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samedi 8 octobre 2022

Roumanie : Voyage à Bucarest (2 ) : Eglises Stavropoleos, Coltea, Studentali, Doamnei...

Eglise Stravopoleos

 Dans le vieux centre-ville, j'ai découvert d'adorables petites églises qu'il faut parfois chercher tant elles sont cachées ou du moins peu mises en valeur. Mais l'église de Stavropoleos, elle, a été restaurée  et le monastère remis en fonction en 2008.

L'église Stavropoleos

L'église Stavropoleos est l'une des plus belles églises orthodoxes du centre de la ville historique, dans la rue du même nom, fleuron du quartier Lipscani. Contruite au XVIII siècle par un moine grec, Ioanichie Stratonikeas,  son nom vient du grec, Stavropolis, qui signifie ville de la Croix.

 

Eglise Stavropoleos : détail du style brancovan

C'est l'un des plus parfaits exemples du style architectural brancovan, du nom du roi de Valachie, Constantin II Brâncoveanu ( 1688 -1714), mélange d'éléments de style renaissance tardif ou baroque et d'éléments orientaux : arcs byzantins, colonnes sculptées de motifs végétaux, chapiteaux ouvragés,  médaillons en mosaïques.  J'ai adoré cette visite !

Eglise Stavropoleos : détail du style brancovan

 Le nartex de l'église et l'intérieur sont ornés de peintures murales d'une grande beauté.

 

Eglise Stavropoleos : détail du style brancovan


Eglise Stavropoleos : détail du style brancovan
 

L'on peut pénétrer dans le joli petit cloître du monastère qui possède, nous dit-on, une très riche bibliothèque, monastère à nouveau occupé par les moniales.

Cloître du monastère de Sraveoplolos

                   

Eglise Coltea ou l'église des Trois Hiérarques


Eglise Coltea : église des Trois Hiérarques

 

 Au XVI siècle le boyard Coltea-Doiscecu fit édifier d'abord une église en bois puis en briques. Dès le XVII siècle la famille Cantuzène rénova l'église existante et  construisit  deux pavillons hospitaliers mais c'est au début du XVIII siècle que fut érigé l'hôpital Coltea qui forme avec l'église un vaste ensemble architectural. 

L'architecture actuelle de l'hôpital date des années 1888-1895  dans le style académiste français.


Eglise Coltea des Trois Hiérarques (style brancovan)

Les Trois Hiérarques ont joué un grand rôle dans la théologie chrétienne : Basile le Grand (329-379), Grégoire de Nazianze (329-390), Jean Chrysostome (349-407). Nés en Cappadoce,  en Turquie, ils sont entrés dans l’histoire sous le nom des «Trois Saints Hiérarques». Ils sont reconnus comme docteurs par la religion catholique et vénérés comme saints dans la religion orthodoxe.

Eglise et hôpital Coltea


Eglise Coltea des Trois Hiérarques (style brancovan) : fresques


Intérieur église Coltea iconostase

Interieur église Coltea

Biserica Studentali ou Eglise des Etudiants


Iconostase et fresques  de l'église Studentali

L' iconostase de l'église orthodoxe russe Studentali  ou église des Etudiants consacrée à Saint Nicolas est éblouissante comme tout l'intérieur de cette église. Pourtant, cachée sous un échafaudage, l'église ne paie pas de mine. Mais la partie supérieure et les bulbes montrent quelle merveille ce sera quand elle sera entièrement restaurée.


Eglise Studentali : sous l'échafaudage

En fait, les travaux entrepris pour la consolider après le tremblement de terre de 1997 ont commencé en 2000 et sont abandonnés faute de moyens financiers et c'est vraiment regrettable !


Belle restauration des Mosaïques et des coupoles de l'église


L'église des Etudiants a été construite entre 1905 et 1909 à l'initiative d'un ambassadeur russe. Située tout près de l'université et de la place des Etudiants, elle leur sert de chapelle.


