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vendredi 23 décembre 2016

Joyeux Noël

Pekke Halonen, peintre finlandais


 Un paysage de neige pour vous souhaiter un joyeux Noël et de bonnes fêtes en famille et avec vos amis. Beaucoup de joie à tous !

Je suis en  Lozère avec enfants et petits enfants et je vous dis à bientôt, au mois de Janvier!

mardi 20 décembre 2016

Victor Hugo : Torquemada


Torquemada est un drame en quatre actes et en vers de Victor Hugo écrit en 1869 et publié en 1882  en réaction à de nouveaux pogroms en Russie. Il fait partie du recueil Théâtre en Liberté qui  rassemble 4 drames et 5 comédies. Nous avons déjà lu ensemble la pièce Mangeront-ils au cours d'une lecture commune pour le challenge Victor Hugo. 
Torquemada n'a jamais été donnée du vivant de l'auteur. Le moine dominicain Tomás de Torquemada (1420-1498) qui fut le premier inquisiteur est un personnage historique.

L'intrigue

Tomas Torquemada, premier inquisiteur espagnol
Le moine espagnol Torquemada, considéré comme hérétique, est emmuré vivant. Il  est délivré par don Sanche et doña Rosa, de jeunes gens purs et innocents qui ont été élevés ensemble et ont découvert l'amour qu'ils ont l'un pour l'autre.  Pris de pitié pour le sort affreux qui attend le moine,  ils le délivrent.
Torquemada part à Rome où il obtient l'absolution du pape et revient en Espagne pour y fonder l'inquisition.  Cependant le roi Ferdinand amoureux de Rosa veut la séparer de son amoureux. Il les envoie au couvent et cherche à tendre un piège à don Sanche pour le tuer. Son premier ministre, le comte de Fuentel, les délivre et les confie à Torquemada. Celui-ci reconnaît en eux ses deux sauveurs  mais lorsqu'il apprend que ceux-ci l'ont délivré à l'aide d'une vieille croix pour soulever la pierre de sa prison, il décide de sacrifier leurs "corps" sur le bûcher pour sauver leurs "âmes".

Le sens

Avec le personnage de Torquemada, Hugo critique avec virulence le fanatisme religieux et l'intolérance. Au personnage de Torquemada qui fonde la religion sur la peur, il oppose saint François de Paule, un ascète, un saint, pour qui la religion ne peut reposer que sur l'amour.
Sa critique du pouvoir monarchique s'exerce à travers les personnages de Isabelle et Ferdinand d'Espagne, les rois catholiques, personnages tout aussi implacables.



Il y a dans cette pièce tardive de Victor Hugo (il avait quatre-vingt ans quand il la publie)  de grands moments où les vers flamboyants rappellent le jeune romantique Hugo. Le personnage de  l’inquisiteur espagnol est un personnage impressionnant. Il incarne le fanatisme porté à la plus haute puissance car Torquemada va jusqu’au bout de sa logique et de sa foi pervertie. Puisque brûler des corps, c’est sauver des âmes, il tient la promesse qu’il a faite aux jeunes gens en les « sauvant » c’est à dire en les livrant au feu.

L'inquisition Espagnole

La critique au moment de la parution en 1882  a reproché à Hugo ses erreurs en ce qui concerne l'histoire et la psychologique. Dans La Revue des deux mondes Louis Ganderax écrit  :

« L’interprétation du poète, si éloignée qu’elle soit de la vérité historique, l’est encore plus de la vraisemblance humaine : elle est justement contraire à la psychologie du chrétien. Comment un chrétien pourrait-il croire qu’en brûlant un hérétique, il le sauvera contre son gré ? Pour que la douleur de la chair profite à l’esprit, il faut que l’esprit l’accepte et l’offre au Seigneur ; le supplice n’a pas la valeur morale du martyre, et le ciel n’admettra pas ce racheté malgré lui.
Donc ce Torquemada n’est ni vrai, ni possible ..…  »  

 Louis Ganderax semble oublier que le fanatique ne raisonne pas comme un être normal. De plus, si comme il le dit, le personnage perd en vérité psychologique, il gagne, je pense, au point de vue dramatique. Le poète a voulu faire de ce moine un symbole du fanatisme religieux, il a voulu frapper les esprits en créant un personnage monstrueux dont le raisonnement échappe à la part d’humanité que chacun porte en soi. L'Histoire nous apprend que ces raisonnements existent ! Torquemada me fait penser à Savonarole à Florence et plus près de nous à Hitler. De ce fait, ce moine illuminé a une telle force qu’il met en relief tout ce qu’il y a d’atroce dans l’Inquisition. Il représente tout ce que hait Victor Hugo, l’intolérance, la haine de l’autre, l'atteinte à la liberté, le rejet de ceux qui n’obéissent pas à la norme, la volonté de domination des esprits. Torquemada n’est plus un homme, c’est un monstre et l’on pourrait en dire autant des autres personnages, les rois catholiques : Isabelle et Ferdinand qui représentent le pouvoir monarchique absolu …  ou presque absolu car les souverains doivent se courber devant le pouvoir religieux.

