre cadenassée du phare. Quant à Goulven Dénès, le gardien chef, il a disparu après avoir laissé un journal où il explique le drame atroce qui vient de se jouer. Le récit raconte sa rencontre avec une belle fille de Tréguier, Adèle Lézurec, dont il tombe éperdument amoureux. Il l'épouse et l'amène à la pointe du Raz, dans le hameau où sont logés les trois gardiens de Gorlébella qui travaillent en alternance, un mois en mer suivi de quinze jours de congé. Or la jeune femme abandonnée à elle-même, sans amis, dans un lieu battu par les vents et les tempêtes, s'ennuie et déprime. Aussi quand l'un des gardiens du phare est remplacé par Louan, un jeune trégorrois comme elle, gai et charmeur, ce qui doit arriver, arrive!

Vous l'avez compris, l'intérêt du roman ne porte pas sur le suspense du récit, sur ce qui va se passer mais sur le pourquoi et le comment. 
L' explication psychologique du drame, avancée par Anatole Le Braz, est pour le moins curieuse aux yeux du lecteur du XXI ème siècle habitué au brassage des populations. Un gars du Léon n'épouse pas une fille de Tréguier. Le Léonard est sévère et sombre, marqué par la religion, la trégorroise est légère, rieuse, aime s'amuser et danser. Il y a une incompatibilité de caractère entre eux. L'analyse psychologique des personnages montrent bien, en effet, la différence de comportement des deux époux. Cependant, l'immense amour et l'admiration que Goulven voue à Adèle et sa gentillesse envers elle compensent son austérité tant qu'ils sont dans des villes accueillantes. C'est en arrivant dans le village de la Pointe du Raz que leurs relations se gâtent. Adèle ne peut supporter la solitude, la sauvagerie de ses voisins, et l'atmosphère qui règne dans ce lieu aride et désolé, ce sinistre paysage, un dos de promontoire nu et comme rongé par la lèpre, troué çà et là par des roches coupantes, de monstrueuses vertèbres de granit.". L'influence de cette région inhospitalière va donc provoquer le drame et la désunion du couple. La personnalité de Goulven terrassé par la jalousie se révèle alors. Entier dans son amour, il ne peut supporter la trahison et la duplicité de sa femme, et devient un monstre insensible à la pitié. Le phare servira sa vengeance!
L'auteur dénonce ici les excès de la religion catholique qui prive les hommes de la joie de vivre et considère le bonheur comme un péché. Une pratique de la religion qui joue sur la peur et la renonciation et non sur la bonté puisque Goulven confronté au mal se fermera à tout sentiment d'humanité et de pardon.
 "On voit bien que tu as été élevé pour la prêtrise, dit Adèle à Goulven, dans un contrée où les jeunes filles se croiraient damnées, si elles chantaient ailleurs qu'à la messe.Tu parles de tout et même de l'amour, sur un ton de prêcheur. "

Le portrait d'Adèle est plein de charme et c'est à elle que va la sympathie du lecteur. Goulven l'admire:
Vous autres, filles du Trégor, lui disais-je, vous avez eu des fées pour aïeules; elles vous ont légué des secrets magiques.. Les femmes de chez nous ne savent que prier les saints et filer de la laine. Toi et tes pareilles, vous êtes des tisseuses de beaux rêves.

Mais il la condamne sans appel à cause de ce qu'il aime justement chez elle, sa légèreté, sa séduction, sa soif de bonheur. Anatole le Braz en analysant ainsi les contradictions du personnage témoignent d'une grande habileté dans la connaissance de la psychologie. Il a aussi l'art de peindre des atmosphères, de décrire un paysage en nous en faisant sentir les maléfices, de transformer un atroce fait divers en tragédie. Un écrivain à découvrir!

Voir le billet de Miriam sur Le Gardien du feu  

Voir aussi les autres romans de Le Braz  :
 Le sang de la sirène
Les noces noires de Guerneham




