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jeudi 28 avril 2016

Raymond Lacroix : Un soir de Septembre à Tihuiten

Paysage de la Nouvelle-Calédonie (source)

Il y a quelques jours j'ai participé à une jeu poétique venu du Québec. Il s'agissait de partager son amour de la poésie avec d'autres personnes, inconnues ou non, dont on nous indiquait l'adresse mail, en envoyant un de nos poèmes favoris. Je vous ai d'ailleurs sollicités, chers amis blogueurs! Il faut croire que le jeu a voyagé puisque j'ai reçu, quant à moi, une poésie de la Nouvelle-Calédonie, Un soir de Septembre à Tihuiten, de Raymond Lacroix, envoyée par Régine G. que je remercie ici.

 Raymond Lacroix : Voir sa biographie ICI "La mort d’un poète : Raymond Lacroix n’est plus" parue en Mars 2005 à l'occasion de son décès.

 Un soir de Septembre à Tihuiten est un sonnet de facture classique qui montre l'influence française mais ce que j'ai le plus apprécié, c'est évidemment de découvrir l'île et sa culture.

 Un soir de Septembre à Tihuiten

La cascade aux roseaux bourdonne son glouglou
Bordant la tarodière en pente évanescente
Près des billons fumants, le danseur dans la sente
Scande un rythme oublié de l'antique pilou.

C'est l'heure vespérale ou règne le Tabou.
Du banian défeuillé la roussette s'absente;
Sur la brise des monts que l'érythrine hante
Les grincheuses du soir descendent en vol flou.

Des brouillards indécis s'enrobent sur la chaîne.
Un bramement résonne et déferle à la plaine;
La sylve en harmonie entonne sa chanson;

Le chant lent des notous retentit dans la gorge
Puis s'égrène aux grands pans que partout l'écho forge;
Mais tout âme bientôt s'apaise à l'unisson.

Raymond Lacroix

Le pilou est la danse traditionnelle kanake. Elle tient son nom des missionnaires français en Nouvelle-Calédonie. Les pilous marquent les grandes cérémonies mais aussi des événements plus mineurs : il existe des "pilous de guerre", des "pilous de deuil", ou encore de simples pilous d'adieu lors du départ d'une personne d'importance. Généralement, une tribu invite des tribus amies. La tribu invitante fournit la nourriture, les tribus invitées apportent des présents. Le chef de la tribu invitante prononce un discours. Une cérémonie a lieu. La danse consiste à tourner selon une spirale, hommes et femmes séparés, au son des instruments qui marquent la cadence, tambours en bambou et tambourins en écorce frappés l'un contre l'autre. Les hommes portent leurs armes, alors que les femmes portent des rameaux ou des bâtons. Les guerriers simulent des combats.
La dernière partie est une boria, danse totalement différente, mêlant les genres, en une sorte de piétinement lourd et rythmé, « réplique et préfiguration de cette occupation des défunts » (Leenhardt, Do Kamo, 112). La foule gesticule, martèle le sol, pilonne, écrase, en mesure.
Chaque danse invente sa propre chorégraphie. (source Wikipédia)

Rendue célèbre lors de l'exposition coloniale de 1931 à Paris où les kanaks amenés de leur île furent présentés comme des sauvages cannibales, la danse a connu un vif succès dans la bonne société parisienne qui l'avait adoptée et..  adaptée!  Les autorités françaises et l'église catholique considéraient cette danse comme indécente. Elle fut interdite en 1880 mais les cabarets continuèrent à l'offrir aux touristes. 





Le banian ou figuier de l'Inde se propage sur de grandes étendues grâce à ses racines aériennes qui se développent quand elles touchent la terre. Il  peut atteindre une taille gigantesque..
 
Banians (source)
 Les billons : désigne spécifiquement le monticule de terre allongé dans lequel sont cultivées les ignames. Les billons des anciennes cultures d'ignames des Mélanésiens étaient particulièrement importants, hauts de plus de 1 mètre, larges de 3 m, ils s'étendaient sur plusieurs dizaines de mètres en plusieurs rangs et permettaient d'obtenir des ignames atteignant plus d'un mètre de longueur. (source)

 
L'érythrine, crête de coq

 Voici aussi les explications données, à la suite de ce poème, par  Pierre de Saint Steban, commissaire général de la Marine  et que vient compléter Régine G. qui nous a fait découvrir ce sonnet.  

La tarodière est un lieu planté de taros, plantes tropicales de la famille des aracées, dont les tubercules sont comestibles.
 
Le taro (source)
 
Le taro (source)

 Les grincheuses sont les roussettes, grosses chauves-souris  dont la chair très fine est très appréciée des Calédoniens de toute origine et dont les poils tressés servent à faire des colliers et des bracelets.

 
Roussette de Nouvelle-Calédonie (source)

La chaîne, c'est ainsi qu'est appelée la montagne calédonienne.


La chaîne : la montagne calédonienne (source)

Les notous sont de gros pigeons autochtones, en voie de disparition parce que trop chassés.
Le bramement : les marins ont laissé des cerfs et des biches sur le territoire pour se réapprovisionner en viande fraîche dans leurs longs périples, ils ont fait de même avec les dindons qui aujourd'hui ont des pattes très, très hautes! On chasse toujours les cerfs et les dindons (moins prisés). Il n y avait aucune viande sur le territoire.

 
Paysage de Nouvelle-Calédonie (source)
"La Nouvelle-Calédonie, écrit Régine, pays paradisiaque tant que l'ambition et la politique ne s'en mêlent pas! Habitants multicolores, les marins ont laissé des enfants, certains a la "retraite" ont pris femme sur le territoire marin : italiens, anglais, danois, allemands, français, prisonniers politiques, mais aussi paysans aventureux, indochinois, chinois, réunionnais(qui ont apporté... les arbres à fleurs!), pieds noirs, antillais.... Chacun a trouvé sa place même si on titille la vieille culpabilité coloniale, ce n'est pas le petit blanc qui a fait fortune aux dépends du Canaque!


Dans le cadre La poésie du Jeudi Chez Asphodèle


mardi 26 avril 2016

Jon Fosse : La remise à bateaux





 Jon Fosse est un écrivain norvégien, né à Haugesund en 1959. Il a écrit des romans et aussi des livres pour la jeunesse.
Dramaturge, il est internationalement reconnu. Certaines de ses pièces ont été présentées au festival d'Avignon : 
En 2002 avec  Visites  mise en scène Marie-Louise Bischofberger
En 2011 avec  Je suis le vent mise en scène par Patrice Chéreau.
en 2015 avec  Matin et soir
 En 2010 sa pièce Quelqu'un va venir reçoit le prix international Henrik Ibsen


Je vous ai déjà présenté Jon Fosse, écrivain norvégien, avec le premier livre que j’ai lu de lui  : Insomnie. Je viens de finir ce roman intitulé La remise à bateaux.