Quant à la vérité historique, Louis Ganderax a certainement raison. Victor Hugo a une grande connaissance de l'Espagne, un pays qu'il a visité, qu'il aime, et sa culture est immense.  C'est pourquoi ses didascalies sont très précises sur le décor et les costumes mais elles trahissent avant tout une  préoccupation esthétique et poétique.  Lorsque la vérité historique le gêne, il la sacrifie volontiers à l'Idée ou au Sens qu'il veut donner. C'est avant tout un poète, un visionnaire et il écrit ici un texte engagé qui dénonce les abus de pouvoir de l’église et de la royauté. La pièce est  évidemment une démonstration et parfois elle l’est un peu trop à mon goût ! je n’ai pas aimé par exemple le passage ou Torquemada rencontre Saint François de Paule et la discussion théologique qui s’ensuit et qui est trop démonstrative. De plus  cette scène ne sert pas l’intrigue, elle l’arrête.
   Pourtant Victor Hugo voulait que le drame peigne le « vrai» , soit conforme à « la nature », en mêlant comme dans la vie, « le sublime au grotesque », « le bien et le mal », « le tragique et le comique". Mais le drame finalement a été bien autre chose du moins chez Victor Hugo. La conception antithétique de la vie, le noir et le blanc, l’ombre et la lumière, qu’il développe dans toute son oeuvre, romans, poésies, dessins, et pas seulement dans le théâtre, a été animée par le souffle du grand poète. Loin de refléter la réalité, le drame frappe l’imagination, l’exalte, donne une dimension décuplée à l’intrigue d’où naît la beauté.
 Finalement Louis Ganderax a raison sur certains points mais pour moi sa critique passe à côté de ce qu'est le drame hugolien ! Ce qu'il y a de bien c'est qu'il ne pourra pas me répondre et me mettre en difficulté.  Après tout le pauvre homme a écrit cela en 1882 (ICI La revue des deux mondes), il y a prescription ! Et il fallait un certain courage pour critiquer Victor Hugo, vénéré comme un prophète, à l’époque ! 

Lecture commune  avec :

Miriam, Nathalie , Margotte 






vendredi 9 décembre 2016

Estelle Fenzy : Rouge vive


Quand j’ouvre un recueil de poèmes, je lis un texte choisi au hasard. Je ne veux pas les découvrir dans l’ordre, méthodiquement. Je préfère « goûter » les images qui se lèvent devant mes yeux, les émotions qui s’éveillent en moi à la lecture d’un premier poème, isolé, je veux sentir s’il existe en lui-même.
C’est ce que je fais avec Rouge vive de Estelle Fenzy. Et l’alchimie a lieu. Ce premier poème me touche, me transporte dans un ailleurs que je connais bien, dans Ma montagne, la Lozère :  Images  très précises que ma mémoire a engrangées, des cordes à linge emmêlées et des draps qui s’envolent par delà les prés ou s'enroulent autour des fils de fer barbelés « quand le vent souffle fort ».


Quand le vent souffle fort
chaque fois j’entends
les linges les cordes battant
claquant les draps les chemises

Mon coeur tissu fragile
se déchire

à l’écho des combats
dans les cotons tremblants


Il y a quelque chose de très beau, très vrai dans cette scène. On « entend » : le bruit, le « souffle du vent » mais aussi le mouvement, l’agitation, la violence du drap soulevé, presque arraché, puis qui retombe  en "claquant". On voit :  les chemises se tordent, se dressent, s’abattent brusquement. Il y a un ressenti physique, le froid, la brutalité. Je ne suis pas seulement spectatrice de la scène mais partie prenante, je peux même imaginer les détails, précisément. J’aime glisser peu à peu du paysage extérieur au paysage intérieur symbolisé par le coeur. Les "cotons" (j’adore ce pluriel si réaliste, cette épaisseur des choses ) entraînent la métaphore du " tissu" singulier comme une antithèse, si fin, si  "fragile "  qui risque de se déchirer sous les assauts extérieurs de la vie. De cette simplicité du style, de cette économie du mot, naît l’émotion, de cette image qui pourrait être banale parce que quotidienne, celle du linge agité par le vent, naît la profondeur :  "combats" menés contre soi-même ou conflits qui agitent les hommes entre eux, les font s'entretuer ? Les deux, sans doute.