lundi 12 novembre 2012

Marc Dugain : L'insomnie des étoiles



Si La chambre des officiers traitait des atrocités de la guerre de 1914 à travers la souffrance des hommes blessés au visage, L'insomnie des étoiles peint l'horreur du nazisme. A croire que Marc Dugain n'a de cesse d'explorer ce qu'il y a de plus bas dans la nature humaine, sa soif de destruction, cette violence qui est en elle! Les étoiles qui nous contemplent n'en ont pas fini, c'est certain, d'être insomniaques!
Nous sommes en Automne 45, une compagnie de soldats français avec, à leur tête, le capitaine Louyre découvre une jeune fille, Maria, dans une ferme isolée. Ils ne savent rien d'elle et s'interroge sur le cadavre d'un soldat calciné qu'ils découvrent à côté d'elle. Ils l'amènent dans la ville voisine où le capitaine va mener une enquête : Que s'est-il passé dans cette ferme? La jeune fille a-t-elle tué cet homme? Mais ses recherches prennent bientôt une orientation plus générale : pourquoi la maison de repos de la ville a-t-elle était fermée? Que sont devenus les handicapés et les malades mentaux qui y étaient abrités?
L'habileté du récit est de rendre le lecteur plus savant que le personnage car nous savons ce qui s'est passé dans la ferme avant l'arrivée de l'armée française puisque nous avons assisté au drame et la pratique de l'eugénisme, une des hontes du nazisme, nous est connue aussi. Ce qui n'est pas le cas du capitaine Louyre qui s'enfonce dans l'horreur. Le roman montre comment le régime nazi a pu amener peu à peu des hommes apparemment normaux à perpétrer ces crimes. Comment l'on peut composer avec sa conscience s'il s'agit d'obéir aux ordres les plus iniques jusqu'à s'en trouver justifié. C'est le cas du docteur Halfinger. C'est un sujet qui n'est pas neuf et que j'ai eu l'occasion de découvrir à travers des films ou des lectures comme La Mort est mon métier de Robert Merle ou Au fond des ténèbres de Gitta Sénery.
Ce qu'il y a de particulier dans Marc Dugain, tout au moins dans les deux livres que j'ai cités, c'est que, tout en constatant que la nature humaine est foncièrement mauvaise, il place en contrepoint un ou plusieurs hommes qui s'élèvent au-dessus de cette triste humanité. Dans La chambre des officiers, les gueules cassées parvenaient par leur courage, leur amitié et leur solidarité à redonner de la couleur à la vie. Ici, c'est le capitaine Louyre qui en prenant soin de Maria dont la santé mentale vacille, incarne le bien, d'une manière peut-être un peu trop rigide et trop démonstrative pour être totalement sympathique. C'est peut-être pour cela que j'ai préféré le récit quand il adoptait le point de vue de Maria. Je me suis moins intéressée quand le centre d'intérêt se déplace et adopte celui de Louyre. Quoi qu'il en soit L'insomnie des étoiles est un bon roman qui a le mérite  de sonder les gouffres noirs de notre Histoire et de s'interroger sur l'Homme.






dimanche 11 novembre 2012

John Mead Falkner : Moonfleet



Résultat de l'énigme n°47
Les contrebandiers ayant réussi leur coup sont : Aifelle, Dasola. Eeguab, Keisha, Pierrot Bâton.. Merci aux autres contrebandiers malchanceux ! Si vous voulez lire ou voir le livre ou le film, inscrivez-vous, ils voyagent!



le roman de John Mead Falkner : Moonfleet
 Le film de Fritz Lang : Les contrebandiers de Moonfleet






John Mead Falkner est né en 1858. Son père est un ecclésiastique (ce qui explique peut-être le caractère moral de son récit). Après un voyage en Europe, Falkner travaille dans le secteur de l'armement. Ses nombreux voyages d'affaires lui laissent l'occasion d'écrire quelques romans: The Lost Stradivarius (1895) et The Nebuly Coat (1903), deux textes fantastiques dans la tradition de Sheridan Le Fanu, et Moonfleet (1898). Il semble qu'il ait cessé d'écrire à la suite de la perte d'un manuscrit (un récit dans la veine de Moonfleet): découragé, il n'eut jamais le courage de reprendre la plume. Il écrit également des vers, dont on tirera un recueil après sa mort, qui survient en 1932. source


Moonfleet de John Mead Falkner, qui parut en 1898, est surtout connu par le film de Fritz Lang qui est un chef d'oeuvre mais le roman ne lui cède en rien. Grandement influencé par Stevenson et L'île au trésor, il fait partie de ces livres d'aventures qui marquent l'imaginaire et dépassent par leur signification l'histoire même pour devenir mythe. C'est pourquoi Thomas Hardy et Stevenson lui-même accueillirent ce livre avec enthousiasme. 


le petit John Whiteley avec Steward Granger,

Le roman et le film sont pourtant très différents. Le personnage tourmenté de Jeremy Fox dans l'oeuvre de Fritz Lang, déchiré entre le Bien et le Mal, hanté par son amour impossible et par la soif de vengeance et  incarné si magnifiquement par Stewart Granger, n'existe pas! Quant à l'enfant, John Trenchard, il n'est pas le noble héritier des Mohune comme dans le film, fils de la femme aimée par Fox, mais un petit orphelin pauvre recueilli par sa tante et qui trouve dans Elzevir Block, le cabaretier du Pourquoi Pas, un père adoptif. Le film finit avec la découverte du diamant de Barbe Noire et la mort de Jeremy Fox. Alors que dans le roman l'intrigue continue au-delà  puisqu'il faudra dix ans de souffrance à John pour revenir au pays et retrouver la jeune fille qu'il aime. Et pourtant malgré ces importantes variations, le film et le roman se rejoignent et conservent l'essentiel, l'essence même du récit, ce mélange de mystère et de secret qui est la vision de l'enfance. Car le récit de Falkner  est mené à la première personne par John Trenchard, un jeune garçon âgé de 15 ans, et le regard qu'il porte sur le monde qui l'entoure transcende les lieux et les faits et leur confèrent une aura magique. L'univers de Falkner est baigné par les clairs-obscurs, la crypte éclairé par les chandelles où John, dissimulé contre le cercueil de Barbe Noire, découvre les contrebandiers, le souterrain où il se cache quand il est poursuivi par la police, le puits où il descend chercher le trésor, le bagne où il est enfermé.. Et puis il  y a la lumière que Grace (un personnage qui n'existe pas dans le film), la fille de du magistrat Maskew (dans le film Lord Ashwood) tient allumée à sa fenêtre pour guider les marins dans les ténèbres de la nuit. Ombre et lumière, c'est le combat entre le bien et le mal qui est au centre du récit dans le livre comme dans le film. Enfin, le roman met en valeur la puissance de la nature qui exerce une étrange influence sur le jeune garçon, cet océan dont la présence est obsédante, qui rythme la vie et la mort, et dont le bruit et la fureur ne cessent de nous hanter en particulier dans la bouleversante scène finale où John Tranchard naufragé est arraché aux entrailles de la mer par le sacrifice de son ami le plus cher.
Ce roman porté par un très beau style est vraiment passionnant. Il est imprégné de la nostalgie et  la tristesse sourde qui accompagnent ceux qui font un retour sur la vie et en constatent les erreurs. Pourtant si le mal et la noirceur existent, c'est sur une image de clarté que se clôt le roman, celle de Grace, qui montre que l'amour est plus fort que la mort. Deux très belles oeuvres pour un seul récit qu'il faut avoir lues et vues absolument!


