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vendredi 3 juillet 2015

Le 3 Juillet : spectacles en avant -première à Avignon OFF

Avignon festival OFF 2015

La vieille du festival, les avignonnais ont l'opportunité d'aller assister à quelques spectacles en avant-première. J'ai choisi d'aller voir Une chambre à Soi de Virginia Woolf mais quand je suis arrivée au Théâtre Girasole, on me dit que la compagnie ne joue pas car elle ne se sent pas prête ; de même pour le spectacle du soir Ubu Roi. Quand vous avec traversé toute la ville sous la chaleur accablante et qu'on vous annonce que vous ne pourrez pas voir la pièce, laissez-moi vous dire que vous êtes forcément très déçue.  Moralité? Téléphonez avant de partir au théâtre pour ne pas avoir ce genre de déconvenue! Pour le théâtre Essaïon j'ai donc pris la précaution de me renseigner. Finalement, je n'ai pas trop eu le choix mais j'ai découvert trois spectacles (que je ne serais peut-être pas aller voir) Fille du paradis, Les divalala, Les fâcheux. j'ai assisté aussi à la représentation de Zigzag, à la Luna, lieu qui ouvre ses portes le 3 juillet un jour avant la date officielle du festival  qui est cette année le 4 Juillet.

Zigzag de Molière/Xavier Lemaire 


 Et si vous aviez, durant le même spectacle, la 1ère scène du Médecin malgré lui de Molière mis en scène de 3 façons différentes ?
ZIGZAG, vous propose cela !

L'année dernière Xavier Lemaire  a été coup du coeur du OFF pour Les Coquelicots des tranchées pour lequel il a obtenu aussi un Molière. Il revient à Avignon cette année avec une pièce plus légère interprétée par Isabelle Andréani, Franck Jouglas et lui-même.
Les trois mises en scène que Xavier Lemaire propose de la première scène du Médecin malgré lui où l'on voit Sganarelle battre sa femme Martine, sont intéressantes. La première classique en costumes d'époque, décor réaliste,  tire vers la farce. La seconde, je ne sais comment trop comment la classer : contemporaine, oui,  conceptuelle, peut-être? Sans décor et avec une économie de paroles et de moyens,  elle provoque le rire. La  troisième actualisée montre un couple de SDF, alcooliques tombés dans la déchéance. La violence y est telle qu'elle occulte le comique et cela fonctionne! Preuve que ce que Molière écrit est de tous les temps!
Comme d'habitude dans la Compagnie les Larrons les acteurs sont convaincants et bien dirigés.
J'ai moins aimé cependant le discours de Xavier Lemaire sur la mise en scène; beaucoup trop pédagogique à mon goût. j'ai eu l'impression de me retrouver en classe dans un cours de lettres!

Zigzag

LUNA (THÉÂTRE LA)

Xavier Lemaire
du 3 au 26 juillet


11h01
durée : 1h20

Tout public Théâtre / Théâtre musical / Café-théâtre à partir de 8 ans

Fille du paradis de Nelly Arcan / Ahmed Madan

Fille du paradis : interprète Véronique Sacri
Cynthia, une jeune étudiante en littérature décide un jour de composer le numéro de la plus grande agence d’escorte de Montréal. Adapté de Putain, roman autobiographique de Nelly Arcan, c’est une charge radicale et sans concession contre l’icône dévastatrice de la femme parfaite. Une parole bouleversante d’humanité, une rage de vivre qui déchire l’opacité des ténèbres telle une étoile filante.

A priori le sujet me faisait peur mais découvrir cette auteure québécoise Nelly Arcan était tentant. Elle y explique comment elle est arrivée à la prostitution après une enfance entre une mère toujours couchée qui refusait de vivre, un père religieux et austère, des études dans un institut catholique étouffant. Certains passages sont d'une violence terrible et résonne comme un cri de souffrance. Nelly Arcan s'est donnée la mort en 2009. Chaque mot est une dénonciation du poids de la religion et d'une société hypocrite. L'actrice Véronique Sacri est excellente. Un bémol pourtant! j'ai trouvé que l'adaptation à la scène était parfois trop répétitive et sans véritable progression dramatique.

Fille du paradis de Nelly Arcan
GIRASOLE (THÉÂTRE) 
du 4 au 6 juillet
14H10
relâche le 19 juillet

Les divalala ou chansons d'amour traficotées

Un récital décalé pour Divas allumées ! De Johnny à Piaf en passant par Stromae, Dalida ou encore Gainsbourg, Les Divalala retracent a cappella le parcours amoureux d'une femme des premiers frissons aux ravages de la passion.

