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jeudi 2 mai 2024

Le jeudi avec Marcel Proust : Du côté de chez Swann Deuxième partie : Un amour de Swann

Sandro Boticelli : Séphora, l'épouse de Moïse, fresque de la chapelle Sixtine

" Il regardait ; un fragment de la fresque apparaissait dans son visage et dans son corps, que dès lors il chercha toujours à y retrouver, soit qu’il fût auprès d’Odette, soit qu’il pensât seulement à elle, et bien qu’il ne tînt sans doute au chef-d’œuvre florentin que parce qu’il le retrouvait en elle, pourtant cette ressemblance lui conférait à elle aussi une beauté, la rendait plus précieuse. Swann se reprocha d’avoir méconnu le prix d’un être qui eût paru adorable au grand Sandro, et il se félicita que le plaisir qu’il avait à voir Odette trouvât une justification dans sa propre culture esthétique. Il se dit qu’en associant la pensée d’Odette à ses rêves de bonheur, il ne s’était pas résigné à un pis-aller aussi imparfait qu’il l’avait cru jusqu’ici, puisqu’elle contentait en lui ses goûts d’art les plus raffinés. "

 L'amour de Swann

 Toute la seconde partie de Du côté de chez Swann, un amour de Swann traite de l'amour de Swann pour Odette, une femme entretenue, réputée pour sa beauté, mais que Swann trouve laide et pour laquelle il n'éprouve aucune attirance. Son mauvais goût pour les femmes un peu vulgaires, précise Proust, est inversement opposé à son bon goût pour l’Art.  Or l'une de particularités de Swann est de retrouver dans "dans la peinture des maîtres non pas seulement les caractères généraux de la réalité qui nous entoure, mais ce qui semble au contraire le moins susceptible de généralité, les traits individuels des visages que nous connaissons."

  

Le doge Loredan: Antonio Rizzo

 

"... dans la matière d’un buste du doge Loredan par Antoine Rizzo, la saillie des pommettes, l’obliquité des sourcils, enfin la ressemblance criante de son cocher Rémi" 

 

Domenico Ghirlandaio: vieillard et jeune garçon


"sous les couleurs d’un Ghirlandajo, le nez de M. de Palancy "

 

Le Tintoret : Autoportrait

 "... dans un portrait de Tintoret, l’envahissement du gras de la joue par l’implantation des premiers poils des favoris, la cassure du nez, la pénétration du regard, la congestion des paupières du docteur du Boulbon."

On verra que Swann va encore plus loin, puisqu'il ne peut tomber amoureux d'Odette que parce qu'elle ressemble à une création de Boticelli ! La femme réelle ne l'attire que lorsqu'elle est magnifiée par l'oeuvre d'art. Aussi est-ce par l’art que Odette va s’introduire dans l’imagination de Swann et devenir objet de désir.

"Debout à côté de lui, laissant couler le long de ses joues ses cheveux qu’elle avait dénoués, fléchissant une jambe dans une attitude légèrement dansante pour pouvoir se pencher sans fatigue vers la gravure qu’elle regardait, en inclinant la tête, de ses grands yeux, si fatigués et maussades quand elle ne s’animait pas, elle frappa Swann par sa ressemblance avec cette figure de Zéphora, la fille de Jéthro, qu’on voit dans une fresque de la chapelle Sixtine. " 

L’amour n’est donc qu’une illusion, l’on ne voit dans l’être aimé(e) que ce que l’on a envie d’y voir, on ne l'aime que vu par le prisme de son imagination.

Déjà, dans du Côté de chez Swann, première partie Combray, Marcel Proust analyse l'amour du jeune Marcel pour Mademoiselle Swann, Gilberte, qu’il ne connaît pas mais qu’on lui a décrit comme jolie. Il projette dans l’image de la jeune fille tout le charme qu'il éprouve pour l’architecture gothique, les beautés du paysage normand et son amitié avec Bergotte un écrivain que vénère Marcel. C’est au point que la fillette acquiert toutes les qualités que le jeune garçon attribue à ce qui l'entoure . « c’était être tout prêt à l’aimer. Que nous croyions qu’un être participe à une vie inconnue où son amour nous ferait pénétrer, c’est, de tout ce qu’exige l’amour pour naître, ce à quoi il tient le plus, et qui lui fait faire bon marché du reste."
 
Plus tard, dans la troisième partie intitulée Des Noms, analysant son amour de jeunesse pour Gilberte, le narrateur vieillissant  dira : " Mais à l'époque où j'aimais Gilberte, je croyais encore que l'Amour existait réellement en dehors de nous".