Le narrateur, enfermé dans son grenier, écrit, gagné par l’inquiétude : « l’inquiétude est insupportable, c’est  pour ça que je dois écrire ». Ce sentiment qui le submerge, il le doit au retour dans le village natal de son ami d’enfance Knut qu’il n’avait pas revu depuis de longues années. Knut est professeur de musique, il a des enfants, une femme belle et visiblement insatisfaite qui va jouer un jeu trouble dans ses rapports avec le narrateur.  Ce dernier est resté au pays, il n’a pas fait d’étude, habite chez sa mère, vivote en se livrant à quelques petits travaux.  Peut-être est-il simple d'esprit comme semblent l'indiquer le manque de cohésion du récit, les répétitions incessantes, le vocabulaire simple? Peut-être au contraire est-il tellement replié sur lui-même, tellement persuadé de n'être rien qu'il ne peut plus communiquer? On sait qu'il se réfugie dans les livres. Peu à peu remontent à la surface les souvenirs d’enfance des deux garçons liés par l’amour de la musique, peu à peu reviennent les moments qui rassemblent et ceux blessent; cet instant irréparable, en apparence anodin, mais qui a une telle répercussion sur un adolescent fragile qu’il décide de son avenir. Ce qui les a séparés, qui a fait de chacun d’entre eux ce qu’il est devenu.

Récit douloureux, avec des retours vers l’enfance au milieu du présent. Le récit n’est pas linéaire et nous livre des bribes de souvenirs comme un flash de la mémoire qui ensuite disparaît pour réapparaître un peu plus loin davantage explicité. On a l’impression que l’on suit les méandres d’un esprit en proie au trouble, à la peur.
Et toujours la même surprise et la même difficulté pour entrer dans  un livre de Jon Fosse car le style -inimitable et étrange- est formé des phrases courtes qui reviennent, se répètent encore et encore, comme une antienne.  Comme si le narrateur était tellement choqué, bouleversé, qu’il était obligé de revenir sans cesse dans ses souvenirs, de les tourner et les retourner devant nous. Mais peu à peu comme pour Insomnie, j’entre dans le récit, je suis prise par ces phrases répétitives, obsédantes, empreintes de douleur. Elles ont un rythme lancinant et semblent répondre aux bruits incessants des vagues du Fjord qui s’écrasent contre le rivage. Elles peignent ce paysage sombre, fait de montagnes écrasantes et de masses d'eau impressionnantes, éloigné de tout, qui pèse sur les esprits. Elles peignent la solitude des personnages, la difficulté de vivre, le sentiment d’échec, la jalousie qui les ronge et  l’angoisse qui les accable!
Encore un très beau livre bien que déroutant!

Et nous marchons sur la route, le long du fjord, et les vagues frappent doucement, toujours et encore, elles frappent contre la grève, et le fjord est noir, il s'étend vers la mer, et je devine les montagnes qui bordent le fjord, les maisons sombres, et le fjord, toujours et encore le fjord et les vagues, et puis les montagnes.

dimanche 17 avril 2016

Harper Lee : Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur



Il y a plus de cinq ans, j'avais écrit ce billet sur Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur, pour le blogo-club de Sylire. Ce roman est un best seller américain que l'on fait étudier dans les écoles de nos jours aux Etats-Unis, et pour cause! Il s'agit d'un appel à la tolérance, d'une belle leçon contre le racisme; et puis aussi d'une vérité essentielle formulée ainsi : Avant de vivre en paix avec les autres, je dois vivre en paix avec moi-même. La seule chose qui ne doive pas céder à la loi de la majorité est la conscience de l’individu.

Harper Lee (source )

En Février 2016, la romancière Harper Lee, auteure du célèbre "Ne Tirez pas sur l'Oiseau moqueur" ("To Kill a Mockingbird" en anglais) est morte à l'âge de 89 ans. Ce livre, vendu à plus de 30 millions d'exemplaires, est considéré comme un classique de la littérature américaine.
Née en 1926 dans l'Alabama, elle avait été à l'école avec le futur écrivain Truman Capote. C'est lui qui, en 1959, la met sur la voie de la littérature. À cette époque, elle l'épaule dans l'enquête de ce qui va devenir "De sang froid".
Elle a publié "Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur" en 1960. Ce livre, couronné du prix Pulitzer, restera longtemps l'unique ouvrage de son oeuvre. Toutefois, en juillet 2015, Harper Lee a publié "Go Set a Watchman", un livre écrit dans les années 50 et présenté comme une suite. (source )

Voir aussi l'article Harper Lee le retour à propos de son second livre ICI

Harper Lee à l'époque de Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur

Voilà ce que j'en écrivais en 2010 :  Quand j'ai lu il y a quelques années Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur, j'avais été séduite par ce livre, par ce ton frais, empreint d'une apparente naïveté, par ce regard d'enfant qui porte un regard sur le monde qui l'entoure et découvre des choses qui le dépasse, qu'il ne comprend pas mais qu'il réprouve. La phrase de Charles Lamb que Harper Lee cite en exergue : Les avocats n'ont-ils pas commencé par être des enfants?" prend ici toute sa signification.
Quand j'ai su qu'il avait été choisi pour le commenter dans le Blogoclub, j'ai eu l'impression que je m'en souvenais comme si je l'avais lu la vieille. Or ce qui m'en restait et ce qui m'avait marquée avant tout c'est la figure du père, cet avocat courageux qui prend la défense d'un noir accusé d'un viol qu'il n'a pas commis mais qui est condamné d'avance dans la société raciste de cette petite ville américaine de l'Alabama. Nous sommes dans les années 35, à l'époque de la ségrégation. Et puis j'avais gardé cette impression un peu étrange d'avoir lu un Caldwell mais raconté par une petite fille.Très étrange même et pourtant combien efficace! Car le regard de Jean Louise dite Scout, pur de tout calcul et débarrassé de tout préjugé est prompt à discerner le dysfonctionnement d'une société qui prône l'égalité des droits pour tous, qui se dit une démocratie mais agit en contradiction totale avec ses principes. En fait, ce qui m'était resté en mémoire, c'est le sens profond et grave du livre, la dénonciation d'une société fondée sur le racisme et l'inégalité raciale avec comme antidote la grandeur de l'Homme lorsqu'il fait face aux préjugés, affronte la haine pour rester en accord avec sa conscience. C'est ce que fait Atticus, le père de Scout.
Vois-tu, Scout, il se présente au moins une fois dans la vie d'un avocat une affaire qui le touche personnellement. Je crois que mon tour vient d'arriver. Tu entendras peut-être de vilaines remarques dessus, à l'école, mais je te demande une faveur : garde la tête haute et ne te sers pas de tes poings. Quoi que l'on dise, ne te laisse pas emporter. Pour une fois, tâche de te battre avec ta tête ... elle est bonne, même si elle est un peu dure.
- On va gagner, Atticus ?
- Non, ma chérie.
- Alors pourquoi...
- Ce n'est pas parce qu'on est battu d'avance qu'il ne faut pas essayer de gagner.