Les divalala chantent la variété; elles ont de l'humour, sont cocasses et pleines d'invention. Ce n'est pas le genre de spectacle que je vais voir d'habitude - s'il n'avait été donné en avant-première- mais il fait passer un moment agréable et le public s'amuse beaucoup.

Les Divalala Chansons d'amour traficotées

ESSAÏON-AVIGNON

du 3 au 26 juillet


19h
durée : 1h10 

Spectacle musical
  

Les fâcheux de Molière/ Jérémie Milsztein 


« Le devoir de la comédie étant de corriger les hommes en les divertissant, j'ai cru que, dans l'emploi où je me trouve, je n'avais rien de mieux à faire que d'attaquer par des peintures ridicules, les vices de mon siècle.» Molière  
Pendant trois actes Eraste essaie d'avoir une rendez vous avec Ophise dont il est épris mais il doit subir tout un défilé de fâcheux qui l'accablent de leurs politesses et tiennent à lui raconter leurs hsitoires

Les fâcheux est une comédie-ballet de Molière (1661). Ce n'est pas une grande pièce mais certains passages annoncent Le Misanthrope Elle souffre parfois de quelques longueurs car les fâcheux, comme leur nom l'indique, sont parfois bien ... fâcheux, autrement dit ennuyeux!  La mise en scène est inventive et enlevée. Une des bonnes trouvailles du metteur en scène est d'avoir confié le rôle des fâcheux à un seul comédien qui s'en sort fort bien et sait nous amuser. Les acteurs sont tous bons et l'on passe un agréable moment. je suis heureuse d'avoir découvert cette pièce que je n'avais jamais vue.

Les Fâcheux

ESSAÏON-AVIGNON

Molière
du 4 au 26 juillet
20h30
durée : 1h  Classique

jeudi 21 novembre 2013

Le Nouveau Tartuffe : Molière/Pelaez/ Gélas au théâtre du Chêne Noir



Orgon (Damien Rémy) et Elmire (Sabine Sendra )

Le nouveau Tartuffe -comme  son titre l'indique-  donné à Avignon au théâtre Le Chêne noir et mis en scène par Gérard Gélas, n'est pas celui de Molière mais celui de Jean Pierre Pelaez qui nous en propose une réécriture.
Je le dis tout de suite, si je me méfie beaucoup des metteurs en scène qui prétendent "dépoussiérer" , "déstructurer",  selon les termes à la mode, les grandes pièces du répertoire théâtral classique comme si elles n'attendaient qu'eux pour avoir un sens, je ne suis pas contre la réécriture. Après tout Molière, Racine, Corneille, Shakesperare et bien d'autres l'ont  fait avant eux! Et il n'est plus temps à notre époque de relancer le débat entre les Anciens et les Modernes. Pascal le disait  : Quand on joue à la paume, c'est une même balle dont se sert l'un et l'autre mais l'un la place mieux!

 Mieux? pas obligatoirement! Mais il suffit qu'il la place judicieusement, comme le fait Jean Pierre Pelaez en imaginant un Tartuffe de notre temps,  soit un médecin humanitaire dont les passages à la télévision servent de tremplin à  la carrière politique et financière :  portefeuille de ministre et  revenus substantiels. Vous aurez reconnu sans peine? Mais au-delà de l'anecdote, bien sûr, la pièce de Pelaez rappelle que les Tartuffes de notre époque sont aussi nombreux que jadis! Et si si les moyens d'y parvenir ont changé, le processus, lui, est resté le même et le but à atteindre aussi! La famille d'Orgon paraît bien appartenir à ce que l'on appelle la gauche caviar, confort, richesse et bonne conscience, avec leur jeune fille au pair colombienne (mais gênante quand elle la ramène trop!) et les jeunes gens de bonne famille qui s'évanouissent ou presque à l'idée de devoir travailler… pour vivre! Et bien sûr, de même que Molière prend soin de distinguer les vrais dévots des faux, Pelaez insiste sur la distinction entre les vrais humanitaires et.. les imposteurs, ceux qui ont, dit-il,  "leur compte en Suisse" et le porte-monnaie à la place du coeur!


Un Tartuffe réussi! (Jacky Nercessian)
Pour bien montrer cette permanence de l'espèce humaine au-delà des siècles,  les personnages  sont vêtus en tenue du XVII siècle mais Tartuffe en vêtement moderne - costume de lin blanc et écharpe blanche -, uniforme de ce faux humanitaire médiatisé. Le jeune messager qui rétablit l'ordre au dénouement d'une manière aussi factice ( en réalité ce sont toujours les Tartuffes qui gagnent) que dans le Tartuffe  du XVII siècle, l'un au nom du président de la République, l'autre  du roi, porte, lui, le costume du commissaire révolutionnaire de 1793 et arbore la cocarde tricolore. A noter aussi les beaux éclairages qui soulignent l'action.
La mise en scène est réglée comme un ballet, avec une précision rigoureuse qui souligne l'entêtement, la sottise, l'aveuglement, d'un Orgon, (excellent Damien Rémy) habité de tics, agité de gestes automatiques, traçant devant lui des dessins géométriques comme pour affirmer une autorité qui lui échappe. Le dialogue s'interrompt parfois pour laisser place à une danse saccadée ou chaque personnage perd son statut d'humain pour devenir automates, déshumanisés. La prestation homogène de tous les acteurs ajoute au plaisir du spectacle. Un bon moment théâtral.