Linge séchant au vent : Caillebotte
Alors je continue ma lecture; je tourne les pages dans un sens ou dans l’autre et peu à peu je distingue deux voix* qui s’élèvent, distantes, mais qui paraissent se répondre et où il est question de roses sauvages, d’amour et de mort, de sang sur la neige... Les gouttes de sang sur la neige toujours associées à la femme comme le fait Perceval méditant sur la beauté de Blanchefleur ; ou encore la reine qui se pique le doigt à une aiguille et imagine le visage de sa future enfant blanche comme la neige, aux joues rouges comme le sang. Je m’enfonce dans le mystère d’un récit, chanson d'amour et de mort qui paraît de tous les temps, qui évoquent les lais du moyen âge, les contes de notre enfance.

Je suis la dépossédée

Mon promis est mort à la guerre
j’étais encore fille

je suis venue dans ce village
verser dans des jarres vides
mon chagrin


Musique à la fois douce, triste et cruelle.

 Je cherche à pénétrer l'énigme de ce récit étrange. L'évidence s'impose ! Et oui, les poèmes de  Rouge vive  d'Estelle Fenzy nous racontent une histoire. Je reprends ma lecture depuis le début. C'est ainsi qu'il faut lire ce recueil !

D’un côté un homme silence, un homme paria, rejeté par la société :  La solitude/ mon manteau/ m’accompagne tout le jour/ me caresse quand je dors.
petit garçon blessé par la vie, devenu adulte : « Je suis né dans ce village /à l’engrais des tempêtes ».

Puis une rivière aux rosiers sauvages; et ce sont ces roses couleur du sang qui consolent, fascinent, on le comprend, mais aussi blessent et ont l’attrait de la mort.

De l’autre une fille dont le fiancé est mort à la guerre (à moins qu’elle ne revive le traumatisme vécu par sa mère et par bien des femmes avant elle : "depuis des millénaires/ mon histoire se raconte"

Il est mort loin d'ici
Dans les montagnes 
au Nord de mon pays.

le sang sur la neige a gelé

Eclosion d'incarnat.
Karine Rougier  : Rouge vive
Et puis la rencontre, la première vision que l’homme et de la femme ont l’un de l’autre. Légèreté, innocence de la jeune fille en mouvement, apparition à la Giono pour peindre la beauté virile de l'homme-nature ? Mais non ! Des fausses notes viennent troubler cette harmonie; ces portraits ne sont pas ceux qu'ils paraissent être de prime abord car la beauté semble toujours corrompue par la mort.… 

La première fois
elle descendait
vers la forêt

belle comme un enfant
A genoux

sur une tombe.

*
Il portait dans ses bras
des gerbes de griffures

et à sa ceinture

un faisan colleté
pendu par les pieds.


Max Chagall : bouquet de roses à la femme

 Jusqu'à cette fin surprenante qui est à l’image du titre Rouge vive :  Rouge la rose "carmin" ou "grenat", rouge le sang de la guerre, les "braises" de la forêt dans l’ardeur de la passion, rouge le sang de la virginité, et "le feu de sa robe" , et son sourire, et sa bouche… Ici, même les ombres sont "écarlates ".

Et vive? pourquoi ce féminin ou l’on attend le masculin?  Parce que vive caractérise autre chose que le rouge ? Vive comme la jeune fille qui crie sa « révolte dans les buissons de houx » ou comme la rivière où poussent les roses sauvages. Vive comme l'évidence de l'amour: « j’ai vu un homme/ j’ai vu la vie ».
Ou vive au sens d'être vivant ? Vive antithèse de la mort, de la guerre, du malheur qui jamais ne s’efface, des blessures de l’enfance qui jamais ne guérissent ? Vive parce que Eros rime toujours avec Thanatos? 

Veux-tu que 
ce soir 
je t'amène
là ou poussent
les roses sauvages ?

Parce que comme la chanson Where the wild roses grow de Nick Cave cité en exergue et qui a inspiré Estelle Fenzy : Toute beauté doit mourir  ?

Un très beau recueil dont le langage poétique, épuré, va droit à l’essentiel et donne essor à  l'imagination, un régal de mots et d'images !

Le recueil est paru aux éditions AL Manar de Alain Gorius. J'aime aussi ce livre en tant qu'objet. Les beaux dessins en noir et blanc de Karine Rougier interprètent les poèmes avec sobriété.

 Refrain de la chanson de Nick Cave

Là où poussent les roses sauvages

Ils m'appellent La Rose Sauvage
Mais mon nom était Elisa Day
Je ne sais pas pourquoi ils m'appellent ainsi
Car mon nom était Elisa Day



*Dans le recueil, le changement de voix est indiqué par la graphie : la voix masculine est en style courant, la voix féminine en italique



lundi 5 décembre 2016

Bath : sur les traces de Jane Austen

Bath : musée de Jane Austen Jane Austen center: N° 40 Gay Street
Jane Austen center: N° 40 Gay Street

