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mardi 20 septembre 2016

Victor Hugo : Mangeront-ils? Lecture commune


 
J'ai vu cet été au festival d'Avignon 2016, la représentation de la pièce de Victor Hugo : Mangeront-ils? par la compagnie des Barriques. (voir mon billet ICI).  Ce qui m'avait donné envie de lire la pièce.
 

Mangeront-ils? Aïrolo et Zineb Compagnie des barriques photo Luca Lomazzi
Mangeront-ils? appartient au recueil Théâtre en liberté composé de quatre drames et cinq comédies en vers ou en prose. Ecrites par Victor Hugo pendant son exil à Guernesey, éditées en 1869 à son retour en France, ces pièces n’ont jamais été jouées sur scène du vivant de l’auteur.

Mangeront-ils? est une histoire d’amour contrarié, celle de Lord Slada et de Lady Janet obligés de se réfugier dans l’asile d’une église à moitié en ruines, sur l’île de Man, pour échapper au Roi, amoureux de Lady Janet qu’il veut pour épouse. Mais dans l’enceinte de ces ruines ne poussent que des plantes vénéneuses et coule une rivière aux eaux empoisonnées. Les deux amants ne peuvent s’échapper et sont condamnés bientôt à mourir de faim et soif. C’est alors que le voleur au grand coeur Aïrolo les prend sous son aile et part chercher de la nourriture pour eux dans la forêt où vit la sorcière Zineb. Celle-ci a cent ans et se sent proche de la mort. Pourchassés par le tyran, le bandit et la sorcière vont faire alliance contre celui-ci.

Le drame romantique : entre comédie et tragédie 

 

Lady Janet et Aïrolo :  Serge Reggiani dans une mise en scène pour la TV
 
 
Il s’agit d’un drame romantique en deux actes qui pratique le mélange des genres prôné par Victor Hugo. La pièce commence donc comme une tragédie avec un despote cruel qui veut se saisir de la jeune femme et tuer son mari mais elle finit en véritable comédie. Dans le deuxième acte, l’on voit en effet Aïrolo mener par le bout du nez le tyran crédule et sot, le couvrant de ridicule et parvenant à le chasser du trône.
A ce mélange des genres correspond celui des styles. Le contraste entre les déclarations d’amour nobles et lyriques de Lord Slada et les préoccupations de Lady Janet crée un effet comique alors que la situation des jeunes gens n’est rien moins que tragique :
Lord Slada
Mets sur ton front ta main. Je suis ton protégé.
Déesse, inonde-moi de ta lumière.
Lady Janet, à part.
J’ai
une faim!

A l’expression du bel amour romantique répondent les exigences les plus terre à terre. La « déesse » a l’estomac vide et lord Slada est bien obligé, lui aussi, d’avouer qu’il est soumis aux mêmes contingences terrestres! C’est ce que souligne la réplique de Aïrolo :
Oui, c’est le paradis de s’aimer de la sorte,
Mais toutefois un peu de nourriture importe;
Vous êtes, j’en conviens, deux anges, mais aussi
Deux estomacs ; daignez me concéder ceci.

D’où le titre réaliste de la pièce, Mangeront-ils? qui résume l’enjeu de l’action, les jeunes gens étant condamnés soit à mourir de faim, soit à périr de la main du roi pour Slada et au mariage forcé pour Janet. Mais ce titre est aussi un moyen pour Victor Hugo de dénoncer la misère du peuple qui souffre de faim pendant que le Roi fait ripaille. Car la pièce se veut un pamphlet contre la tyrannie et les grands de ce monde qui se rient de la souffrance des humbles.
 

 Contre l'arbitraire et l’injustice sociale  : un hymne à la liberté

 

Le Roi et son conseiller : Mise en scène de Beno Besson à Lausanne
 
Victor Hugo dans son exil continue donc à mener son combat contre Napoléon III et à dénoncer le despotisme. Le roi de la pièce est un homme qui vit dans l’opulence au dépens du peuple. Mess Tityrus son conseiller l’encourage dans cette voie : 
 
Roi, plaisirs, tournois, galas, combats, vous pouvez vous donner toutes vos fantaisies,
le peuple paie.

Il aime le pouvoir mais aussi les richesses, la bonne chère mais il en jouit d’autant plus devant ceux qui n’ont rien. 
 
J’approuve cette estrade,
Il sied qu’un roi qui mange ait d’en bas pour témoins
le reste des mortels qui mangent beaucoup moins.

C’est un être médiocre qui veut soumettre les autres, les plier à son arbitraire. Il aime faire souffrir, torturer, jouer au chat et à la souris en donnant de l’espoir pour mieux plonger son ennemi dans le désespoir. Il est prompt à condamner ceux qui lui résistent et Victor Hugo s'élève ici, encore une fois, contre la peine de mort.
 
Mess Tityrus
Pour jouer de la sorte avec l’espoir, l’effroi,
La mort, la vie, il faut, vois-tu bien être roi.
Aïrolo à part
Il suffit d’être tigre.

La charge satirique dirigée contre le roi est forcée. Victor Hugo en fait un fantoche, une sorte de pantin habilement manipulé par Mess Tityrus. Imbu de lui-même, il est non seulement méchant mais sot. Il refuse de croire en Dieu, il se proclame supérieur à lui mais il tombe dans la superstition et pourchasse Zineb pour qu’elle lui dise son avenir. Sa crédulité imbécile alliée à son égocentrisme et sa lâcheté le ridiculise.

Face à lui, Aïrolo incarne la figure du peuple, l'amour de la liberté et dénonce l’injustice sociale qui commence par celle de la naissance.
 
Ah! je vaux bien les rois,
Car j’ai la liberté de rire au fond des bois.
Mon chez-moi c’est l’espace, et Rien est ma patrie.
Voyez-vous la naissance est une loterie;
Le hasard fourre au sac sa main, vous voilà né.
A ce tirage obscur la forêt m’a gagné.

Il est celui qui lutte pour que le peuple mange et pour que celui-ci ait doit au bonheur : 
 
Je livre la bataille immense de la faim
Contre le superflu des autres.