  C’est ce que veut signifier Stendhal dans son Traité de l’Amour  :" Aux mines de Salzbourg, on jette dans les profondeurs abandonnées de la mine un rameau d'arbre effeuillé par l'hiver ; deux ou trois mois après, on le retire couvert de cristallisations brillantes : les plus petites branches, celles qui ne sont pas plus grosses que la taille d'une mésange, sont garnies d'une infinité de diamants mobiles et éblouissants ; on ne peut plus reconnaître le rameau primitif. Ce que j'appelle cristallisation, c'est l'opération de l'esprit, qui tire de tout ce qui se présente la découverte que l'objet aimé a de nouvelles perfections"

  C'est ce qui se passe pour Swann :

Il n’estima plus le visage d’Odette selon la plus ou moins bonne qualité de ses joues et d’après la douceur purement carnée qu’il supposait devoir leur trouver en les touchant avec ses lèvres si jamais il osait l’embrasser, mais comme un écheveau de lignes subtiles et belles que ses regards dévidèrent, poursuivant la courbe de leur enroulement, rejoignant la cadence de la nuque à l’effusion des cheveux et la flexion des paupières, comme en un portrait d’elle en lequel son type devenait intelligible et clair."

L'amour vécu comme une maladie

 

Laure Muray, un des modèles qui inspira Proust pour Odette

On pourrait penser que le transfert que Swann accomplit en faisant d’Odette une « oeuvre florentine » et en conférant à son image une impression de noblesse qui l’introduit dans un « monde de rêve », lui enlèverait sa lucidité et sa faculté de jugement. Or, il n’en est rien. Swann sait qu’Odette est sotte, inculte, superficielle, dès le début de son amour. Il comprend rapidement - même s’il est naïf au départ - qu’elle est vénale, intéressée, menteuse, cruelle, dépravée. Mais rien ne peut l’empêcher de l’aimer puisque cet amour n’est pas une réalité mais une projection qu’il fait sur elle. Tous ses amis sont consternés de le voir devenir la victime d'une telle femme. Swann est semblable à la reine des fées, Titiana, de Shakespeare dans le Songe d’une nuit d’été lorsque celle-ci tombe amoureuse d’un âne à la grande consternation de son entourage :
Titiana, à Bottom. — Viens, assieds-toi sur ce lit de fleurs ; pendant que je caresse tes charmantes joues ; je veux attacher des roses musquées sur ta tête douce et lisse, et baiser tes belles et longues oreilles, toi la joie de mon cœur.
 On peut l’avertir de son erreur il est incapable de changer.  Cet amour est fait d'illusions et aussi de jalousie et s'apparente à une maladie tenace qui lui enlève tout amour-propre.




jeudi 4 avril 2024

Le Jeudi avec Marcel Proust : Du côté de chez Swann, première partie Cambray : Marcel Proust et l'Art

Claude Monet Nymphéa


Je suis en train de lire du côté de chez Swann, le premier livre de A la Recherche du temps perdu dont nous devons faire une LC avec Miriam le 15 mai. Mais cette lecture me donne envie de venir de temps en temps, avant cette date, noter les impressions qu'éveille en moi la rencontre du texte dans une chronique que j'appellerai Le Jeudi avec Marcel Proust. Et d'abord, outre l'omniprésence de la nature, l'omniprésence de l'Art, sous toutes ses formes, qui imprègne l'oeuvre et devient une façon de voir, une manière d'appréhender la réalité et de la transformer. Marcel Proust n'est pas peintre mais il voit la nature comme un tableau et pas seulement la nature, mais les êtres et les choses aussi.

Ainsi, je note, quand il va se promener au bord de la Vivonne, du côté de Guermantes, combien cette description des Nymphéas est proche des tableaux de Monet. C'est une évidence tant il y a de points communs entre la vision du peintre et de l'écrivain. Dans son livre L'herbier de Marcel Proust, Dane Mc Dowell écrit :  
 
"Chasseur d'éphémère comme Monet, obsédé comme lui par le temps qu'il fait et le temps qui fuit, Proust évoque avec des mots la poésie et le mystère de la peinture impressionniste, autant que la sérénité et la joie qu'elle transmet ".  (Editions Flammarion)
 

L'impressionnisme : les Nymphéas de Monet

" Çà et là, à la surface, rougissait comme une fraise une fleur de nymphéa au cœur écarlate, blanc sur les bords. "

 

Claude Monet "une fleur de nymphéa au coeur écarlate"
 

" Plus loin, les fleurs plus nombreuses étaient plus pâles, moins lisses, plus grenues, plus plissées, et disposées par le hasard en enroulements si gracieux qu’on croyait voir flotter à la dérive, comme après l’effeuillement mélancolique d’une fête galante, des roses mousseuses en guirlandes dénouées."

 

Claude Monet : " des roses mousseuses en guirlandes dénouées"
 

" Ailleurs un coin semblait réservé aux espèces communes qui montraient le blanc et rose proprets de la julienne, lavés comme de la porcelaine avec un soin domestique, tandis qu’un peu plus loin, pressées les unes contre les autres en une véritable plate-bande flottante, on eût dit des pensées des jardins qui étaient venues poser comme des papillons leurs ailes bleuâtres et glacées sur l’obliquité transparente de ce parterre d’eau ; de ce parterre céleste aussi : car il donnait aux fleurs un sol d’une couleur plus précieuse, plus émouvante que la couleur des fleurs elles-mêmes ; et, soit que pendant l’après-midi il fît étinceler sous les nymphéas le kaléidoscope d’un bonheur attentif, silencieux et mobile, ou qu’il s’emplît vers le soir, comme quelque port lointain, du rose et de la rêverie du couchant, changeant sans cesse pour rester toujours en accord, autour des corolles de teintes plus fixes, avec ce qu’il y a de plus profond, de plus fugitif, de plus mystérieux — avec ce qu’il y a d’infini — dans l’heure, il semblait les avoir fait fleurir en plein ciel."