Eglise Saint Nicolas Studentali : les peintures murales sont réalisées par le peintre Vassiliev
 

 
Eglise des Etudiants
 
Biserica  Studentali Saint Nicolas ou église des Etudiants




Biserica  Studentali Saint Nicolas ou église des Etudiants


Biserica  Studentali Saint Nicolas ou église des Etudiants



Biserica Studentali : L'iconostase  Les Saintes Portes (détails)
 
 La somptueuse iconostase en bois sculpté et recouverte d'or a été peinte par Viktor Vasnetsov et conçue sur le modèle de celle de l'église des Apôtres Pierre et Paul du Kremlin.
Rappelons que l'iconostase (du grec byzantin Icône et du latin stasis : arrêt, rester immobile), est la cloison ornée d'icônes qui sépare la nef de l'autel où le clergé célèbre les rites liturgiques dans une église orthodoxe.  Elle est le symbole de la limite entre le monde divin et le monde humain.

Biserica Doamnei ou Eglise de la Princesse

 

Biserica Doamnei ou Eglise de la Princesse

Cette adorable petite église bâtie sur une ancienne église de bois porte le nom de la princesse Maria Doamna, femme du prince de Valachie, Serban Cantacuzino (1683). Sa façade de style Valache annonçant le style Bracovan est très belle, épurée, élégante, avec son bandeau d'arcades pleins au niveau supérieur rappelant les cinq arcades du niveau inférieur sur la façade frontale, et la frise ajourée qui le souligne. Elle est dédiée à la Présentation de la Vierge.

 Il nous a fallu la chercher longtemps ! Inutile de penser la voir à partir de la rue Victorei car elle est enchâssée dans des immeubles qui la dérobent aux yeux des promeneurs. Vous parvenez jusqu'à elle par une passage couvert qui vous amène dans une cour intérieur où elle se dresse, dominée par les murs des appartements qui la surplombent.

Je lis dans mon guide que Caucescu détestait tant les églises qu'un ingénieur conçut un procédé pour les déplacer sur roulettes afin de les dissimuler dans des impasses ou des cours d'immeubles. Je ne crois pas que la biserica Doamnei ait été déplacée mais, le moins que l'on puisse dire, c'est qu'elle est bien cachée !

Passage de la rue Victorei vers l'église Doamnei

Biserica Doamnei ou Eglise de la Princesse

Biserica Doamnei ou Eglise de la Princesse

Biserica Doamnei ou Eglise de la Princesse : nef centrale vers la sortie


Biserica Doamnei ou Eglise de la Princesse


Biserica Doamnei ou Eglise de la Princesse

Biserica Doamnei ou Eglise de la Princesse :vers l'iconostase au fond


Biserica Doamnei ou Eglise de la Princesse : iconostase et Sainte Porte (détail)


Dans la vieille cité, je ne vous ai pas parlé de l'église Zlatari ou église des Orfèvres et l'église de l'Annonciation car je n'ai pas de photos à vous montrer.  

Et il y a encore bien d'autres merveilles artistiques et architecturales à découvrir dans les autres quartiers de la capitale de Roumanie malgré l'hostilité de Causcescu pour les églises.




mercredi 5 octobre 2022

Roumanie : Voyage à Bucarest : (1)

Une des grandes artères de la cité, la Calea Victorei et l'extrémité de la place de la Révolution

Bucarest est une immense ville, de plus de deux millions d’habitants, livrée aux voitures, à la vitesse, dans de longues et larges avenues à six voies, plus les contre-allées, bordées de trottoirs arborés qui pourraient être un havre rafraîchissant si ce n’était le bruit étourdissant de la circulation. 

 

Une partie de l'immense Piazza Victorei

Cet aspect de la ville du XIX siècle, début du XX ième, avec ses places immenses que je ne suis jamais arrivée à photographier dans leur totalité, avec ses grands hôtels, ses banques somptueuses, ses anciens palais - et ceci malgré ses trottoirs pleins de trous-  forme un contraste frappant avec le centre ville, un des seuls quartiers anciens qui a échappé à la folie destructrice de Ceausescu. Mais il est encore en piteux état, du moins près de mon hôtel :  maisons taguées, vitres cassées, immeubles noirâtres hérissés de climatiseurs, chaussée défoncée, terrains vagues derrière des palissades, jusque dans la rue Lipscani, la plus réputée de l’ancienne cité. Dans celle-ci les maisons restaurées sont occupées par des restaurants  qui cherchent à alpaguer les passants et ne vous laissent pas respirer ! Le mauvais côté du tourisme !