En relisant le roman, je me suis intéressée de plus près à ce que j'avais un peu oublié, la vie quotidienne de Scout, la petite fille, "garçon manqué" comme on disait à l'époque, toujours en salopette, toujours prête à faire le coup de poing surtout pour défendre l'honneur de son père que les autres enfants appellent avec mépris, "l'ami des nègres", partageant les jeux de son frère Jem et de son "fiancé", le petit Dill. Scout de même que Jem sont décrits avec tendresse et humour par l'auteur et l'on ne peut s'empêcher de sourire devant  leur curiosité, leur imagination débridée, leur art de se mettre dans des situations inextricables. Mais l'on est touché aussi par ces beaux portraits d'enfants qui, certes ne sont pas parfaits et commettent beaucoup d'impairs, mais ont un sens de la justice et de l'honneur qui manquent aux adultes.  Leur père, Atticus, qui leur apprend les valeurs essentielles, le courage de ses opinions, le respect des autres, la maîtrise de soi, peut en être fier.
Enfants sans mère, Jem et Scout  reçoivent beaucoup d'amour de la part d'Atticus, de leur oncle Jack, de Calpurnia la femme de ménage noire mais aussi de Maudie, une vieille dame, amie de leur père. Ils s'intéressent de très près à leur voisin, le mystérieux Boo Radley qui vit enfermé dans sa maison pour ne plus en ressortir!
C'est l'occasion pour Lee Harper de brosser des personnages attachants, haut en couleur, avec des caractères et des idées très affirmées, parfois assez étonnants!
En écrivant ce premier livre qui fut aussi le seul Harper Lee réalise un coup de maître : écrire un chef d'oeuvre, un livre d'une telle force dans son apparente simplicité qu'il est devenu un classique incontournable aux Etats-Unis.



Dans l'adaptation de R. Mulligan, Gregory Peck interprète le rôle d'Atticus.

- Je préférerais que vous ne tiriez que sur des boîtes de conserves, dans le jardin, mais je sais que vous allez vous en prendre aux oiseaux. Tirez sur tous les geais bleus que vous voudrez, si vous arrivez à les toucher, mais souvenez-vous que c'est un péché que de tuer un oiseau moqueur.
Ce fut la seule fois où j'entendis Atticus dire qu'une chose était un péché et j'en parlai à Miss Maudie.
- Ton père a raison, dit-elle. Les moqueurs ne font rien d'autre que de la musique pour notre plaisir. Ils ne viennent pas picorer dans les jardins des gens, ils ne font pas leurs nids dans les séchoirs à maïs, ils ne font que chanter pour nous de tout leur coeur. Voilà pourquoi c'est un péché de tuer un oiseau moqueur.

- Miss Gates, c'est une gentille dame, non ? demandai-je.
- Tout à fait. Moi je l'aimais bien quand j'étais dans sa classe.
- Elle déteste Hitler...
- Qu'est-ce qu'il y a de mal à ça ?
- Aujourd'hui elle nous a expliqué comme il était méchant avec les Juifs. C'est pas bien de persécuter les gens, hein, Jem ? Je veux dire même en pensée ?
- Evidemment que non, Scout ! Qu'est-ce qui te prend ?
- Eh bien l'autre soir en sortant tu tribunal, Miss Gates... elle descendait les escaliers devant nous, tu l'as peut être pas vue... elle parlait avec Miss Stephanie Crawford. Je l'ai entendue dire qu'il serait temps que quelqu'un leur donne une bonne leçon, qu'ils se sentaient plus et qu'un de ces jours ils finiraient par penser qu'il pouvaient nous épouser. Jem, comment peut-on tellement détester Hitler si c'est pour se montrer odieux avec les gens de son pays ?


Le livre : Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur de Harper Lee (To kill a mocking bird)
Le film : Du silence et des ombres de Robert Mulligan


Félicitations à : Aifelle, Asphodèle, Caroline, Dasola, Eeguab, Keisha, Nathalie, Valentine

Merci à tous!

samedi 16 avril 2016

Un livre/un film : énigme du samedi

`
Pour ceux qui ne connaissent pas Un Livre/un film, l'énigme du samedi, je rappelle la règle du jeu.

Wens de En effeuillant le chrysanthème et moi-même, nous vous proposons, le 1er et le 3ème samedi du mois, un jeu sous forme d'énigme qui unit nos deux passions : La littérature et le cinéma! Il s'intitule : Un livre, Un film. Chez Wens vous devez trouver le film et le réalisateur, chez moi le livre et l'auteur.

Consignes  

Vous pouvez donner vos réponses par mail, adresse que vous trouverez dans mon profil : Qui suis-je? et  me laisser un mot dans les commentaires sans révéler la réponse pour m'avertir de votre participation. Le résultat de l'énigme sera donné le Dimanche.

La prochaine énigme aura lieu le samedi 30 du mois d'Avril pour pouvoir publier le billet le 1er mai avant notre départ à Oslo.

Enigme n° 126
Ce roman écrit par une auteure américaine, paru dans les années 1960, est un best-seller mondialement connu. Il est devenu un classique aux Etats-Unis.  L'action se passe dans les années 1930, à l'époque de la ségrégation.

Vois-tu, ,..., il se présente au moins une fois dans la vie d'un avocat une affaire qui le touche personnellement. Je crois que mon tour vient d'arriver. Tu entendras peut-être de vilaines remarques dessus, à l'école, mais je te demande une faveur : garde la tête haute et ne te sers pas de tes poings. Quoi que l'on dise, ne te laisse pas emporter. Pour une fois, tâche de te battre avec ta tête ... elle est bonne, même si elle est un peu dure.
- On va gagner, .... ?
- Non, ma chérie.
- Alors pourquoi...
- Ce n'est pas parce qu'on est battu d'avance qu'il ne faut pas essayer de gagner.

lundi 11 avril 2016

Ron Carlson : Cinq Ciels Mais qui m'a fait parvenir ce livre?


J'ai eu l'heureuse surprise de découvrir Cinq ciels de Ron Carlson dans ma boîte à lettres. Rien ne ne pouvait me faire plus plaisir, alors que je venais à peine de finir, de commenter et d'aimer Retour à Oapkine. Mais qui me l'a envoyé? Aucun mot n'indique sa provenance, si ce n'est qu'il vient de Leipzig? Alors merci mille fois à l'inconnu(e) qui a pensé à moi! Mais j'aimerais bien savoir qui je dois remercier!

Départ en Creuse

La Creuse Photo Aurélia Frey (source)

Une petite pause pour partir en Creuse voir le petit Liam.. et ses parents!

L'énigme du samedi 16 Avril



Malgré cette pause,  Wens et moi, nous vous donnons rendez-vous pour l'énigme du samedi 16 Avril.


Bon repos à ceux qui ont la chance d'être en vacances!  Bon courage aux autres! A bientôt!

dimanche 10 avril 2016

Erik Larson : Lusitania 2015 La dernière traversée




 Dans Lusiatinia 2015 La dernière traversée Eric Larson raconte la dernière traversée du grand paquebot britannique Le Lusitania parti de New York le 5 mai 1915 pour gagner Liverpool. En arrivant dans les eaux classées "zone de guerre" par les allemands, il fut coulé en vue des côtes irlandaises par un U-Boote commandé par le capitaine Walther Schwieger. Cet acte de guerre contre un navire de passagers fut considéré comme une barbarie. Le navire disparut en dix-huit minutes. Plus de la moitié des passagers périt, soit 1198 personnes, parmi eux des ressortissants américains. Si cela contribua à envenimer les relations entre les Etats-Unis et l’Allemagne, il en fallut beaucoup plus au peuple américain et à son  président Woodrow Wilson pour déclarer la guerre puisque les Etats-Unis ne rejoignirent le conflit que deux ans après. 