 

Monet : il semblait les avoir fait fleurir en plein ciel."



L'impressionnisme : les asperges : Manet

 Botte d'asperges Manet
 
 
 Mais Proust ne dédaigne pas les natures mortes et si la description des asperges fait penser à Manet, elle évoque aussi les peintres hollandais. Ah! ces asperges ! Elles jouent un grand rôle dans toute la première partie comme révélation du caractère de Françoise. Comme sujet de conversation avec Léonie aussi, qui de son lit, observe les passant et les voit passer avec "des asperges grosses comme le bras" , elles témoignent de la curiosité de la vieille dame mais aussi de sa vie étriquée, réduite à la fenêtre de sa chambre entrouverte sur le monde où elle ne va plus jamais.
 
"Mais mon ravissement était devant les asperges, trempées d'outre-mer et de rose et dont l'épi, finement pignoché de mauve et d'azur, se dégrade insensiblement jusqu'au pied – encore souillé pourtant du sol de leur plant – par des irisations qui ne sont pas de la terre. Il me semblait que ces nuances célestes trahissaient les délicieuses créatures qui s'étaient amusées à se métamorphoser en légumes et qui, à travers le déguisement de leur chair comestible et ferme, laissaient apercevoir en ces couleurs naissantes d'aurore, en ces ébauches d'arc-en-ciel, en cette extinction de soirs bleus, cette essence précieuse que je reconnaissais encore quand, toute la nuit qui suivait un dîner où j'en avais mangé, elles jouaient, dans leurs farces poétiques et grossières comme une féerie de Shakespeare, à changer mon pot de chambre en un vase de parfum.


Edouard Manet : l'asperge



La pauvre Charité de Giotto, comme l'appelait Swann, chargée par Françoise de les « plumer », les avait près d'elle dans une corbeille, son air était douloureux, comme si elle ressentait tous les malheurs de la terre ; et les légères couronnes d'azur qui ceignaient les asperges au-dessus de leurs tuniques de rose étaient finement dessinées, étoile par étoile, comme le sont dans la fresque les fleurs bandées autour du front ou piquées dans la corbeille de la Vertu de Padoue."
 
La Charité de Giotto ainsi nommée par Swann est la fille de cuisine qui assiste Françoise, la cuisinière, et qui est terriblement enceinte ! On apprendra plus tard que si Françoise a fait manger des asperges à ses maîtres presque tous les jours cet été-là, c'est parce que ces légumes donnaient des crises d'asthme à la pauvre Charité dont la cuisinière était jalouse, craignant que sa patronne tante Léonie ne la préfère à elle.
 

Le Trecento italien : La charité de Giotto

La charité de Giotto


"L’année où nous mangeâmes tant d’asperges, la fille de cuisine habituellement chargée de les « plumer » était une pauvre créature maladive, dans un état de grossesse déjà assez avancé quand nous arrivâmes à Pâques, et on s’étonnait même que Françoise lui laissât faire tant de courses et de besogne, car elle commençait à porter difficilement devant elle la mystérieuse corbeille, chaque jour plus remplie, dont on devinait sous ses amples sarraux la forme magnifique. Ceux-ci rappelaient les houppelandes qui revêtent certaines des figures symboliques de Giotto dont M. Swann m’avait donné des photographies. C’est lui-même qui nous l’avait fait remarquer et quand il nous demandait des nouvelles de la fille de cuisine, il nous disait : « Comment va la Charité de Giotto ? ». D’ailleurs elle-même, la pauvre fille, engraissée par sa grossesse, jusqu’à la figure, jusqu’aux joues qui tombaient droites et carrées, ressemblait en effet assez à ces vierges, fortes et hommasses, matrones plutôt, dans lesquelles les vertus sont personnifiées à l’Arena. Et je me rends compte maintenant que ces Vertus et ces Vices de Padoue lui ressemblaient encore d’une autre manière.
 
 
Giotto chapelle de Scrovegni : La prudence, la fermeté, la tempérance, la foi, la charité, lespérance

 
 De même que l’image de cette fille était accrue par le symbole ajouté qu’elle portait devant son ventre, sans avoir l’air d’en comprendre le sens, sans que rien dans son visage en traduisît la beauté et l’esprit, comme un simple et pesant fardeau, de même c’est sans paraître s'en douter que la puissante ménagère qui est représentée à l’Arena au-dessous du nom « Caritas » et dont la reproduction était accrochée au mur de ma salle d’études, à Combray, incarne cette vertu, c’est sans qu’aucune pensée de charité semble avoir jamais pu être exprimée par son visage énergique et vulgaire. Par une belle invention du peintre elle foule aux pieds les trésors de la terre, mais absolument comme si elle piétinait des raisins pour en extraire le jus ou plutôt comme elle aurait monté sur des sacs pour se hausser ; et elle tend à Dieu son cœur enflammé, disons mieux, elle le lui « passe », comme une cuisinière passe un tire-bouchon par le soupirail de son sous-sol à quelqu’un qui le lui demande à la fenêtre du rez-de-chaussée."
 
