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dimanche 19 février 2017

Venise au temps du Carnaval (1) : la place San Marco

Dimanche 19 février : notre premier jour de Carnaval

Le masque de la journée


Derrière ce masque, Léonie


Dimanche 19 février 2017  : Quelle drôle de journée ! Nous étions partis très tôt de notre logement pour gagner la place San Marco où se déroulaient le défilé du plus beau costume et le saut de l'Ange. Il est vrai que nous avons d'abord musé en chemin mais bien vite nous avons été pris dans une foule compacte. Impossible d'avancer si ce n'est au pas à pas et ce piétinement inconfortable nous a paru bien long si bien que lorsque nous sommes arrivés à la place, l'Ange avait déjà exécuté son saut prodigieux du haut du campanile depuis longtemps ! Quant au défilé, il se faisait entre deux barrières et, personnellement, du haut de mon mètre soixante, je n'ai absolument rien vu ! Si je peux vous en donner un aperçu c'est grâce à ma petite fille qui, juchée sur les épaules de son papa, est parvenue à prendre quelques photos. Ceci vous donnera une idée de cette foule composée non seulement de touristes du monde entier mais d'italiens venus, en particulier de toute la province de La Vénétie, et qui arrivaient en masse par le train depuis ce matin.









Ne rien voir ! Quelle déception ! Heureusement, toute la journée, ces personnages costumés se sont volontiers laissés photographier et admirer !





























Et puis il y  a Venise la Belle sous le soleil, la promenade un peu loin de la foule sur les quais, dans le quartier du Castello et enfin le retour en vaporetto sur le grand canal. 







samedi 18 février 2017

Pause voyage : Venise et son carnaval

Carnaval de Venise (Source)

Et voilà, je suis là !  A bientôt !

Dezső Kosztolányi poète hongrois

Venise

Venise, cloches du midi

Les feux vieillissants de ma vie.
À présent c’est midi.
Ô feu ! Ô silence du vent ! Ô trêve !

Il n’y a plus de travail, mais les champs sont féconds,
les fleurs poussent,
le silence est si sage et infini.

J’accoste sur les rives du feu,
et le silence et midi
se lancent un ballon d’or…



 

mercredi 15 février 2017

Meg Wolitzer : La doublure



Meg Woltizer la doublure : Résumé quatrième de couverture

Joan, 64 ans, est confortablement installée dans la première classe d'un avion. Elle voyage vers Helsinki où son mari, un écrivain très célèbre, unanimement considéré comme un génie, doit recevoir une prestigieuse récompense pour l'ensemble de son oeuvre. Tout va donc pour le mieux dans ce couple respecté de tous. Et pourtant... dans cet avion, à ce moment précis, Joan vient de décider de quitter son mari. Elle repense à leur rencontre dans le New York du début des années 1960, dans le quartier de Greenwich village. Puis leur marche commune vers le succès. Surtout, elle revient sur le secret qui cimente leur relation depuis de longues années. Si elle décide de partir, tous les deux y perdront beaucoup. Toute leur vie. Comme dans Les Intéressants, Meg Wolitzer déploie, dans ce roman, son art de l'analyse psychologique et du flasback . La doublure porte un regard lucide sur le couple, sur le succès et sur toute une génération issue des années 60.

C’est Kathel qui m’a donné envie de lire ce livre et pour une fois je l’ai trouvé en bibliothèque !  Les miracles existent ! Je dois que dire que j’ai été subjuguée par cette écriture, tellement que je n’ai pu lâcher le livre et que je l’ai lu en une nuit.

Le thème principal parle de l’effacement d’une femme pourtant  très douée  devant  son mari, un grand écrivain couronné par plusieurs prix littéraires dont celui très convoité de Finlande. Joan est de celle qui sacrifie ses dons, abandonne ses études et une possible carrière pour se consacrer à Son Grand Homme. Il faut dire qu’elle est toute jeune quand elle l’épouse et qu’en plus il est son premier amant et son professeur de lettres donc il bénéficie d’une autorité sexuelle, spirituelle et d’une aura incontestable tout au moins au début du mariage. Il faut ajouter encore pour mieux comprendre son sacrifice que dans les années 1950-60, il est très difficile pour une femme de réussir comme écrivain. Même talentueuses, les femmes-écrivains sont souvent étouffées par leurs homologues masculins dans ce milieu de l’édition extrêmement misogyne, à moins de posséder un tempérament de fonceuse et de ne pas s’en laisser imposer !  Or, Joan est timide et a des doutes sur ce que doit être une femme-écrivain ou tout simplement une femme.  Elle aussi participe aux poncifs véhiculés à son époque sur le statut féminin.