Le Lusitania coulé le 7 mais 1915
Le Lusitania

Je me suis intéressée à ce récit historique pour lequel Eric Larson a bénéficié d’une riche documentation, s’appuyant sur les nombreux témoignages des rescapés d’une rare précision, la correspondance qu’ils entretinrent avec leur famille après le naufrage, les journaux de bord des capitaines du Lusitania, William Turner, et du sous-marin, les archives de l’Amirauté britannique et les documents classés secrets de guerre aujourd’hui consultables. 

William Turner commandant du Lusitania
Walther Schwieger, commandant  de l'U-Boote

Et bien sûr, tous ces documents ont le mérite de faire revivre les passagers du Lusitania à travers des témoignages pleins de vie, des anecdotes sur le déroulement du voyage, le déroulement de la vie à bord, les menus. Le récit, en particulier du torpillage, est d’une incroyable précision et la description du géant en train de sombrer entraînant des centaines de passagers dans le gouffre est hallucinante. L’auteur peut décrire les vêtements que portaient certains enfants le dernier jour du Lusitania parce qu’ils ont été trouvés sur les corps qui n’ont pas sombré ou qui sont venus s’échouer tout au long des côtes d’Irlande. Et c’est extrêmement émouvant. On s’attache à tous ceux qui ont une voix dans le récit. Après la lecture, j’ai cherché à retrouver ces personnes dont certaines étaient célèbres à l’époque et j’ai éprouvé de la nostalgie à mettre un visage sur l'un ou l'autre. C’est ce que dit avoir éprouvé Eric Larson au cours de ses recherches, on ne peut pas vivre avec des fantômes pendant si longtemps sans finir par les aimer et c’est ce qu’il nous transmet.

Theodate Pope, architecte, passagère de première classe
Pourtant ce n’est pas sur le pathos que repose le récit. Celui-ci est nourri par le contexte historique qui nous permet de mieux connaître l’enjeu énorme entre les pays belligérants, l’Allemagne et la Grande-Bretagne, pour la suprématie maritime. Le contrôle des mers est capital dans une guerre puisqu’il permet d’empêcher le ravitaillement, le réapprovisionnement en armes en maintenant le blockhaus.. Jusqu’alors la Grande-Bretagne était souveraine sur la mer mais l’Allemagne devint une rude concurrente.. C’est pourquoi les Britanniques firent construire ce superbe et rapide navire Le Lusitania dont la vitesse était inégalée.  Quant à l’Allemagne, elle va utiliser ses U-Boote, armes que la grande-Bretagne sous-estimait à l’époque. Les exploits des équipages des sous-marins allemands vont considérablement affaiblir l’Angleterre au point de risquer lui faire perdre la guerre. Nous voyons aussi le jeu trouble que l’Amirauté, avec à sa tête Winston Churchill, a joué face à ces attaques de navires sous pavillon neutre (américain) pendant la guerre. Alors que les services secrets britanniques suivaient à la trace le sous-marin du commandant Schweiger, le Lusitania ne fut pas détourné vers une route plus sûre, on ne lui envoya aucun destroyer pour le protéger, ce qui aurait certainement évité la tragédie. Pourquoi? Winston Churchill fut le premier à accuser le commandant du Lusitania, Turner, de négligence pour mieux cacher les impérities de l’Amirauté ? ou surtout son dessein secret : plus y aurait de navires neutres coulés, plus vite l’Amérique entrerait dans la guerre.

Un roman intéressant et bien documenté qui a le mérite de faire vivre l'Histoire.
Salle à manger du Lusitania
                                                          
Merci à Dialogues croisés et aux Editions du Cherche-Midi


vendredi 8 avril 2016

Henrik Ibsen : Hedda Gabler


Hedda Gabler, la fille du général Gabler, femme impérieuse, passionnée de tir aux pistolets qu’elle tient de son père, s’est mariée avec Jorgan Tesman. Celui-ci vient de finir sa thèse d’histoire de la culture et attend un poste à l’université. Au retour de leur voyage de noces, ils rentrent à Oslo. L’indifférence de Hedda pour son mari apparaît très vite. Elle ne supporte pas la vieille tante de Jorgan, Julia, qui a élevé le jeune garçon à la mort de sa mère, elle juge son mari peu brillant, terre à terre, ennuyeux, le méprise et refuse de participer à ses soucis lorsque sa nomination à l’université semble compromise.De plus, elle est peut-être enceinte et horrifiée de l’être. La visite de Thea Elvsted, une ancienne compagne de classe, qui va lui donner des nouvelles de Eijlert Lovborg, provoque le drame.
Eijlert Lovborg est un brillant écrivain que sa conduite a mis au ban de la société. Alcoolique, il est tombé dans la déchéance et c’est Thea Elvsted qui le sort de l’ornière en lui redonnant le goût du travail.  Thea est très attachée à cette résurrection morale qui est son oeuvre.  Hedda Gabler qui a été  la maîtresse de l’écrivain ne supporte pas que Thea joue un tel rôle auprès de Lovborg. Or, il est de retour à Oslo. Hedda décide de réapparaître dans la vie de l’écrivain et d’exercer son influence sur lui afin de diriger sa vie. Mais Lobvorg ne se montre pas à la hauteur de ce qu’elle attendait. Hedda Gabler se suicide en se tirant un coup de pistolet.

Ingrid Bergman dans le rôle de Hedda Gabler

Toutes les grandes actrices ont rêvé d’interpréter le rôle de Hedda Gabler car ce personnage aux motivations difficiles à comprendre, qui paraît irrationnelle et peu adaptée à l’étroitesse et au puritanisme de la société dans laquelle elle vit, exige des prouesses d’interprétation. Il faut dire que sa complexité déroute et passionne à la fois.
 Ce qui a retenu mon attention c’est la volonté de Henrik Ibsen de donner, dans le titre de la pièce, le nom de jeune fille et non le nom d’épouse : Hedda Gabler et non Hedda Tesman. Il insiste ainsi sur le fait que la jeune femme reste la fille de son père plus que l’épouse de son mari. Définir ainsi le personnage permet de mettre en relief l’origine sociale de Hedda, la grande bourgeoisie, et une éducation qui a dû être moins conformiste que celle des autres jeunes filles de sa classe, témoin les pistolets dont Hedda adore se servir et le caractère capricieux et libre de la jeune femme. Son dédain des autres, la haute opinion qu’elle a d’elle-même, son désir de s’affranchir des contraintes sociales, se heurtent à un obstacle majeur dans la société de son temps. Elle est femme et ne peut donc se réaliser par elle-même. Elle qui est éprise de liberté et d’absolu, n’a d’autre échappatoire que le mariage. C’est pourquoi elle décide de faire un fin : épouser Jorgan Tesman. Lui ou un autre, cela n’a pas d’importance. Hedda Gabler symbolise l’emprisonnement moral et social de la femme dans une société qui la cantonne au rôle d’épouse et de mère. C’est insupportable pour une femme qui n’en a pas la vocation! Elle est elle aussi la soeur de  la Nora de La maison de poupées, mais une soeur négative et malfaisante. Hedda ne peut prouver sa valeur et trouver un sens à sa vie qu’en manipulant les hommes, en les tenant sous sa coupe, non sans machiavélisme!  C’est pourquoi elle est condamnée à mourir.
Ceci est une interprétation sociale et psychologique du personnage mais il y a en a beaucoup d’autres. Elle a souvent été étudiée par le biais de la psychanalyse à la lumière de Freud ou bien sous l’influence de la philosophie de Nietzsche qu’évoque la volonté de puissance de Hedda. Elle fait le régal des metteurs en scène et suscite les analyses les plus diverses depuis sa création en 1890. Hedda Gabler est  l'une des oeuvres la plus célèbre de Henrik Ibsen.