Livre et DVD voyageurs : inscrivez-vous!




samedi 10 novembre 2012

UN livre/un film : Enigme n° 47






Pour les nouveaux venus : De quoi s'agit-il?

Wens de En effeuillant le chrysanthème et moi-même, nous vous proposons, le samedi, un jeu sous forme d'énigme qui unit nos deux passions : La littérature et le cinéma! Il s'intitule : Un livre, Un film.
Chez Wens vous devez trouver le film et le réalisateur, chez moi le livre et l'auteur.
Consignes :  Vous pouvez donner vos réponses par mail que vous trouverez dans mon profil : Qui êtes-vous? et  me laisser un mot dans les commentaires sans révéler la réponse pour m'avertir de votre participation. Le résultat de l'énigme et la proclamation des vainqueurs seront donnés le Dimanche.
Pendant les vacances, nous arrêtons le jeu Un livre/ Un film.

 Enigme n°47

Ce roman qui a influencé un des chefs d'oeuvre du cinéma est une oeuvre de l'époque victorienne moins connue en France qu'en Angleterre! Et c'est bien dommage car son auteur nous livre un récit d'aventures passionnant mais aussi une réflexion philosophique pleine de nostalgie. Et si je vous dis que ce livre a  été influencé, tout en restant très personnel, par lLîle au trésor de Stevenson...? 
Derrière tout cela la mer éternelle, toujours pareille et toujours changeante, s'étend comme un rideau. Mais j'aime par dessus tout la regarder lorsqu'elle est fouettée jusqu'à la furie par la tempête d'automne, et j'aime entendre son grondement profond tel un grand orgue, quand elle roule les galets dans la nuit. Alors je me retourne dans mon lit et je remercie Dieu, d'un coeur plus sincère peut-être que tout homme vivant, de ne pas être sur la plage de ..... à lutter pour ma vie.  Plus d'une fois, je me suis trouvé, une corde à la main, dans ce même lieu terrible, tentant de sauver quelque pauvre naufragé, mais jamais je n'en ai vu aucun franchir vivant les déferlantes, par une nuit semblable à celle où Elzévir me sauva.

 Livre et DVD sont voyageurs : ça vous dit?

vendredi 9 novembre 2012

Des mots, une histoire : Combat de Titans











 Combat de Titans




Comme des chaussures qui scintillent sur la banquise, satinées     
Comme en apnée d'admiration sur le circuit de nos idées
Comme la vérification ultime d'un vil canular susceptible
De mentir et d'emménager dans le sous-sol de nos pensées
Comme un tournoi où ils s'affrontent, le surineur et le kiné
Se sont battus, se sont traînés sur le noir pavé  de nos nuits
Comme un combat de chevaliers, le choc des lances a explosé
Mais le tueur a pardonné!

dédié à Eeguab et Wens
















Cette fois-ci, j'ai déclaré forfait avec les mots imposés dans l'atelier d'écriture d'Olivia. Et puis impressionnée par le combat de titans des susnommés, j'ai écrit ce petit texte : apnée – admiration – tournoi – vérification – pardonner – mentir – circuit – chaussures – canular – susceptible – emménager – satiné – banquise – cape – scintiller – pavé

jeudi 8 novembre 2012

Jasper Fforde : L'affaire Jane Eyre



Biographie de l'auteur  

Jasper Fforde vit au pays de Galles. Après avoir travaillé vingt ans dans l'industrie cinématographique, il a choisi de concrétiser son rêve d'enfant : devenir écrivain. Son premier roman, L'Affaire Jane Eyre, situé à la frontière entre le thriller littéraire et le conte fantastique, est devenu un livre culte aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne. 