 
L'envie et la colère

 
L’Envie, elle, aurait eu davantage une certaine expression d’envie. Mais dans cette fresque-là encore, le symbole tient tant de place et est représenté comme si réel, le serpent qui siffle aux lèvres de l’Envie est si gros, il lui remplit si complètement sa bouche grande ouverte, que les muscles de sa figure sont distendus pour pouvoir le contenir, comme ceux d’un enfant qui gonfle un ballon avec son souffle, et que l’attention de l’Envie — et la nôtre du même coup — tout entière concentrée sur l’action de ses lèvres, n’a guère de temps à donner à d’envieuses pensées."

C'est dans l'église Arena, à Padoue  et dans la chapelle Scrovegni que l'on peut admirer les fresques de Giotto qui raconte la vie du Christ et les groupes de Sept vertus et sept vices. J'ai toujours eu envie de les voir et disons que Proust en  rajoute encore !
 


L'Arena et les fresques de Giotto Chapelle des Scrovegni




Giotto : Les vices: le désespoir, l'envie, l'idolâtrie, l'injustice, la colère, l'inconstance, la sottise


Giottodi Bondone ou Ambrogiotto di Bondone, dit Giotto, né en 1266 ou 1267 à Vespignano ou Romignano et mort le 8 janvier 1337 à Florence, est un peintre, sculpteur et architecte italien de la République florentine. Artiste majeur du Trecento, ses œuvres sont à l'origine du renouveau de la peinture occidentale.((Wikipédia) On peut voir de très belles fresques de lui à la basilique de Santa Croce et à la Basilique de Saint François d'Assise.


L'Architecture  médiévale : entre roman et gothique
 
 
L' église de Saint Loup de Naud


 

Tantôt, c’est une femme réelle, la servante qui perd son statut d'être humain et qui devient peinture, qui se transmue en  oeuvre d'Art  sous la puissance de l’imagination de l’enfant renforcée et comme authentifiée  par celle de l’adulte, monsieur Swann.

Tantôt ce sont les statues du porche de l’église de Saint André des Champs qui deviennent vivantes s’incarnant comme des figures familières qui peuplent les rues de Combray. Ainsi en est-il de Théodore, le garçon de chez Camus, mauvais sujet peut-être mais  qui, pour venir en aide à Tante Léonie alitée, prend  la mine naïve et zélée des petits anges des bas-reliefs, s’empressant, un cierge à la main, autour de la Vierge défaillante, comme si les visages de pierre sculptée, grisâtres et nus, ainsi que sont les bois en hiver, n’étaient qu’un ensommeillement, qu’une réserve, prête à refleurir dans la vie en innombrables visages populaires, révérends et futés comme celui de Théodore, enluminés de la rougeur d’une pomme mûre. Non plus appliquée à la pierre comme ces petits anges, mais détachée du porche, d’une stature plus qu’humaine, debout sur un socle comme sur un tabouret qui lui évitât de poser ses pieds sur le sol humide, une sainte avait les joues pleines, le sein ferme et qui gonflait la draperie comme une grappe mûre dans un sac de crin, le front étroit, le nez court et mutin, les prunelles enfoncées, l’air valide, insensible et courageux des paysannes de la contrée. 
 
 
Vierge gothique Calvados

 
Cette ressemblance, qui insinuait dans la statue une douceur que je n’y avais pas cherchée, était souvent certifiée par quelque fille des champs, venue comme nous se mettre à couvert, et dont la présence, pareille à celle de ces feuillages pariétaires qui ont poussé à côté des feuillages sculptés, semblait destinée à permettre, par une confrontation avec la nature, de juger de la vérité de l’œuvre d’art.
 
Comme le personnage de Swann, le jeune Marcel fait descendre les personnages des murs, des toiles ou des socles où les siècles les avait figés. La réalité ne lui apparaît vraie que confirmée par l'oeuvre d'Art ou inversement !





Cette église Saint André des Champs est citée dix-sept fois dans la Recherche. C'est l'ancien prieuré clunisien de Saint Martin des Champs à Paris, exemple parfait du passage du roman au gothique et symbole du peuple français, qui a servi de modèle à Proust pour la description de l'église de Saint André des champs. 
Mais celle-ci est aussi  composée de plusieurs références architecturales : La Cathédrale de Chartres, l’église de Saint-Loup-de-Naud (Seine-et-Marne, près de Provins).
 