« Je ne voulais pas devenir « femme-écrivain », peintre du monde dans des couleurs d’aquarelle, ou à l’inverse une dingue, une casse-couille, une raseuse épuisante. »

Sur ce, vous risquez de me dire que le sujet n’est pas très original, qu’on a lu cent livres sur ce thème féministe et… Oui, mais, si ce n’est pas original, c’est d’abord parce que c’est fréquent dans ces années-là et pas seulement... parce que la femme même a notre époque n’est pas encore l’égale de l’homme et trop souvent a tendance à s’effacer ! Le sujet n'est donc pas caduc.  Et puis, il y a l’écriture de Meg Wolitzer et celle-ci est tellement pugnace, caustique, qu’elle vous tient en éveil. Un style sans concession et plutôt coup de poing qui détaille avec une ironie parfois féroce et lucide le lent délitement d’une vie de couple, ses fatigues, son usure, quand il est fondé sur l'inégalité.
Ainsi quand sa fille lui demande pourquoi elle ne divorce pas puisqu’elle se sent si malheureuse :

« Elle ne savait rien de cette sous-culture des femmes qui restaient, des femmes incapables d’expliquer leur allégeance par des voies logiques, qui tenaient bon parce que c’était ce qui leur paraissait  le plus confortable..  Elle ne comprenait pas le luxe  du familier, du connu : le même dos saillant sous les couvertures, et la même touffe de poils dans la même oreille. L’époux. Une figure qui ne vous inspirait aucun élan, qui ne vous mettait jamais dans tous vos états, mais simplement vous viviez à côté de lui… »

De plus, le récit se déroule dans un milieu d’écrivains, autre centre d'intérêt, et s’y ajoutent les interrogations sur le métier d’écrivain, sur les différences entre l’écriture féminine et masculine.. s’il y en a une.
La construction du roman est habile et pendant le voyage qui l’amène en Finlande la pensée de Joan oscille entre le présent et différentes strates de son passé, qui fait apparaître sa vie familiale avec Joé et ses trois enfants. Peu à peu la psychologie des personnages se révèle, s’affirme et là aussi Meg Wolitzer sait dévoiler les sentiments ambivalents, complexes, entretenus par ce couple dans lequel la femme a toujours tenue le rôle de doublure… jusqu’à ce que la coupe soit pleine. Du moins pour Joan.
Un petit bémol, la fin du récit  ainsi que le "secret" sont trop attendus mais ce n'est pas ce qui est le plus important. Cela ne m’a pas empêchée de beaucoup aimer ce livre si convaincant et d’avoir envie de découvrir d’autres oeuvres de Meg Wolitzer.

Lire aussi :


lundi 13 février 2017

Molière : Le Misanthrope mise en scène de Clément Hervieu-Léger à la Comédie française

Le misanthrope de Molière à la Comédie française  mise en scène de Clément  Hervieu-Léger : Oronte, Célimène, Alceste
Le Misanthrope mise en scène de Clément  Hervieu-Léger : Oronte, Célimène, Alceste
J’ai eu la chance d’assister à la représentation de la pièce de Molière Le Misanthrope à la Comédie française, mise en scène par Clément Hervieu-Léger retransmise au cinéma à Avignon et dans 300 salles de cinéma le 9 Février. Quel bonheur de pouvoir assister à distance à une mise en scène que j’étais curieuse de découvrir à force d’en entendre parler !

L’actualité du Misanthrope

Célimène et Alceste
Disons tout de suite - parce que c’est un détail de la mise en scène- que le metteur en scène Clément Hervieu-Léger a transposé l'action dans notre monde contemporain, ce qui se justifie aisément par l’universalité des propos de Molière.
Et oui, Le Misanthrope est si actuel, si vrai, que je pensais en voyant la pièce, à ces hommes politiques qui font campagne actuellement et à ces classes sociales mondaines qui détiennent l'argent et le pouvoir et qui ont peu changé depuis le XVII siècle : un milieu où celui qui est le plus méchant est considéré comme celui qui a le plus d’esprit et l’emporte sur l’autre. Autrement dit, l’art de dire des vacheries et d’être le plus rosse porté à sa quintessence. Les rumeurs, les moqueries, les médisances ne cessent de circuler et ressortent au bon moment pour blesser celui qui en est la victime. J'ai noté, à ce propos, une trouvaille de mise en scène qui en dit long sur cette société. Les petits marquis reprennent à la fin de l'acte II la chanson traditionnelle qu’Alceste a citée comme le modèle du bon goût dans la scène 2 de l'acte I : " Si Henri m’avait donné Paris sa grand ville/ je dirai au roi Henri… ». On apprend ainsi que les commérages se propagent derrière son dos et qu' Alceste est la cible des moqueries de tous.
On peut y ajouter l’hypocrisie, toutes ces protestations d’amitié et de respect pour mieux poignarder l'adversaire quand il a le dos tourné ! Car c’est bien cela que Molière dénonce, entre autres dans sa pièce, à travers Célimène, Arsinoé et les petits Marquis. Et il s'en prend aussi à la justice qui  jugera en fonction des appuis, des amitiés politiques, des avocats dont vous bénéficiez. C’est ce qui arrive à Alceste qui a le bon droit pour lui mais perd son procès parce qu’il n’a pas voulu jouer ce jeu malhonnête .