Présentation de l'éditeur

"Dans le monde de Thursday Next, l'héroïne principale de la série littéraire qui porte son nom,  la littérature fait quasiment office de religion. A tel point qu'une brigade spéciale a dû être créée pour s'occuper d'affaires aussi essentielles que traquer les plagiats, découvrir la paternité des pièces de Shakespeare ou arrêter les revendeurs de faux manuscrits. Mais quand on a un père capable de traverser le temps et un oncle à l'origine des plus folles inventions, on a parfois envie d'un peu plus d'aventure. Alors, lorsque Jane Eyre, l'héroïne du livre fétiche de Thursday, est kidnappée par Achéron Hadès, incarnation du mal en personne, la jeune détective décide de prendre les choses en main et de tout tenter pour sauver le roman de Charlotte Brontë d'une fin certaine... " Au croisement du roman policier et de l'uchronie déjantée, Jasper Fforde signe un ouvrage jubilatoire. " Le Monde des livres.


J'avais ce livre depuis longtemps dans ma PAL mais chaque fois que je lisais les premières pages, j'abandonnais, ne parvenant pas à entrer dans ce monde imaginaire. Je trouvais les explications peu claires et pour tout dire rébarbatives, à tort finalement. Ce qui m'a introduit dans le livre, c'est le challenge Thursday Next d'Alice dan le blog Books are my wonderland sur lequel je suis tombé par hasard  et qui dressait la liste de toutes les oeuvres et tous les auteurs que l'on rencontrait dans cette série. Je me suis dit alors qu'un livre qui témoignait d'un si grand amour de la littérature ne pouvait pas être mauvais! Et je l'ai lu! Une fois les première difficultés surmontées pour m'adapter à cet univers pour le moins étrange, j'ai éprouvé beaucoup de plaisir non tant par l'histoire elle-même, le "thriller"  qui oppose Thursday Next à l'infâme Achéron Hadès, mais pour toutes les allusions à la littérature, l'imagination débridée qui nous projette dans les livres que nous aimons tant, la rencontre des personnages qui sont pour nous des amis de longue date. Que celui qui n'a jamais rêvé de  rencontrer "pour de bon" le Mr  Rochester de Jane  me jette la première pierre! Et puis il y a l'humour : Ainsi en pénétrant dans le livre pour sauver Jane Eyre  nous allons changer le dénouement car, le croyez-vous? Charlotte Bronté n'avait pas écrit la fin que nous connaissons tous!

 J'aime beaucoup, entre autres, les allusions à Shakespeare! Dans l'univers de Jasper Fforde où la littérature est le fondement de la civilisation et où l'on est capable de tuer ou de se faire tuer pour sauver l'héroïne d'un roman en danger, les Baconiens font du porte à porte comme le font les membres d'une secte religeuse pour chercher à vous convaincre! J'apprécie particulièrement cet épisode plein d'humour surtout après avoir moi-même rencontré des Baconiens fanatisés! Mais qu'est-ce qu'un Baconien?

J'entrouvris la porte retenue par une chaînette et aperçus un petit homme en costume de velours avachi. Il brandit une plaque d'identité  écornée et souleva poliment son chapeau avec un sourire nerveux. les Baconiens étaient complètement cinglés, mais, pour la plupart d'entre eux, inoffensifs. Le but de leur existence était de prouver que c'était Francis Bacon et non William Shakespeare qui avait écrit les plus grandes pièces du théâtre anglais. Bacon, pensaient-ils, ne jouissait pas de la reconnaissance qui lui revenait de droit, et ils bataillaient inlassablement pour réparer cette injustice imaginaire.
-Bonsoir dit le Baconien d'un ton enjoué. Puis-je vous prendre quelques minutes de votre temps?
Je répondis lentement
- Si vous pensez me convaincre que Le songe d'une nuit d'été a été écrit par un juriste, c'est que je dois être plus bête que je n'en ai l'air

 Je pense que  si ce livre à un tel succès c'est qu'il nous permet de retrouver ce sentiment enfoui en nous, c'est que la littérature est parfois plus vraie, plus forte que la vie et que les personnages sont  nos amis les plus fidèles!


Voir le challenge Thursday Next d'Alice ICI






lundi 5 novembre 2012

Laurent Gaudé : Pour seul cortège


La mort d'Alexandre, c'est la mort d'un géant! L'univers entier en est secoué et cette chute a des répercussions sur toutes les nations mais aussi sur chaque individu qui l'entoure. C'est pourquoi Laurent Gaudé dans Pour seul cortège emprunte à l'épopée pour parler des derniers instants du grand conquérant et des  querelles de succession, des violences perpétrées par ses généraux qui se disputent sa dépouille car chacun à bien compris que le pouvoir irait à celui qui la détiendrait. Un immense et somptueux cortège autour de son cercueil en or, accompagné de pleureuses et de tous les siens, s'organise pour transporter ses restes. Mais à qui appartient vraiment Alexandre? Ce sont ses proches qui auront la réponse, et c'est avec une poignée d'hommes pour seul cortège, qu'il parviendra au bout du voyage.

Le texte est à plusieurs voix, celle de Dryptéis, la fille de Darius, celle du cavalier acéphale, Ericléops, celle d'Alexandre lui-même, des voix qui s'élèvent tour à tour, racontent, se recoupent, s'interrompent et forment comme un choeur polyphonique, une musique interne à la narration, parfois rapide, parfois ample comme les paysages qui défilent, comme ce long cortège qui s'étire à l'infini. Une épopée fantastique, irréelle, violente,  pleine de souffrances et où la mort règne en maître.