Lors de ma visite en Angleterre, à Londres puis à Bristol, une visite s'est imposée ! La ville de Bath que j'avais déjà découverte il y a quelques années, sur les traces de Jane Austen. Je voulais compléter ma visite en allant voir la maison de la célèbre écrivaine.
Jane Austen à Bath
La cathédrale de Bath

 Le premier séjour à Bath de Jane Austen qui vivait dans le Hampshire remonte à 1797 avec sa mère et sa soeur Cassandra où elle loge au N° 1 Paragon Buildings. Elle y restera six semaines. Elle y retourne ensuite en 1799, invitée par son frère Edward qui venait y prendre les eaux.  Elle habite au 13 Queen Square pendant deux mois et a déjà en tête l'écriture de Northanger abbey. C’est dans cette ville, en effet, que Catherine Morland va tomber amoureuse et va recevoir la leçon amère d’une société hypocrite où l’amitié se mesure à la hauteur de la rente annuelle ou au montant de la dot.  C'est là aussi qu'elle écrit Les Watson, roman resté inachevé. Plus tard, Jane Austen placera à Bath l’intrigue de Persuasion. 

Voir Northange abbey 1 ICI  

Voir mon billet sur Northanger abbey 2 à Bath ICI 
Ce n’est qu’en 1801 que le père de Jane, le révérend George Austen, décide de se retirer à Bath où il meurt en 1805. En 1806, Jane quitte la cité dans laquelle elle a peu séjourné finalement mais qui a eu une grande influence sur son oeuvre et dans sa vie. Ses parents se sont mariés à Bath et son père y est enterré.


Le Centre Jane Austen de Bath

Le centre Jane Austen est installé au n°40 de Gay Street dans une maison semblable à celle qu’elle a habité au n°25 pendant quelques mois après la mort de son père. Elle avait dû déménager pour un appartement moins cher. Le musée est assez vieillot de conception avec beaucoup de panneaux à lire mais pour les amoureux de Jane Austen il évoque bien des souvenirs et présente un intérêt certain.

La famille Austen

On y voit des images de sa famille et de ses amis, un plan de Bath avec tous les endroits où elle a habité, des présentations et une analyse de ses romans, un mannequin portant une robe de l’époque, un bureau avec un encrier et une plume d’oie. 

Parmi ces documents, le portrait de Tom Lefroy, le premier amour de Jane mais qui n'a pas eu de suite.


... et Harris Bigg-Wither, frère de ses amies. Plus jeune que Jane, il la demande en mariage pendant un séjour qu'elle fait chez eux avec Cassandre. Jane accepte et la famille amie des Austen, fait un bon accueil à Jane malgré sa modeste dot. Mais après une nuit de tourment,  Jane est convaincue qu'elle n'aime pas assez Harris pour l'épouser. Le matin, elle rompt ses fiançailles. Devant la consternation de la famille elle prend rapidement congé et part en toute hâte avec sa soeur.
 
Harris Bigg-Wither


robe de mariée

Les revenus des familles à l'époque de Jane Austen

Parmi les documents les plus intéressants figurent le montant comparatif des revenus familiaux et ce que cela représente à l'époque de Jane. Quant il se marie, le révérend Austen a 100 Livres de rente annuelle et une terre de 200 acres qui lui rapporte 100 L de plus. Avec 200 L,  il peut prétendre appartenir à une classe sociale distinguée, de petite noblesse ou petite bourgeoisie (gentility)  mais avec un style de vie très modeste. Plus tard, quand ils viennent s'installer à Bath, George Austen a 700 livres, ce qui permet à la famille une certaine prospérité. Ils auront une voiture que le père abandonnera car il trouve la dépense trop onéreuse.
Avec 300 livres un célibataire vivait confortablement mais James, le frère de Jane, qui est marié, peut avoir avec cette rente deux serviteurs mais ne peut entretenir une voiture pour sa femme ni un meute de chiens de chasse pour lui-même.
Dans Northanger abbey, Isabelle Thorpe est désappointée d'appendre que, si elle se marie avec le frère de Catherine Morland, celui-ci n'aura que 400 livres. Avec ce revenu on peut avoir un cuisinier, une bonne et un serviteur. Mais Isabelle vise plus haut.

Dans Pride and Préjudice Mr Bennet a 2000 livres par an, une rente coquette qui lui permet de tenir son rang dans la gentry campagnarde (haute bourgeoisie, noblesse titrée ou non). Cependant avec cinq filles à marier, l'économie familiale doit  être stricte. Tandis qu'avec un revenu de 4000 livres, Darcy appartient à la classe supérieure qui peut  se permettre de vivre dans le confort et le luxe.

Le portrait de Jane Austen

Jane Austen : Portrait de Jane peinte par sa soeur Cassandre
Portrait de Jane peinte par sa soeur Cassandre

On ne connaît la jeune femme que d’après le portrait de sa soeur Cassandre qui, aux dires de sa famille et de ses amis, n’était pas ressemblant.  En 2002, Melissa Dring membre de la société des artistes médico-légale de la police a été chargée de produire un nouveau  portrait de Jane en cherchant à être au plus près de la vérité. Elle avait déjà exécuté un portrait de Vivaldi - dont on ne connaît aucune représentation fiable - pour un cinéaste qui voulait tourner un documentaire sur le musicien.