Le centre historique : Juxtaposée à mon hôtel, cette maison de style byzantin!


Le centre historique

 

Le centre historique

Le centre historique

J'avoue que j'ai eu un choc ! Ce premier contact avec le centre historique de  Bucarest a été rude ! Il est vrai que j'arrivais, je m'étais levée à trois heures du matin, j'étais fatiguée et il faisait très chaud ! J'ai tourné à gauche en sortant de l'hôtel et telle a été ma premier vision de la capitale ! J'aurais tourné à droite, j'aurais aperçu la ville du XIX siècle et ma vision aurait été toute différente.

C’est qu’elle revient de loin, cette ville ! Je n’ai pas eu le temps (ni l’envie) de visiter le parlement, le plus grand monument administratif du monde avec le Pentagone, mais pour le construire je sais que le dictateur a fait détruire l’équivalent de trois arrondissements de Paris, dont certains quartiers anciens pleins de charme, dans une zone historique comprenant trois monastères, vingt six églises anciennes, deux synagogues, 7000 maisons de style art déco ou néo-classsique. 70 000 personnes qui y demeuraient ont été déplacées. Un véritable traumatisme pour la population ! Cette construction a dévoré 40% du PIB du pays pendant cinq ans. Un retard économique terrible !  Un retard aussi en ce qui concerne l’écologie si l’on en juge par le culte de la voiture ! J’ai eu l’impression de revoir la France il y a  plusieurs  dizaines d’années quand on ne parlait pas encore de réduire les émissions de gaz, preuve que nous avons fait des progrès même si c’est insuffisant ! 

Mais c’est compréhensible. Comme nous l’a expliqué notre chauffeur qui nous amenait visiter les châteaux de Transylvanie, il n’y a qu’une seule route qui rejoint les deux plus grandes villes du pays car avant personne n’avait d’automobile. Une fois libre tout le monde a voulu en avoir une ! C’est donc encore le règne des quatre roues !

Enfin, l’on sent bien que tout bouge ici, de nombreux bâtiments sont en restauration, cachés derrière de grandes bâches. Les immeubles, les palais, déjà restaurés et qui abritent souvent des banques, des hôtels de luxe, offrent d’élégantes façades de style art déco, néo-classique. Il va falloir encore quelques années à la capitale de Roumanie pour que, le tourisme aidant, elle puisse développer tout son potentiel. Les restaurations dans la vieille ville laissent entrevoir ce qu'elle sera quand tout sera terminé.

Le lendemain de mon arrivée, je découvrai ceci ...

La vieille ville : beaucoup de restaurations

Le centre historique restauré  :  immeuble de style art déco

Porte art déco

La vieille ville  : Belle alliance du contemporain et art Déco


La vieille ville :  rue restaurée avec ses maisons néo-classiques


La vieille ville : le fameux restaurant Caru cu bere néo-gothique

 

Caru cu Bere : intérieur du restaurant

Caru cu Bere : un restaurant aussi beau que bon !


Caru cu Bere

J’ai commencé à déambuler, à fureter, à marcher les yeux levés et si vous aimez, comme moi, l'architecture et l'art, vous serez surpris de découvrir toutes sortes de petites merveilles non seulement dans la  partie ancienne de la ville mais aussi dans celle du XIX siècle, début du XX siècle.  Il ne faut pas essayer pas de trouver une unité, tous les styles  se chevauchent. A noter  tout particulièrement le style Brancovan, caractéristique de la Roumanie que j'ai découvert ici et qui est un mélange d'Orient, de culture roumaine et de Renaissance tardive.  Mais aussi l'Académisme, le Néo-classicisme d'inspiration française, l'Art Déco, l'influence Byzantine ou Renaissance, l'art néo-roumain ou néo-brancovien  reconnaissable à ses arcs, son avant-toit rouge foncé imitant ceux des maisons paysannes, les immeubles de type haussmannien, résultat de tout un brassage de population entre les Valaches (Bucarest est située en Valachie) et les Turcs, les Arméniens, les Grecs, les juifs, Les Allemands, les Français...  :  adorables petites églises enchâssées dans un immeuble sans grâce ou cachées derrière un échafaudage, nombreux musées installées dans de somptueux palais, belles oeuvres d'art, parcs... richesses qu’il faut prendre le temps de découvrir. Finalement, oui, j’ai aimé Bucarest  même si je n’ai pu en visiter qu’une infime partie tant la ville est étendue. Je n'y suis restée qu'une semaine !