Henrik Ibsen

Henrik Johan Ibsen est un dramaturge norvégien. Il se présente comme un « anarchiste aristocrate». Fils de Marichen Ibsen et de Knud Ibsen, Henrik Johan Ibsen naît dans un foyer que la faillite des affaires paternelles, en 1835, désunit rapidement.…
Ses œuvres les plus connues sont Une maison de Poupée, La cane sauvage,  Rosmershom, Hedda Gabler, Peer Gynt... Certaines pièces plus politiques, comme Les prétendants à la couronne , les Revenants, Un ennemi du peuple ont souvent heurté l'opinion progressiste ou de la gauche norvégienne. Cependant, selon Jeanne Pailler, Henrik Ibsen est un «auteur de drames historiques et de pièces intimistes, considéré comme un réformiste acharné par les uns, comme un conservateur par les autres » Hostile aux partis cléricaux et au traditionalisme de la monarchie norvégienne de son temps, il est souvent vu comme un libéral en Norvège. ( source wikipedia)



mercredi 6 avril 2016

Kazuaki Takano : Treize marches






Kazuaki Takano est né en 1964 à Tôkyô. Il a étudié le cinéma aux États-Unis et, à son retour au Japon, est devenu scénariste. Les Treize Marches se sont vendues à plus de 400 000 exemplaires au Japon. (source  Presse de la cité)







Treize marches de Kazuaki Takano  est qualifié de thriller mais il  présente beaucoup d’autres centres d’intérêt. Il décrit le système judiciaire japonais, ses failles et ses erreurs, et peint aussi la mentalité japonaise vis à vis de la culpabilité et du pardon.

Le récit

Ryô Kihara est condamné à mort pour un crime qu’il n’a pas commis. Il est amnésique et ne se souvient donc de rien. Mais dix ans après le drame, alors qu’il attend l’exécution de la peine, un souvenir lui revient en mémoire : il se revoit monter treize marches d’escalier. Il cherche alors à faire réviser son procès.
Jun’ichi Mikami a été condamné à deux ans de réclusion pour avoir tué accidentellement un homme qui lui avait cherché querelle dans un bar. A sa remise en liberté, il est contacté par Shôji Nangô, gardien de prison chargé de la réinsertion des prisonniers, qui lui demande de l’aider à prouver l’innocence de Kihari.

Le roman à suspense

Le roman fonctionne effectivement en jouant sur les nerfs du spectateur. Pour sauver Ryô Kihara condamné à mort, une course contre la montre est engagée. Il faut que Jun’ichi Mikami et Shôji Nangô aient trouvé les preuves de son innocence avant que l’ordre d’exécution ne soit signé car, alors, plus rien ne pourra arrêter la marche de la justice. Parallèlement à leur recherche, on suit le document qui décidera du sort de Kihara, de bureau en bureau, jusqu’à la signature suprême, celle du garde des Sceaux. Chaque minute qui passe, chaque retard, chaque échec sont donc une avancée vers la peine capitale. Le roman se lit donc bien comme un thriller et l’intrigue, d’ailleurs assez complexe, avec de nombreux rebondissements, tient le lecteur en haleine.

La justice japonaise et la peine de mort 

Voir Ici source Mediapart
Mais le roman est aussi et surtout un réquisitoire contre la peine de mort. Kazuaki Takano dépeint l’horreur d’une justice qui, telle une machine implacable, peut condamner un innocent. Une justice qui bien souvent se révèle aléatoire, condamnant l’un, absolvant l’autre, parfois inconséquente. Mais il va plus loin. Il montre tout l’inhumanité de cette attente de la mort qui peut survenir des années après la condamnation. C’est avec beaucoup de conviction que l’écrivain communique au lecteur, l’angoisse intolérable de ces prisonniers qui guettent le bruit des pas dans le couloir de la mort.. Devant quelle cellule vont-ils s’arrêter? L’arrivée de la Mort se fait dans un silence halluciné rompu par les cris de révolte du condamné qui comprend que son heure est arrivée. Mais l’horreur culmine lors de la description de l’exécution par pendaison, vue cette fois par les gardiens.  Il s’agit d’un acte que chacun d’entre eux portera inscrit dans sa chair et dans son esprit. A travers les angoisses et le sentiment de culpabilité du gardien Shôji Nanko qui se considère comme un meurtrier, nous comprenons toute la barbarie de la peine capitale. Kazuaki Takano détaille par le menu les étapes d’une mise à mort en pénétrant dans la tête et le coeur des hommes chargés de la pendaison. Ce qui n’est souvent qu’une idée abstraite se concrétise en quelque chose de terrifiant.

Culpabilité, repentir, rédemption

Enfin, autre intérêt du roman, la mentalité japonaise par rapport au sentiment de culpabilité et de pardon.  La notion de repentir est primordiale. Un assassin qui éprouve des regrets et les exprime peut éviter la peine capitale même si, bien sûr, se pose le problème de la sincérité. Cela aboutit à des aberrations :  Ryö Kihara, amnésique, ne se souvient pas qu’il a tué. Il ne peut donc éprouver de repentir si bien qu’il est condamné à mort! La réparation financière compte aussi beaucoup pour prouver la bonne foi du condamné et atténuer sa culpabilité. Un homme riche s’en sortira donc mieux qu’un pauvre. Jun’ichi Mikami est forcé lors de sa mise en liberté conditionnelle d’aller présenter ses excuses au père de la victime, une démarche terrible, pour l'un comme pour l’autre. La question de la rédemption et du pardon par le repentir est donc essentielle dans la société japonaise. Nango, gardien de prison, qui a tué légalement deux hommes, ne peut pas être jugé ni châtié. Il doit chercher ailleurs la rédemption.

Treize marches peut donc avoir des entrées différentes et je dois dire que j’ai été passionnée par les divers aspects du roman.

Treize marches paraîtra le 21 Avril aux éditions Presse de la cité.

Merci à Dialogues croisés et aux éditions Presse de al cité




lundi 4 avril 2016

Nikolaj Frobenius : Branches obscures





Né en 1965 à Oslo, Nikolaj Frobenius a écrit des romans, des pièces de théâtre et des scénarios. Actes Sud a déjà publié Le Valet de Sade (1998 et Babel n° 419), Le Pornographe timide (2000 et Babel n° 687), Je est ailleurs (2004) et Je vous apprendrai la peur (2011). Actes sud




Branches obscures est le genre de récit qui vous entraîne dans une aventure inquiétante au suspense haletant, où il est aussi question du pouvoir de l'écriture.