Elle s’est appuyée sur les nombreuses descriptions faites par ses amis ou sa famille entre 1802 et 1806 et elle explique qu’elle  a de plus «cherché des ressemblances avec les autres Austens, en commençant par ses parents avec leurs longs nez distincts ».  Jeanne, née en 1775,  est la septième des huit enfant et la deuxième fille de George Austen et Cassandra Leigh. Les portraits de ses frères et le profil de Cassandre en médaillon ont permis de dégager des traits distinctifs de la famille Austen.
                                                               
Reverend George Austen, père de Jane

Son frère Edward
Melissa Dring a tenu compte de la classe sociale de Jane et l’a vêtue d’une robe de mousseline tachetée de rouge que Jane a achetée et décrite dans une lettre à sa soeur. Et surtout, la peintre a voulu donner « une expression complexe d’amusement », de moquerie, une vivacité qui témoigne de son humour et des « idées qui bouillonnent dans sa tête ».  Et voilà Jane qui apparaît devant nous telle qu'elle a pu être il y a de cela plus de deux siècles !

Le nouveau portrait de Jane Austen
Jane Austen




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samedi 3 décembre 2016

Bruce Holbert : L'heure de plomb aux éditions Gallmeister



L’heure de plomb de Bruce Holbert paru aux éditions Gallmeister emprunte son titre au poème d’Emily Dickinson cité en exergue :
 C’est  l’heure plomb-
Dont on se souvient si on y survit,
Comme les gens qui Gèlent se rappellent la Neige-
d’abord-le Froid- puis
l’Engourdissement -puis l’abandon-

L’heure de plomb, c’est celle que vivent les jumeaux, Luke et Matt Lawson perdus dans la neige, un soir de tempête. Nous sommes en 1918 dans l’état de Washington et le blizzard qui s’abat sur le pays pendant cet hiver est si rigoureux qu’il reste gravé à tout jamais dans les mémoires. Matt est sauvé par son institutrice. Luke meurt de froid ainsi que le père des deux garçons parti à leur recherche. Le père enseveli sous la neige n’est pas retrouvé.
Le roman raconte l’histoire du survivant, Matt, marqué à tout jamais par le drame. Il a 14 ans et se voit voler son enfance, obligé de travailler dans le ranch familial pour remplacer son père, rongé par la culpabilité. Il occupe ses temps libres à la recherche du disparu, une idée fixe qui le hante. C’est au cours de ses pérégrinations dans la région qu’il rencontre Wendy, une adolescente qui l’aide dans sa quête. Elle deviendra le grand amour de Matt devenu adulte. Mais rien n’est simple pour lui. Incapable de vivre un vie normale, de dire ses sentiments, il ne peut les exprimer que d’une manière exacerbée et est sujet à des crises de violence qui effraient la jeune fille. Le récit dira si l’on peut guérir d’une telle enfance.
A côté de ces deux jeunes gens gravitent de nombreux personnages que nous suivrons pendant une soixantaine d'années, l’institutrice Linda jefferson veuve en mal d'enfant, la mère de Matt repliée sur son deuil, son patron le vieux Roland et son fils Jarms définitivement abimé par l’abandon de sa mère.. Des portraits d’hommes et de femmes forts mais blessés par la vie, tous en manque de l'essentiel, l'amour; des êtres parfois primitifs, façonnés par la Nature impitoyable, par cette terre belle mais meurtrière qui exige d’eux d’être durs au mal, à la souffrance. Des êtres violents jusqu’à la folie, et prêts au meurtre; des relations entre hommes et femmes parfois bestiales ... et pourtant dans cet univers noir,  la tendresse et l'amour véritable peuvent naître et durer.  Et c'est justement parce que l'amour existe, celui de Matt et de Wendy, celui de Roland pour les bébés, que l'espoir renaît et nourrit le récit.