Alceste un personnage tragique

Le Misanthrope Alceste et Oronte
Le Misanthrope Alceste et Oronte
Quand j’étais lycéenne, j’adorais Alceste, sa révolte, son dégoût de cette société corrompue et mensongère. Je trouvais qu’il y avait un certain panache et une réelle grandeur dans ce personnage. Quant à son amour, je le voyais comme une passion romantique et fatale.
 Ce n’est pas ainsi que nous le montre Clément Hervieu-Léger. Il a choisi de mettre en valeur le côté noir de la pièce et d’en souligner  le pessimisme. En effet, Alceste est un personnage tragique et s’il fait rire autour de lui, sa souffrance est exacerbée. Sa haine du genre humain est telle que l’on ne peut plus (c’est du moins ce que j’ai ressenti) avoir de l’empathie pour lui du moins dans cette mise en scène. On le voit s’enfoncer dans la dépression, la déraison et même la folie. Hors de lui, c'est le terme qu'il faudrait employer lors de cette scène très bien interprétée par Loïc Corbery  où Alceste se jette sur Célimène, la brutalise et semble prêt à la prendre de force avant de revenir à la conscience. Le personnage y perd de sa grandeur, il devient objet de rejet, presque de répulsion. Il est même inquiétant et fait le vide autour de lui. La misanthropie est ici traitée comme une maladie grave. Mais l’amour aussi est une maladie quand elle est vécue comme le vit Alceste. Rien de romantique ici, c’est une souffrance entièrement négative, qu’Alceste vit à son corps défendant et qui ajoute à son angoisse. Je n’avais jamais vu interpréter cette pièce avec une telle noirceur et j’ai trouvé ce point de vue passionnant. 

Philinte, un personnage qui n’a pas sa place

Dans Alceste à bicyclette
Pourtant ce qui m’a un peu gênée, c’est qu’en accordant une telle importance à Alceste, le metteur en scène laisse moins de place à son ami Philinte qui par contraste paraît effacé. Non qu’il soit mal interprété. Au contraire, j’ai aimé la sobriété de Eric Génovese mais Alceste présente une telle démesure dans son interprétation qu’il exclut l’équilibre et la tempérance. Or, c’est ce qu’incarne Philinte qui est le type de « l’honnête homme ». On se souvient qu’il représente le juste milieu, la modération, la sagesse. Il est aussi important pour Molière qu'Alceste. Or, le juste milieu n’a pas l’air d’avoir vraiment intéressé C. Hervieu-Léger. On pourrait dire la même chose de la « sage » Eliante (Jennifer Decker). A mon avis, la mise en scène en fait un peu trop une pâle copie de Célimène en particulier dans la scène des portraits, où on la fait jouer d’une manière coquette, petite fille, primesautière. Pourtant elle est le pendant de Philinte et non de Célimène.

Célimène, encore mystérieuse

Cécile Sorel dans le rôle de Célimène
Il me reste encore bien des interrogations sur ce personnage. Célimène reste pour moi un mystère. Le plus souvent, elle est considérée comme une coquette voire une allumeuse. Je me souviens l’avoir vue à Marseille dans une mise en scène où elle était la tenancière d’une maison close ! Oui, je sais, c’était vraiment exagéré ! Intelligente, observatrice, spirituelle, elle est certainement une grande dame à l’égal de ceux qu’elle fréquente et qu’elle mystifie. Mais est-elle vraiment leur égale ? Si un Oronte ou un Alceste, la grande bourgeoisie, veulent l’épouser, en est-il de même des petits marquis,  noblesse de cour fière de ses titres, qui veulent peut-être tout simplement la mettre dans leur lit. A moins qu'elle ait une grande fortune ? Et pourquoi se conduit-elle ainsi ? Elle dit elle-même qu’elle ne le sait pas. Il est curieux de voir qu'elle n'a de parents pour veiller sur elle, personne pour lui dire qu'elle se conduit dangereusement dans une société qui n'attache d'importance qu'au paraître. J'ai lu dans une critique de presse que la robe noire portée par Célimène au début de la pièce pourrait être un signe de deuil. Le metteur en scène voudrait-il indiquer qu'elle a perdu ses parents ? C'est peut-être aller trop loin ?

Clément Hervieu-Léger en fait aussi un personnage tragique. Elle a l’air de souffrir de ses propres atermoiements, de ses errances, ce que la comédienne interprète parfaitement. On la sent douloureuse, hésitante, inquiète.  Ce qu’il y a de certain, c’est que dans le dénouement elle est mise au ban de cette société qu’elle aime tant et l’on se demande comment elle pourra vivre après le scandale qui l’éclabousse. Et là encore le jeu est d’une grande violence.