Théâtre du Chêne Noir : Avignon
Le nouveau Tartuffe jusqu'au 24 Novembre

Challenge Théâtre  En scène chez Eimelle



lundi 5 février 2024

Mayra Santo-Febres : La maîtresse de Garlos Gardel

 

Dans La maîtresse de Garlos Gardel de Mayra Santo-Febres, écrivaine portoricaine, Micaela Thorné, une femme âgée, devenue gynécologue et phytologue, raconte la rapide liaison qu’elle a eue avec Carlos Gardel, surnommé le roi du Tango, quand elle était une jeune fille étudiante à l’école d’infirmière dans l’île de Porto Rico.
Nous sommes en 1935 qui est l’année de la mort de Carlos Gardel dans un accident d’avion, l’année aussi où Micaela va vivre avec lui une passion brûlante qui durera vingt-sept jours, période à la fin de laquelle elle est congédiée par l’impresario du chanteur comme une vulgaire chaussette ayant fini de servir ! Heureusement, comme il la vire rapidement, elle pourra valider son diplôme d’infirmière et plus tard continuer des études de médecine. Comme si, pour "suivre son propre chemin", il fallait absolument "le parcourir sans l'aide d'un compagnon". C'est la question qu'elle se pose face aux livres qui se rappellent à elle pendant sa liaison amoureuse et qui lui annoncent "des aventures différentes" :

La seule façon d'aller au bout de ces aventures-là est-elle toujours solitaire ? Libre d'attaches sentimentales ?

Carlos Gardel


Bien sûr, ce roman nous fait connaître la vie du célèbre chanteur né en France à Toulouse ou en Argentine, ou encore en Uruguay.  Le  récit nous explique le mystère autour du lieu de la naissance de celui qui vécut une enfance pauvre et violente en Argentine avant de triompher sur la scène. Il y a aussi une réflexion intéressante sur la danse elle-même qui naît dans les bas quartiers des grandes villes hispaniques et conquiert les classes sociales supérieures désireuses de s'encanailler surtout après l'anathème jeté par le Pape qualifiant le tango comme la danse du Diable !  Il y a aussi un passage sur la beauté de la tristesse et de la nostalgie, que l'on peut peut-être comparer à la "saudade" du  Fado portugais ?

 La tristesse est cette note qui s'étire comme un bandonéon. Elle fait grandir l'appel quand la distance se relâche, grandir la voix quand l'objet du désir est loin. C'est de là que viennent ce soupir et cette cassure dans la voix. C'est vers ce lieu-là qu'il faut tendre, faire battre le cœur, pour que la nostalgie atteigne ce qu'on a perdu et le fasse revivre dans la poitrine.

 
Bien sûr, Carlos Gardel est une personnalité célèbre et il est intéressant d'en savoir plus sur lui mais je l'ai trouvé antipathique et il m’a irritée comme m’a ennuyée la soumission de Micaela, personnage fictionnel autrement intéressant pourtant, dans sa conquête du savoir et sa recherche de l'indépendance. Bref ! je n’ai pas particulièrement apprécié cette histoire d’amour torride, assez classique finalement, l’un dans le rôle de « l’étalon » latin, l’autre dans le rôle de la fille noire éprise jusqu’à risquer de mettre sous éteignoir son intelligence et à perdre sa dignité.
Car Micaela est noire et, à ce titre, elle subit le racisme déclaré ou larvé de la société et de ses pairs, les autres étudiantes. Si elle peut envisager de poursuivre des études, ce qui est impensable dans le milieu où elle vit, c’est grâce à sa grand-mère, la « sorcière », guérisseuse, dont la connaissance des plantes médicales est si poussée que pour connaître ses secrets, un médecin, le docteur Roberts, parraine la jeune fille et lui fait obtenir une bourse. C'est donc une double lutte que mène Micaela, échapper au déterminisme social et se libérer en tant que femme amoureuse.
C’est ce que j'ai aimé dans ce roman ainsi que le personnage très fort de la grand-mère avec toutes les connaissances médicales qui ont trait aux plantes comme celle, mystérieuse, appelée le Coeur-de-vent, plante sorcière dont Micaela devenue médecin percera le secret scientifique.

