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jeudi 18 septembre 2014

Challenge Shakespeare : Bilan 5

Arthur Rackam

 Amoureux de la langue anglaise, amoureux du théâtre élisabéthain, amoureux de la démesure et du rêve,  inscrivez-vous au challenge Shakespeare qui, je le rappelle, est illimité. Je suis désormais seule à m'en occuper, Maggie ayant trop de travail pour continuer. Shakespeare est un des plus grands dramaturges de tous les temps, un de ces écrivains universels, toujours étonnamment moderne, qui a peint la nature humaine sous toutes ces faces et a utilisé pour le faire tous les genres, du rire à la tragédie.

  Les logos que vous pouvez utiliser : Arthur Rackam


  Les logos sont créés à partir des illustrations d'un artiste britannique Arthur Rackam et des pièces : La Tempête, Le songe d'uen nuit d'été,  Le roi Lear, Roméo et Juliette. Né en 1867 à Londres, Arthur Rackam, après des études à l'école d'art de Lambeth, quitte son travail d'employé de bureau pour devenir journaliste et illustrateur au journal Westminster Budget. Peu à peu il va trouver son style, fantastique ou merveilleux et illustrera de nombreux livres pour enfants, les contes de Grimm, Alice au pays des Merveilles, Peter Pan et aussi des pièces de Shakespeare. Vous pourrez utiliser l'un ou l'autre de ces logos.


 
                                           Pièces, biographies, films,  mises en scène de théâtre


  petite bibliographie...
 

  Les comédies : Comme il vous plaira, La nuit des rois, Les marchands de Venise, Peines d'amour perdues, La mégère apprivoisée, beaucoup de bruit pour rien, Le songe d'une nuit d'été...
 

 Les tragédies : Roméo et Juliette, Le roi Lear, Macbeth, Hamlet, Othello, Titus Andronicus, Jules César, Antoine et Cléopâtre...
 

 Les pièces historiques : Richard III, Richard II, Henri IV, Henri V, Henri IV, Le roi Jean, Edouard III...
 

...Et une petite filmographie (les films les plus connus)...
  

Macbeth, Orson Welles (1948)
 

Le château de l'araignée Akira Kurosawa  (transposition de Macbeth) (1957)
  

The tragedy of Macbeth,  Roman Polanski (1971)
 

 the tragedy of Othello, Orson Welles (1952)
 

Roméo et Juliette de F. Zeffireli
 

 Roméo + Juliette de Baz Luhrmann (1996)
 

West side story  de Robert Wise (transposition de Roméo et Juliette) (1961)
 

 Hamlet, film de K. Brannagh (1996)
 

 King Lear, de Peter Brook (1971)
 

 Ran de Akira Kurosawa (transposition du Roi Lear) (1985)
 

Prospero's book, Peter Greenaway (1991)
 

La Mégère apprivoisée F. Zeffireli (1967)
 

Biographies
  

 biographie de Shakespeare de Peter Ackroid
  

Shakespeare in love Joseph Fienne 

L'antibiographie de Shakespeare de Bill Bryson 

Mises en scène

Et puis, bien sûr, si vous allez voir des pièces de Shakespeare, faites-nous part de votre expérience. C'est encore la meilleure façon de découvrir William Shakespeare!


Et maintenant le BILAN! Signalez--moi tout oubli!
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Alison Mossaharty  Bookerdose

Nouvelle inscrite

Le marchand de Venise
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Aymeline  Le blog d'Arieste


Shakespeare avec des photos d'Helsingor



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 Carole (K'role) Ppdj


 Hamlet's first soliloquy

 about my brain Hamlet monologue fin de l'acte 2 comment choisir sa traduction?