 Je n'ai pas aimé par contre son interprétation sans relief des portraits dans la scène 4 de l'acte II, trop entrecoupée de fous rires peu naturels et souvent perturbée par  les autres personnage qui se lèvent de table et se rassoient, boivent... En fait, ils étirent l'action, ajoutent des longueurs inutiles et détournent l’attention.  Le spectateur n'a pas le temps de "voir", de savourer cette galerie de personnages passés au crible de l'esprit et des talents redoutables de Célimène. Le repas dans ce hall désaffecté qui est tout sauf une salle à manger m'a de plus gênée. On se demande bien pourquoi elle les reçoit là.
D'ailleurs d'une façon générale, je n'ai pas aimé le décor. Je veux bien que ce soit le hall d’un hôtel particulier (celui de Célimène) pour respecter la règle de l’unité de lieu du théâtre classique; mais pourquoi en réfection, avec des meubles couverts de draps, un lustre par terre, des escaliers sans grâce? Du coup, le lieu paraît désaffecté, en désordre, mal éclairé, et accroît mes questions - sans toutefois y répondre-  sur le statut social et la fortune de Célimène.

La prude Arsinoé, une interprétation originale

Arsinoé : Florence Vial
La scène entre Arsinoé et Célimène où les deux comédiennes rivalisent d'agressivité sous des dehors de politesse cérémonieuse est excellente. Le duo est interprété avec brio et l'on a, ici, le temps de savourer l'esprit de répartie, l'acrimonie des deux "amies".
 Florence Vial incarne une Arsinoé surprenante pour moi qui ne l’avais jamais vue que ridicule : une coquette très âgée, usée, poudrée de blanc, prude et vertueuse parce qu’elle ne peut plus avoir de vie amoureuse. Dans cette mise en scène, elle n’est plus ridicule. Elle est interprétée par une femme encore jeune, élégante et qui a de la classe. Sa réaction quand Célimène se moque de son âge avancé (40 ans au XVII siècle!! ) ne manque pas d’une certaine dignité et l’on n’a pas envie de rire de sa colère et de sa blessure. Au contraire, l'on sent que c'est une femme qui a du répondant et qui peut être dangereuse. Elle a certainement des appuis puissants et est plus habile (et plus retorse) que Célimène pour l'emporter dans la société comme la  suite le prouvera.

Le spectacle filmé

Alceste et Arsinoé
J'ai trouvé que la pièce était bien filmée et que la caméra mettait en valeur les réactions des personnages au bon moment, avec beaucoup de pertinence. On voyait mieux les comédiens que si l'on était dans la salle grâce aux gros plans sur leur visage et l'on entendait bien.  Alors que j'ai lu des critiques qui se plaignaient du manque de clarté dans la diction des comédiens et du fait que l'on n'entendait pas toujours. 



 En résumé :
Passionnante, c’est le mot pour la mise en scène de cette grande pièce qui peut donner lieu à tant d’interprétations différentes. J'ai été ravie de pouvoir assister à une représentation de cette qualité.

samedi 11 février 2017

Lars Pettersson : La loi des Sames




Lars Pettersson est suédois. Au cours d’un reportage, en 1990, il découvre le pays des Sames (un peuple de Laponie) à Kautokeino en Norvège, dans le comté du Finnmark.  Il faut savoir que les  Lapons dont les Sames sont installés sur trois pays, la Finlande, la Suède et la Norvège, au-delà du cercle polaire, et que les rennes ne connaissent pas de frontières !

Dans La loi des Sames, Anna est procureur en Suède. D’origine sami, elle s’est éloignée de son peuple parce que sa mère a fui sa famille qui vit à Kautokeino pour s’installer à Stockholm. Elle a épousé un suédois si bien que Anna a été élevée en Suède. Pourtant lorsque sa famille, en raison de ses connaissances juridiques, l’appellent au secours de son cousin Nils, éleveur de rennes, accusé de viol, elle n’hésite pas.  Ce pays, elle ne le connaît que par quelques lointains souvenirs de vacances quand elle était enfant. Aussi l’on peut dire que c’est pour elle une découverte. Elle va être soumise non seulement aux rigueurs de l’hiver mais aussi aux problèmes de mentalité.

La loi des Sames est un roman policier. Anna va mener son enquête avec un policier local et va vite se demander si son cousin est aussi innocent que tous le prétendent. Mais elle comprend aussi que la survie de la famille est en jeu car Nils est le seul  à pouvoir maintenir le troupeau (le grand père est trop âgé). Elle prend conscience que sa mère en quittant Kautokeino a trahi sa famille et que sa culpabilité rejaillit sur elle, sa fille.
Anna va être aussi confrontée à des meurtres dont elle s’apercevra bien vite qu’ils ne sont pas étrangers aux vols de bêtes que les grands propriétaires-éleveurs font subir à ceux qui sont les plus faibles. Entre la loi norvégienne ou suédoise et la loi same, implicite, celle de la tradition, existe un hiatus que rien ne semble vouloir combler. Entre les deux, Anna va connaître bien des tiraillements et des problèmes de conscience. C’est un thème que j’ai trouvé très intéressant de même que la découverte du passé et du caractère de sa mère disparue depuis peu. Quant à l'héroïne, on peut dire qu'elle n'a pas froid aux yeux et qu'elle n'est pas une faible femme !
Mais ce que j’ai préféré, bien sûr, c’est la description de ce pays rude tout autant que son peuple, qui ne fait pas de cadeau et où le moindre accident de voiture ou de scooter des neiges peut se transformer en catastrophe  : routes enneigées,  lacs gelés et  cieux noirs parfois illuminés d’aurores boréales. Et puis, la découverte des coutumes, des traditions, des costumes sames dont les couleurs vives et gaies semblent vouloir lutter contre la maussaderie du climat, de la culture avec le Joik, ce chant sami si caractéristique et bien sûr tout ce qui concerne l’élevage des rennes pour tous les éleveurs qui ne se sont pas sédentarisés.