L’homme ayant égaré le bonheur, je le cherche.

Avec Aïrolo, l’on retrouve le thème du bandit, du proscrit, du marginal rejeté par la société, thème cher à Victor Hugo. Il est un Jean Valjean, un Gwinplaine, un Hernani en rébellion contre l’ordre établi, un humble qui ne se soumet pas, un homme avec sa part d’ombre et de lumière. 
 
Possesseur de zéro, que j’en sois le voleur,
ça fait rire. Je suis le pire et le meilleur.

Aïrolo se révèle supérieur au roi car c’est un être libre, qui accepte la mort plutôt que de servir et de s’humilier. 
 
Après tout j’aime autant la corde que la chaîne,
Et la mort que la geôle. Un noeud qui pend d’un clou,
Et qu’on serre une fois pour toutes à mon cou
Me délivre d’un tas de choses que j’évite.

Il n’est corrompu ni par le pouvoir ou les honneurs, ni par l’argent. Il place les valeurs spirituelles et la liberté au-dessus de tout. Il a un certain panache et comme les héros romantiques de Hugo, il l’exprime  avec superbe : 
 
ll ne me convient pas de vous divertir, prince,
Et d’être la souris quand vous êtes le chat.
 
 

Fantastique, Superstition, Religion : "Je lis Dieu sans lunettes"

Les amoureux dans le cloître abandonné : décor de la mise en scène de La Fine Compagnie et Les Estropiés

 
Le fantastique est l’une des composantes discrète de la pièce avec la présence de la sorcière Zineb mais l’on verra que Victor Hugo laisse malicieusement planer un doute sur les talents divinatoires de Zineb. Et l’on est témoin du scepticisme d’Aïrolo lorsqu’il reçoit le talisman de Zineb censé lui assurer une longue vie de cent ans. L’auteur critique les superstitions absurdes. Le roi de Man qui se place au-dessus du Christ et de Dieu mais sombre dans l’obscurantisme, en est bien puni.
En fait, brigand ou sorcière, les deux personnages sont avant tout des êtres proches de la nature, vivant en symbiose avec elle. Incarnation du dieu Pan ou de Puck, Aïrolo est enfant de la Grèce et de Shakespeare… 
 
 Je suis l’âme sereine à qui Pan s’associe
 
Quant à Zineb, si elle est sorcière, elle n’est pas semblable aux sombres apparitions de Macbeth. Elle serait plutôt cousine du Petit Monde des bois, celui du Songe d’une nuit d’été, parentes des fées, suivantes de Titiana. Personnage malicieux mais sans méchanceté, elle est du côté des êtres qui ont besoin d'elle, les animaux comme le pigeon blessé ou les humains innocents.

De plus, le personnage de Zineb permet à Victor Hugo de dénoncer le fanatisme, les bûchers allumés par l’Eglise pour mettre à mort ces pauvres femmes qui sont surtout des êtres de la nature, connaisseuses des plantes et guérisseuses.
A côté de la satire du despotisme, Victor Hugo se livre effectivement à une critique en règle de l’Eglise prompte au fanatisme, prête à appuyer les puissants quand cela l’arrange mais constituant un contre-pouvoir redoutable dès que l’on touche à ses biens ou à ses privilèges.
 
Mais si vous touchez un jour à l’église, à ses droits, à ce cloître inutile,
Ah! bien, c’est pour le coups que, dans toute cette île,
On entendra sonner le tocsin jusqu’au ciel.

Pour Hugo qui croit en Dieu mais n’aime pas le clergé, Aïrolo représente la religion débarrassée des prêtres, la vraie foi pure et sincère. C’est ce que le jeune homme exprime d’une manière extrêmement pittoresque :
 
 « je lis Dieu sans lunettes ».
Faut-il vous compléter mon portrait? Braconnage,
Et clef des champs. Pensif, je dédaigne de loin
Le juge, plus le prêtre; et je n’ai pas besoin
De vos religions, je lis Dieu sans lunettes.
 

Une célébration de la Nature :  entre lyrisme et grotesque

 

La forêt, le très beau décor de la mise en scène de Laurent Pelly à Marseille Théâtre de la Criée
 
 
Il y a de très beaux passages dans cette pièce, de grands moment poétiques où le lyrisme s’élève comme une musique éthérée pour célébrer la beauté de la nature, l’amour de la liberté, de l’espace. Ainsi lorsque Aïrolo parle de sa vie dans la forêt :
 
A ce tirage obscur la forêt m’a gagné.
Joli lot. C’est ainsi que parmi la bruyère
Où Puck sert d’hippogriffe à la fée écuyère,
Enfant et gnome, étant presque un faune, j’échus
Comme concitoyen aux vieux arbres fourchus.
Dans l’herbe, dans les fleurs de soleil pénétrées,
Dans le ciel bleu, dans l’air doré, j’ai mes entrées.

Parfois  le style se fait plus familier, plus proche et l’humour affleure  : 
 
Mon patrimoine est mince. Errer dans les sentiers,
C’est là mon seul talent; je plains mes héritiers.
 
Mais une fois encore il alterne avec des vers d’une poésie simple et pure évocatrice de cette nature qui est sa vraie richesse :
 
Voyons que laisserai-je après moi?
Regardant autour de lui.
Cette dune,
Ce sapin, les roseaux, l’étang, le clair de lune,
La falaise où le flot mouille les goémons,
La source dans les puits, la neige sur les monts,
Voilà tout ce que j’ai.

Très beau aussi le moment ou Zineb remercie Aïrolo de l’avoir aidée non parce qu’il lui a sauvé la vie mais parce qu’il lui  a donné plus encore, une mort digne, en accord avec sa vie, en phase avec la nature :
 
Ecoute je te dois la mort sombre et tranquille,
La mort douce et profonde au fond des bois cléments,
Parmi ces rocs sacrés, mystérieux aimants,
Sous les ronces, au pied des chênes, sur la mousse,
Dans la sérénité de l’obscurité douce
La mort comme les loups et comme les lions,
Je te dois loin des peurs et des rebellions,
L’évanouissement dans la bonne nature.