Biserica Coltea Les Trois saint Hiérarques : XVIII siècle


Eglise Coltea Les Trois saint Hiérarques : style Brancovan


L'hôpital Coltea, de style académiste français :  Début XVIII siècle

L'ancien palais royal devenu le musée nationale d'Art de Roumanie


Icône royale :Saint George terrassant le dragon musée national d'art de Roumanie (section médiévale)

Icône royale : (détail) Saint George terrassant le dragon


Musée Zambaccian : un coup de coeur !


Hôtel Particulier : style néo-classique (détail)

 





                                             
L'Athénée roumain : style néoclassique salle de concert

Casa Romanit : Le musée des collections de l'art (Collectiilor)



Charles de Gaulle a rencontré Caucescu, d'où cette statue



Regardez qui nous avons rencontré place Charles de Gaulle, à l'entrée de l'immense parc Herastrau.  Dans ce parc  se trouve aussi le musée Satului ou musée en plein air du village du paysan roumain. 
 
 
Musée Satului : musée du village du paysan roumain

 
 
Musée Satului : musée du village du paysan roumain

 
A ne pas confondre avec le musée Taranului, musée du paysan roumain (qui était fermé pour encore six mois) !


Musée Taranuili : musée du paysan roumain style néo-roumain


MuséeTaranului: musée du paysan roumain : style néo-roumain ou néo-Brancovan


mardi 4 octobre 2022

Le premier Prix littéraire avignonnais : Venez me rejoindre !


  

Le premier Prix littéraire des Avignonnais

 

La Ville d’Avignon lance le premier Prix littéraire des Avignonnais. À partir du 1er octobre et jusqu’au 12 novembre, les avignonnais et tous les amoureux de la littérature sont invités à élire, parmi les cinq ouvrages sélectionnés par les bibliothèques, les librairies d'Avignon, un professeur de lettres du lycée René Char et la directrice des bibliothèques d'Avignon, leur roman préféré issu de la rentrée littéraire d’automne. Lectures, tables rondes, midi-sandwichs et de nombreuses animations permettront de mieux faire connaître ces cinq ouvrages et de voter pour celui qui emportera le premier Prix.
Les cinq romans sélectionnés sont disponibles en prêt dans les bibliothèques de la Ville et à la vente dans les librairies partenaires.
 

Comment élire votre livre préféré ?

En votant jusqu’au 12 novembre !
   

 •    sur jeparticipe.avignon.fr
 .   en déposant un bulletin dans une des urnes des bibliothèques de la ville
 

Remise du prix à l’écrivain lauréat
Le samedi 3 décembre à 15h30 au Théâtre des Halles

Si ces titres vous tentent venez me rejoindre pour la lecture de ces livres jusqu'au 12 Novembre. Vous pouvez voter en ligne si vous lisez les cinq romans puisque le vote est ouvert à tous les amoureux de la littérature ou  seulement vous joindre à moi pour quelques-uns de ces livres lors de Lectures Communes avec pour logo : le blason d'Avignon.

Je commence Lundi 10 Octobre avec le livre de l'édition Zulma (édition que j'aime) :  L’invention du diable
 Hubert Haddad



Liste les livres sélectionnés



L’évaporée 
Fanny Chiarello, Wendy Delorme
 Éditions Cambourakis 

 


 

« Qu’est-ce qui peut bien faire qu’une femme soudain abandonne celle à qui elle vient de dire, Quels merveilleux moments j’ai passés auprès de toi, aujourd’hui encore : je veux ça tous les jours de la vie ? » Tel est le questionnement auquel est confrontée Jenny après le départ d’Ève. Toutes deux apprendront que l’ on peut vivre une même histoire de deux façons totalement différentes ».