"De la famille de l’Uncaria Tormentosa, connue dans ce pays sous le nom de Coeur-de-vent, la plante et son champignon contiennent des doses adaptogèniques d’hormones végétales, ainsi que d’autres composés qui peuvent être isolés pour traiter d’autres maladies."
"J’ai travaillé sur la plante pendant des décennies, classant ses constituants, mesurant sa composition."
 

De plus le roman est bien écrit avec de belles descriptions animées et vivantes de la vie dans les quartiers populaires et des paysages de l’île.

Les Mogotes (Cuba)


"J’ai regardé par la vitre. Les mogotes de calcaire défilaient les uns après les autres. Tout était vert. Nature dense et sauvage. J’ai commencé à déchiffrer la campagne. Malgré l’enchevêtrement d’arbres et de feuillages, je parvenais à identifier des hibiscus, un chêne cabelassier, des cèdres, un palmier royal, des acajous sur lesquels grimpaient du lierre, des Bromélies. Elles étaient bien là, les plantes, elles régnaient. Certains vivaient des autres, griffant le ciel en quête de plus de lumière. D’autres donnaient de l’ombre et des fruits tandis que des millions de feuilles se transformaient en excroissances, pour donner leur jus. "

LC avec Ingannmic  ICI



mercredi 8 juin 2011

Michel Quint : Les joyeuses



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En choisissant Les Joyeuses de Michel Quint chez BOB, je pensais me faire un double plaisir :  d'abord lire un livre de cet auteur dont j'ai beaucoup apprécié Effroyables jardins, à la lecture comme au théâtre (voir ici), ensuite aborder une pièce de Shakespeare  in situ, pendant le laps de temps nécessaire à son éclosion théâtrale sur les planches. Je savais, en effet, qu'il y était question d'une troupe de comédiens travaillant sur la mise en scène de : Les joyeuses commères de Windsor. Autant vous le dire tout de suite, je n'ai pas aimé ce roman qui ne manque pourtant pas d'ambition pour des raisons que je vais expliquer.
L'intrigue plein de rebondissements se déroule en Vaucluse, à Sablet, près de Gigondas, en plein coeur des vignobles. Ce détail une importance capitale puisque le vin qui coule à flots va être le Maître des divertissements orgiaques de ces nuits d'été shakespeariennes et ceci aussi bien dans la vie qu'au théâtre. En effet, Edwige, la soixantaine bien conservée, propriétaire d'un grand domaine viticole, a invité son ancien amant, Jean-Pierre Barnier, metteur en scène et acteur, à monter la pièce de Shakespeare. La troupe est composée de comédiens professionnels et l'on emploiera pour les seconds rôles les bonnes volontés locales. Simone, la fille d'Edwige, ne voit pas d'un très bon oeil cet homme dont sa mère semble toujours amoureuse et qu'elle lui présente de plus comme étant son père.
Le jeune narrateur Federico Peres, au cours de cet été enflammé va oublier le bégaiement qui l'a toujours handicapé pour faire ses premiers essais sur la scène et s'initier aux jeux de l'amour. C'est lui qui observe et décrit, en même temps que ses premiers émois, les différents personnages autour desquels plane un drame passé dont personne ne veut parler clairement. Qui est, en effet, le père de Simone? Quel est la véritable personnalité du père de Federico, David Peres? Quel chagrin secret ronge la belle Béatrice, médecin de Sablet?
Le thème du théâtre domine, bien sûr, dans le roman. Les joyeuses commères de Windsor ou Les gaillardes épouses de Windsor est une farce cocasse, assez simple, vraisemblablement une oeuvre de commande de la Reine Elizabeth, pièce que Shakespeare a un peu bâclée. Le metteur en scène inspiré par le décor du vignoble a décidé de le monter comme une farce dionysiaque, consacré aux vins, aux plaisirs de la chair, à la sensualité grossière et débordante. Lui-même, Jean-Pierre Barnier n'est-il pas un Falstaff, énorme, truculent, hommes à femmes en train de perdre son pouvoir de séduction et plus proche de la mort qu'il ne le voudrait? Les Fées deviennent donc des Bacchantes, la leçon donnée à Falstaff, une lapidation, une boucherie au sens propre : la mort de Falstaff  et celle de Barnier se répondant comme un écho. Pourquoi pas? L'idée est bonne.
Là où je ne le suis plus, c'est lorsque les personnages gagnés par la contagion finissent par se conduire dans la vie comme sur scène. Je sais bien que c'est un des grands thèmes de Shakespeare - le monde est une scène-  mais le roman n'est pas théâtre et la transposition passe mal. Les orgies paraissent sans grand intérêt et finalement on ne parvient pas à s'intéresser à ces gens, à leurs beuveries répétitives, aux coucheries de même. Du coup j'ai ressenti une impatience devant cette histoire ou la grande préoccupation semble être de se procurer des Joyeuses (les bouteilles! je vous laisse le soin de découvrir le champ sémantique du mot) et de lutiner, ou plus si affinités, sa voisine. J'ai trouvé aussi peu vraisemblable l'histoire elle-même.
D'autre part, où est passé le style de Michel Quint, celui qui assurait le succès de Effroyables jardins? Le jeune narrateur parle dans un style familier prétendument incorrect mais évidemment très travaillé. Emploi de l'adjectif  là où l'on attend un adverbe, verbes pronominaux doublement transitifs et autres recherches stylistiques qui me détournent de ma lecture! La phrase est nerveuse, incontinente et charrie un flot de mots qui se bousculent, rivalisent entre eux. Comme si, parce que l'on était dans le Midi, l'on ne pouvait parler sobrement.
Pourtant le début partait bien: Longtemps les mots ont roulé au fond de moi comme des cailloux au lit d'un torrent. Et puis, changement de ton :
Elles sont enchantées, sourient féroce, s'évaluent mutuellement les élégances, les rondeurs bandantes et l'outrage des ans, se guettent la ride véloce et la pesante graisse, et puis rien, t'es toute nue sous ton pull, jolie môme.. Et moi j'en pétille de partout, couillon de petit roi lion qui croit voir deux femelles montrer les crocs pour être sa favorite.
Certes, c'est bien écrit, c'est réussi dans le genre. Mais voilà, je n'aime pas. Pour moi, cela sonne faux, une fausse faconde méridionale, une fausse bonhomie, non pas du Marcel Pagnol mais une Pagnolade.