 Plaidoyer pour Hamlet femme texte de Sarah Bernhardt



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                   Céline : Le blog Bleu


Richard III

Macbeth 



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claudialucia :  Ma librairie




 Rimbaud : Ophélie 
Hamlet : en guise d’introduction(1), 
Ophélie (2) 
Hamlet et Ophélie (3)


Le marchand de Venise (1)
Le marchand de Venise et l'antisémitisme?(2)
Le marchand de Venise : thèmes et citations (3) 

Michel Quint : Les Joyeuses une troupe de théâtre joue les Joyeuses commères de Windsor   

Macbeth :  mise en scène d'Orson Welles
Macbeth : Mises en scène, théâtre Le Centaure/ un Macbeth africain




 La nuit des Rois au festival Off d'Avignon







 sonnets de Shakespeare : L'immortalité littéraire

A propos de Shakespeare dans  Gérard Donovan dans Julius Winsome 

L'antibiographie de Bill Bryson 

Antoine et Céopâtre LC


Antoine et Cléopâtre mise en scène de Tiago Rodrigues au festival d'Avignon 2015

Antoine et Cleopâtre : de l'inconstance des peuples (citation) 

  Coriolan 


Beaucoup de bruit pour rien


Le songe d'une nuit d'été

Comme il vous plaira (LC)

Richard III mis en scène par Ostermeier au festival d'Avignon 2015 

Looking for Richard avec Al Pacino

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Droopyvert  : De la lecture avant toute chose

Hamlet :

Le  songe d'une nuit d'été 

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Eiluned: Le dévore tant...




Othello , le maure de venise

 Roméo et Juliette

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Eimelle

 Hamlet Shakespeare

Ophélie de Shakespeare à la peinture

Lady Mabecth


  Roméo et Juliette, la version opéra

  Romeo et Juliette Opéra de Tours

Hamlet Shakespeare 

  Ophélie de Shakespeare à la peinture 

 Eimelle : Richard III 

Will le Magnifique de Stephen Greenblatt
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 Elcrys La soif de lire


Roméo et Juliette

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Elinor : Tâches d'encre

présentation du challenge

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Flora, écossaise, écrira dans le blog de claudialucia


Publication : spot the quote (or crypto-quote) : la richesse de la langue shakespearienne

Roméo et Juliette : Jouer  Juliet and Romeo à 76 et 66 ans 

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George : Les livres de George
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Hathaway : Hathaway



Macbeth : théâtre, BD de Daniel Casanave , adaptation cinématograhique par Geoffrey Wright

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Irrégulière : L'irrégulière

Roméo et Juliette


Antoine et Cléopâtre

Macbeth 

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Lewerenz : Le nez dans les livres


Beaucoup de bruit pour rien





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 L'or rouge

La fiancée du fantôme de Malika Ferdjoukh

Trois mille façons de dire je t'aime de Marie-Aude Murail 
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Lou : my lou book

Le Songe d'une nuit d'été

Anonymous Robert emmerych Was Shakespeare a fraud?

La fiancée du fantôme 


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Maggie Mille et un classiques

To be or not to be , Lubitch

Macbeth

La nuit des rois

Shakespeare in love 

Le songe d'une nuit d'été 

La Mégère apprivoisée de Zefirelli

Titus et Andronicus 

Comme il vous plaira de François Laroque : La vie du dramaturge

  Shakespeare : biographie de Bill Bryson
 
Antoine et Cléopâtre


Comme il vous plaira (LC)

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Margotte le bruit des pages



Vient de s'inscrire!



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Miriam : carnets de voyages





Le marchand de Venise










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Océane : Oh! d'Océane!

 La mégère apprivoisée

Roméo et Juliette 

Dumas et Shakespeare


Antoine et Cléopâtre 



Coriolan

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Ostinato : Lukea livres

Le théâtre du Globe


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Shelbylee :


 Les 7 Shakespeares : Harold Sakuishi

Othello

Hamlet

Richard III

Peines d'amour perdues
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Simone : lectures et autres curiosités

Nouvelle inscrite

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Theoma



Othello

Hamlet  Posté par Theoma

Biographie par Bill Bryson 

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Titine : plaisir à cultiver







Beaucoup de bruit pour rien 

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Wens : En effeuillant le chrysanthème...

Hamlet de Zefirelli

Extrait de Woody Allen : Shakespeare, Dieu et moi : Qui est Shakespeare?