 
 

 

Le pion 
Paco Cerdà
  Éditions La Contre Allée 

 


Stockholm, hiver 1962. Deux hommes de mondes adverses se font face. Arturo Pomar, l’enfant prodige espagnol, affronte sur l’échiquier Bobby Fischer, un jeune Américain excentrique et ambitieux.
En pleine guerre froide, l’un était le pion du régime franquiste, l’autre sera celui des États-Unis.
    •    Première sélection du Prix du Meilleur Livre Étranger - catégorie non-fiction.

 
 

 

 

Eleftheria 
Murielle Szac  
Éditions Emmanuelle Collas 

 


 
1940, au nord de la Crète. La communauté juive célèbre Rosh Hashana. Rebecca écoute les commérages sur le futur mariage de Stella. On s’interroge aussi sur la guerre qui a commencé en Europe. Metaxas, le dictateur au pouvoir à Athènes, saura-t-il résister à Mussolini et à son allié, Hitler ? Bientôt, le bateau de Nikos, le Tanaïs, est réquisitionné par l’armée grecque. Malgré la menace, la vie continue… Jusqu’au matin du 20 mai 1941, lorsque le 3e Reich lance sur la Crète une invasion aéroportée. Faut-il fuir ou rester ? C’est l’heure de savoir si l’on est libre de choisir son destin.


 

 

Des rêves d’or et d’acier
 Émilie Tôn
 Éditions Hors d’atteinte 

 


 

 Je veux savoir comment mon père est arrivé dans cette Lorraine où l’acier s’écoule, comprendre comment il est devenu cet homme au destin plusieurs fois brisé, qui n’a jamais abandonné. Il l’a toujours dit : « Quand on a tout perdu plusieurs fois, on n’a plus peur de se lancer. »
 


 

 

 

L’invention du diable
 Hubert Haddad
 Éditions Zulma 

 



Papillon de Lasphrise s’est retiré dans sa tour d’ivoire angevine. Après une existence dédiée à l’amour et à la guerre, le voilà tout entier habité par le démon de l’écriture. Au soir de sa vie, il pactise avec le diable : tant que ses Poésies n’auront pas accédé à la postérité, il ne connaîtra pas le repos éternel. L’immortalité sera sa malédiction.
 

 

 

 Le Blason d'Avignon

 


 J'ai choisi pour illustrer ce billet le blason d'Avignon même si ce n'est pas le choix du prix littéraire. Le symbole des trois clefs est adopté par le festival d'Avignon.

Voici l'explication du blason :

La ville d'Avignon porte 3 clés parce que,du temps des papes, il y avait alors pour gouverner la ville, trois syndics ou consuls.

 Les trois clefs évoquent l'emblème papal, qui comprend deux clefs en sautoir, et le nombre de trois rappelle que la ville d'Avignon était alors gouvernée par trois syndics.

 Au xve siècle, des gerfauts furent réintroduits en tant que supports à l'écu, sur demande de la population auprès du pape.
La devise de la ville fut adoptée au même moment :
" Unguibus et rostro. "

Sa signification, « à bec et ongles », fait référence aux gerfauts.
Les deux oiseaux portent chacun un grelot à la patte, afin de maintenir symboliquement l'attention des syndics sur les affaires de la cité.https://www.armorial.org/produit/106138/avignon.html

 

vendredi 30 septembre 2022

Jean-Philippe Jaworsky : Gagner la guerre

 

Je me suis immédiatement et volontiers couler dans l’univers de Gagner la guerre, roman de Jean-Philippe Jaworsky. Celui-ci nous introduit dans un monde imaginaire qui semble pourtant réel. La République de Ciudala ressemble fortement à la Florence de la Renaissance avec ses palais dont la base fortifiée est à bossage, et qui s’ouvrent aux étages supérieurs sur d’élégantes ouvertures géminées. Les grandes familles nobles de Ciudala, les Mastiggia et les Ducatore, s’y livrent à une guerre intestine sournoise, référence probable aux Médicis et aux Strozzi. Ciudala rappelle aussi Venise, son commerce avec les Turcs qui sont aussi ses meilleurs ennemis. Car la grande bataille navale que la République de Ciudala vient de remporter au début du roman est livrée contre Ressine, capitale de ce qui semble être l’ancienne Turquie, avec ses aghas, ses janissaires, ses eunuques, ses sérails et ses concubines. 


