Pages

Affichage des articles dont le libellé est Littérature américaine. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Littérature américaine. Afficher tous les articles

mercredi 4 mai 2022

Jake Hinkson : Au nom du bien


 

Jake Hinkson est fils d’un prêcheur baptiste et il a été marqué dès son enfance par son éducation religieuse étouffante. Alors quand il parle dans son livre Au nom du bien des formes d’oppression religieuse dans certaines régions des Etats-Unis et, ici, dans un petite ville de l’Arkansas, il sait ce dont il parle. Et cela le rend féroce !

Richard Weatherford est le pasteur de cette ville et il impose son autorité à tous, s’immisçant dans la vie privée des gens, surveillant leur participation au culte ou leur absence, jugeant de leur moralité jusqu’au sein de leur vie de couple, de leur sexualité, réprouvant le divorce, l'homosexualité, interdisant, culpabilisant, guidant de haute main la vie de ses paroissiens, une influence qui s’abat sur la cité, prend une forme pateline, insidieuse et exerce une violence certaine sur les esprits ! Pour l’heure, il intrigue avec ses paroissiens, notables vertueux, pour faire interdire l’alcool et faire fermer les débits de boissons. Considéré par tous comme un saint homme, il est l’exemple qu’il faut suivre pour gagner son paradis !

Son épouse Penny est la parfaite épouse de pasteur, assurant le catéchisme, dirigeant les prières, déjeunant avec les dames de la paroisse. Très attachée à ses prérogatives et à la supériorité que lui donne sa position sociale, elle laisse son mari diriger l’éducation de leurs enfants.

Une vie édifiante dans lequel le pasteur sage et respecté, pourrait couler des jours sereins  mais… Car il y un mais, bien sûr, un caillou qui va enrayer les rouages, et faire grincer la machine bien huilée jusqu’alors. Et ce caillou, s’appelle Gary Doane, jeune homme dépressif et suicidaire. Il a pour petite amie Sarabeth Simmons considérée par tous comme une fille immorale, dépravée. Tous les deux ne supportent plus le manque de liberté, les excès d’une religion fondamentaliste, conservatrice, les jugements des bien-pensants persuadés d'agir au nom du bien.
Que veut Gary Doane à Richard Weatherford ?  Pourquoi le fait-il chanter ? On le saura bien vite car la réponse à cette question n’est pas l’intérêt principal du roman. Non, l’intérêt réside dans la démonstration magistrale de l’écrivain qui scrute le personnage du pasteur avec un intérêt digne d'un entomologiste étudiant un scarabée. Comment va  réagir le pasteur ?  Va-t-il reconnaître la vérité ou, au contraire, essayer de la fuir, de s'en sortir ? Le récit adopte plusieurs points de vue, celui du pasteur, de Penny,  Gary et de Sarabeth mais aussi celui d'un autre protagoniste, Brian Harten. Péripéties haletantes qui nous mènent de surprise en surprise, suspense, retournements de situation au cours desquels s’exerce l’ironie acérée d’un Jake Hinkson qui décrit une société figée, radicale, hypocrite, et nous livre une vision noire et désenchantée d’une Amérique conservatrice et liberticide.

Un très bon roman !

jeudi 31 mars 2022

Isaac Bashevis Singer : Shosha

 

Varsovie 1939

Dans son roman Shosha, Isaac Bashevis Singer, écrivain né en Pologne et naturalisé américain, met beaucoup de lui-même dans son personnage principal  Arele (Aaron) Greidinger.