Je dois dire que j'ai admiré ce style ciselé, un travail d'orfèvre sur lequel l'on peut s'arrêter pour en repérer les beautés, les accents tragiques. Pourtant et étonnamment pour moi qui aime la poésie, je n'ai pas vraiment adhéré au récit, je me suis parfois même ennuyée. Cela vient du fait, je crois, que les personnages ne sont pas des êtres réels. Le style tient lieu de tout, seul importe la forme mais nous restons dans l'abstraction même d'un point de vue historique. L'histoire de Dryptéis est terrible, elle à qui Alexandre a tout pris, et qui se sacrifie pour sauver son enfant, mais ce n'est pas un être vivant. Ce qui lui arrive ne me touche pas. Je préfère le Gaudé, ancienne manière, celui de Le Soleil des Scorta. Là, des personnages de chair évoluent dans un paysage où l'on sent la brûlure du soleil et le poids réel de la vie.  Finalement, ce que je reprocherais le plus à Gaudé - et cette opinion n'engage que moi dans le concert de louanges qui retentit partout-  c'est que si je peux éprouver une admiration intellectuelle, au niveau des sentiments, c'est le vide absolu.


Merci à Price Minister pour cette lecture

dimanche 4 novembre 2012

Un livre/Un film : Les misérables de Victor Hugo


Résultat de l'énigme n°46

Félicitations à tous ceux qui ont reconnu Les Misérables de Victor Hugo et les Misérables de Robert Hossein : Aifelle, Asphodèle, Dasola, Eeguab, Keisha, Marie-Josée, Mireille, Miriam, Océane, Pierrot Bâton, Somaja..








On ne présente plus Les Misérables. Que nous l'ayons lu ou non, nous connaissons tous au moins quelques uns des personnages et quelques épisodes de l'histoire de ce roman fleuve paru en 1862 qui a marqué les esprits par ses thèmes et ses personnages. 

 Cosette Emile Bayard

L'autre jour comme ma petite fille de 2 ans1/2 s'emparait de mon balai, je l'ai appelée Cosette! Quand elle a su qui était cette petite fille, ce qui de fil en aiguille nous a amenées à faire connaissance des Thénardier, elle a déclaré : "moi, veux pas être Cosette!". Je crois que je l'ai dégoûtée pour la vie de faire le ménage! J'espère aussi que je l'aurais amenée pour la vie du côté de la justice et de la liberté. Tout ceci, non pas par la "faute" de Rousseau ou de Voltaire mais de Victor Hugo! Car des "misérables" notre société n'en a jamais autant comptés qu'en ce moment, depuis le XIX e siècle, et, tandis que ceux qui sont du côté du pouvoir s'en tirent toujours comme dans le roman, quel que soit le changement de régime, tandis que les grosses fortunes augmentent, les victimes de plus en plus nombreuses sont à la rue ou s'entassent dans des banlieues inhospitalières, dans des immeubles délabrés et dangereux.

Victor Hugo en était d'ailleurs très conscient puisqu'il écrivait en exergue de son oeuvre :

Tant qu’il existera, par le fait des lois et des mœurs, une damnation sociale créant artificiellement, en pleine civilisation, des enfers, et compliquant d’une fatalité humaine la destinée qui est divine ; tant que les trois problèmes du siècle, la dégradation de l’homme par le prolétariat, la déchéance de la femme par la faim, l’atrophie de l'enfant par la nuit, ne seront pas résolus ; tant que, dans de certaines régions, l’asphyxie sociale sera possible ; en d’autres termes, et à un point de vue plus étendu encore, tant qu’il y aura sur la terre ignorance et misère, des livres de la nature de celui-ci pourront ne pas être inutiles. » — Victor Hugo, Hauteville-House, 1862.

Hugo a commencé ce roman en 1845 sous la Restauration, puis il l'a interrompu pendant douze ans et enfin repris en 1860, au moment de  son exil à Guernesey pour fuir le régime de Napoléon III.
 Roman réaliste, historique et social

Roman réaliste et historique, Les Misérables reflète les évolutions politiques de l'auteur, d'abord royaliste puis bonapartisme et républicain. L'écrivain y décrit la société du XIX siècle en pénétrant dans tous les milieux sociaux, en décrivant la vie quotidienne de ses contemporains mais aussi les grandes luttes politiques et révolutionnaires. Il y développe ses idées sur la justice sociale, son combat contre la peine de mort et les sévices du bagne. Il dénonce l'égoïsme et l'indifférence des nantis et les ravages dont sont responsables la misère et les mauvais traitements sur le peuple. Il y présente ses idées philosophiques sur le Bien et le Mal et montre que le Bien ne peut l'emporter chez celui qui est maintenu dans la souffrance et l'ignorance. 