Un roman qui s’appuie sur l’Histoire, donc, avec un mélimélo de références, un pot pourri d’influences diverses ! Et que dire de ce peuple des pays froids où le héros va s’exiler, dans la ville de Bourg-Preux, et qui surenchérit sur le racisme des Ciudaliens  : ceux-ci jugent les Ressiniens trop noirs, les habitants de Bourg Preux ne voient, eux, aucune différence entre les deux susdits, tous trop sombres, tous inférieurs !
Un roman qui, pourtant, n’est pas un roman historique car ce monde est peuplé de magiciens, de sorciers et d’elfes qui nous entraînent dans un univers imaginaire soumis aux lois de la magie propres au roman fantasy. Ainsi le redoutable Sassanos, sorcier nécrophore qui se nourrit de l’énergie des morts pour déjouer le destin. Un vampire ?

 Peut-être, néanmoins, est-ce l’aspect du roman qui m’a le moins intéressée ?

Mais Gagner la guerre est aussi un roman politique - et par là de tous les temps-  car il explore les arcanes du pouvoir à travers les luttes que se livrent les familles nobles de Ciudala. Le podestat Léonide Ducatore a pour but de détruire la République pour devenir le souverain absolu. C’est avec habileté qu’il cache son jeu. Il intrigue, analyse les rapports de force, jouant une famille contre l’autre et vice versa, quitte à recourir au mensonge, à la trahison, voire au meurtre, tout en donnant à voir une façade de sincérité et d’honnêteté.

Le podestat Léonide Ducatore :

« Est-il abusif, pour un homme de gouvernement de subordonner la nation à son propre intérêt ? Les rêveurs, les naïfs, les hypocrites s’en offusqueront.
Je suis clair avec moi-même : j’assume mes actes, je profite de ma situation, je me sers de ma position à des fins personnelles. (...) Gouverner n’est pas un ministère; voilà bien une idée pour le clergé, un voeu pieux qui peut mener à de dangereuses dérives. La vérité est plus simple. Gouverner, c’est coucher. Si les deux partenaires aiment ça, ils se confondent. Ils partagent tout. j’ai une connaissance intime de la République. Je sais tout de ses faiblesses : la vanité, la coquetterie artistique, l’affairisme, le clientélisme, la corruption, le populisme, le chauvinisme, la calomnie…. Sans oublier le mépris, bien sûr. Autant de petits travers qu’il suffit de flatter pour faire brailler la plèbe dans la rue, pour faire crier la République toute entière comme une courtisane. Je baise la République et je la baise bien ». 

Machiavel n’est pas bien loin ! Quand je vous dis que ce propos est universel !

Venons en maintenant à notre héros ! Benvenuto Gesufal ! L’anti-héros par excellence ! La première fois que vous le rencontrez, du moins, dans ce roman, il est sur une galère, a le mal de mer et vomit toutes ses tripes devant l’équipage hilare. Mais quand vous le découvrirez sur un canasson, il ne sera pas plus à son aise, et se plaindra de son postérieur enflammé ! Pour un héros, vous avouerez ! Au départ, il est censé être beau mais il se fait casser la gueule, et se retrouve avec le nez de traviole, le râtelier en moins, remplacé par de rutilantes dents en or - excusez-moi, je parle comme lui, du moins j’essaie, car je ne possède pas un vocabulaire aussi riche - ! Donc, pour ce qui est de la beauté, vous repasserez ! Quant au sentiment romantique, à la galanterie envers les dames, vous repasserez aussi, un petit viol de temps en temps et puis l'on poinçonne la Belle, histoire qu'elle n’aille pas se plaindre de l’inconstance des hommes, c’est un des plaisirs de la guerre ! La parole donnée ? Vous rigolez ! Benvenuto Gesufal est un traître et son fond de commerce, c’est le meurtre. Alors, je vous conseille de ne pas vous fier à lui ! En fait, il est l’assassin patenté du podestat Léonide Ducatore ! Il ne s’embarrasse pas de scrupules et tue sur commande. Et là, oui, il est fort ! Il manie l’épée et la dague comme pas deux et embroche son adversaire sans coup férir ! 