 
Cathédrale de Chartres


Quant à l'église Saint-Hilaire son clocher et ses fameux vitraux, elle aussi est une construction à partir de  de monuments différents dont Proust lui-même a parfois oublié l'origine. Il écrit en 1918 : « Ma mémoire m'a prêté comme modèles beaucoup d'églises. Je ne saurais plus vous dire lesquelles. Je ne me rappelle même plus si le paysage vient de Saint-Pierre-sur-Dives ou de Lisieux. Certains vitraux sont certainement les uns d’Évreux, les autres de la Sainte-Chapelle et de Pont-Audemer »


Vitrail de la cathédrale d' Evreux


"Il y en avait un qui était un haut compartiment divisé en une centaine de petits vitraux rectangulaires où dominait le bleu, comme un grand jeu de cartes pareil à ceux qui devaient distraire le roi Charles VI ; mais soit qu’un rayon eût brillé, soit que mon regard en bougeant eût promené à travers la verrière tour à tour éteinte et rallumée un mouvant et précieux incendie, l’instant d’après elle avait pris l’éclat changeant d’une traîne de paon, puis elle tremblait et ondulait en une pluie flamboyante et fantastique qui dégouttait du haut de la voûte sombre et rocheuse, le long des parois humides, comme si c’était dans la nef de quelque grotte irisée de sinueux stalactites que je suivais mes parents, qui portaient leur paroissien ; un instant après les petits vitraux en losange avaient pris la transparence profonde, l’infrangible dureté de saphirs qui eussent été juxtaposés sur quelque immense pectoral, mais derrière lesquels on sentait, plus aimé que toutes ces richesses, un sourire momentané de soleil ; il était aussi reconnaissable dans le flot bleu et doux dont il baignait les pierreries que sur le pavé de la place ou la paille du marché ; et, même à nos premiers dimanches quand nous étions arrivés avant Pâques, il me consolait que la terre fût encore nue et noire, en faisant épanouir, comme en un printemps historique et qui datait des successeurs de saint Louis, ce tapis éblouissant et doré de myosotis en verre."

On le voit, ce que décrit Marcel Proust rappelle l'émerveillement ressenti par l'enfant quand il contemple les effets fantastiques du kaléidoscope. Le vocabulaire fait appel tour à tour aux champs lexicaux de l'incendie "éteinte et rallumée""mouvant et précieux", et surtout de la pluie dans une longue métaphore filée "ondulait""dégouttait" , "les parois humides" "le flot bleu et doux", "baignait" et où l'oxymore pluie flamboyante unit l'incendie à la pluie, le ruissellement de l'eau entraînant l'image de la grotte "irisée de sinueux stalactites". Mais l'enfant n'oublie pas qu'il est dans une église "la nef de quelque grotte". Puis intervient le champ lexical de la pierre précieuse : "l'infrangible dureté des saphirs" "les pierreries", la beauté de la nature prenant ensuite le relais de la beauté de l'art , "un sourire momentané du soleil" et  les myosotis de verre."
 
Comparaisons avec l'incendie, métaphores de la pluie, image de la grotte et de ses stalactites, de la pierre précieuse, des fleurs et du soleil. Le texte de Proust est en lui-même un éblouissement, une oeuvre d'art qui rend bien compte de la beauté des vitraux. !
 
 
 
Pont-Audemer : Eglise Saint-Ouen

 
XVIII siècle :   Le goût des  ruines


Clair de lune Hubert Robert


Dans chaque jardin le clair de lune, comme Hubert Robert, semait ses degrés rompus de marbre blanc, ses jets d’eau, ses grilles entr’ouvertes. Sa lumière avait détruit le bureau du télégraphe. Il n’en subsistait plus qu’une colonne à demi brisée, mais qui gardait la beauté d’une ruine immortelle. Je traînais la jambe, je tombais de sommeil, l’odeur des tilleuls qui embaumait m’apparaissait comme une récompense qu’on ne pouvait obtenir qu’au prix des plus grandes fatigues et qui n’en valait pas la peine. Des grilles fort éloignées les unes des autres, des chiens réveillés par nos pas solitaires faisaient alterner des aboiements comme il m’arrive encore quelquefois d’en entendre le soir, et entre lesquels dut venir (quand sur son emplacement on créa le jardin public de Combray) se réfugier le boulevard de la gare, car, où que je me trouve, dès qu’ils commencent à retentir et à se répondre, je l’aperçois, avec ses tilleuls et son trottoir éclairé par la lune.

Dans ce texte le point de vue artistique est délibérément choisi par l'écrivain, un peintre du XVIII siècle à une époque où le goût des ruines romaines ou médiévales prédominent dans l'art. Ici, le tableau du peintre vient se substituer à la réalité et parvient même à l'effacer : "le clair de lune semait ses degrés rompus de marbre blanc" pour faire apparaître "une colonne à demi brisée". C'est la lumière qui fait surgir la fantasmagorie comme le fait la lanterne magique dans sa chambre d'enfant à Combray, envoyant danser sur les murs et la poignée de la porte les ombres de Geneviève de Brabant et de Golo. 
On voit ici comment, plus tard, le son (les aboiements des chiens) et l'odeur (des tilleuls) associés à cette vision du peintre du XVIII siècle, ressuscitent le souvenir et rappellent l'image du passé enfoui dans la mémoire comme le fait le goût de la madeleine trempée dans du tilleul de Tante Léonie. Ainsi le temps n'est jamais retrouvé brut,  directement,  mais seulement  par l'intermédiaire de tous les  sens.
 