Pour moi, ce livre est d’autant plus intéressant que je vais partir en Norvège au mois de Mai dans le pays des Sames, à Alta et à Kautokeino, au moment de la transhumance des rennes. D’après les critiques, il paraît que les romans d’Olivier Truc sur le même sujet, sont plus réussis que celui-ci mais je ne peux pas comparer car je ne les ai pas encore lus.  Mais… cela ne va pas tarder !

jeudi 9 février 2017

Victor Hugo : Bon conseil aux amants

L'ogre (détail du Chat botté) de Gustave Doré


Bon conseil aux amants est un poème de Victor Hugo. Il montre que le poète n'était pas toujours sérieux au cas où vous en auriez douté !

Bon conseil aux amants

Un brave ogre des bois, natif de Moscovie
Était fort amoureux d'une fée et l'envie
Qu'il avait d'épouser cette dame s'accrut
Au point de rendre fou ce pauvre cœur tout brut

L'ogre, un beau jour d'hiver, peigne sa peau velue
Se présente au palais de la fée et salue
Et s'annonce à l'huissier comme prince Ogrousky
La fée avait un fils, on ne sait pas de qui

Elle était ce jour-là sortie et quant au mioche
Bel enfant blond nourri de crème et de brioche
Don fait par quelque Ulysse à cette Calypso
Il était sous la porte et jouait au cerceau

On laissa l'ogre et lui tout seuls dans l'antichambre
Comment passer le temps quand il neige en décembre
Et quand on n'a personne avec qui dire un mot ?
L'ogre se mit alors à croquer le marmot

C'est très simple, pourtant c'est aller un peu vite
Même lorsque on est ogre et qu'on est moscovite
Que de gober ainsi les mioches du prochain
Le bâillement d'un ogre est frère de la faim

Quand la dame rentra, plus d'enfant. On s'informe
La fée avise l'ogre avec sa bouche énorme
"As-tu vu, cria-t-elle, un bel enfant que j'ai ?"
Le bon ogre, naïf, lui dit : "Je l'ai mangé"

Or c'était maladroit. Vous qui cherchez à plaire
Ne mangez pas l'enfant dont vous aimez la mère.


Version de Julos Beaucarne, chanteur et poète belge, dont je n'ai pu trouver l'interprétation savoureuse sur you Tube.




mardi 7 février 2017

Claudie Gallay : Seule Venise

Zoran Music : Venise

Je suis allée à la médiathèque avec la liste de tous les titres que j’avais glanés dans vos blogs mais… Je n’en ai trouvé que deux. Seule Venise de Claude Gallay est un de ceux-là.



Ma première remarque concerne la minceur et le manque d’originalité de l’intrigue; je crois avoir lu cette histoire des dizaines de fois.

Un femme, la quarantaine,  est « plaquée », pour reprendre ses termes, par son amant : souffrance insupportable, tentative de suicide, anéantissement proche de la folie … Alors, l’héroïne craque, casse sa tirelire et part à Venise pour une durée indéterminée. Elle s’installe dans une pension et se lie d’amitié avec un vieux prince russe qui a fui la révolution (en effet, il doit être vieux !) et elle rencontre un libraire qui lui prête des livres et dont elle tombe amoureuse…. Je ne vous en dis pas plus.
Bon, d’abord, bonjour les poncifs, le prince russe à Venise, le libraire obligatoirement séduisant …  Aucun personnage n’a vraiment une épaisseur psychologique. Ce sont des figures que l’on peut désigner par leur titre ou leur métier, le prince, la danseuse, l’aubergiste etc.. mais ils n’existent pas, pas même elle, l'amoureuse désespérée, qui manque de vraisemblance : suicidaire mais prête à remplacer son grand amour une semaine après son arrivée à Venise ! Accompagnatrice dans des voyages en Italie, mais complètement ignare, elle semble n’avoir jamais rien lu. En dehors de cela, on sait peu de choses d’elle. 