logotwitter2.1294593887.jpgMerci à BOB et aux éditions Gallimard

shakespeare2_p1291970470.1294594141.jpg Cet article participe aussi au challenge Shakespeare initié par Maggie et Claudialucia

Voilà comment Jean-Pierre Barnier  présente sa vision de la pièce Les Joyeuses commères de Windsor à ses acteurs dans le roman de Michel Quint :
Alors on jouera une bacchanale, une fable païenne dont les personnages sont pétris d'une terre où coule le vin! Falstaff est possédé de l'esprit de Bacchus et les ménades qu'il poursuit de son désir primitif, le bouffent à la fin dans un banquet dionysiaque! Bref résumé : Falstafff, vieux chevalier sans le sou, veut séduire deux bourgeoises  de Windsor, madame Ford et madame Page qui découragent ses avances à l'insu de leurs maris et finissent, au moment de ce que l'on traite généralement en mascarade féerique où la petite Anne Page va duper ses parents et se livrer en cachette à un coquin, par se révéler prêtresses de Dinysos et détruire complètement ce brave homme dans un dernier piège, l'humilier, le battre  le brûler dans une cérémonie au dieu de la force virile et de la boisson, alors qu'il est déguisé en bête.

lundi 10 mars 2014

Walter Scott : Le talisman



Le roman de Walter Scott Le talisman se déroule pendant la troisième croisade organisée pour reconquérir la ville sainte de Jérusalem tombée aux mains du sultan Saladin. Richard Coeur de Lion, malade, ne peut combattre et l'armée des croisés est immobilisée dans l'attente d'une amélioration de la santé du souverain anglais. Tandis que les alliés de Richard, avec, entre autres, le roi de France Philippe-Auguste, Gilles Amaury, le grand maître de l'ordre des Templiers, l'archiduc d'Autriche, Léopold V (celui-là même qui retiendra Richard prisonnier lors de son retour en Angleterre), Conrad de Montferrand, complotent, les uns pour abandonner la croisade et repartir chez eux, les autres pour maintenir leur souveraineté sur les terres de Palestine qui leur appartiennent déjà, le sultan Saladin accorde une trêve à Richard et envoie son médecin à son chevet.

Walter Scott avertit le lecteur dès la préface. Certes les personnages sont historiques mais il a pris beaucoup de liberté avec l'Histoire. De plus il a imaginé des personnage fictifs : Kenneth, un chevalier écossais, pauvre mais ardent et courageux, et la cousine du roi, qui n'a jamais existé. Une histoire d'amour chevaleresque va naître entre les deux dans la pure tradition du roman courtois .