On ne peut qu’être secoué par ce récit haletant qui croisent des destinées terribles racontées sans concession, sans apitoiement, dans un style qui va droit au but et appuie là où cela fait mal. J’avoue que j’ai eu de temps en temps un rejet de ces personnages, de leurs excès, leur brutalité, leurs actes barbares. Mais le talent de Bruce Holbert est incontestable et ne peut laisser indifférent et sa voix résonne longtemps après la fin du livre.


jeudi 1 décembre 2016

Elena Ferrante : l'amie prodigieuse


Dans  L’amie prodigieuse, Elena Greco, fille du portier de la mairie, se prend d’amitié pour Lila Cerullo, fille de cordonnier dans un quartier pauvre de Naples dans les années 1950. Lila est l’amie « prodigieuse », qui la subjugue par son intelligence. Extrêmement douée, la petite Lila a un caractère affirmé, une  indépendance et une personnalité forte que rien ne semble pouvoir brimer. Pourtant au moment du choix, Lila se verra interdire le collège par des parents intraitables alors que Lena poursuivra ses études jusqu’au lycée grâce à l’intervention de l’institutrice.
L’amie prodigieuse est l’histoire d’une amitié profonde mais complexe entre les deux fillettes qui grandissent devant nous, mais aussi le récit d’une séparation inéluctable, Lena s’éloignant peu à peu de son entourage qui parle encore le dialecte. Sa maîtrise de la langue italienne et de la culture fait d’elle une étrangère dans son propre milieu.

C’est Lena, âgée, devenue écrivaine, qui raconte cette histoire et fait revivre  le quotidien des familles pauvres dans un quartier où la violence est de mise entre adultes mais aussi entre les enfants. Nous faisons connaissance avec toutes ces familles qui sont non seulement marquées par la misère mais aussi par les souvenirs de la guerre, du fascisme et des exactions commises pendant le conflit. Le marché noir qui a permis à certains de s’enrichir sur le dos des autres est loin d’être oublié et peut encore pousser au crime. Mais le point de vue est celui d’une enfant qui ne comprend pas tous les sous-entendus et peuple son quartier de personnages échappés des contes comme l’ogre, Don Achille Carracci. Peu à peu, en grandissant et en s’instruisant, le regard de Lena, adolescente, s’éclaire et les zones sombres de son enfance prennent une autre signification. Quant à Lila, elle ne peut échapper au déterminisme social et à son statut de fille pauvre mais belle et son intelligence supérieure doit être mise sous éteignoir. C’est Mozart qu’on assassine !

J’ai beaucoup aimé les talents de conteuse de Elena Ferrante et sa manière de décrire des personnages populaires vrais, sans misérabilisme mais aussi sans concession. Ni mépris, ni angélisme. Un ton si juste que l’on se demande si la Lena du roman n’est pas l’Elena qui signe le livre. Pas de réponse à cette question puisque Elenaa Ferrante semble être un personnage mystérieux qui se cache sous son pseudonyme. (voir article du Figaro ICI)

Un bon livre, plein de sensibilité qui, je m’en suis aperçue à la fin du roman, n’est pas terminé et se poursuit dans les tomes suivants : Le nouveau nom et Celle qui fuit et celle qui reste (sortie en Janvier 2017).

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mardi 29 novembre 2016

Londres Paolo Ucello : La bataille de San Romano et ses trois musées


Niccolo Mauruzi da Tolentino à la tête de ses troupes de Paolo Ucello : La bataille de San Romano National Gallery Londres
Paolo Ucello : La bataille de San Romano  National Gallery Londres Niccolo Mauruzi da Tolentino à la tête de ses troupes

 Le tableau londonien

Paolo Ucello : La bataille de San Romano  Nicola da Tolentino (détail) Londres national Gallery
Paolo Ucello : La bataille de San Romano  Nicola da Tolentino (détail)
 Pendant ce séjour à Londres, j'ai voulu absolument revoir le tableau de Paolo Ucello narrant la bataille de San Romano qui est l'un de mes préférés à la National Gallery !
 Il s'intitule : Niccolo Mauruzi da Tolentino à la tête de ses troupes.  Il est le premier des trois oeuvres qui illustrent la bataille entre les Florentins et les Siennois le 1er juin 1432 à San Romano, près de Lucques, qui vit la victoire de Florence. Il représente le début de la guerre avec Nicola da Tolentino à la tête des florentins. A noter qu'il y a encore peu de corps qui gisent par terre avec quelques armes, contrairement au dernier volet, celui de Florence. La scène est animée, les chevaux cabrés ont souvent été comparés à des chevaux de manège. Paolo Ucello s'intéresse à l'aspect esthétique de la scène, à la beauté des harnachements des montures et celles des costumes ou armures. Nicola de Tolentino porte le mazzocchio, le superbe couvre-chef florentin de bois et d'osier, véritable support du grand bonnet drapé et de la longue écharpe.
Les trois volets de cet ensemble ont été peints par Paolo Ucello à partir de 1456 à la demande de Lionardo Bartolini Salimbeni, qui avait participé à la campagne militaire en 1432. Laurent de Médicis les a achetés vers 1484 et ils  ont longtemps orné un cabinet du palais des Médicis à Florence avant  d'être séparés et dispersés. 