Donc, Seule Venise se révèle à mes yeux un roman bien décevant et creux. Heureusement, il y a Venise, la  vieille cité que le texte nous invite à arpenter, des anecdotes, une foule de petits détails que nous saisissons au passage dans cette errance : la Fenice dont les vénitiens viennent récupérer les cendres après l’incendie,  la bora au souffle glacial, le pont de l’Académie, Le Rialto, les reflets gris de la lagune, le cimetière San Michele, Torcello, la Ca’ Dario et ses mosaïques… Et là, j’aime ces passages tout simples, poétiques, par petites touches, ces phrases sans grandiloquence, au présent de narration, qui nous font voir la ville, ses beautés et sa mélancolie. Beaucoup de charme se dégage de ces promenades ! Finalement pourquoi un prétexte romanesque? Venise se suffit à elle-même !

Zoran Music

La Calle delle Capucine, une ruelle tout près de la pension, une passe étroite qui s’enfonce entre deux hauts murs et permet de rejoindre les quais de Fondamenta Nuevo. La pierre y est rongée, grattée. Le vent s’engouffre là-dedans comme dans un couloir. Tout au bout, la masse grise de l’eau. Les murs de briques rouges. L’île San Michele, l’île des morts. Tous les morts de Venise. Là-bas. Ensevelis.
On dit que les murs du cimetière s’enfoncent. Qu’un jour, des pans entiers glisseront dans la lagune et qu’ils emporteront les cercueils avec eux. Ce jour-là, on ne saura plus qui est qui, et alors la mort reprendra ses droits.
On dit que ce jour-là n’est pas loin.

Zoran Music : Canale della Giudecca


Je retrouve à San Marco et je grimpe à la cime du campanile. En ascenseur.
Une rampe permet à un cheval de monter tout en haut de la tour.
C’est le gardien qui m’explique.
Aucun cheval n’est jamais monté mais la rampe existe. Et a été conçue pour ça.
Un chemin secret au-dedans de la tour.
Une petite chose inutile.
Précieuse.

 Un pensionnaire qui était ici avant vous m'a raconté qu'autrefois les vieux gondoliers remontaient la ville par les canaux, ils longeaient ensuite les murs du cimetière et ils ramaient vers le large. Le soir, on les attendait... L'emplacement de la gondole restait vide. 
(...)
Il y a tellement de façons pour mourir.

Zoran Music : Ponta della Doggana





lundi 6 février 2017

Benjamin Lacombe/ Sébastien Perez : Généalogie d'une sorcière

Généalogie d'une sorcière de Benjamin Lacombe et Sébastien Pérez : la petite sorcière et Grimoire de sorcières
Généalogie d'une sorcière de Benjamin Lacombe et Sébastien Pérez

Généalogie d’une sorcière de Benjamin Lacombe et Sébastien Perez se présente sous la forme d'un élégant coffret qui enchâssent deux albums : La petite sorcière et Grimoires de sorcières. Evidemment, tous deux s’adressent aux enfants, les veinards !
Ce qui n’a pas empêché ma fille de me l’offrir, à moi, sa mère :  elle me connaît bien ! Quel bonheur de feuilleter ces livres pour en admirer les illustrations de Benjamin Lacombe si étranges, mystérieuses et originales, aux couleurs vives, et qui parlent tant à l’imagination. Un régal pour les yeux.



La petite sorcière

La petite sorcière Lisbeth  dans Généalogie dune sorcière et sa grand mère Olga  Benjamin Lacombe/ Sébastien Pérez
Lisbeth et sa grand mère Olga de Benjamin Lacombe

Le premier livre La petite sorcière conte une jolie histoire dans laquelle le lecteur entre vite en empathie avec Lisbeth et sa grand mère Olga chez qui la petite fille va passer Noël. Dans le grenier, Lisbeth découvre, avec son ami Edward, un vieux grimoire que la vieille dame en colère lui interdit de lire. Dès le jour même, Edward disparaît. Alors, la nuit, pendant que Olga dort, la petite fille subtilise le vieux livre et elle découvre… ?  Vous le saurez en le lisant ! Non, non, n’insistez pas ! Je ne vous en dirai pas plus.

Très joli texte plein de tendresse, à la mesure des sentiments qui lient Lisbeth et sa grand mère et qui raconte un joli histoire d’amour où l’on risque sa vie pour cueillir une fleur à une petite fille.. et où il est question aussi et beaucoup de.. sorcières ! Mais cela vous vous en doutez !

C'est dur d'apprendre qu'on est une sorcière

Grimoire de sorcières


Pour pénétrer dans le second album il va vous falloir un peu de courage ! Peureux s’abstenir! Le Grimoire des sorcières est un livre maudit  : s’il est tombé par erreur entre vos mains, refermez-le immédiatement et fuyez.

Il s’agit de la généalogie de la petite Lisbeth depuis la création du monde avec Lilith qui fut remplacée par Eve mais qui n’en reste pas moins la première ! Et là, c’est un tour du monde auquel l'on est convié, du passé  au présent,  et l’on va de surprise en surprise. Je vous mets sur la voie en vous disant : Méfiez-vous de Mona, entre autres... parce que ces créatures sont tout de même quelque peu diaboliques ! 