 Jo Uddermann, écrivain norvégien connu, marié à Agnete et père d’une petite Emma, vient de terminer son dernier roman dont tout le monde dit qu'il est son meilleur. Il  s'agit d'une retour vers son adolescence, d'une histoire qui ravive en lui des souvenirs douloureux.  Le genre de livre où l'écrivain doit puiser  très profond en lui-même et "réveiller d'anciennes plaies". Il y parle d'un  élève de sa classe, Georg Nymann, un garçon mystérieux et bizarre. Celui-ci l’a manipulé, lui faisant croire à son amitié, puis s’est révélé pervers et dangereux.  Lorsque, des années plus tard, la mère de Nymann lui apprend la mort de son fils, à l’étranger, Jo n’a aucune raison d’en douter.
Pourtant, à la sortie de son livre, Jo Uddermann se sent surveillé.  Sa petite fille de six ans a vu un homme rôder près de la maison. Toutes sortes d'évènements inquiétants se produisent autour de lui. Manifestement, on cherche à lui faire peur.  Bientôt le meurtre de Katinka, ancienne camarade d’école dont Georg Nymann était amoureux, va rendre l’écrivain suspect aux yeux de la police. Il est, en effet, l’amant de la jeune femme. Le héros s’enfonce peu à peu dans sa solitude. Sa femme le quitte en amenant sa fille. La police ne semble pas croire à ce qu’il dit. Son agent littéraire qui a reçu une autobiographie de lui a du mal à accepter l’idée qu’il n’en est pas l’auteur. La situation se tend de plus en plus jusqu’au dénouement qui nous révèlera la vérité!

Au cours du récit, le lecteur est amené à se demander si Georg Nymann est en vie. Mais il en arrive aussi à se poser des questions au sujet du narrateur lui-même  : a-t-il dit la vérité au sujet de son camarade de lycée? Est-il en train de nous mystifier ou sombre-t-il dans la folie? La structure du roman qui est une mise en abyme est très habile car elle renforce ces doutes. Un roman dans le roman. Le livre de Jo Udderman sur Georg Nymann se situe dans le passé et constitue une partie de Branches obscures qui conte le présent. Quant à la prétendue autobiographie dont nous ne connaîtrons que des bribes, troublantes, elle est une sorte d’anti-roman, une réponse inversée au récit de Jo Udderman, elle réfléchit une image déformée du personnage. Par le pouvoir de l'écriture, l'écrivain semble avoir réveillé les ombres troubles du passé.

Un petit bémol pour moi : Il y a quelques invraisemblances (ou des lacunes voulues)(?) dans l’enquête que mène la police, me semble-t-il. Cela n’enlève rien à l'intérêt mais je me suis demandée si j’étais la seule à le remarquer. En résumé, un bon suspense que j'ai lu avec beaucoup de plaisir,  un récit très bien mené et écrit.

dimanche 3 avril 2016

Honoré de Balzac : La duchesse de Langeais


La duchesse de Langeais a été publié en feuilleton en 1834 sous le titre Ne touchez pas à la hache, titre que Rivette a choisi pour son adaptation cinématographique. En 1843, La duchesse de Langeais (titre retenu par Baroncelli, réalisateur dont vous aviez à trouver le nom) fut intégré dans La comédie humaine, dans la section Histoire des Treize.

Le récit

La duchesse de Langeais de Baroncelli

Nous sommes en 1823. Le général Armand de Montriveau s’introduit dans un couvent de carmélites, sur une île espagnole pour retrouver sous le nom de soeur Thérèse, la femme qu’il aime, Antoinette de Langeais. Le récit se déroule ensuite en flash back à Paris, dans le Faubourg Saint Germain, au temps de la première Restauration.
La duchesse de Langeais, riche aristocrate au coeur froid, orgueilleuse imbue des privilèges de sa classe, poursuit une vie factice, faite de bals, d’amusements, de conversations mondaines et de flirts. Elle collectionne les admirateurs, s’amusant à les provoquer mais leur opposant une vertu irréprochable. C’est le jeu qu’elle joue avec Armand de Montriveau, ancien général d’Empire. Celui-ci cherche à la conquérir mais en vain, la coquette le séduit, l’affole puis se dérobe. Mais le général n’est pas homme dont on peut se moquer. Il enlève la duchesse décidé à se venger. Puis il l’épargne mais la duchesse a compris qu’elle l’aimait. Désormais elle supplie son amoureux de lui revenir. Pour lui, elle est prête à sacrifier sa réputation mais Armand la dédaigne à son tour. La duchesse s’enfuit alors et prend le voile. Il faudra cinq ans à Montriveau pour la retrouver et chercher à nouveau à l’enlever mais cette fois-ci d’un couvent!

Le romantisme

La duchesse de Langeais Illustration de Andre E. Marty
Si le roman La duchesse de Langeais part d’un fait réel, souvenir cuisant de Balzac repoussé par la duchesse de Castries à qui il avait avoué son amour, il est marqué par le romantisme de son époque. Il présente même un aspect gothique dès le premier enlèvement de la jeune femme, transportée dans un lieu inconnu par des hommes masquées, menacée d’être marquée au fer rouge comme dans un roman de Dumas. Les années de recherche à travers plusieurs pays d’Europe de l’amant inconsolable et le deuxième enlèvement sont autant d’éléments de cette atmosphère romantique. Montriveau et ses amis, prennent d’assaut les falaises de cette île qui protègent le monastère. Dans un décor et sous un éclairage éminemment gothiques, tout est en place pour conter une histoire terrible : les ombres de la nuit, le déguisement de Montriveau en religieuse, ses compagnons ayant chacun sur eux un poignard ( et détail incongru qui m’a fait sourire (?) : « une provision de chocolats »!), l’office des morts qui résonnent tandis qu’ils s’introduisent dans la cellule de Soeur Thérèse, la découverte de la morte à la lumière des cierges et le transport du corps jusqu’au navire…
Les personnages aussi rappellent d’autres héros romantiques, en particulier ceux de Stendhal.  Montriveau quand il est repoussé par la duchesse alors qu’elle s’est presque donnée à lui réagit comme un Julien Sorel  décrochant une arme pour tuer Mathilde de la Mole qui paraît le mépriser! L’orgueil et le sentiment de l’honneur sont très vifs chez les deux personnages. Le revirement de la duchesse de Langeais qui découvre soudain son amour quand elle va être marquée par son amant est semblable à la réaction de Mathilde exaltée d’avoir failli être tuée par son amant. Le ressemblance des deux femmes et des deux hommes s’arrêtent là : Mathilde à les défauts de sa classe sociale mais n’est pas prude, étroite d’esprit, confite en dévotion. Elle est intelligente, elle lit les philosophes, elle a des idées avancées. Julien Sorel n’appartient pas à la noblesse, il est ambitieux mais naïf et capable d’amour vrai, ce dont on peut douter pour Armand de Montriveau. Les personnages de Balzac ne sont pas sympathiques.
Et d’ailleurs le dénouement si terre à terre du roman me paraît être de la part de Balzac le refus de l’émotion, une réaction anti romantique voire cynique! Ultime petit coup de griffe décoché à la duchesse de Castries?
Ah! ça dit Ronquerolles à Montriveau quand celui-ci reparut sur le tillac, c’était une femme, maintenant ce n’est rien. Attachons un boulet à chacun de ses pieds, jetons-la à la mer, et n’y pense plus que comme nous pensons à un livre lu pendant notre enfance.
- Oui, dit Montriveau, car ce n’est plus qu’un poème.
-Te voilà sage. Désormais aie des passions; mais de l’amour, il faut savoir le bien placer, et il n’y a que le dernier amour d’une femme qui satisfasse le premier amour d’un homme. »