Triviales par contre les réflexions d’Aïrolo sur les amoureux
 
Le coeur  a ses bonheurs, l’estomac ses misères,
Et c’est une bataille entre ces deux viscères.
Lequel l’emportera? L’estomac.
 
Et franchement vulgaires ses pensées exprimées en « franglais » (et oui, déjà!)  devant la belle Janet endormi pour qui il éprouve du désir  :
 
J’en suis incandescent.- que n’ai-je
le droit d’offrir un kiss à ce biceps de neige.
 
Toujours ce fameux mélange des styles qui réclame du comédien incarnant Aïrolo d’avoir à la fois un tempérament comique, une certaine truculence et un penchant vers le lyrisme, une manière d’exprimer la nostalgie assortie d’une gaité un peu triste, un équilibre léger et subtil entre deux extrêmes. Une pièce qui demande donc une remarquable interprétation. Quant à la scénographie, j'ai pu voir en faisant des recherches dans le net combien cette pièce avait donné lieu à de très belles créations et décors variés.

 

 LECTURES COMMUNES RAPPEL

Pour le 20 Octobre 2016 :  Lettres de Juliette Drouet ou biographie de Henri Troyat :  Juliette Drouet  OU Juliette Drouet : Mon grand petit homme, mille et une lettres d'amour (Gallimard) OU  tout autre livre de correspondance entre Drouet-Hugo
Miriam, Margotte, Claudialucia

Pour le  20 Novembre 2016 :  BIOGRAPHIE DE VICTOR HUGO  : Un été avec Hugo de Laura El Makki (Equateurs/ Parallèles) OU Victor Hugo de Sandrine Filipetti (livre de poche) Ou Olympio ou la vie de Victor Hugo de Maurois. Bref! une biographie de Hugo au choix.

Miriam, Nathalie, Claudialucia, Eimelle (?), Margotte

LECTURES COMMUNES : AUTRES PROPOSITIONS

Je propose de continuer notre exploration du Théâtre en Liberté (livre de poche Folio Gallimard) dans le cadre du challenge Victor Hugo, du challenge romantique et aussi du Challenge Tous en Scène d'Eimelle pour la fin 2016 et  l'année  2017 : en alternant drames et comédies

Pour le 20 Décembre : un drame : Torquemada

Margotte,  Miriam, Nathalie, claudialucia,

Je proposerai plus tard le tableau  les lectures à partir de janvier 2017.




lundi 19 septembre 2016

LC Victor Hugo : Rappel



Demain rendez-vous pour la lecture commune de Victor Hugo, la pièce de théâtre : Mangeront-ils?


 

jeudi 18 août 2016

Représentation de Mangeront-ils ? d'après Victor Hugo au bois de Boulogne au mois d'août et de septembre



Si vous voulez voir Mangeront-ils? de Victor Hugo (nous avons une lecture commune de cette pièce pour le mois de Septembre), je vous signale qu'il y a une représentation de la pièce au Bois de Boulogne tous les vendredis et samedis soir du mois d'août et les 10 17 24 septembre.


Tarif Libre, au gré de votre satisfaction.


Entrée au pied de la Butte de Mortemart - Côté Boulogne (92100)

Au bout du Bd Anatole-France 

Rendez-vous devant l’ancienne maison du gardien, à l’entrée du Bois de Boulogne
(92100 Boulogne-Billancourt).

Voir aussi le site de la Compagnie Avant les forêts  


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  Savoir si cette représentation est de qualité, c'est ce que je sais pas mais.. si vous y allez, n'oubliez pas de nous en informer.. nous autres pauvres provinciaux!

Voir retour des spectateurs sur la pièce  ICI

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Billet fait en Lozère, en ce jour de grâce du 18 août avec internet.

Blog toujours en pause mais quand j'ai internet je viens vous voir!

jeudi 4 août 2016

Festival d'Avignon OFF 2016 : Mangeront-ils ? de Victor Hugo



Mangeront-ils? est une pièce en deux actes et en alexandrins de Victor Hugo. Je ne l’ai jamais lue, jamais vu jouer avant ce jour. Et j’avoue que la représentation m’a surprise et un peu déconcertée car je n’ai pas trop su qu'en penser. J’ai surtout cherché à savoir ce que Victor Hugo voulait dire.
 
Voilà le sujet de la pièce présentée par la Compagnie des Barriques :

"Dans une forêt profonde, deux amants pourchassés par un roi jaloux ont trouvé asile dans un cloître où poussent des plantes vénéneuses. Non loin d'eux vivent deux proscrits: la sorcière Zineb, qui ne demande qu'à mourir en paix loin des hommes, et le voleur Aïrolo. Ce dernier, vagabond épris de liberté, touché par la pureté de l'amour des deux fugitifs, vient à leur secours, car depuis trois jours les tourtereaux rebelles ne mangent ni ne boivent.
Ils s’aiment, mais ils ont faim : mangeront-ils?
Une sorcière âgée de cent ans, un talisman qui protège de la mort, une forêt empoisonnée, tous les ingrédients sont réunis pour nous transporter dans une fable onirique servie par la puissance de l'écriture de Victor Hugo."
 
Dans ce spectacle, les amoureux sont  représentés par deux marionnettes, jolies, mais qui ont un rôle très réduit. Aux déclarations d’amour de l’un, répond le « j’ai faim » de l’autre. C’est alors que le voleur de grand chemin Aïrolo décide de les aider car lorsque la faim est là, dit-il, l’amour ne peut résister. On est donc loin du Victor Hugo romantique et plus proche, semble-t-il, du Victor Hugo politique qui dénonce la tyrannie des grands (ici un roi obèse) et est plein de compassion pour le peuple qui souffre et qui a faim. D’où le titre...
La pièce tend aussi vers le fantastique avec cette sorcière qui vient en aide au brigand même si l’on se dit qu’en fait son pouvoir divinatoire semble dû à une mystification qui fait sourire.
Quant au voleur, il est la figure récurrente chez le dramaturge de l’homme proscrit, du bandit comme Hernani, en marge de la société, entièrement libre, et qui pourtant peut avoir grand coeur et aider les plus faibles.
Voilà pour les thèmes que j’ai relevés.
J’avoue que je n’ai pas été convaincue par le jeu des comédiennes qui interprètent le roi et la sorcière et le conseiller. Au niveau de la mise en scène, le théâtre des marionnettes comme mise en abyme est intéressant ainsi que le costume de la sorcière qui semble être une émanation de la nature, feuilles, branchages, mousse.
Ce spectacle m'a donc donné envie de lire cette pièce  pour en avoir une idée plus précise.