 La mégère Apprivoisée (Zeffirelli)

Extrait de Bill James : Skakespeare et le polar 

 La nuit des Rois par la troupe Comédiens et Compagnie.

BD Enki Bilal : Juliet  et Roem 

Beaucoup de bruit pour rien de Kenneth Branagh


mercredi 18 juin 2014

Shakespeare : Comme il vous plaira




Contrairement à ce que je croyais, je n'avais jamais lu (ni vu) Comme il vous plaira  et comme d'habitude à la première découverte d'une pièce de Shakespeare, ce qui domine, ce sont les interrogations  qu'elle éveille en moi.

Le sujet de la pièce

Mais d'abord le sujet de la pièce.Voici la présentation du livre de poche de Yves Bonnefoy à laquelle j'ajoute quelques précisions :

Chargé de l'éducation de son jeune frère Orlando depuis la mort de leur père, Olivier le déteste assez pour se réjouir qu'il puisse périr lors d'un corps à corps avec un lutteur. Mais Orlando triomphe sous les yeux de Rosalinde  et s'éprend d'elle. La jeune fille pourtant doit partir maintenant que son père, le vieux duc, a été chassé du pouvoir par son frère. Sous un déguisement de garçon - elle prend le nom de Ganymède- elle gagne la forêt d'Ardennes où s'est réfugié le vieux duc avec les compagnons qui lui sont restés fidèles. Sa cousine Clélia, fille du nouveau maître, décide de la suivre, travestie en bergère sous le nom d'Aliéna. Elles vont vivre dans la forêt une vie pastorale, entourées de bergers. Mais elles retrouvent bientôt le duc et sa cour, Orlando, puis son frère Olivier maintenant repenti.
C'est en 1599 que Shakespeare écrit cette comédie pastorale et gaiement romanesque : une pièce à prendre pour le plaisir, « comme il vous plaira ». Mais après la composition de ses sonnets, et avant l'écriture des grandes tragédies, ce n'est pas une pièce que l'on puisse isoler. Réflexion sur l'amour et la condition féminine, elle nous montre, écrit Yves Bonnefoy, "qu'un Shakespeare n'est jamais en repos » : « La facilité même, quand elle semble régner dans son écriture, c'est aussi et peut-être d'abord ce qu'il emploie à un projet plus sérieux, et qui vient de loin et qui va loin. »
 

Edition et traduction d'Yves Bonnefoy.

Un personnage principal féminin  sous le déguisement d'un homme

Yves Bonnefoy choisit pour résumer la pièce de partir du personnage d'Orlando, l'amoureux de Rosalinde! Ce qui est surprenant! Rosalinde est, en effet, le personnage principal, et même si elle prend le déguisement d'un garçon, c'est elle qui mène l'action, qui dicte leur conduite aux autres personnages et qui les domine  tous par son esprit et le verbe. Cela est incontestable! 
Pour gagner sa liberté, assurer sa protection et celle de sa cousine Célia,  la jeune fille, il est vrai, est travestie en homme. On peut se demander si Rosalinde obéit ainsi à des codes sociaux : pour être l'égale de l'homme, la femme doit-elle abandonner son identité féminine, se comporter en homme?   (On pense aussi à George Sand ). Pourtant, c'est bien en tant que femme qu'elle s'affirme comme indépendante mais il semble qu'il y ait un passage obligé par le travestissement (lié à la condition féminine de l'époque) pour qu'elle puisse accéder ainsi à la liberté d'action mais aussi de parole et de sentiment : Rosalynde n'est pas une prude jeune fille, elle fait allusion à la sexualité gaillardement, a la langue bien pendue, elle raille et domine son amoureux. De plus, elle décide elle-même de celui qui sera son époux même si elle prétend qu'elle le choisit parce que son père l'approuverait!

Le travestissement : homosexualité, androgynie ou simple tradition littéraire?