Ce qui intéresse peut-être le plus Scott c'est d'imaginer la confrontation entre Richard Coeur de Lion et le sultan Saladin. Si Richard Coeur de Lion a un sens chatouilleux de l'honneur, s'il est présenté comme un valeureux chevalier, imposant, dominateur et grand, le meilleur sur un champ de bataille, Walter Scott se plaît à souligner ses défauts. Son caractère violent, emporté, sa morgue et le mépris qu'il manifeste souvent envers ses alliés, son manque de diplomatie, le rendent incapable de maintenir l'union de la croisade.  Face à lui, Saladin apparaît comme un sage à la culture raffinée, intelligent, réfléchi, un homme de sciences, très versée dans l'art de guérir, un souverain tout puissant qui n'a qu'une parole, mais qui n'en est pas moins un guerrier redoutable. Incontestablement supérieur à Richard!  ce qui est assez étonnant de la part d'un écrivain occidental du XIX siècle!  Il faut peut-être voir dans ces critiques, les sentiments de l'écossais Walter Scott face au souverain d'Angleterre.

Quant au récit romanesque lui-même, il m'a paru assez faible et de peu d'intérêt. L'intrigue est plus un prétexte qu'une véritable histoire en dehors de la rencontre dans le désert de Kenneth et de Saladin et de la grotte de l'ermite. Les personnages sont assez fades. Je me suis peu intéressée à eux et j'avoue que je n'ai pas trop compris l'intérêt du talisman qui donne son titre au roman. Dans l'ensemble, je n'ai pas aimé le roman malgré quelques passages intéressants.

Lecture commune avec : 

 Miriam : A partagé cette lecture commune avec nous et cela lui a donné l'idée de consacrer plusieurs billets à ses lectures sur Jérusalem dont Le talisman fait partie.. Aujourd'hui elle publie un premier volet sur Jérusalem :  la biographie de Montefiore et l'opéra de Jordi Savall

Eeguab ICI

Nathalie ICI

Shelbylee


vendredi 30 avril 2010

Claude Pujade-Renaud : Le désert de la Grâce



Je m'intéresse à Port Royal et aux jansénistes depuis que, adolescente ou étudiante, j'ai un peu approché leur vie par l'intermédiaire de Racine, un auteur que j'ai beaucoup aimé et fréquenté. Le problème de la grâce, les rapports de Religieuses de Port Royal et de messieurs les Solitaires avec saint Augustin, la parenté spirituelle des jansénistes et des calvinistes et leurs différences, ne me passionnent pas d'un point de vue religieux. Je suis très peu versée sur la religion. Mais ce savoir est indispensable pour comprendre les tragédies raciniennes, ce que la fatalité antique qui pèse sur Phèdre, par exemple, doit à l'éducation de Racine par Antoine le Maistre et à la notion de prédestination, de  grâce acquise ou de grâce accordée.
Acquérir un savoir ! C'est ainsi que j'ai abordé l'oeuvre et c'est peut-être pour cela que j'ai lu le roman de Claude Pujade-Renaud sans véritable passion parce que j'étais sur les traces de Racine qui n'était pas le sujet principal même s'il est forcément bien présent, parce que  j'ai voulu aussi y trouver des connaissances précises sur des question personnelles.
Le désert de la grâce est un  roman, solidement documenté, où les évènements historiques sont habilement présentés par des personnages les ayant vécus : Françoise de Joncoux qui maintient la mémoire de Port-Royal, Claude Dodart, médecin à la cour mais proche de Port Royal, les différents membres de la famille Arnauld qui, depuis, la fondatrice, la mère Angélique, sont l'âme de Port Royal, Madame de Maintenon, leur ennemie, Blaise Pascal et sa soeur Jacqueline religieuse sous le nom de Sainte Euphémie, Marie-Catherine, la fille de Racine ...
Je ne peux m'en prendre qu'à moi-même, donc, si je n'ai pas été très accrochée par cette lecture, certains aspects de l'histoire ou certains personnages m'intéressant moins. Mais je l'ai été suffisamment, cependant, pour le lire jusqu'au bout et pour apprendre beaucoup sur ce qu'a été Port Royal.
Il y a des moments très forts dans le récit : celui de l'exhumation des religieuses, des Solitaires et  des fidèles de Port-Royal enterrés dans le cimetière de l'abbaye et que Louis XIV fait jeter à la fosse commune. Le roi, sous l'influence des jésuites, veut effacer jusqu'à la mémoire de ceux qui constituent un contre-pouvoir religieux puissant dont le rayonnement spirituel au-delà des frontières lui est insupportable.
Celui où Angélique Arnauld décide la clôture de l'abbaye et tient tête à son père, refusant de le laisser pénétrer dans le cloître.
Celui où l'actrice, La Champmeslé, mourante, va jouer Phèdre, vingt ans après l'avoir créée en l'absence de Racine qui a renié son passé théâtral.
Celui où Marie-Catherine Racine lit pour la première fois les oeuvres de son père et découvre l'existence des passions, amour ou haine..
C'est bien sûr le personnage que j'ai préféré :  Marie-Catherine Racine que son père, courtisan, alors historiographe du roi, retira contre son gré de Port-Royal pour ne pas déplaire à Louis XIV. Mariée, mère de trois enfants, elle part à la recherche de ce père dont le cadavre, comme celui des autres puisqu'il a voulu être enterré à Port Royal, vient d'être exhumé sous ordre du souverain. Poursuivie par le souvenir de celui pour qui elle éprouve affection filiale et  ressentiment, elle fouille le passé de cet homme coupable de tant de bassesses, de reniements et pourtant si grand dans l'expression poétique de la passion et elle découvre les aspects troubles de sa personnalité. C'est finalement dans la lecture des pièces du grand dramaturge qu'elle finira par trouver une réponse et un apaisement.