Aussi je vous donne rendez-vous pour la Lecture commune  de Mangeront-ils ? que nous ferons avec Margotte, Miriam, Nathalie, et moi-même pour le 20 Septembre. Pour nous nous rejoindre, inscrivez-vous dans les commentaires.

Je rappelle les LC suivantes : Victor Hugo

 Pour le 20 Septembre : MANGERONT-ILS? Livre de poche 
 Miriam, Nathalie, Margotte, Claudialucia

Pour le 20 Octobre lettres de Juliette Drouet ou biographie  Une bio de Henri Troyat :  Juliette Drouet  OU Juliette Drouet : Mon grand petit homme, mille et une lettres d'amour (Gallimard) OU  tout autre livre de correspondance entre Drouet-Hugo
Miriam, Margotte(?), Claudialucia

Pour le  20 Novembre :  BIOGRAPHIE DE VICTOR HUGO  : Un été avec Hugo de Laura El Makki (Equateurs/ Parallèles) OU Victor Hugo de Sandrine Filipetti (livre de poche) Ou Olympio ou la vie de Victor Hugo de Maurois. Bref! une biographie de Hugo au choix.
Miriam, Nathalie, Claudialucia, Eimelle (?)




Compagnie des Barriques

    •    Interprète(s) : Claire Chauchat, Lucie Jousse, Victorien Robert
    •    Interprète en alternance : Pauline Aubry, Natacha Milosevic, Romain Villiers Moriamé
    •    Metteur en scène : Eva Dumont
    •    Créateur Lumière : Jean-Yves Perruchon
    •    Costumes : Christine Vilers

vendredi 29 juillet 2016

Festival OFF d'Avignon 2016 : L'homme qui rit de Victor Hugo à Présence Pasteur




Au 17ème siècle, par une nuit d’hiver, le misanthrope Ursus recueille dans sa roulotte deux enfants abandonnés au froid et à la faim : une petite fille aux yeux gelés, et un garçon au visage horriblement défiguré par des trafiquants d’enfants : Gwynplaine. Il devient bientôt L'Homme qui rit, vedette incontestée des foires de la vieille Angleterre… jusqu’au jour où la Chambre des Lords le réclame !

C’est une véritable gageure que d’adapter le roman-fleuve de Victor Hugo :  L’homme qui rit. Il faut évidemment tailler dans le vif quitte à laisser de côté bien des aspects de cette oeuvre! Et comme il s’agit de de mon roman-culte Voir Ici parmi tous les autres de Hugo, j’étais un peu dubitative. Mais j’avais envie de découvrir comment l’on pouvait représenter un tel monument au théâtre! 

La comédienne, Christine Guênon, est seule en scène et elle est convaincante. Conteuse, elle évoque les Comprachicos et leurs atroces commerces d’enfants, leur départ en mer hâtif pour échapper à la justice. Une silhouette mince, pantalon et tee-shirt, une coupe à la garçonne, asexuée, elle est le frêle Gwinplaine abandonné sur la plage, errant dans l’immensité neigeuse. Et nous voyons par ses yeux les rencontres du jeune garçon avec le pendu, avec la femme morte et le bébé aux yeux gelés puis avec Ursus. C’est avec son incarnation d’Ursus, que Christine Guênon est la plus étonnante! J’ai même cru voir un Jean Gabin bougon dans un de ces rôles de râleur pas trop méchant! Elle devient Ursus, ce misanthrope, philosophe bourru à la voix rude et gouailleuse mais au coeur d’or qui accueille les proscrits en leur donnant la nourriture dont il se prive.
J’ai regretté que l’histoire d’amour entre Gwinplaine et Déa soit sacrifiée et de même le personnage de la jeune aveugle qui n’existe pas. Malgré tout j’ai aimé tout ce qui concerne cette partie du roman. Peu ou pas de décor, un banc pour la roulotte d’Ursus, une table avec un miroir où Gwinplaine devenu histrion se grime et dans lequel on voit le visage de la comédienne se transformer devant nous. Les lumières jouent sur le clair-obscur comme dans le roman et permet à l’imagination de se déployer.
Par contre j’ai trouvé trop rapide l’ascension sociale de Gwinplaine devenu lord et plutôt expédiée l’exposition de ses idées même si une part de son discours est conservé. Cette partie du roman porte toutes les idées politiques et sociales de Hugo contre la féodalité, contre l’immense puissance de l’aristocratie anglaise et toute sa compassion pour le peuple opprimé. Il est donc dommage que ce soit si rapidement traité. De plus la comédienne m’a paru alors moins à l’aise et un peu éteinte par rapport à ce qui précède. Elle ne rend pas la puissance, la générosité et le souffle révolutionnaire de Gwinplaine-Hugo ni la grandeur et la beauté épique du style de Victor Hugo! C’est un peu comme si en adaptant le texte on s’était désintéressé de cet aspect de l’oeuvre.
Mais bon, je sais bien qu’en une heure l’on ne pouvait rendre compte de tout et qu’il fallait choisir et, malgré ces regrets, j’ai bien aimé le spectacle dans l'ensemble et la comédienne qui le défendait.


 Compagnie Chaos Vaincu
 Interprète(s) : Christine Guênon
 Régisseur : Patrick Marchand

Et pour le plaisir ....