Walter Howard Deverell

D'autres personnages féminins de Shakespeare sont travestis en homme. Ainsi la Viola de La nuit des rois. il s'agit d'une tradition romanesque mais le travestissement et les débats amoureux qui s'en suivent soulèvent néanmoins la question de l'identité sexuelle. Orlando courtise Ganymède comme si elle était une femme (ce qu'elle est mais il ne le sait pas) alors qu'il pense que c'est un homme. La bergère Phébé est amoureuse de Ganymède qu'elle prend vraiment pour un homme. On voit se reproduire les mêmes méprises dans La nuit des rois. Peut-on parler d'une attirance homosexuelle comme certains critiques le pensent? Rosalinde prend le nom de Ganymède, ce jeune homme si beau que Zeus lui-même en tomba amoureux; il l'enleva en se métamorphosant en aigle et en fit son amant. Le choix de ce nom n'est donc pas anodin (de même que celui de Célia qui devient Aliena : l'étrangère).


J'ai lu une autre explication possible dans un article du Salon littéraire ICI  :

Encore une fois, ce n'est pas l'homosexualité qui prend le masque de l'hétérosexualité mais l'hétérosexualité qui prend le masque de l'homosexualité. Ce que nous dit Shakespeare est que dans un monde magique, c'est-à-dire un monde parfait, les sexes ne devraient jamais se tromper. On n'imagine pas Adam et Eve homosexuels ! Dès qu'il y a homme et femme, il y a différence, amour, vie - et c'est pourquoi couper la scène de l'hymen du cinquième acte comme le font la plupart des metteurs en scène revient à dénaturer la pièce, sinon à en censurer son sens profond.

Cette affirmation s'appuie peut-être (?) sur le mythe platonicien de l'androgynie. Au commencement les êtres humains sont doubles, mi-homme, mi-femme. Mais ils provoquent la colère des Dieux. Zeus les punit en les partageant en deux moitiés qui toujours auront le souvenir de leur origine et la nostalgie de la séparation.


                                         Une comédie pastorale qui critique la pastorale

 
roman pastoral d'Honoré d'Urfé France XVII°

Comme il vous plaira a une source romanesque Rosalynde de Lodge qui appartient au genre de la pastorale. Cette dernière idéalise la vie à la campagne présentée comme idyllique. Les moeurs des bergers dépourvus d'artifice, innocents et purs contrastent avec le manque de simplicité de la ville, la corruption et les vices qui y règnent. Cette opposition existe dans Comme il vous plaira qui semble donc obéir aux lois du genre mais chaque fois que le thème est présenté, un personnage prend aussitôt le contre pied :

Ainsi, le vieux duc dans la scène 1 de l'acte II magnifie cette vie dans les bois en des termes poétiques  mais il en souligne les duretés :

Le vieux duc.—Eh bien ! mes compagnons, mes frères d’exil, l’habitude n’a-t-elle pas rendu cette vie plus douce pour nous que celle que l’on passe dans la pompe des grandeurs ? Ces bois ne sont-ils pas plus exempts de dangers qu’une cour envieuse ? Ici, nous ne souffrons que la peine imposée à Adam, les différences des saisons, la dent glacée et les brutales insultes du vent d’hiver, et quand il me pince et souffle sur mon corps, jusqu’à ce que je sois tout transi de froid, je souris et je dis : « Ce n’est pas ici un flatteur : ce sont là des conseillers qui me convainquent de ce que je suis en me le faisant sentir. » On peut retirer de doux fruits de l’adversité ; telle que le crapaud horrible et venimeux, elle porte cependant dans sa tête un précieux joyau Notre vie actuelle, séparée de tout commerce avec le monde, trouve des voix dans les arbres, des livres dans les ruisseaux qui coulent, des sermons dans les pierres, et du bien en toute chose.

Cette opposition se retrouvera déclinée à deux voix par Amiens et Jacques, les deux gentilhommes de la suite du vieux duc dans la scène 5 de l'acte II

Amiens 
Chanson
Toi qui fuis l’éclat de la cour,
Des champs féconds préférant la parure,

Heureux des mets que t’offre la nature,

Viens habiter avec moi ce séjour.

Dans ce bocage,

Sous cet ombrage,

Point d’ennemi que l’hiver et l’orage.