Alors pourquoi s’intéresser à un tel individu ? Parfois, cela fait plaisir d’être du côté du méchant ! Après tout, c’est rare et original ! Et puis quand il s’adresse à nous, lecteurs, nous jubilons. Benvenuto a l’art de l’auto-dérision et manie hautement l’humour. J’adore, en particulier le mot de la fin qui constitue une chute hilarante au roman ! Il fait preuve d’un cynisme qui nous laisse pantelant et puis, il est, de plus, intelligent, une intelligence brillante qui lui permet de jouer au plus fin avec ses adversaires et de lire dans leur jeu, en particulier celui du podestat. Il a l’art de la formule, de la synthèse et réfléchit vite et bien. On sent qu’il n’est pas qu’un soudard ! Il sait lire et écrire, ce qui pour un homme de sa condition est exceptionnel. D’ailleurs, c’est lui qui écrit cette histoire. ll manifeste une sensibilité à la nature et à la beauté des choses. Il aime l’art, la peinture, la musique :  

« Les derniers accords abandonnèrent le public dans un état de suspension, vacillant au bord d’un abîme solaire. C’était plus qu’un charme : deux cents personnes stupéfiées, dans un état de choc délicieux. J’essuyai en vitesse le coin de mon oeil; cette divine salope m’avait tiré une larme, et ça la foutait très mal pour un ruffian de mon style. »

Un retour vers son enfance grâce à un passage à la Proust, nous permettra de comprendre sa personnalité, plus complexe que ce que l’on pourrait croire. Parfois la cuirasse se fend, quand il écoute un chant, quand son ami meurt … Les souffrances ressenties dans son corps, le non-sens de sa vie, lui apparaissent. Au dénouement, on le sent prêt à rendre les armes. Ce qui ne l’empêche pas d’être un parfait enfoiré mais il n’est pas le seul dans cette histoire qui en compte beaucoup ! Jaworsky réussit le tour de force de nous passionner avec un personnage absolument imbuvable ! Lecteurs, croyez-moi, si vous entrez dans ce livre, abandonnez toute morale et tout espoir de rédemption !

Bon !  Le style maintenant ! Il est magistral. L’écrivain manie tous les registres de la langue française et passe de l’un à autre avec aisance, fin connaisseur de l’argot, qu’il utilise avec verve, orfèvre des mots crus, truculents en diable, maître des descriptions ciselées. Il crée des effets comiques, d’ailleurs en mêlant les genres, en passant brusquement du registre soutenu ou registre familier et même trivial.

« Vous n’avez pas les fumerons de jaboter dans cette boutanche ? observai-je en baissant le ton. C’est gavé de gnasses qui ont les loches qui traînent; sans parler des floues et des casseroles. Ça me fait gaffer de dévider en plein entrépage.
Mordez le tableau ! rétorqua Dagarella d’un air dégagé. A la ronde, il n’y a que du lourd et du rupin. Même les grouillots, c’est de la pelure en souillards. Ils entravent que dalle au jar. On peut jacter à son aise. »

« En contrebas la ville nichée dans les replis des collines littorales : un chevauchement de toits ocre, un paradis mystérieux aux sillons de terre cuite, crevassé du lacis étroit des rues et des venelles, comme un épiderme quadrillé de ridules.Ça et là, la carapace tuilée était percée par le faîte des grands arbres et par le parement altier des tours et des beffrois. »

En résumé voici un bon, gros et long roman tel que je les aime (près de mille pages) que j’ai lu, d’ailleurs, comme pavé de l’été mais que je n’ai pas eu le temps de commenter avant la fin du challenge. On y vit mille péripéties comme dans un roman de cape et d’épées, on y rit des saillies, des réparties de notre héros, on y réfléchit sur les hommes politiques du passé ou du présent. Et s’il y a parfois quelques longueurs, elles se font vite emporter dans le flux impétueux de nouvelles aventures.

PS une mention spéciale aux remerciements de fin de roman. Ne les ratez pas!


Merci à Ingammic et à son bel article de m’avoir donné envie de lire ce livre : voir son billet ici