Je suis celui qui vient des profondeurs, Milords, vous êtes les grands et les riches. C'est périlleux. Vous profitez de la nuit. Mais prenez garde, il y a une grande puissance, l'aurore. L'aube ne peut être vaincue. Elle arrive. Elle a en elle le jet du jour irrésistible. Et qui empêchera cette fronde de jeter le soleil dans le ciel? Le soleil, c'est le droit. Vous, vous êtes le privilège. Ayez peur. Le vrai maître de la maison va frapper à la porte.

Sais-tu qu'il y a un duc en Ecosse qui galope trente lieux sans sortir de chez lui? Sais-tu que le lord archevêque de Canterbury a un million de France de revenus? Sais-tu que sa majesté a par an sept cent mille sterlings de liste civile, sans compter les châteaux, forêts, domaines, fiefs, tenances, alleux, prébendes, dîmes et redevances, confiscations et amendes, qui dépassent un million sterling? Ceux qui ne sont pas contents sont difficiles.
- Oui, murmura Gwynplaine pensif, c'est de l'enfer des pauvres qu'est fait le paradis des riches.




lundi 4 juillet 2016

Festival d'Avignon 2016 : Les spectacles Victor Hugo/Le challenge Victor Hugo


Victor Hugo est toujours, chaque année, un des grands auteurs du festival Off d'Avignon. Cette année les spectateurs pourront assister à sept spectacles qui lui sont consacrés.


Hugo : espace Saint Martial 10H10

Et si l'on pouvait aujourd'hui, le temps d'une émission, convoquer l'esprit de Victor Hugo, un esprit au fait de l'actualité, qui nous donnerait son avis éclairé sur notre époque ?


L'homme qui rit de Victor Hugo Présence Pasteur 12H30

Fin 17ème siècle, par une nuit d’hiver, le misanthrope Ursus recueille dans sa roulotte deux enfants abandonnés au froid et à la faim : une petite fille aux yeux gelés, et un garçon au visage horriblement défiguré par des trafiquants d’enfants : Gwynplaine. Il devient bientôt L'Homme qui rit, vedette incontestée des foires de la vieille Angleterre… jusqu’au jour où la Chambre des Lords le réclame !


Voyage dans une mémoire Chapelle du Verbe incarné à 13H15

Je vous invite à voyager en compagnie de ces "bâtisseurs de langage" que sont Glissant, Vigny, Césaire, Hugo, Chamoiseau, Rostand, Racine, Walcott et d'autres... Ils ont marqué ma vie depuis l’enfance, peuplé mon imaginaire et probablement déterminé ma vocation d’acteur.
Ils n’ont pas de frontières et sillonnent ce spectacle au gré de la musique des mots. 

 

Le dernier  Jour d'un condamné de Victor Hugo  Au magasin 17H

Un homme, qui a commis un crime, est condamné à mort et attend son exécution."L'oeuvre culte des abolitionnistes. Stéphane Dausse est magnifique dans le rôle de ce condamné à mort. Et le verbe de Hugo fait merveille."

FIGAROSCOPE, Jean-Luc Jeener Spectacle retenu dans la sélection du journal "le Monde" lors de sa création au Théâtre de l'Ile Saint-Louis à Paris.

 

 Mangeront-ils de Victor Hugo  Théâtre les Barriques 18H45

 Dans une forêt profonde, deux amants pourchassés par un roi jaloux ont trouvé asile dans un cloître où poussent des plantes vénéneuses. Non loin d'eux vivent deux proscrits: la sorcière Zineb, qui ne demande qu'à mourir en paix loin des hommes, et le voleur Aïrolo. Ce dernier, vagabond épris de liberté, touché par la pureté de l'amour des deux fugitifs, vient à leur secours, car depuis trois jours les tourtereaux rebelles ne mangent ni ne boivent.
Ils s’aiment, mais ils ont faim : mangeront-ils?

Une sorcière âgée de cent ans, un talisman qui protège de la mort, une forêt empoisonnée, tous les ingrédients sont réunis pour nous transporter dans une fable onirique servie par la puissance de l'écriture de Victor Hugo. 



Victor Hugo, mon amour Condition des Soies  19H30

La plus belle des histoires d'amour. Victor Hugo et Juliette Drouet se sont aimés pour la vie et ont échangé 23 653 lettres. D'après leurs écrits, une suite de scènes met en lumière les grands moments de leur vie intime, littéraire et politique.


Claude Gueux de Victor Hugo  Isle 80  21H15

L'histoire commence dans une prison. Claude Gueux, détenu modèle y est enfermé pour un vol mineur. Il y finira la tête tranchée pour le meurtre de son geôlier. Que s'est-il passé? Qu'est-il arrivé à cet homme intelligent et doux? Celui que les prisonniers les plus durs écoutent et respectent? Celui qui a volontairement choisi d'appliquer sa justice au prix consenti de sa propre vie?
C'est le lent glissement vers une personnalité nouvelle née du harcèlement d'un homme sur un autre qui va être raconté là. Davantage qu'un pamphlet contre la peine de mort, cette lente transformation née de l'enfermement est une exhortation à l'éducation du peuple plutôt qu'à sa répression qui habite ce texte de Victor Hugo écrit en 1834.



La Fin de Satan Victor Hugo : Fabrik'théâtre 22H05

Le thème du mal s’est posé à chaque époque et gagne en acuité à chaque pas de l’histoire.
Qu’est-ce que le mal ? Pourquoi le mal ? A-t-il un sens ? Victor Hugo développe une vison grandiose où le théâtre des démons intérieurs devient théâtre cosmique. Il ne place pas le Mal à côté du Bien, comme une chose qu’il faudrait tout simplement anéantir, non, il fait naître de ce détachement, de cette dérive face au Bien divin, la « possibilité » de l’expérience de la liberté. La liberté – conquête de l’homme- ne peut exister sans cette possibilité du Mal.
La Fin de Satan est une œuvre immense. Elle dépeint la chute de Satan dans l’abîme, la naissance de l’être Liberté, et la longue descente de celui-ci à la rencontre du Mal. 