Jacques.
(Il chante.)
S’il arrive par hasard
 
Qu’un homme soit changé en âne ;

Quittant son bien et son aisance

Pour suivre une volonté obstinée,

Duc dàme, duc dàme, duc dàme,

Il trouvera ici

D’aussi grands fous que lui

S’il veut venir ici.

Amiens.—Que signifie ce duc ad me ?

Jacques.—C’est une invocation grecque pour rassembler les sots dans un cercle.

Enfin sur le mode comique, le fou Touchstone reprend à lui tout seul cette opposition dans la scène 2 de l'acte III

Corin—Et comment trouvez-vous cette vie de berger, monsieur Touchstone ?

Touchstone.—Franchement, berger, par elle-même, c’est une bonne vie ; mais en ce que c’est une vie de berger, c’est une pauvre vie. En ce qu’elle est solitaire, je l’aime beaucoup ; mais en ce qu’elle est retirée, c’est une misérable vie : ensuite, par rapport à ce qu’on la passe dans les champs, elle me plaît assez ; mais en ce qu’on ne la passe pas à la cour, elle est ennuyeuse. Comme vie frugale, voyez-vous, elle convient beaucoup à mon humeur ; mais en ce qu’il n’y a pas plus d’abondance, elle contrarie beaucoup mon estomac ....
acte III scène2

Mais si cette pastorale contient une critique de la pastorale, il n'en reste pas moins que cette forêt des Ardennes (En France?) où se réfugient tous les personnages, lieu fantaisiste où poussent des palmiers et vivent des lions est tout de même un monde magique, une sorte d'Eden. Là, les êtres humains finissent par revenir à la bonté primitive de l'homme d'avant la Chute. Ainsi Frederic, l'usurpateur, se convertit soudainement; Olivier qui souhaitait la mort d'Orlando revient à de bons sentiments. Nous sommes donc bien au-delà de la vraisemblance, entre le rêve et le réel, comme dans Le songe d'une nuit d'été mais en moins cruel,  un univers où la bonté triomphe, où tout finit bien.

Une pièce sur l'amour courtois qui se moque de l'amour courtois

Plus que politique, Comme il vous plaira est avant tout une comédie où l'amour joue un rôle primordial. Elle se conclura d'ailleurs par quatre mariages célébrés par la déesse Hymen. Mais si les amoureux y tiennent un langage précieux et doivent subir des épreuves selon la plus grande tradition de l'amour courtois, Shakespeare se plaît à se moquer de ses conventions et il confie aux femmes le rôle de les critiquer.
Ainsi lorsque Orlando énamourée compose des vers qu'il accroche aux branches des arbres, Roslynde convient qu'il s'agit de bien mauvais vers.
Quant à la bergère Phébé poursuivi par les assiduités du berger Sylvius qu'elle n'aime pas, ce vocabulaire précieux la met carrément en colère et c'est avec une grande vivacité qu'elle condamne cet excès de langage qui n'a d'égal que la fausseté des sentiments :
 Phébé
 Tu me dis que le meurtre est dans mes yeux ; cela est joli à coup sûr et fort probable que les yeux, qui sont la chose la plus fragile et la plus douce, à qui le moindre atome fait fermer leurs portes timides, soient appelés des tyrans, des bouchers, des meurtriers. C’est maintenant que je fronce les sourcils de tout mon cœur en te regardant ; et si mes yeux peuvent blesser, eh bien, puissent-ils te tuer dans ce moment ! Maintenant fais semblant de t’évanouir ; allons, tombe.—Si tu ne peux pas, oh ! fi, fi, ne mens donc pas, en disant que mes yeux sont des meurtriers. Montre la blessure que mes yeux t’ont faite. Égratigne-toi seulement avec une épingle, et il en restera quelques cicatrices ; appuie-toi seulement sur un jonc, et tu verras que ta main en gardera un moment la marque et l’empreinte : mais mes yeux, que je viens de lancer sur toi, ne te blessent pas ; et, j’en suis bien sûre, il n’y a pas dans les yeux de force qui puisse faire du mal. Acte III scène 6

Et Rosalynde surenchérit :
Orlando.—Alors il faut que je meure en ma propre personne.