Un roman romantique
Mais les Misérables reste aussi un roman romantique. L'évocation de la  bataille de Waterloo prend des allures d'épopée, la grande solidarité des barricades balaie l'oeuvre d'un souffle puissant associée à l'idéal de liberté chère aux romantiques. Le thème de l'amour y est décliné sous toutes ses faces, celui de l'amour divin avec Monseigneur Bienvenu, de l'amour paternel de Jean Valjean envers Cosette, enfin l'amour partagé de Marius et Cosette. 
Romantique, enfin, le  style de Victor Hugo qui manie les images, les métaphores, les hyperboles, les contrastes, les clairs-obscurs, les antithèses. Un style qui donne à l'oeuvre une ampleur et une force épique animées par la foi en un monde meilleur et emplies d'émotion.


La mort de Gavroche, un style au service du romantisme 

 Le spectacle était épouvantable et charmant. Gavroche fusillé, taquinait la fusillade. Il avait l'air de s'amuser beaucoup. C'était le moineau becquetant les chasseurs. Il répondait à chaque décharge par un couplet. On le visait sans cesse, on le manquait toujours. Les gardes nationaux et les soldats riaient en l'ajustant. Il se couchait, puis se redressait, s'effaçait dans un coin de porte, puis bondissait, disparaissait, reparaissait, se sauvait, revenait, ripostait à la mitraille par des pieds de nez, et cependant pillait les cartouches, vidait les gibernes et remplissait son panier. Les insurgés, haletants d'anxiété, le suivaient des yeux. La barricade tremblait ; lui, il chantait. Ce n'était pas un enfant, ce n'était pas un homme ; c'était un étrange gamin fée. On eût dit le nain invulnérable de la mêlée. Les balles couraient après lui, il était plus leste qu'elles. Il jouait on ne sait quel effrayant jeu de cache-cache avec la mort ; chaque fois que la face camarde du spectre s'approchait, le gamin lui donnait une pichenette.
   Une balle pourtant, mieux ajustée ou plus traître que les autres, finit par atteindre l'enfant feu follet. On vit Gavroche chanceler, puis il s'affaissa. Toute la barricade poussa un cri ; mais il y avait de l'Antée dans ce pygmée ; pour le gamin toucher le pavé, c'est comme pour le géant toucher la terre ; Gavroche n'était tombé que pour se redresser ; il resta assis sur son séant, un long filet de sang rayait son visage, il éleva ses deux bras en l'air, regarda du côté d'où était venu le coup, et se mit à chanter :
Je suis tombé par terre,
C'est la faute à Voltaire,
Le nez dans le ruisseau,
C'est la faute à...
   Il n'acheva point. Une seconde balle du même tireur l'arrêta court. Cette fois il s'abattit la face contre le pavé, et ne remua plus. Cette petite grande âme venait de s'envoler."

Le texte de la mort de Gavroche est un exemple du style de Victor Hugo qui exalte les idées romantiques la liberté, met en valeur le personnage de Gavroche et le magnifie, transformant ainsi l'enfant en héros et même plus en symbole.
 Tout le texte est basé sur ces thèmes La mort/ le jeu  : avec des figures de style multipliant les antithèses et oxymores : épouvantable # charmant;  fusillé #taquinait; Visait sans cesse # /manquait toujours; tremblait# chantait; et Le grand/le petit : le moineau# chasseurs;  le gamin, nain # le géant; Antée # pygmée, petite#grande (âme)
 L'enfant devient ici le symbole de la Révolution en marche, de la liberté debout sur les barricades. On pense au tableau de Delacroix. Le gamin fée, l'enfant feu follet est auréolé par une lumière qui lui donne une aura surhumaine. Malgré sa fragilité, sa petite taille, sa solitude vis à vis de ses nombreux ennemis, il incarne une force supérieure, celle de l'Esprit et ceci bien que le combat physique soit perdu d'avance. La lutte pour la liberté ne peut  s'acheter que par le sang.
Le couplet que chante Gavroche montre aussi ce que les mouvements révolutionnaires doivent au Siècle des Lumières et aux grandes idées soicales, de justice, d'égalité et de liberté, à travers ces deux grands philosophes Rousseau et Voltaire.


 Delacroix : La liberté guidant le peuple


samedi 3 novembre 2012

Un livre/ un film : énigme n 46



Pour les nouveaux venus : De quoi s'agit-il?

Wens de En effeuillant le chrysanthème et moi-même, nous vous proposons, le samedi, un jeu sous forme d'énigme qui unit nos deux passions : La littérature et le cinéma! Il s'intitule : Un livre, Un film.
Chez Wens vous devez trouver le film et le réalisateur, chez moi le livre et l'auteur.
Consignes :  Vous pouvez donner vos réponses par mail que vous trouverez dans mon profil : Qui êtes-vous? et  me laisser un mot dans les commentaires sans révéler la réponse pour m'avertir de votre participation. Le résultat de l'énigme et la proclamation des vainqueurs seront donnés le Dimanche.
Pendant les vacances, nous arrêtons le jeu Un livre/ Un film.

 Enigme n°46
  Ce roman du XIX siècle, l'un des plus célèbres de la littérature française,  écrit par l'un des plus grands écrivains français, poète et homme politique, est peuplé de personnages inoubliables qui hantent notre imaginaire et on donné lieu à des types. Avec tous ces superlatifs, vous avez deviné peut-être? Sinon voilà un extrait, l'un  des plus connus...