Le tableau florentin

Paolo Ucello : La bataille de San Romano Bernardino della Ciarda désarçonné (Florence Les Offices
Paolo Ucello : La bataille de San Romano Bernardino della Ciarda désarçonné (Galleria degli Uffizi, Firenze)

J'avais quinze ans  : visite à Florence de la galerie des Offices et là je tombe en admiration devant ce tableau  de Paolo Ucello : La bataille de San Romano Bernardino della Ciarda désarçonné
Je ne savais pas alors qu'il existait trois tableaux de cet évènement et que celui-ci était le dernier  puisqu'il conte la victoire des florentins : le chef de l'armée siennoise, Bernardino della Ciarda, est vaincu. Bref, je commençai pas la fin de la bataille ! je ne savais pas que les voir tous me demanderait une longue attente et que je finirai par le début de l'histoire à Londres quelque vingt après!
Ce tableau était tellement différent des tableaux de la Renaissance qui l'entouraient ! Je vois encore le mur sur lequel il était accroché  dans la salle des Offices! Il était tellement moderne avec ses formes un peu géométriques, ces couleurs irréalistes (le rouge des chevaux), le mouvement qui l'anime, le relief du cheval en train de ruer dans un raccourci audacieux qui semble défoncer la toile et venir à nous. Il y avait un tel art de la composition, avec ce cheval blanc au centre (celui de Bernardino della Ciarda), avec la symétrie des ces hallebardes dressées vers le ciel et aussi une telle recherche de la profondeur avec ces scènes de chasse qui se déroulent dans le lointain que je ne pouvais m'en détacher !

Paolo Ucello : La bataille de San Romano Bernardino della Ciarda désarçonné (détail)

Et puis... une telle violence dans le premier plan, les chevaux piétinent les corps des chevaliers blessés ou morts, les cadavres des chevaux gisent sur le sol, que j'ai cru entendre le tumulte et les cris de la bataille ! Je n'ai jamais vu un tableau aussi bruyant !

Le tableau parisien

Paolo Ucello :  La contre-attaque décisive de Micheletto Attendolo da Contignola Musée du Louvres Paris

Quelques années après j'ai pu voir celui de Paris au musée du Louvres  : Paolo Ucello :  La contre-attaque décisive de Micheletto Attendolo da Contignola. C'est le second de la trilogie  de la bataille de San Romano. Ce condottieri vint sauver l'armée florentine qui semblait en déroute. Il est représenté au centre du tableau coiffé de son somptueux mazzochio, sur un destrier noir aux antérieurs dressés comme pour une statue équestre. Il semble poser, tourné vers le spectateur. Les armures des chevaliers recouvertes d'une couche d'argent brillent dans l'obscurité. Ils paraissent enchevêtrés les uns dans les autres, les chevaux prêts à partir à l'attaque et l'on aperçoit les jambes des fantassins qui les suivent. C'est une scène nocturne et le ciel noir contraste avec les couleurs rouges des étendards et des écus. Les casques des chevaliers sont terminés par des cimiers aux formes fantastiques. Toute la scène paraît surréaliste.



jeudi 24 novembre 2016

Londres : Shakespeare et Tate Britain

Elizabeth 1er  1563: Portrait attribué à Steven van der Meulen ou Steven Vann Herwijckz
La Tate  Britain abrite la collection nationale d'art britannique du XVI siècle à nos jours. On peut donc suivre l'évolution de cet art chronologiquement, de salle en salle. Un autre parcours est proposé dédié à Shakespeare dont on peut  suivre l'influence qu'il a eu sur l'art britannique au cours des siècles.

Shakespeare à la Tate Britain

Tate Britain

La collection commence avec des oeuvres du XVI siècle et en particulier de Elizabeth 1er qui nous plonge directement dans le siècle de Shakespeare avec des portraits de personnages contemporains du dramaturge intéressants par la personnalité qu'il reflète mais aussi les costumes richement orné, leurs bijoux témoins de leur haute classe sociale.

Portrait de femme inconnue  1565 : Hans Eworth (1540-1573)

William 1er lord de la Waar : école du XVI siècle
Deux dames de la famille  Cholmondeley (1600_10) Ecole du XVII siècle
Curieux tableau que celui de ces deux femmes jumelles, mariées le même jour et qui ont accouché le même jour. Identiques? presque car une différence subtile permet de voir que l'un d'entre elles à épouser un homme plus riche que l'autre.