Rosalinde—Non, vraiment, mourez par procuration : le pauvre monde a presque six mille ans, et pendant tout ce temps, il n’y a jamais eu un homme qui soit mort en personne, pour cause d’amour, s’entend. (...) Mais tout cela n’est que des mensonges ; les hommes sont morts dans tous les temps, et les vers les ont mangés ; mais jamais ils ne sont morts d’amour. Acte IV scène 1

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On pourrait encore parler d'autres thèmes de Comme il vous plaira : celui des frères ennemis ( le vieux duc et Frédéric,  Olivier et Orlando), thème cher à Shakespeare que l'on retrouve aussi dans La Tempête ou Hamlet, le rôle du fou et de Jacques, l'importance du nombre :  les quatre vitesses du temps, les sept âges de la vie, les trois leçons de morale, les sept variétés de la mélancolie, les sept degrés du démenti et tant d'autres... mais il faut que je m'arrête en remerciant Shakespeare de me questionner autant et du plaisir qu'il me donne!

Acte IV scène 1 Les sept variétés de la mélancolie
Jacques.—Je n’ai pas la mélancolie d’un écolier, qui vient de l’émulation ; ni la mélancolie d’un musicien, qui est fantasque ; ni celle d’un courtisan, qui est vaniteux ; ni celle d’un soldat, qui est l’ambition ; ni celle d’un homme de robe, qui est politique ; ni celle d’une femme, qui est frivole ; ni celle d’un amoureux, qui est un composé de toutes les autres : mais j’ai une mélancolie à moi, une mélancolie formée de plusieurs ingrédients, extraite de plusieurs objets ; et je puis dire que la contemplation de tous mes voyages, dans laquelle m’enveloppe ma fréquente rêverie, est une tristesse vraiment originale. 

 Acte II scène 7 Les sept âges de l'homme

Jacques.—Le monde entier est un théâtre, et les hommes et les femmes ne sont que des acteurs ; ils ont leurs entrées et leurs sorties. Un homme, dans le cours de sa vie, joue différents rôles ; et les actes de la pièce sont les sept âges[13]. Dans le premier, c’est l’enfant, vagissant, bavant dans les bras de sa nourrice. Ensuite l’écolier, toujours en pleurs, avec son frais visage du matin et son petit sac, rampe, comme le limaçon, à contre-cœur jusqu’à l’école. Puis vient l’amoureux, qui soupire comme une fournaise et chante une ballade plaintive qu’il a adressée au sourcil de sa maîtresse. Puis le soldat, prodigue de jurements étranges et barbu comme le léopard[14], jaloux sur le point d’honneur, emporté, toujours prêt à se quereller, cherchant la renommée, cette bulle de savon, jusque dans la bouche du canon. Après lui, c’est le juge au ventre arrondi, garni d’un bon chapon, l’œil sévère, la barbe taillée d’une forme grave ; il abonde en vieilles sentences, en maximes vulgaires ; et c’est ainsi qu’il joue son rôle. Le sixième âge offre un maigre Pantalon[15] en pantoufles, avec des lunettes sur le nez et une poche de côté : les bas bien conservés de sa jeunesse se trouvent maintenant beaucoup trop vastes pour sa jambe ratatinée ; sa voix, jadis forte et mâle, revient au fausset de l’enfance, et ne fait plus que siffler d’un ton aigre et grêle. Enfin le septième et dernier âge vient unir cette histoire pleine d’étranges événements ; c’est la seconde enfance, état d’oubli profond où l’homme se trouve sans dents, sans yeux, sans goût, sans rien. 

LC avec Maggie et Miriam







vendredi 16 mai 2014

Le songe d'une nuit d'été par la compagnie anglaise Propeller




Ce que j'attends de la pièce de shakespearien  le songe d'une nuit d'été ICI, je l'ai écrit dans mon billet  du mois de janvier 2014, lors d'une LC, car pour moi cette comédie est une des plus riches du répertoire du dramaturge. Malheureusement les metteurs en scène en occultent trop souvent de nombreux aspects tant elle est complexe sous son apparente simplicité.  Aussi je n'ai jamais pu être vraiment satisfaite des mises en scène que j'ai vues bien que certaines m'aient plu. Mais il me manque toujours quelque chose. Et c'est encore vrai cette fois, pour la représentation au théâtre de La Criée à Marseille de la mise en scène de Edward Hall de la compagnie anglaise Propeller.