Il avait l'air de s'amuser beaucoup. C'était le moineau becquetant les chasseurs. Il répondait à chaque décharge par un couplet. On le visait sans cesse, on le manquait toujours. Les gardes nationaux et les soldats riaient en l'ajustant. Il se couchait, puis se redressait, s'effaçait dans un coin de porte, puis bondissait, disparaissait, reparaissait, se sauvait, revenait, ripostait à la mitraille par des pieds de nez, et cependant pillait les cartouches, vidait les gibernes et remplissait son panier. Les insurgés, haletants d'anxiété, le suivaient des yeux. La barricade tremblait ; lui, il chantait. Ce n'était pas un enfant, ce n'était pas un homme; c'était un étrange gamin fée . On eût dit le nain invulnérable de la mêlée. Les balles couraient après lui, il était plus leste qu'elles. Il jouait on ne sait quel effrayant jeu de cache-cache avec la mort; chaque fois que la face camarde du spectre s'approchait, le gamin lui donnait une pichenette.
 

vendredi 2 novembre 2012

Hommage à Goya : L'enterrement de la Sardine


Francisco Goya : L'enterrement de la Sardine

Hommage à Goya

A l'enterrement de la Sardine
je ne veux pas aller maman
on met en terre Carnaval
On y embaume la Sardine
et la foule en ribambelle
Défile en fol cheminement
Dans un attelage funeste
Une cérémonie grotesque
Sous un ciel de larme et de deuil.

A l'enterrement de la Sardine

Je ne veux pas aller maman
Roses rose et ancolies frêles

Costumes blancs, sourire aux lèvres
Petites poupées manifestent
Marionnettes aux têtes creuses
Les bras levés, la jambe leste
Derrière elles, la Mort ricane
Dans une atmosphère de fête
costumes noirs, masques funèbres
La mort ricane, elle a placé
des fleurs
Dans les trous bleutés de son nez.

A l'enterrement de la Sardine
Je ne veux pas aller maman
Les acclamations admirables
S'élèvent jusqu'au Roi Momo
Au roi Momo sur sa bannière
Sa tête d'ogre carnassière
Picador qui crois-tu piquer?
Au roi Momo sur sa bannière
Qui nous dit, je veux te manger
Petits enfants, tremblez, tremblez!



L’origine de l’Enterrement de la Sardine remonte au milieu du XIXe siècle, lorsqu’un groupe d’étudiants de Madrid décidèrent de se réunir dans l’arrière-boutique de la Pharmacie de San Antón et de former un cortège funèbre présidé par une sardine, qui symbolise le jeûne et l’abstinence, en souhaitant revivre les festivités carnavalesques qui se célébraient à Madrid, le Mercredi des Cendres. Ce à quoi ils n’avaient sans doute pas songé était l’immense proportion et popularité qu’au fil du temps cette fête allait avoir. source


Les mots imposés dans l'atelier d'écriture d'Asphodèle :  funèbre – larme – ribambelle – cheminement – fleur – manifester – foule – costumes – rose (couleur ou fleur) – atmosphère – succession – carnaval – piquer – bleuté – attelage – embaumer – ancolie – cérémonie – tête – défiler – abattre – admirable – acclamation.

Ernest Capendu : Marcof, le Malouin





Ernest Capendu est né à Paris en 1826 dans une famille aisée. Il meurt en 1868. Il a  écrit une soixantaine de romans en s'essayant à tous les genres, historiques, maritimes, militaires, fantastiques…

Marcof le Malouin d'Ernest Capendu est reédité aux éditions Grand West pour la rentrée littéraire.  C'est le premier tome d'un roman populaire, historique et maritime, dans la même veine que les romans d'un Paul Féval dont Capendu est le contemporain.

Les ingrédients du roman populaire sont bien présents, y compris une intrigue complexe et à ramifications :  amour passion, jalousie, enlèvement, meurtres, secrets de famille, vengeance,  tout ceci se déroule sur une toile de fond historique, celui de la révolution qui voit s'organiser la révolte des Chouans en lutte contre les révolutionnaires.

Yvonne, une jeune et belle bretonne qui habite le petit village de Fouesnan, près d'Audierne, est fiancée à Jahoua. Mais Keinec son ami d'enfance à qui elle était promise ne lui pardonne pas ce qu'il considère comme une trahison. Il est prêt à tout pour se venger, y compris à  tuer les amoureux. Les deux jeunes gens sont sous la protection de Marcof, le Malouin, capitaine d'un lougre qui veille sur eux et a une influence sur Keinec pour qui il a de l'affection. Ce marin, nous le verrons, est reçu comme un familier par le marquis de Lonan et nous comprenons bien vite qu'un secret plane sur sa naissance. D'autre part, le marquis a été marié à une femme qui lui a été infidèle et qu'il a chassée pour laver son honneur. Le comte de Fougueray et le  chevalier de Tessy, les frères de cette dernière, ourdissent une diabolique machination pour s'emparer de la fortune du marquis.  Et voilà que ces deux  hommes rencontrent la pauvre Yvonne,  voilà que le chevalier la trouve à son goût et veut la faire enlever et qu'ils y parviennent avec l'appui de Ian Cardoff, un berger quelque peu sorcier qui vit dans une grotte de la baie des Trépassés et qui complotent avec eux pour faire triompher la révolution. Car vous vous en doutez, dans ce roman, les méchants sont tous anti-royalistes et les bons sont du côté du Roi et de la religion! Lorsque Yvonne est enlevée, Jahoua et Keinec, oubliant leur querelle, s'allient pour retrouver la jeune fille, laissant pour l'instant de côté leur rivalité. je ne vous en dis pas plus et je vous laisse affronter les dangers des souterrains mystérieux, les complots, les revirements de situation, les traîtrises, les actes d'héroïsme….