King Lear weeping over the dead body of Cordelia  1786 :  James Barry

Oberon, Titiana and Puck with fairing dancing 1786 : William Blake
Lady Macbeth saisissant les dagues 1812  : Henri Fuseli



Henri Fuseli :  Titiana et Oberon

 Queen Mab’s Cave by JMW Turner.1846

Sir John Everett Millais :  Ophelia 1851-2










 

lundi 21 novembre 2016

Shakespeare : Imogen au Théâtre du Globe mise en scène de Matthew Dunster

Théâtre du Globe

 Un théâtre du XVI ème siècle

Londres Théâtre du Globe rebâti à l'identique de celui de Shakespeare XVI siècle
Théâtre du Globe
 Le 16 Octobre 2016, date historique, je suis allée voir la dernière représentation de l'année au théâtre du Globe, la dernière de la saison car le spectacle est en plein air comme à l'époque élizabéthaine.  Il s'agissait de la pièce de Shakespeare Cymbeline que le metteur en scène Matthew Dunster a renommé Imogen, marquant ainsi sa volonté de redonner à Imogen, fille du roi Cymbeline, le premier rôle qui lui revient à juste titre. Elle est, en effet, le personnage le plus important  et le plus intéressant de la pièce. Loin d'être une jeune femme soumise et victime, elle prend en main son destin, se dresse contre ceux qui veulent décider pour elle de sa vie, - son père et sa belle mère - et obtient réparation des insultes et des violences qui lui sont faites par son mari et les amis de son mari.

Lorsque j'ai découvert la pièce cette année pour préparer ma visite à Londres (Voir mon billet ICI), j'ai surtout été frappée par la complexité de l'intrigue, la pluralité de l'action, les invraisemblances, et je me demandais comment l'on pouvait faire passer tout cela sur scène; je m'inquiétais aussi  de savoir si je comprendrais quelque chose, moi qui suis nulle en anglais à l'oral ! J'ai découvert depuis que la pièce n'est pas des plus connues du public anglais, ce qui me donnait une (modeste) longueur d'avance par rapport à ceux qui ne l'avaient pas lu !
Mais je savais que de toutes façons j'aurais le sentiment de vivre un moment exceptionnel dans la magie de ce théâtre, dans ce retour au source du XVI siècle. Voir billet sur le Globe ICI 
La queue pour les places du parterre quelques heures avant la représentation
Le public s'amasse autour de la scène quelques minutes avant l'ouverture du rideau
Comme les "riches" nous étions au balcon

 Une mise en scène étonnante et enlevée

Mise en scène de Imogen au théâtre du Globe par  Matthew Dunster

D'emblée la mise en scène de Matthew Dunster m'a conquise, emportée comme je l'ai été dans un tourbillon étonnant, "amazing" comme disait le public, extrêmement enlevé, virevoltant. Le spectacle  tient de la danse avec des chorégraphies au rythme endiablé, du cirque avec les cascades des comédiens qui s'envolent au-dessus de la scène, mimant les scènes de combat, mais aussi du pur théâtre qui laisse place aux moments d'émotions tout en mettant nettement en valeur l'aspect comique de la pièce. Longtemps on s'est demandé si Cymbeline était une tragédie ou une comédie. Avec Imogen, Matthew Dunster a tranché :  les comédiens ne cessent de nous faire rire. De plus leur gestuelle qui souligne le texte me permettait de mieux comprendre.

Matthew Dunster a choisi de transposer la scène dans une banlieue défavorisée de Londres (ou d'ailleurs) livrée au trafic de drogue. Les règlements de compte, les passages à tabac, les meurtres  sont le quotidien. La violence est omniprésente comme elle l'est chez Shakespeare. Et le metteur en scène ne nous épargne pas même s'il en tire parfois un effet comique.  Cymbeline est un caïd de la drogue et ceux qui l'entourent ne sont plus des nobles mais ses lieutenants, ses gros bras. Il va se mesurer non pas à un général romain comme dans le texte d'origine mais à un autre caïd. Et comme il se doit dans ce milieu-là les femmes doivent obéir et servir les hommes. Aussi quand Imogen se déguise en garçon (avec sa casquette à l'envers comme un gosse des banlieues) et s'enfuit pour sauver sa vie, l'intrigue est tout à fait crédible. Et le plus étonnant c'est que le texte de Shakespeare respecté à la lettre, servi par de très bons comédiens, semble avoir été écrit pour  notre époque et se révèle étonnamment (encore ce mot) moderne. Mais ce n'est pas la première fois que je constate cela à propos de Shakespeare, ce qui est le propre des plus grands dramaturges. On se sent toujours concerné. D'ailleurs le public, en particulier le parterre où la moyenne d'âge était jeune, manifestait son empathie pour Imogen et l'applaudissait quand elle marquait des points. J'ai adoré ce public nature, spontané et enthousiaste; il était un spectacle dans le spectacle !

Bref! Un vrai régal! Un spectacle théâtral que je ne suis pas prête d'oublier !
Maddy Hill,  excellente Imogen, en garçon : survêtement et casquette

 Encore quelques images

Imogen
Allez voir le site du Globe, mise en scène de Imogen, vous pourrez y voir des extraits de la pièce ICI

Un des fils de Cymbeline enlevé à son père dans son enfance. Il cultive du cannabis dans la forêt !

 A la fin de la représentation: Le metteur en scène  Matthew Dunster et les acteurs
A côté d'Imogen, Maddy Hill,  en noir et avec les béquilles Cymbeline le roi : Jonathan McGuinesss