 Hubert Robert né le 22 mai 1733 à Paris et mort le 15 avril 1808 dans la même ville est un peintre français, dessinateur, graveur, professeur de dessin, créateur de jardins et conservateur au muséum central des arts de la République. Il est un des principaux artistes français du XVIIIᵉ siècle. (Wikipédia) Ses peintures de ruines en font un précurseur des romantiques.
 
 
Et comme l'on ne peut épuiser ce thème de l'art chez Proust, je m'arrête, sachant que ces passages sont presque tous  situés dans la première partie de Du côté de chez Swann intitulée Cambray et que j'en ai noté bien d'autres en avançant dans ma lecture.


Voir ce livre recommandé par Keisha sur l'Art dans l'ensemble de La Recherche du temps perdu.
 
Le musée imaginaire de Marcel Proust  Tous les tableaux de A la recherche du temps perdu  Eric Karpeles Editions Gallimard
keisha ICI 





jeudi 8 février 2024

Rita Indiana : Les tentacules


Les Tentacules, roman de de Rita Indiana, écrivaine  caribéenne (Saint Domingue) est qualifié d’Ovni dans le paysage littéraire et l’on comprend pourquoi. Elle y mêle trois époques :

 2027

l'Orisha Yemaya, la déesse mère, de M G Alemanno

Le roman Les Tentacules se déroule dans la République Dominicaine ravagée par la pollution, où l’air dépose une suie grasse sur les vitres et les poumons, où règne la canicule, les épidémies, la misère, où l’on tue les réfugiés climatiques et où toute forme de vie marine a disparu. La mer grise ou brunâtre ne reflète plus le ciel mais la mort de ses coraux, de ses poissons. En 2027, une anémone survivante est un trésor que les collectionneurs se disputent à coups de millions. Là, vit Alcide, une jeune fille qui souhaite changer de genre et qui se prostitue pour vivre puis devient la domestique d’Esther Escudero. Bien vite, l’on s’aperçoit qu'Esther n’est pas une vieille dame ordinaire mais qu’elle est Omicunlé, le manteau qui couvre la mer, prêtresse de la Santeria, une religion populaire du peuple Taïno, dans les Caraïbes (l’équivalent du Vaudou à Cuba) et qu’elle considère Alcide comme un Orisha, un être d'essence divine destiné à sauver la planète de la catastrophe écologique. Grâce au Rainbow Bright, Alcide devient un homme sans avoir à subir une intervention chirurgicale. Accusé injustement du meurtre de sa patronne, il s’enfuit.

 2000

Rita Indiana

 Linda, une riche héritière, très impliquée dans la lutte écologique et son mari Giorgio Menicucci, mécène d’art, conscient de l’enjeu écologique cherche à créer un sanctuaire pour la préservation des espèces marines. Pour trouver des financements, le  couple propose une résidence à Playa Bo dans la ville de  Sosua, à plusieurs  artistes dans le but de créer un évènement qui attirera les donateurs. Parmi eux, Argenis, un peintre raté qui a pourtant une technique parfaite mais dont l’inspiration n’est pas contemporaine. C’est un personnage de macho aigri que l’on pourrait haïr s’il ne faisait pitié. Autour d’eux, le critique d’art cubain Ivan, Elizabeth, plasticienne, vidéaste qui se tourne vers la musique en réalisant une performance de DJ (comme Rita Indiana elle-même). Au thème écologique, l’écrivaine mêle donc aussi une réflexion sur l’art. Enfin, avec le personnage du domingois Malagueta, elle décrit le racisme et l’infériorité sociale à travers le vécu et l’intériorité de cet artiste noir.

«  Négro », s’entendit-il dire en crachant la fumée par la bouche. Un petit mot grossi au fil du temps par d’autres significations, toutes odieuses. Chaque fois que quelqu’un le prononçait au sens de pauvre, sale, inférieur, criminel, le mot s’enflait, il devait être sur le point d’exploser, et quand finalement cela arriverait, sans doute ne signifierait-il plus qu’une simple couleur. Son corps était ce ballon de chair qui contenait le mot, mille fois gonflé par le regard malfaisant des autres, de ceux qui se croyaient blancs. »

1991 et XVII siècle

Le dictateur Joaquin Balaguer

 

Mais Argenis et Alcide (on verra plus tard son nom masculin que je ne divulgue pas volontairement mais n’oublions qu’il est considéré par Esther comme le sauveur ) se retrouvent, de plus, projetés dans des époques antérieures de leur vie en 1991 et au XVII siècle, sur un navire de flibustiers.

Un roman complexe

 

Olokun le dieu de la mer voir ici

Présenté ainsi car j’ai essayé de démêler les fils, ce roman a l’air sage, voire classique : une dystopie sur fond de désastre écologique avec des retours dans le passé. Il n’en est rien  !  Quand je parle de fil, c’est presque au sens propre car le récit semble composé d’écheveaux complètement emmêlés et remplis de noeuds si bien que le passé et le présent ne s’opposent pas, ne se confrontent pas mais coexistent ! Et cela se traduit au niveau de l’écriture par la description de deux réalités vécues non pas d’un chapitre à l’autre, ni même d’un paragraphe à l’autre mais parfois dans la même phrase.