Quand on se lance dans ce genre de lecture, il faut s'abandonner à son âme d'enfant,  être prêt à vivre les situations les plus périlleuses, laisser parler son imagination…  C'est ce que je fais, je joue le jeu avec plaisir tout en explorant les côtes de la Bretagne, en essuyant des tempêtes et en partageant la vie et les aventures de nos héros. Ernest Capendu n'a peut-être pas le génie littéraire d'un Alexandre Dumas, l'invention d'un Eugène Sue mais son récit est suffisamment dense et enlevé pour nous intéresser. Marcof Le Malouin a une suite que je n'ai pas encore lue : Le marquis de Loc Ronan.


Avec mes remerciements à : 







jeudi 1 novembre 2012

Citation : Shakespeare : De l'inconstance des peuples




A la lumière de ce qui se passe en France lors de nos différents changements présidentiels, je m'étais imaginée que l'inconstance du peuple et son mouvement continuel, étaient le propre des français et peut-être même de notre époque!
Or, voilà les paroles que Shakespeare  prête à César (Octave) dans Antoine et Cléopâtre.
Octave vient d'apprendre que Pompée est soutenu par le peuple dans le combat qu'il lui livre pour avoir le pouvoir :

Je ne devais pas m'attendre à moins. L'histoire dès son origine nous apprend que celui qui est au pouvoir a été bien-aimé jusqu'au moment où il l'a obtenu; et que l'homme tombé dans la disgrâce, qui n'avait jamais été aimé, qui n'avait jamais mérité l'amour de son peuple, lui devient cher dès qu'il tombe. Cette multitude ressemble au pavillon flottant sur les ondes, qui avance ou recule, suit servilement l'inconstance du flot, et s'use par son mouvement continuel.



mercredi 31 octobre 2012

Toni Morrison : Home





Nous sommes dans les années 50, Frank, un soldat noir qui revient de Corée, n'a pas le courage de retourner au pays, en Géorgie, sans ses deux amis d'enfance disparus à la guerre. Il porte en lui l'horreur des combats et tout son cortège de violences, de culpabilités, de fantômes, comme le visage de cette petite coréenne qui cherche désespérément un peu de nourriture dans les poubelles de l'armée américaine. C'est pourquoi il demeure à Seatle et cherche l'oubli avec Lily, une femme qu'il pourrait aimer s'il n'était souvent terrassé par des crises de dépression ou de violence. Pourtant, quand il reçoit une lettre lui annonçant que sa petite soeur bien-aimée, Cee, dont il a toujours été le protecteur, est en train de mourir, Frank se décide à faire le voyage vers le sud, vers Lotus, sa ville natale. Home! C'est ce retour à la maison qui va nous révéler, avec le passé de Frank,  la vérité sur la guerre qu'il a vécue et qu'il ne peut oublier. Un retour cathartique.
Le narrateur raconte l'histoire de Frank mais aussi de tous les autres personnages, Cee, sa grand mère, Lily… mais son récit est entrecoupé par les interventions de Frank mises en valeur dans le roman par le graphisme mais aussi par le style poétique. Ces moments nous font pénétrer dans les souvenirs du personnage, son intimité, ce qui nous permet d'explorer les zones d'ombre, d'aller au-delà de l'apparence.
 Ce court roman intense contient en condensé tous les thèmes de l'écrivain présentés avec une sobriété et une concision efficaces : racisme, haine, ségrégation, figure de la femme qui est à la fois la victime désignée, celle qui souffre le plus dans sa chair et son esprit mais aussi celle qui détient la sagesse et la force, celle qui a le pouvoir d'accéder à la liberté de l'esprit qui met véritablement fin à l'esclavage. Toni Morrison dit aussi que la violence n'est pas l'apanage d'une classe sociale ni d'une race mais est partout, prend toutes les formes comme celle exercée sur Cee par sa grand-mère, Lénore, qui se considère comme supérieure à tous parce qu'elle a de l'argent. Enfin, l'écrivaine dénonce l'horreur de la guerre et montre comme celle-ci peut détruire l'humain en l'homme et le transformer en monstre. Ce beau roman enferme en lui une  charge émotionnelle qui reste contenue et maîtrisée. La dernière scène où le frère et la soeur enfin réunis remettent en place l'ordre du monde par un geste symbolique est un message d'espoir - Ici se dresse un homme- dans un pays où les tensions raciales sont loin d'avoir disparu.