Méduse de Benjamin Lacombe

Si le texte est plein d’humour au début, il fait pénétrer l’enfant dans la mythologie égyptienne ou grecque ou dans les contes traditionnels, il lui fait découvrir des personnages historiques, sans compter, bien sûr, des êtres fictifs. Nous y retrouvons Lisbeth qui a grandi et apprenons ainsi la suite de son histoire.

Lisbeth et Edward

 Là encore les illustrations sont somptueuses et font de cet ouvrage un petit chef d’oeuvre, un coup de coeur, un livre précieux à mettre entre les mains des enfants.
Je ne l’ai pas encore fait lire à ma petite fille (six ans) parce qu’elle serait bien capable d’avoir peur  pour de vrai et de faire des cauchemars  ! Les parents ne me le pardonneraient pas ! Mais cela viendra. Les éditions Seuil les conseillent pour les 9-12 ans. A mon avis, le premier album, La petite sorcière doit pouvoir être lu avant.


Lilith

samedi 4 février 2017

Elena Ferrante : L'amie prodigieuse 2 : Le nouveau nom



 Et voilà, j'ai lu le second volume de L’amie prodigieuse de Elena Ferrante :  Le nouveau nom, ce livre qui fait un tabac dans les blogs et que tout le monde commente ! Pour moi, il ne s’agit pas  d’un coup de coeur car je trouve qu'il y a parfois des longueurs et des redites mais j’apprécie beaucoup cette saga que je suis avec intérêt et plaisir parce qu’elle nous permet de pénétrer dans un quartier populaire de Naples dans les années 50 à 60 et j'y reconnais parfois des éléments de ma propre enfance toujours marquée par la guerre dans un Marseille pas encore reconstruit. Projection dans un passé et dans une ville italienne où règne la misère, la violence, la corruption. L’écrivaine fait revivre ces milieux souvent misérables, sans grand espoir d’avenir et le fait avec justesse, vérité et empathie. On sent qu’elle connaît bien ce milieu et je suis de plus en plus persuadée que le roman est autobiographique ou en partie.
Depuis que j’ai écrit ces mots, j’ai vu un  reportage aux infos sur la 2 où l’on parlait justement du mystère Ferrante pas vraiment résolu et de l’engouement autour de ce roman... Mais ce n'est pas pour cela que je lis ce roman, en fait peu m'importe qui est Elena pourvu que j'aime ce qu'elle écrit !

photographie  : Naples de Mario Cattaneo dans les années 1950
Naples de Mario Cattaneo dans les années 1950
Ce deuxième volet continue à explorer l’histoire de l'amitié complexe des deux jeunes femmes qui est le fil conducteur du récit. Elena Ferrante excelle dans la peinture de la psychologie de Lila et Lena. Elle explore avec perspicacité les sentiments avérés des deux amies mais aussi ceux qui se cachent sous l’apparence, ceux qui sont inavoués. La jalousie, l’envie, la rivalité, l’exaspération, la rancune,  les  faux-semblants, une amitié qui ressemble parfois à de la haine, une amitié avec de longues périodes d’absence, de désamour, mais pourtant qui ne peut mourir.

Il n’y a pas ellipse de temps dans ce second volume puisque l’on retrouve Lila tout de suite après son mariage. Elle a seize ans et elle découvre la réalité de la vie d’épouse. Elle est battue par son mari. Il pense ainsi la « redresser », c’est à dire éteindre en elle son besoin de liberté, corriger son anticonformisme et son caractère entier et fantasque. Mais il en faut plus pour réduire Lila à l’obéissance et à la soumission. La haine couve dans son coeur, la révolte aussi et si elle met sa belle intelligence sous éteignoir ce n’est jamais pour très longtemps.
Parallèlement, Elena poursuit ses études jusqu’à l’université. Elle s’intéresse à la politique peut-être plus pour captiver le garçon qu’elle aime que par réel intérêt. Son sentiment d’infériorité la pousse à un certain conformisme et à une soumission intellectuelle par rapport à ceux qu’elle admire. Mais peu à peu sa vision de la société s’affine. Le regard qu’elle porte sur son quartier n’est plus innocent. Elle voit en particulier ce qu’est  la condition des femmes, les brutalités qu’elles subissent de la part de leur mari mais aussi de la société. Mères épuisées, sans aucun droit, pauvres, elles perdent le goût de vivre et reproduisent le cycle de la violence auprès de leurs enfants. Elena découvre que non seulement ses études l’éloignent de ses anciens amis qui la considèrent comme une étrangère mais aussi qu’elle n’est pas acceptée par la classe sociale qui possède la culture. La bourgeoisie ne la reconnaît pas vraiment comme une de leurs et quand elle se fiance avec un jeune homme de bonne famille, elle comprend que si lui peut prétendre naturellement à un poste de professeur d’université, elle non, malgré de brillantes études !
Cet aspect du roman m’a énormément interpellée car je l’ai trouvé très vrai et pas seulement à cette époque et dans ce pays mais aussi en France et même actuellement;  ainsi si l’on est fils ou fille de « quelqu’un » on réussira toujours mieux et plus facilement que si l’on est de famille modeste. Rien ne change ! En ce sens le roman prend de l’envergure car il ne se limite pas à être seulement le récit des peines de coeur d’Elena et des déboires conjugaux de Lila (et des autres personnages). Il dénonce l’injustice sociale, la servitude des femmes, il peint des générations sacrifiées qui ne peuvent accéder au savoir, il montre que l’intelligence et le travail et l’assiduité ne sont pas à armes égales avec le pouvoir et la richesse. Il nous fait découvrir que la culture (la littérature en particulier) transforme un être mais qu’il y aura toujours une différence entre ceux pour qui c’est un dû, un phénomène naturel, et ceux qui doivent se battre pour l’acquérir.