Sur la plaine des flibustiers, les couleurs du soleil couchant étaient les mêmes qu’à Playa Bo, car pour Argenis deux soleils plongèrent en même temps derrière l’horizon. Vivre ces deux réalités était un peu comme faire un puzzle sur une table tout en regardant la télévision; celle-ci était son présent prévisible et inoffensif, le monde des flibustiers était le casse-tête sur lequel il devait se concentrer… »

D’autre part, il ne faut pas oublier que le Merveilleux intervient aussi dans le récit. Dans les années 1991, dans la propriété du Taïno Nenuco, soutien du dictateur Balaguer alors en place, dans le tunnel de la plus grande anémone, germe l’embryon de celui qui va devenir le sauveur.

Tout doucement Nenuco lui dit : « Nous t’attendions, tu es venu de loin pour nous sauver Etoile d’eau, maintenant je vais t’aider à te souvenir ».

Ainsi, non seulement les personnages peuvent vivre au même moment dans des époques différentes, mais ils ont le pouvoir de s’incarner dans les dieux de la Santeria, qui par syncrétisme peuvent correspondre aux saints de l’église catholique, comme Yémaya, la mère des eaux, associée à la Vierge de Régla, patronne des marins...

Tu sais maintenant que tu es l’omo Olokun: celui qui sait ce qu’il y a au fond de la mer. Sers-toi de tes pouvoirs dont tu commences à prendre conscience pour le bien de l’humanité. Sauve la mer, Maféréfun Olokun, Maféréfun Yémaya : Qu’Olokun nous accorde la grâce, que Yémaya nous accorde la grâce »

Mais voilà, quand il faudra sauver l’humanité, le messager en aura-t-il le courage. Et nous ? A quels sacrifices consentirions-nous si nous en avions le pouvoir. C’est la question que pose ce roman dans son dénouement.

 Que penser de ce roman hors norme?

Les désastres de la guerre de Goya

 Les Tentacules paraissent s’étendre partout, sur tous les thèmes, dans tous les milieux, toutes les époques comme de longs bras qui se ramifient. Dans ce roman délirant, foisonnant, le Shakespeare de Prospéro côtoie le Goku de Dragon Ball et le Yoda de Stars Wars, en se mêlant aux rythmes des Daft Punk et des Chemical Brothers, avec des références à la série de tableaux sur Les désastres de la guerre de Goya  qui marque le début de la peinture moderne....

C’est un brillant exercice de style que j'ai admiré mais qui m’a surprise plus que séduite. Je ne peux pas dire que je l'ai vraiment aimé car les personnages n'existent pas réellement (à part, peut-être Argenis et encore !) et ils restent très démonstratifs. Ce qui m'a intéressée surtout dans ce roman, c'est la découverte des Dieux Santeria.



 LC avec Ingammic

mercredi 10 janvier 2024

Jeux littéraires : autoportrait aux titres

 

Inside in my brain

 

 Décris-toi : Celle qui devint le soleil (et modeste avec ça !)

Comment te sens-tu ? La joie de vivre  ( Youpi! ) 

Décris où tu vis actuellement : La femme du deuxième étage (Et en plus, c’est vrai ! )

Si tu pouvais aller où tu veux, où irais tu ? :   Imaqa, une aventure au Groeland

( Oui! Mon amour des pays de glace et de neige en parfait désaccord avec ma frilosité de Méditerranéenne  ! )

Ton moyen de transport préféré ? : Le convoi pour Samarcande   ( Pourquoi pas ? le train ! ) 

Ton/ta meilleur(e) ami(e) est : L’attrapeur d’oiseaux ou Yvonne  ( Alors là, j'hésite !)

Toi et tes amies vous êtes : Les femmes du North End ou Les Maia   ( L'embarras du choix ! )

Comment est le temps ?:  La Tempête

Quel est ton moment préféré de la journée ? Le roi et l’horloger  :  (là, c'est tiré par les cheveux ! J'avoue ! )

Qu’est la vie pour toi ? : Le bal masqué  : ( A la manière de Shakespeare : Le monde entier est un théâtre... )

Ta peur ? La mort du poète

Quel est le conseil que tu as à donner ?:  Veiller sur elle     

La pensée du jour :  Du bonheur à donner 

Comment aimerais- tu mourir ? :  L’extinction des espèces (Tout de même pas, non !)

Les conditions actuelles de ton âme ? : La recherche de l’absolu

Ton rêve ? :  Le rêve du celte




jeudi 28 septembre 2023

Eva Jospin : Palazzo, exposition au Palais des papes d'Avignon

Palais des papes d'Avignon : exposition Eva Jospin, Grande Chapelle : Côté cour côté Jardin, Nymphée, Cénotaphe


"Diplômée de l'École Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Paris, Eva Jospin compose depuis une quinzaine d’années des paysages forestiers et architecturaux qu’elle développe dans différents médiums. Du 30 juin au 7 janvier 2024, l’exposition Palazzo investit différents espaces du Palais des Papes, invitant à une déambulation rêveuse entre des œuvres choisies de l'artiste pour répondre à l’histoire et l’architecture de la résidence pontificale."