 CHALLENGE VICTOR HUGO  LECTURE COMMUNE

Un beau programme! Je propose que nous reprenions le Challenge Victor Hugo au mois de Septembre avec quelques uns des titres de ce programme que nous n'avons pas encore lus ensemble :

 Le 20 Septembre : MANGERONT-ILS? Livre de poche  

 Miriam, Nathalie, Margotte, Claudialucia

Le 20 Octobre : LETTRES DE JULIETTE DROUET  Une bio de Henri Troyat :  Juliette Drouet  OU Juliette Drouet : Mon grand petit homme mille et une lettres d'amour (Gallimard) OU  tout autre livre de correspondance entre Drouet-Hugo  

Miriam, Margotte(?), claudialucia

Le  20 Novembre :  BIOGRAPHIE DE VICTOR HUGO  : Un été avec Hugo de Laura El Makki (Equateurs/ Parallèles) OU Victor Hugo de Sandrine Filipetti (livre de poche) Ou Olympio ou la vie de Victor Hugo de Maurois. Bref! une biographie de Hugo au choix.

Miriam , Nathalie,   Claudialucia

Eimelle (?)

 Rejoignez-nous dans le challenge Victor Hugo. Incrivez-vous dans les commentaires.  Si vous n'avez pas lu les autres titres du festival L'homme qui rit; Claude Gueux, Le dernier jour d'un condamné, La Fin de Satan, vous pouvez nous accompagner en choisissant ces titres.


jeudi 10 décembre 2015

Victor Hugo : Ruy Blas



Mon premier contact avec Ruy Blas a été, si mes souvenirs sont bons, dans le film de Vadim « Et dieu créa la femme ». On y entend Jean-Louis Trintignant ébloui par la beauté de BB dire : je suis un ver de terre amoureux d’une étoile »… Une phrase qui m’avait frappée comme plus tard, après lecture de la pièce, celui-ci : Bon appétit, messieurs, (...) serviteurs qui pillez la maison!, vers que j’ai asséné à  mes filles maintes fois (en manière de plaisanterie) quand elles se mettaient à table. 


Affiche du TNP : extrait

Il paraît que c’était difficile d’entendre quand elles geignaient pour un bobo sans conséquences : "Puis après comme moi, souffre et meurs sans parler » ou encore à d’autres moments « la raison du plus fort est toujours la meilleure » ou bien « mais la raison n’est pas ce qui règle l’amour » et aussi "Mais qu’allait-il  (qu'alliez-vous) faire dans cette galère? " ou "Il faut courir le mauvais et se rasseoir au bon" et  "Vérité en deçà des Pyrénées, erreur au-delà " puis cette phrase qu’elles ont fini par faire leur quand elles sont de mauvaise humeur: "Tout m’afflige et me nuit et conspire à me nuire". Tous ceux qui aiment les illustres auteurs de ces citations me pardonneront!
Mais j’arrête cette parenthèse sur les dangers ou les mérites (?) de la littérature sur l’éducation des enfants.. et je reviens à mon sujet Ruy Blas.

Affiche du TNP : extrait

L'intrigue

Gérard Philippe dans le rôle de Ruy Blas, mise en scène de Jean Vilar
Ruy Blas est un roturier amoureux de la reine d’Espagne, Dona Maria de Neubourg, qui s’ennuie à la cour entre une étiquette rigide et un mari, le roi d’Espagne Charles II, toujours absent. Don Salluste de Bazan, un grand d’Espagne, qui veut se venger de la reine, introduit Ruy Blas à la cour en le faisant passer pour son cousin Don César de Bazan. Ruy Blas gagne la confiance de la reine et est nommé premier ministre. Il va essayer de rétablir l’autorité royale en luttant contre des ministres corrompus. La reconnaissance de Dona Maria se transforme en estime puis en amour. Elle accorde un baiser à Ruy Blas. C’est alors que Don Salluste va mettre en oeuvre son plan pour perdre la jeune femme. Le retour du vrai Don César complique encore l’intrigue.

Un drame romantique

Danièle Darrieux dans le rôle de la reine, film de jean Cocteau (jean Marais est Ruy Blas)

La pièce obéit en tout point aux lois du drame romantique prônées par Victor Hugo. L'intrigue se déroule, contrairement à la tragédie classique, dans des lieux différents et dans des décors qui exaltent l’exotisme et la couleur locale. Ici l’Espagne, pays dont Victor Hugo est épris.

Nous y retrouvons le mélange des genres. Il n'y a pas la comédie d'un côté et la tragédie de l'autre mais au contraire elles "se rencontrent et l'étincelle qui en jaillit c'est le drame", écrit Victor Hugo dans la préface de la pièce.
Au sublime s’oppose le grotesque. Le drame de la passion amoureuse qui finit en tragédie car les personnages ne peuvent échapper à la fatalité qui les guette, alterne avec des scènes comiques assurées par des personnages comme Don César de Bazan. Au langage noble des uns répond la langue familière de l’autre. A la grandeur des caractères de Dona Maria et de Ruy Blas idéalisés par le dramaturge et à la noirceur tragique de Don Salluste,  correspond la trivialité de Don César.

La pièce est historique puisque l’action est située dans l’Espagne de la fin du XVII siècle montrant un royaume affaibli par une crise économique, par des révoltes intérieures, par la guerre contre la France et un pouvoir faible. La noblesse corrompue cherche à s’enrichir et à obtenir faveurs et dignités, le peuple misérable est en proie à la disette.
Ruy Blas (Ruy pour Rodrigo, prénom aristocratique et Blas pour Blaise d’origine populaire) est noble par le coeur et les sentiments mais roturier par naissance. C’est lui qui va prendre la défense du peuple et représenter l’honneur et la grandeur morale.
En 1838 quand la pièce paraît nous sommes à 8 ans de la révolution de 1830 qui a chassé Charles IX du trône pour y placer Louis-Philippe et à 10 ans de la révolution de 1848 qui l’en chassera. Les préoccupations de la pièce rejoignent donc l'actualité.



Lecture commune avec Nathalie   Laure  Moglug et Miriam



Victor Hugo : Vieille chanson du jeune temps

Auguste Renoir : Les amoureux

Vieille chanson du jeune temps

Je ne songeais pas à Rose ;
Rose au bois vint avec moi ;
Nous parlions de quelque chose,
Mais je ne sais plus de quoi.