Le réalisme

Antoinette et Armand Dessin de Louis Edouard Fournier
Mais La duchesse de Langeais est aussi un peinture réaliste  de la noblesse au moment de la restauration et de l’avènement de Louis XVIII. Le but de l’auteur est de décrire la déchéance d’une classe sociale qui pour survivre devrait être grande. Son manque de hauteur, sa frivolité la condamnent. Les hommes de valeur jugés dangereux sont écartés du pouvoir et ne gouvernent que les hommes médiocres. Le Faubourg Saint Germain dont la duchesse de Langeais et ses chevaliers servants sont les représentants est animé d’une vie vaine, sans idées, sans aspirations. L’église règne en maître sur cette société, les femmes ont leur confesseur, tous suivent la messe, la plupart du temps non par conviction réelle mais parce qu’il faut suivre les  « usages du monde » et que la religion est un moyen de soumettre le peuple: La duchesse est très lucide à ce sujet et déclare:
Si nous voulons que la France aille à la messe, ne devons-nous pas commencer par y aller nous-mêmes? La religion, Armand, est, vous le voyez, le lien des principes conservateurs qui permettent aux riches de vivre tranquilles. La religion est intimement liée à la propriété.
Toutes les moeurs reposent sur l’hypocrisie.  Les femmes peuvent y tromper leur mari à condition que personne ne soit au courant : 
Une imprudence, c’est un pension, une vie errante, être à la merci de son amant; c’est l’ennui causé par les impertinences des femmes qui vaudront moins que toi, précisément parce qu’elles auront été très ignoblement adroites. Il valait cent fois mieux aller chez Montriveau, le soir, en fiacre, déguisée, que d’y envoyer ta voiture en plein jour. Tu es une petite sotte, chère enfant.
Les maris, eux, peuvent s’afficher avec leurs maîtresses avec plus de liberté et ils ont tout pouvoir sur la fortune de  leur femme. Balzac résume cela dans des formules lapidaires d’une méchanceté et d’une lucidité glaçantes! Voilà les conseils donnés à la duchesse par son oncle :
Renoncez à votre salut en deux minutes, s’il vous plaît de vous damner; d’accord! Mais réfléchissez bien quand il s’agit de renoncer à vos rentes. Je ne connais pas de confesseur qui nous absolve de la misère.
La situation de la femme certes n’est pas enviable. Elle est mariée contre son gré par son père et est désormais à la merci d’un époux qui peut tout se permettre et qui dans le cas de la duchesse n’est jamais entré dans son lit..
Si vous tentez à faire un éclat, je connais le sire, je ne l’aime guère. Le duc est assez avare, personnel en diable; il se séparera de vous, gardera votre fortune, vous laissera pauvre, et conséquemment sans considération. Les cent mille livres de rente que vous avez héritées dernièrement de votre grand tante maternelle payeront les plaisirs de ses maîtresses, et vous serez liée, garrottée par les lois, obligée de dire amen à ces arrangements-là.

Armand de Montriveau représente une autre sorte de noblesse; celle d’Empire; Après avoir d’abord été écarté avec le retour des Bourbons, il est ensuite réintégré dans l’armée et retrouve son grade. Mais il ne fait pas de compromis et a son franc parler, il peut être direct et même brutal. A la différence des autres, ce n’est pas un courtisan. Il annonce une nouvelle révolution si la noblesse ne sait pas évoluer.

 Une lutte amoureuse pour la domination

Ne touchez pas à la hache de Jacques Rivette
L’amour d’Antoinette et d’Armand apparaît le plus souvent comme un rapport de force. Chacun lutte pour la domination de l’autre. La duchesse n’aime pas Montriveau, elle veut qu’il soit à ses pieds, qui lui rende hommage, qu’il manifeste de la dévotion pour elle. C’est une coquette et une hypocrite. Elle aime jouer avec le feu, être prête à céder puis reculer au dernier moment en invoquant dieu, sa vertu, son devoir d’épouse. Mais elle n’a jamais eu l’intention de se donner à lui. Elle veut le dominer. Ensuite elle a l’intention de le repousser comme elle l’a fait pour les autres et  se moquer de lui. Le général, au début, en bon soldat, aime conquérir, prendre d’assaut. Le jeu l’amuse mais lorsque la forteresse se révèle imprenable, il dépite; quand enfin, il apprend par son ami Ronquerolles que la duchesse s’amuse de lui comme elle l’a fait tour les autres, il devient furieux et il l’enlève. Mais il ne s’abaissera pas au viol, il veut  faire pire, la marquer au fer rouge car il prouvera qu’elle lui appartient. Là encore le rapport entre eux est celui de la domination. Si dans la première partie de la lutte, la duchesse de Langeais était victorieuse, dans la seconde partie, le renversement de la situation la rend soumise et implorante et Montriveau intraitable. C’est elle qui perd. Lorsqu’il la retrouve au couvent, Montriveau ne lui demande pas son avis, il décide de l'enlever. Il se comporte toujours en officier qui veut remporter la victoire et forcer la citadelle. Seule la mort peut mettre fin à ces rapports passionnés, certes, mais finalement assez monstrueux.

C’est ce qui amène Balzac à distinguer la passion de l’amour :

L’amour et la passion sont deux différents états de l'âme que poètes et gens du monde, philosophes et niais confondent continuellement. L'amour comporte une mutualité de sentiments, une certitude de jouissances que rien n'altère, et un trop constant échange de plaisirs, une trop complète adhérence entre les coeurs pour ne pas exclure la jalousie. La possession est alors un moyen et non un but ; une infidélité fait souffrir, mais ne détache pas ; l'âme n'est ni plus ni moins ardente ou troublée, elle est incessamment heureuse ; enfin le désir étendu par un souffle divin d'un bout à l'autre sur l'immensité du temps nous le teint d'une même couleur : la vie est bleue comme l'est un ciel pur. La passion est le pressentiment de l'amour et de son infini auquel aspirent toutes les âmes souffrantes. La passion est un espoir qui peut-être sera trompé. Passion signifie à la fois souffrance et transition ; la passion cesse quand l'espérance est morte.

 voir le billet de Maggie






Le livre : La duchesse de Langeais de Honoré de Balzac
Le film : La duchesse de langeais de Jacques de  Baroncelli






Le prix Balzac est attribué aujourd'hui à : Aifelle, Dasola, Eeguab, Miriam


samedi 2 avril 2016

Un livre/Un film : énigme du samedi

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Pour ceux qui ne connaissent pas Un Livre/un film, l'énigme du samedi, je rappelle la règle du jeu.