 Cela ne veut pas dire que je n'ai pas aimé et j'ai bien ri de la folie débridée, des facéties, de la fantaisie, acrobaties, cabrioles, musique et chants des Propeller qui ont donné le meilleur d'eux-mêmes dans le registre comique. Avec cette troupe, la pièce n'est jouée que par des hommes y compris les rôles de femmes comme du temps de Shakespeare, certainement pour se rapprocher au plus près de l'esprit de la comédie shakespearienne et de la manière dont les pièces étaient interprétées au XVI siècle.



La scène de jalousie dans la seconde partie de la pièce, entre Hermia et Hélène est par exemple tout à fait désopilante et va crescendo, la colère d'Hermia s'enflant comiquement chaque fois que Hélène répète le terme  "petite", ce qui ne manque pas d'arriver souvent, l'on s'en doute!  Comique de mot et de répétition, comique de caractère et de situation, les acteurs de la troupe Propeller exploitent sciemment tous ces ressorts, et savent ménager leurs effets, alternant les moments de répit où le rire va decrescendo pour mieux nous entraîner ensuite dans une explosion joyeuse. "Suis-je donc si petite, grand mât de cocagne" fulmine Hermia. Les comédiens qui interprètent ces deux rôles jouent à merveille sur leur physique contrasté, le petit blond et le grand maigre comme un échalas!
 Il en est de même de la scène de théâtre dans le théâtre quand les artisans jouent Thisbé et Pyrame devant Thésée ou de l'apparition de Bottom tout à fait grotesque avec sa tête d'âne.. La folie amoureuse qui s'empare des hommes y est donc très bien rendue et nous entraîne dans une nuit d'été exubérante et échevelée! Il faut noter aussi les  costumes amusants (Puck en tutu et leggings rayés) et les lumières qui apportent à la mise en scène un surplus de folie et de fantaisie.


Mais -car il y a un mais- j'ai trouvé cette seconde partie du spectacle de la Propeller qui commence au début de l'acte III (peut-être parce qu'elle est plus franchement comique) meilleure que la première dans laquelle la comédie est moins évidente et ne joue pas un rôle primordial.. 
C'est ainsi que lors de la rencontre de Titiana et d'Obéron je n'ai pas ressenti la poésie de ces scènes magnifiées par la langue de Shakespeare, la beauté et la richesse des images qui rappellent que tout ceci est un rêve.. Le choix du metteur en scène est de montrer l'aspect caricatural de ces personnages et non la beauté et la grandeur de ces créatures magiques, mystérieuses et puissantes. Dans la mise en scène inventive d'Edward Hall, les personnages perchés sur de hautes chaises comme les arbitres d'un match se disputent l'enfant volé à Oberon par Titiana avec une mesquinerie toute humaine!  De ce fait, la pièce est tirée vers la farce et occulte la féérie mais aussi la réflexion tragique sur le pouvoir des dieux, eux, qui tiennent entre leurs mains le destin des êtres humains, eux qui s'amusent cruellement de ces faibles créatures soulignant ainsi les limites de la liberté humaine et la facticité de l'Amour.
Et pourtant c'est tout cela que représente la pièce dans ce fameux mélange des genres que prônait Victor Hugo, grand admirateur de Shakespeare pour le théâtre romantique. Car il y a un aspect tragique indéniable dans Le songe d'une nuit d'été, plus je vois et plus je lis la pièce, plus cette évidence s'impose! Je rêve d'une représentation où le mélange des genres serait vraiment respectée et où l'on passerait du rire aux larmes ou au rêve, où l'on éprouverait toutes les gammes de l'émotion.


Challenge Théâtre Eimelle