J'étais froid comme les marbres ;
Je marchais à pas distraits ;
Je parlais des fleurs, des arbres
Son oeil semblait dire: " Après ? "

La rosée offrait ses perles,
Le taillis ses parasols ;
J'allais ; j'écoutais les merles,
Et Rose les rossignols.

Moi, seize ans, et l'air morose ;
Elle, vingt ; ses yeux brillaient.
Les rossignols chantaient Rose
Et les merles me sifflaient.

Rose, droite sur ses hanches,
Leva son beau bras tremblant
Pour prendre une mûre aux branches
Je ne vis pas son bras blanc.

Une eau courait, fraîche et creuse,
Sur les mousses de velours ;
Et la nature amoureuse
Dormait dans les grands bois sourds.

Rose défit sa chaussure,
Et mit, d'un air ingénu,
Son petit pied dans l'eau pure
Je ne vis pas son pied nu.

Je ne savais que lui dire ;
Je la suivais dans le bois,
La voyant parfois sourire
Et soupirer quelquefois.

Je ne vis qu'elle était belle
Qu'en sortant des grands bois sourds.
" Soit ; n'y pensons plus ! " dit-elle.
Depuis, j'y pense toujours.








mardi 10 novembre 2015

Victor Hugo : Notre-Dame de Paris



Notre-Dame de Paris paru en 1831 au moment où le Romantisme triomphait avec Hernani (en 1830) et où la figure de Victor Hugo comme chef de file de ce mouvement était à son apogée.

Une oeuvre romantique

Un roman historique

Le roi des fous : Quasimodo à Notre -Dame de Paris gravure de Louis Boulanger et W. Finden 1878
Le roi des fous : Quasimodo à Notre -Dame de Paris gravure de Louis Boulanger et W. Finden
Notre-Dame de Paris est un roman historique, genre très prisé par les romantiques français qui vouaient une grande admiration à Walter Scott qui en est l’initiateur. Victor Hugo avec son inépuisable érudition et ses capacités d’analyse et d’étude nous donne une vision fort crédible de cette cité médiévale, de ses moeurs et de ses coutumes, de ses monuments. Nous sommes plongés en plein moyen-âge dès le début du roman qui s’ouvre par une description du jour des rois et de la fête des fous dont la date coïncide, ce 6 Janvier 1482, dans la salle du palais de Justice de Paris. Nous assistons à la célébration d’un mystère, au sacre du roi des fous. L’écrivain a réuni, dans un souci d’exactitude et de précision, toutes sortes de  détails qui vont de la description des costumes portés par les hommes et les femmes, aux salaires des ouvriers, au prix des marchandises, aux pratiques religieuses, à la justice sommaire et ses gibets… Mais s’il lui arrive de prendre des libertés avec l’histoire comme il l’a fait avec le personnage de Louis XI, c’est parce que le romanesque a tous les droits, affirme-t-il.

Le goût  du moyen-âge

Paris médiéval : Pont-aux-Meuniers de Theodor Hoffbauer  Musée Carnavalet Paris
Paris médiéval : Pont-aux-Meuniers de Theodor Hoffbauer

Le roman témoigne du goût romantique pour le Moyen-âge qui jusqu’au XIX siècle, en effet,  était considéré avec mépris, comme une époque obscurantiste et arriérée et l’on n’hésitait pas à en faire disparaître les traces. Ce sont les romantiques qui, en remettant le moyen-âge à la mode et en en célébrant les beautés  de l’architecture romane et gothique ont permis de lutter contre les iconoclastes qui abattaient ces splendides monuments. Ici, Victor Hugo prend la défense de la cathédrale Notre-Dame et s’oppose aux "démolisseurs", à tous ceux qui ne savent pas voir la beauté du passé, comme l’a fait Prosper Mérimée à Avignon contre les imbéciles qui voulaient démolir les remparts.
On peut dire donc que Paris et la cathédrale sont les personnages à part entière du roman et y jouent un rôle essentiel. Hugo dresse le portrait de la cité médiévale que l’écrivain met en opposition à la ville moderne défigurée par la main de l’homme, responsable de l'enlaidissement de la capitale.

Le goût du fantastique

 Notre-Dame de Paris de Victor Hugo  : Illustration de Luc-Olivier Merson 1881
Illustration de Luc-Olivier Merson pour Notre-Dame de Paris

Le personnage de l’archidiacre Claude Frollo, alchimiste, prêtre dévoyé, possédé par une passion amoureuse qui le pousse au mal et fait de lui un damné semble sortir d’un roman gothique anglais tel Le moine de Mattew G. Lewis.
Quasimodo est le type même du héros romantique que sa monstruosité et ses infirmités isolent comme le Gwinplaine de L’homme qui rit.. Il est un paria repoussé par la société. Ses dons extraordinaires, l’acuité visuelle de son seul oeil et  sa force herculéenne qui le rend capable de lutter à lui seul contre le soulèvement des gueux, en font aussi un héros fantastique. Il vit dans l’ombre de sa cathédrale et semble être né de la pierre, tellement semblable aux gargouilles de Notre-Dame qu’il semble en être une incarnation vivante.
La cour des Miracles fait aussi partie de cette ambiance gothique avec ses faux mendiants, ses ivrognes, ses truands sanguinaires qui se donnent un roi et des lois, ses mariages «  à la cruche cassée », ses «  égyptiens » ou bohémiens dont la moins pittoresque n’est pas Esméralda et sa petite chèvre aux cornes et aux sabots d’or.

La fatalité

Victor Hugo : Vianden à travers une toile d’araignée, 1871, dessin,  Maison de Victor Hugo Paris
Dessin de Victor Hugo : l'araignée

La plupart des personnages de Victor Hugo sont marqués par la fatalité. De même que Hernani, le héros maudit par excellence, la jeune Esméralda ne peut échapper à son destin et Quasimodo la suivra dans la mort.  La fatalité, aux yeux de l’archidiacre, est symbolisée par l’araignée qui se nourrit de sa proie dans la toile qui orne sa chambre. Claude Frollo joue le rôle de l’araignée et sa passion destructrice et violente ne laisse aucune chance à Esméralda. Dès le début, nous savons qu’elle est maudite par la recluse enfermée sur la place de grève et c'est Quasimodo qui l'aime qui la livrera à Frollo donc à son destin..