vendredi 30 novembre 2012

Gabriel Jan :Ys, le monde englouti




Dans son roman Ys, le monde englouti Gabriel Jan écrit :

"Cette version libre sous forme de roman est une nouvelle écriture qui respecte toutefois les textes de toutes les époques. j'y ai apporté comme le fait le barde ma part d'imagination, fidèle aux traditions qui veulent que les légendes soient adaptées, remaniées, enrichies afin qu'elles continuent à vivre"

Et c'est ce qu'il fait effectivement. La légende d'Ys qui sert de départ à cette histoire est bien sûr respectée. Gadlon a construit une ville magnifique pour sa fille Dahut mais celle-ci vit dans la débauche et la luxure. Dans son palais, elle accueille des courtisans qui ne pensent qu'au luxe et aux plaisirs. Elle tue ses amants d'une nuit en les précipitant dans un gouffre. Mais elle ne se donne qu'à l'océan, son époux divin. Pourtant un jour, elle a pour amant un étranger qui exerce sur elle sa domination.  Celui-ci, avec l'aide de Dahut, vole la clef des portes de la cité d'Ys au roi Gadlon. Il ouvre les portes à l'océan qui engloutit la ville. Gadlon peut se sauver sur son cheval magique mais Dahut est précipitée dans les flots.

 C'est à partir de cette légende que Gabriel Jan a bâti son récit et imaginé des personnages qui n'ont rien à voir avec elle.

Gélan D'Edarpt, un jeune médecin étranger arrive à Ys avec ses onguents pour exercer son métier et y faire fortune. Attaqué par des brigands, il est défendu par Ceryl, un jeune homme au premier abord sympathique, qui  l'héberge chez son père, le meilleur tailleur de Cornouiailles. La soeur de Céryl,  Cipée, tombe amoureuse de lui mais il ne répond pas à ses avances. En fait, il  aime la fille du barde Nasahben nommée Dryad. Nous comprenons bien vite que Gélan n'est pas tout à fait celui qu'il prétend être et qu'il est investi d'une mission.  Il va s'opposer à trois druides qui sont alliés avec Dahut, pour défendre la cité qu'ils savent menacée.  Mais Gélan, qui est-il vraiment? Quel monde représente-t-il?

En fait la légende de la ville d'Ys devient ici un roman fantasy. L'auteur gomme le merveilleux chrétien de la légende :  le rôle des saints qui convertissent Gadlon est affaibli, le diable est absent du récit, le bal satanique n'a pas lieu, le masque qui se resserre sur le visage des amants de Dahut et les étouffe n'est plus. Mais les personnage possèdent des pouvoirs magiques qui leur permettent de mener le combat entre le Bien et le Mal et ils se disputent le Trémillon ou l'Aigue bleue, pierre magique susceptible de retenir les flots de l'océan.
J'ai cependant trouvé que l'histoire était parfois assez mal ficelée. Par exemple Cipé, l'amoureuse évincée disparaît du récit et le personnage de Céryl est finalement oublié, l'amour entre Dryad et Gelan, style coup de foudre, est un peu fleur bleue. Quant à  Dahut, elle apparaît trop vulgaire et peu intelligente, ce qui lui enlève la force et l'aura qu'elle a dans la légende. Elle cesse d'être le symbole de la religion celtique s'opposant à la christianisation de la Bretagne qui enseigne le péché et l'horreur du plaisir.

Voir Billet de l'oncle Paul ICI

Lecture commune avec Miriam et Aymeline








vendredi 25 mars 2016

Shakespeare : Cymbeline

Cymbeline et Posthumus de Thomas Faed

La pièce de Shakespeare, Cymbeline, parue en 1611 a d’abord été considérée comme une tragédie, puis une comédie avant d’être classée parmi les romances tardives du dramaturge avec notamment Le conte d’Hiver, la Tempête, Les deux nobles cousins.
Il faut dire que l’intrigue est si complexe, les lieux si divers, l’ancienne Bretagne mais aussi la Bretagne élizabethaine, la Rome antique et l’Italie de la Renaissance, les personnages si nombreux … que la pièce semble correspondre à un genre nouveau, la romance, apprécié par le public en ce début du XVII siècle. En France, aussi, c’est l’époque du roman baroque comme l’Astrée d’Honoré d’Urfé .