 

Eva Jospin sculpte dans le carton des oeuvres monumentales
 

Le palais des Papes et les Mondes parallèles d'Eva Jospin  



La déambulation rêveuse parmi les oeuvres d'Eva Jospin est aussi une promenade dans le majestueux palais des Papes d'Avignon, ce qui décuple le plaisir de la découverte, le déplacement spatial devient aussi voyage temporel. 

Les tombeaux et des gisants du palais évoquent la mort toujours liée à la mémoire dans les ruines des cités disparues où nous fait pénétrer l'artiste. 

 

Cénotaphe : Eva Jospin
 

Et cette oeuvre, ci-dessous, dans la chapelle Saint Jean, répond aux fresques de Matteo Giovanetti du XIV siècle.

 

Eva Jospin : Chapelle saint Jean : fresques du XIV siècle

 

L'artiste crée des correspondances secrètes et subtiles entre son travail artistique  et le vieux palais,  piliers,  recoins obscurs,  passages dérobés, voûtes gothiques,...

 

Voûte en ogive : rappel du  palais gothique

qui n'est pas sans rappeler aussi les voûtes nervées des palais hispano-musulmans :

 

 art hispano-musulman

 

 Palais des Papes : pilier sculpté par le vent, pilier à cinq colonnes

Dans la salle du Parement, une forêt inextricable, semé d'embûches, hérissées de piquants, cache, comme dans un conte de fées, un vieux château oublié.

 

 Salle du parement : Une forêt inextricable... carton et bois

  

Des Mondes imaginaires


Eva Jospin Palais des papes  : Nymphée


La Grande Chapelle présente les oeuvres monumentales d'Eva Jospin qui donnent l'impression de pénétrer au coeur de mondes mystérieux si bien que l'on ne sait plus vraiment où l'on est.  Intitulées  : Côte cour, côté jardin, Nymphée, Cénotaphe, elles s'élèvent, couronnées par les arcs en ogive, et se déploient dans ce vaste ensemble. 


Côté cour côté jardin comme dans un théâtre mais aussi fontaine

Dans Côté cour, Côté jardin qui évoque le théâtre peut-être en souvenir de Shakespeare : "le monde entier est un théâtre, et tous, hommes et femmes, n'en sont que les acteurs",  le décor est une fontaine d'où s'écoulent de minces filets d'eau. Eau ou sable poussé par le vent ou cendres  ? Car le  corps replié sur lui-même, en position foetale, rappelle la mémoire de Pompéi ou de tout autre cité disparue. Le corps emprisonné devient alors un de ces moulages que les archéologues ont pu recueillir dans la ville ensevelie.


Eva Jospin Palais des Papes côté cour Côté jardin


 Architecte et sculptrice

 

Cambodge : Angkor Temple
 

Ainsi l'on peut dire que Eva Jospin est architecte, elle crée avec du carton et du bois des villes oubliées, des grottes décorées de coquillages, des nymphées, des ruines envahies par la végétation luxuriante, croulant sous les lianes comme sous le poids des années, témoins de l'éphémérité des civilisations humaines.  Parfois l'on part dans un autre continent, on pense aux temples kmers dévorés par des arbres  gigantesques aux racines tentaculaires.


Eva Jospin Palais des papes : La forêt corinthienne


La forêt corinthienne (détail)


Regardez les détails : cet escalier qui monte jusqu'à ce temple prisonnier de la végétation. On est dans un film d'Indiana Jones ! 

 Sur le plan pictural on pense à la mode des ruines au XVII siècle, Monsu Desiderio, ou des peintres du XVIII siècle, Piranesi... 

 

Monsu Desiderio : l'Atlantide

  

 Piranesi : Temple de Minerve


Mais elle est aussi sculptrice, elle façonne dans le carton, ces décors étranges, ces reliefs qui semblent érodés par le vent et qui nous transportent au milieu d'un désert de pierres

 

Des formes érodées par le vent
 

 

Eva Jospin  : un désert


Les Tapisseries de soie

 

Eva Jospin : Les tapisseries de soie dans le Grand Tinel
 

Eva Jospin abandonne de temps en temps le carton pour présenter de splendides tapisseries de soie qui reprennent ses thèmes de prédilection, les ruines, les cités étouffées sous la végétation. Le Grand Tinel du Palais des Papes est un cadre somptueux qui les met en valeur.

 


 

 

Eva Jospin : Tapisserie de soie : détail

 

Eva Jospin : Les tapisseries de soie : détails
 


Exposition Eva Jospin : Palazzo

 Du 30 Juin 2023 au 7 Janvier 2024

Ouverture : 

Du 30/06/2023 au 07/01/2024, tous les jours.

  • du 30 juin au 5 novembre : de 9h à 19h.
  • du 6 novembre au 22 décembre : de 10h à 17h.
  • du 23 décembre au 7 janvier 2024 : de 10h à 18h.

Fermeture des caisses 1h avant.

Découvrez l'univers de l'artiste

 

Exposition Eva Jospin au Palais des Papes d'Avignon