Wens de En effeuillant le chrysanthème et moi-même, nous vous proposons, le 1er et le 3ème samedi du mois, un jeu sous forme d'énigme qui unit nos deux passions : La littérature et le cinéma! Il s'intitule : Un livre, Un film. Chez Wens vous devez trouver le film et le réalisateur, chez moi le livre et l'auteur.

Consignes  

Vous pouvez donner vos réponses par mail, adresse que vous trouverez dans mon profil : Qui suis-je? et  me laisser un mot dans les commentaires sans révéler la réponse pour m'avertir de votre participation. Le résultat de l'énigme sera donné le Dimanche.

La prochaine énigme aura lieu le troisième samedi du mois, le 16 Avril

Enigme 125

Le roman dont vous devez découvrir le titre a été publié en pleine époque romantique. Rédigé par un grand auteur français qui s’est par la suite démarqué du romantisme, il peint la vie artificielle et vaine de la noblesse parisienne au temps de la première restauration sous Louis XVIII. Il raconte l’histoire d’une femme qui va finir ses jours au couvent, victime à la fois de son amour, des lois antiféministes qui régissent la société,  et  d’elle-même, car elle possède « un esprit éminemment orgueilleux, un coeur froid, une grande soumission aux usages du monde ».


Si vous tentez à faire un éclat, je connais le sire, je ne l’aime guère. (Votre mari) est assez avare, personnel en diable; il se séparera de vous, gardera votre fortune, vous laissera pauvre, et conséquemment sans considération. Les cent mille livres de rente que vous avez héritées dernièrement de votre grand tante maternelle payeront les plaisirs de ses maîtresses, et vous serez liée, garrottée par les lois, obligée de dire amen à ces arrangements-là.

Renoncez à votre salut en deux minutes, s’il vous plaît de vous damner; d’accord! Mais réfléchissez bien quand il s’agit de renoncer à vos rentes. Je ne connais pas de confesseur qui nous absolve de la misère.

Une imprudence, c’est un pension, une vie errante, être à la merci de son amant; c’est l’ennui causé par les impertinences des femmes qui vaudront moins que toi, précisément parce qu’elles auront été très ignoblement adroites. Il valait cent fois mieux aller chez (ton amant), le soir, en fiacre, déguisée, que d’y envoyer ta voiture en plein jour. Tu es une petite sotte, chère enfant.



vendredi 1 avril 2016

Ron Carlson : Retour à Oakpine





Ron Carlson est né en 1947 en Utah et a grandi à Salt Lake City. Après des études de lettres, il devient professeur dans le Connecticut puis à l'université d'Arizona où il commence à enseigner le creative writing avant de devenir directeur de ce département. Il enseigne aujourd'hui la littérature à l'université de Californie, à Irvine, et vit à Huntington Beach. Ses nouvelles ont été publiées dans de nombreux magazines, du New Yorker à GQ. Il collabore également aux cahiers livres du New York Times et du Los Angeles Times. Il est l'auteur de plusieurs recueils de nouvelles et de cinq romans qui ont reçu de nombreuses distinctions aux États-Unis. (Gallsmeiter)

Retour à Oakpine de Ron Carlson paru aux éditions Gallmeister m’a valu une nuit d’insomnie car je n’ai plus pu le lâcher avant de l’avoir fini! Pourtant j’y suis entrée avec lenteur, car il faut du temps pour se familiariser avec tous les personnages vivant dans cette petite ville du Wyoming, Oakpine,  ou la vie s’écoule, lente, monotone, immobile. Une ville qui va jouer un grand rôle dans le roman, à la fois attractive parce qu'elle représente le creuset de l'enfance, mais aussi répulsive parce que rien ne semble vouloir y évoluer. Et puis, une fois que vous avez fait connaissance, vous voulez absolument savoir ce qu’il advient d’eux, vous avez envie de partager leur vie et ce n’est qu’à regret que vous les quittez.

Le thème central est celui du retour de Jimmy Brand dans sa ville natale. Ecrivain, homosexuel, vivant à New York, il a perdu son compagnon et revient au pays après trente ans d’absence pour y mourir. Son père ne veut par le recevoir, on comprendra peu à peu pourquoi. Aussi sa mère fait venir un copain d’enfance de Jimmy, Graig Raslston, pour aménager le garage afin d’y loger son fils. Son retour coïncide avec celui de Mason Kirby, avocat, divorcé, qui revient pour vendre la maison de ses parents. Or ce garage est celui où dans leur jeunesse Jimmy, Graig, Mason et un autre de leur camarade de classe Frank, se réunissaient pour jouer leur musique rock. Les quatre amis se retrouvent, l’un va mourir mais les autres sont aussi à un âge critique, la cinquantaine, "la deuxième moitié de leur vie". C’est l’heure du bilan pour tous, englués comme ils le sont dans cette petite ville où rien ne bouge,  pour eux aussi bien que pour leurs épouses, ces jeunes filles qui sont allées à l’école avec eux, qu’ils ont aimées, épousées, voire abandonnées. Qu’ont-ils fait de leur vie? Qu’ont-ils sacrifié de leurs rêves de jeunesse? Reste-t-il encore un peu de bonheur à glaner pour Jimmy?  Et pour les autres, que feront-ils ce qui leur reste à vivre?

Le ton du roman est plein de nostalgie et les souvenirs des années lycée affluent, se mêlant au présent, portant en eux leurs joies, le fantôme de leurs espoirs, la mélancolie du regret pour ce qui ne reviendra plus jamais. Mais le passé est aussi synonyme de tristesse, de peur, de mal-être car la jeunesse porte aussi son lot de drames. Pourtant le roman n’est jamais désespérant, au contraire. Malgré les amertumes liées au présent comme au passé, ce livre nous apporte du courage et de la force et ceci pour deux raisons : La présence des jeunes  gens adorables, positifs, qui permettent de croire à l’avenir. Ainsi Larry le fils de Graig et de Marci Reslston, un jeune sportif, sain, dévoué, plein de délicatesse et d’attention et Wendy, une jeune fille sincère, un peu paumée au début, qui refuse la fatalité faite aux femmes, se marier, être mère, et qui veut devenir écrivaine. Tous deux apportent à Jimmy la fraîcheur et la gentillesse de leur jeunesse.
Et puis il y a l’amitié qui reprend ses droits avec les retrouvailles des copains à nouveau réunis et se manifeste par le biais de la musique, un lien très fort qui les rassemble tous. Si bien que Jimmy malgré sa faiblesse et sa mort annoncée devient le ferment d’une renaissance et d'un nouveau départ dans la vie pour ses amis.
Un très beau livre, plein d’humanité et de tendresse.  

Merci Aifelle ICI de l’avoir fait voyager jusqu’à moi.
Du même auteur, je voudrais aussi découvrir chez Gallmeister  : Cinq ciels, Le signal. Je vais voir si la bibliothèque de ma ville les a (par miracle!).