Dame Ellen Terry dans le rôle d'Imogen

L’intrigue est enchevêtrée  et je ne vous en révèle que les grandes lignes :

Cymbeline, roi de (Grande)- Bretagne, a perdu ses deux fils qui lui ont été enlevés à l’enfance. Il veut faire de sa fille Imogène, son héritière et la marier à Cloten, fils de sa seconde épouse, la Reine. Mais Imogène se marie contre la volonté de son père à Posthumus, un gentilhomme pauvre. Ce dernier est exilé en Italie et Imogène reste sous la surveillance de sa marâtre la Reine, sommée d’épouser Cloten. Le royaume qui refuse de payer un tribut à Rome va de nouveau être envahi. La guerre éclate.

A Rome, Posthumus qui vante les qualités et la vertu de son épouse est attaqué par Jachimo qui prétend pouvoir obtenir les faveurs de la Belle. L’anneau d’or donné à Posthumus par Imogène sert de gage. Jachimo, ne parvient pas à séduire Imogène mais lui dérobe son bracelet comme preuve de sa victoire. Posthumus, fou de jalousie, commande à son valet, le fidèle Pisanio, de tuer son épouse. Imogene qui s’est enfuie de la cour, déguisée en garçon, pour chercher à rejoindre son mari, se réfugie dans une forêt et est recueillie par un vieux noble banni de la cour, Belarius, qui vit là avec ses deux fils. On apprendra vite qu’ils sont, en réalité, les enfants de Cymbeline. 
Ces deux fils conducteurs vont se rejoindre pour former un dénouement dont on ne sait jusqu’à la fin s’il va être tragique ou non.

Imogène dans la grotte de Belarius :  George Dawe

Ce qui est étonnant dans la pièce c’est sa ressemblance avec un conte traditionnel et en particulier avec Blanche Neige. La marâtre qui feint d’aimer sa belle fille en public, est odieuse. Elle demande à son vieux médecin une potion pour tuer la jeune fille. Le vieillard qui a percé les intentions de la reine fabrique une médecine qui donne l’apparence de la mort. Le serviteur Pisanio qui accompagne la fuite d’Imogène en forêt refuse de la tuer. Il lui donne la potion qui la plonge dans un profond sommeil. La jeune femme est retrouvée par Belarius et ses fils qui la croient morte et qui l’allongent sur un lit de fleurs. Vous avouerez que les similitudes sont évidentes.

Il y a aussi dans la pièce de nombreuses rappels des oeuvres précédentes : La potion qui provoque une mort apparente, c’est, bien sûr, Roméo et Juliette, le mari jaloux, aux pulsions meurtrières, c’est Othello, ou  Leonte d’un Conte d’Hiver ou encore Claudio accusant Hero dans Beaucoup de bruit pour rien. La bague comme gage d’amour que l’amoureux doit conserver envers et contre tout et qu’il finit par céder est une allusion à Portia et Bassano du Marchand de Venise. Quant au déguisement en garçon, on pense bien évidemment à Viola dans La nuit des rois mais aussi à Rosalinde dans Comme il vous plaira qui part se réfugier dans un forêt  où elle retrouve, comme Imogène, ceux qui ont été spoliés par le tyran. On voit donc la richesse de Cymbeline qui reprend les thèmes récurrents  chers au dramaturge.
Cymbeline présente toutes sortes d’invraisemblances, d’évènements irréels, d’effets artificiels si bien que la crédulité du spectateur est mise à rude épreuve. Il faut donc accepter de se plier aux conventions théâtrales et laisser de côté son sens critique pour pouvoir entrer dans la pièce. Il est certain que l’on a l’impression de partir un peu dans tous les sens et puis comme d’habitude l’ordre va surgir de tout ce désordre, l’univers retrouver un sens.
 Il va me falloir d’autres lectures de la pièce pour l’apprivoiser. Je m’y intéresse particulièrement car le 16 Octobre de cette année, je suis invitée à Londres par des amis et nous irons voir une adaptation de cette pièce au théâtre du Globe! Génial, Non? Oui, mais il va falloir que je comprenne la représentation en anglais!


Lecture commune avec Jeneen et Miriam ICI

QUI veut faire une autre lecture commune de Shakespeare avec moi? Je propose pour le 25 Avril : 
 PEINES D AMOUR PERDUES ou si vous l'avez déjà lue une autre comédie de Shakespeare au choix




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