A l'ébranlement de la toile, l'énorme araignée fit un mouvement brusque hors de sa cellule centrale, puis d'un bond elle se précipita sur la mouche, qu'elle plia en deux avec ses antennes de devant, tandis que sa trompe hideuse, lui fouillait la tête. -Pauvre mouche! dit le procureur du roi en cour d'Eglise, et il leva la main pour la sauver. L'archidiacre, comme réveillé en sursaut, lui retint le bras avec une violence convulsive.
-Maître Jacques, cria-t-il, laissez faire la fatalité
Le procureur se retourna effaré. Il lui semblait qu'une pince de fer lui avait pris le bras. L'oeil du prêtre était fixe, hagard, flamboyant, et restait attaché au petit groupe horrible de la mouche et de l'araignée.

Les thèmes chers à Victor Hugo

Les idées sociales et politiques


Le roman développe déjà nombre des idées de Victor Hugo qu’il défendra toute sa vie.

Ainsi il dénonce un justice qui est impitoyable pour les pauvres et n’a aucune équité. Dans une scène caricaturale entre le juge sourd, Florain Barbedienne, qui interroge Quasimodo, sourd, lui aussi, Hugo montre que le verdict ne dépend pas des réponses de l’accusé bien en peine de répondre puisqu’il n’entend pas les questions mais de ce que le juge croit entendre. Un situation aussi absurde que grotesque et qui pourrait faire rire si le sort du pauvre bossu et de tous les misérables accusés n’en dépendait pas. Dans cette scène lamentable, l’ironie acerbe de Victor Hugo signifie que la Justice est sourde - on dit parfois qu’elle est aveugle- de même que Louis XI l’est aussi devant les supplications de son prisonnier enfermé dans une cage.
Quant à la noblesse et la grande bourgeoisie, elles, cherchent surtout à maintenir leurs avantages, à obtenir des charges pour s’enrichir et à accabler le peuple d’impôts.
A côté de la justice, Victor Hugo dénonce aussi la torture et la peine de mort. On voit comment Esméralda avoue tous les crimes qu’elle n’a pas commis par crainte de la douleur. Et comment, innocente, elle est sacrifiée à une justice qui n’est qu’un simulacre. Quand Hugo décrit « le formidable gibet » de Montfaucon , il évoque les innocents qui y ont péri et tous les « malheureux » qui ont été exécutés là ou dans les autres gibets de Paris.

Or Bardienne était sourd. Léger défaut pour un auditeur. Maître Florian n'en jugeait pas moins sans appel et très congrûment. Il est certain qu'il faut qu'un juge ait l'air d'écouter...
Oh!  Bardienne, le butor le voilà à table! Il mange du plaideur, il mange du procès, il mange, il mâche, il se gave, il s'emplit. Amendes, épaves, taxes, frais, loyaux coûts, salaires, dommages et intérêts, géhenne, prison et geôle et ceps avec dépens, lui sont camichons de Noël et massepains de la Saint-Jean!

La Belle et la Bête
Notre-Dame de Paris de Victor Hugo : Quasimodo arrache Esmeralda au gibet.
Esmeralda et Quasimodo : La belle et la bête

La laideur de Quasimodo et la beauté physique du capitaine Phoebus permettent  à Victor Hugo d’introduire un thème qui lui est cher celui de la beauté et la laideur intérieure. Alors que Dea, aveugle, parvenait à voir « la beauté « de Gwinplaine défiguré dans L’homme qui rit, Esméralda, elle, ne voit pas la laideur intérieure du beau capitaine Phoebus, elle ne peut supporter non plus la vue du hideux visage de Quasimodo. Esméralda qui « voit » est aveugle, Dea l’aveugle, elle, ne l’est pas.  Quant au face à face de Quasimodo et d’Esmeralda dans la cathédrale, les simlitudes avec le conte La Belle et la bête sont évidents.

Mon avis

Notre-Dame de Paris de Victor Hugo Gustave Doré : la cour des miracles
Gustave Doré : la cour des miracles

Mon avis sur Notre-Dame de Paris? J’avoue que je l’aime un peu moins que les autres romans de Hugo. Il  n’a pas l’aspect visionnaire et le style brillant de L’Homme qui rit, ni le style épique et la puissance de Les travailleurs de la mer.  Dans l’ensemble le texte est moins flamboyant et je l’ai trouvé par moments presque trop « sage »... heureusement pas toujours!
  D'autre part le prêtre maudit qui semble sortir du gothique anglais est parfois un peu trop attendu et  Gringoire me paraît peu crédible ou en tout cas étrange! Drôle de personnage, en effet, que ce personnage qui représente le philosophe et le poète épris de liberté, amoureux de l'art, mais qui, mis devant le choix de sauver Esmeralda ou sa chèvre, choisit la chèvre!
De plus, les passages qui ont été ajoutés à l'édition définitive de 1832, m'ont ennuyée, en particulier lorsqu’ils développent la théorie selon laquelle l'architecture est un art en décadence et va à sa mort. Hugo s’y montre trop démonstratif et doctoral et pas assez poète à mon goût.
Cependant l’histoire est riche et prenante. Certaines scènes sont d’une grande puissance telles la description de la cour des Miracles ou l’assaut de la cathédrale par les gueux ou la mort tragique et simultanée de la jeune bohémienne et de Frollo. Elles sont dignes de figurer dans les grands textes de Victor Hugo comme la scène du canon dans Quatre-vingt-treize, celle de la mort de Gavroche sur les barricades dans Les misérables ou celles de la tempête et de la pieuvre dans les travailleurs de la mer.

Ce livre est une lecture commune avec Laure, Miriam ICI  et Nathalie ICI.