Naples : mère 1950 nom du photographe?
Autre remarque : Certaines critiques disent que Elena Ferrante n’écrit pas bien (évidemment je ne peux juger que par la version française) et cela m’étonne car je ne sais pas ce que veut dire « mal écrire » dans ce cas précis. Quant à moi, je trouve le style efficace, direct, avec parfois une force réelle quand l’écrivaine décrit par exemple la nuit de noce de Lila, un dur apprentissage des rapports homme et femme ; ou lorsque Pinuccia mariée à Rino, le frère de Lila, découvre la gentillesse et la prévenance de Bruno Soccavo, fils d’un riche industriel et en tombe amoureuse, elle qui ne connaît des hommes que la brutalité, la vulgarité et l’épaisseur intellectuelle de son mari : tout est alors dans les non-dits;  ou encore quand  Lena « voit » pour la première fois les femmes de son quartier, comme si ses yeux se déshabituant de l’accoutumance, se dessillaient pour découvrir une triste réalité.

  Tout à coup, j’eus l’impression d’avoir vécu en limitant en quelque sorte mon regard, comme si j’étais capable de m’intéresser uniquement à nous autres jeunes filles ….
Ce jour-là en revanche je vis très clairement les mères du vieux quartier. Elles étaient nerveuses et résignées. Elles se taisaient, lèvres serrées et dos courbé, ou bien hurlaient de terribles insultes à leurs enfants qui les tourmentaient. Très maigres, joues creuses et yeux cernés, ou au contraire dotés de larges fessiers, de chevilles enflées et de lourdes poitrines, elles traînaient des sacs à commissions et enfants en bas âge, qui s’accrochaient à leurs jupes et voulaient être portés.


Vous avez dit Mal écrit ?

Voir :  Miriam ; Helène
Kathel

jeudi 2 février 2017

Maria Oruna : Le port secret



Je ne sais pourquoi  l’évocation de la guerre d’Espagne y compris dans un roman policier me touche tant … Ou plutôt je sais pourquoi  ! Le souvenir de mes grandes lectures « inolvidable »...  de Jorge Semprun à Javier Cercas, en passant par Manuel Rivas et Lydie Salvayre (Pas pleurer)  et plus récemment de Victor del Arbol (toutes les vagues de l’océan) ...

Alors voilà,  si j’ai choisi de lire Le port secret de Maria Oruna paru chez Actes Sud, c’est parce que l’enquête policière est mêlée étroitement au passé, à cette guerre d’Espagne qui ne cesse de retentir dans la mémoire vive des espagnols. Rien de plus traumatisant et d’ineffaçable qu’une guerre civile.

Olivier Gordon, britannique, espagnol par sa mère qui vient de mourir, va prendre possession de son héritage, sa maison familiale en Cantabrie. Mais les ouvriers qui en effectuent la restauration découvre le cadavre d’un bébé dont la mort remonte à la guerre civile. L’enquête de la police est mise en parallèle avec des fragments d’un journal qui nous raconte l’histoire d’une famille dont les membres sont décimés par les avions nationalistes au moment de la guerre civile. Deux personnages  émergent de ce récit, deux soeurs traumatisées par la mort de leur mère et de leur frère mais aussi par la misère qui oblige le père à séparer la fratrie restante et à "placer" ses enfants chez les riches. Amertume, rancoeur, désir d’échapper à cette condition par tous les moyens, à la dureté de la vie, vont engendrer bien des tragédies.

Pour moi, je le dis tout de suite, Maria Oruna, dont c’est le premier roman noir, n’a pas la puissance des écrivains cités ci-dessus; on est vraiment un cran en dessous quant à la profondeur, au style et à l’émotion qu’il procure. Mais récit se poursuit avec sa part de surprises, de rebondissements. Le passé et le présent se mêlent habilement. Certes, l'intrigue présente quelques invraisemblances, l'histoire d'amour est  un peu attendue, mais dans l’ensemble le polar se lit bien, et on peut se laisser emporter loin dans le passé mais aussi dans cette région d’Espagne qui a l’air si belle entre montagne et mer.