Le roman commence par la description de son enfance dans le quartier juif de Varsovie où a vécu l’écrivain, quartier pauvre mais plein de vie, où règne une joyeuse animation les jours de marché et dans les cours intérieures des immeubles, là tout le monde se connaît. Comme Isaac, Arele a un père rabbin, une mère, fille de rabbin, qui voit d’un mauvais oeil son fils fréquenter leurs voisins juifs d’un milieu social inférieur. Cette famille est pourtant un havre de paix et de joie pour l’enfant. Il se fait dorloter par la mère Bashele, femme au grand coeur, et aime d’un amour pur et intense la petite Shosha, une blondinette, simple d’esprit, souffreteuse, qui a du mal à apprendre à lire et qui voue au petit garçon une admiration sans bornes. Lorsque ses parents déménagent, pendant la guerre de 1914, Arele, est séparé de Shosha. Même s’il ne l’oublie pas, il ne la reverra pas avant cette promenade dans le quartier de son enfance en 1939. Il est accompagné de Betty, une actrice américaine pour qui il écrit une pièce. Le jeune écrivain, journaliste, philosophe, érudit, qui a étudié dès son enfance la Torah, fréquente les milieux intellectuels juifs de Varsovie. Nous savons que Isaac Singer, lui, a émigré dès 1935 aux Etats-Unis mais son personnage vit ces moments crépusculaires, dans l’attente de l’invasion de la Pologne, sous  l'ombre menaçante d’Hitler, sachant très bien que la mort se rapproche. Arele et ses amis, Haiml et Célia, Morris Feitelzohn ont de longues conversations philosophiques mais ils sont incapables d'agir. Certains, dont Aaron, auraient l’occasion de partir en Amérique, mais aucun ne s’y résout. Déni de la réalité ? Résignation devant la mort ? fatalisme ?  Pessimisme fondamental qui ne donne pas envie de lutter pour la vie ?

« J’avais rejeté quatre mille ans de judaïsme en échange d’une littérature dépourvue de sens, yiddishite, Feitelzhoniste. Il ne restait en tout et pour tout que ma carte de membre du Club des écrivains et quelques manuscrits sans valeur. Je m’arrêtai pour regarder les vitrines. Le massacre pouvait commencer d’un moment à l’autre -mais en attendant, on vous tentait avec des pianos, des voitures, des bijoux, des jolies robes du soir, des livres polonais récemment parus ainsi que que des traductions allemandes.(…)
Les hommes regardaient d’un oeil expert les jambes gainées de nylon, prometteuses de délices inaccessibles. Et moi, condamné comme tous les autres, je regardais aussi les hanches, les mollets, les seins, les gorges. La génération qui viendra après nous, me dis-je, s’imaginera que nous sommes  allés à la mort en nous repentant. On nous considèrera comme de saints martyrs, on récitera le Kaddish pour nous, et le « Dieu plein de miséricorde ». En réalité, chacun de nous mourra avec la même passion qu’il a mis à vivre. »

Arele qui a plusieurs maîtresses à la fois, choisit d’épouser la petite Shosha au grand dam de ses amis et de sa famille. Femme-enfant, Shosha représente pour lui la pureté. Singer veut-il dire que la pureté ne peut exister que si l'on reste un enfant ?  Est-elle l'apanage des simples d'esprit comme l'Idiot de Dostoiewsky ? L’amour d’Aaron est sincère mais celui-ci n’est pas exempt de doute au sujet de son mariage. Pourtant il devient plus responsable, refuse les aventures et veille sur Shosha comme s'il avait charge d'une enfant.

Je venais de commettre la pire folie de toute mon existence, et je n’en éprouvais aucun regret. Il faut dire que je n’en étais pas non plus fou de joie, comme le sont en général les gens amoureux. 

Le roman brasse de grandes idées : l’art, la littérature, la philosophie, l’existence de Dieu, la foi, l’athéisme, le péché, la religion, la politique. D’autres amis d’Aaron, Dora et Wolf, ayant confronté leur idéal communiste à la réalité stalinienne, sont désenchantés et sombrent dans le désespoir.
Arele, lui, s’est éloigné de la religion mais il doute. Il a rompu avec la tradition juive, ne suit pas les rites, mais les respecte quand il est avec des croyants. Et, en même temps, il critique les aspects rigides de sa religion. Il décrit une enfance faite d’interdits :

« Tout ce que j’avais envie de faire était défendu. Il ne m’était pas permis de peindre des personnages, parce que c’était une violation du deuxième commandement. Je ne pouvais pas dire un mot contre un autre petit garçon, c’était de la calomnie. Je ne pouvais pas inventer des histoires, c’étaient des mensonges. »

Et plus tard, Isaac Singer fait, à travers le frère d’Arele, le rabbin Moishe, une critique des règles figées, strictes, suivies par le rabbin, par exemple, celle, assez curieuse, de ne pas s’asseoir sur de la tiretaine (?), ou encore de ne pas s'asseoir à côté des femmes. Il décrit en Moishe un homme si rigide qu’il ne peut tout simplement pas être chaleureux envers les gens qui le reçoivent, toujours en train de redouter que le rite ne soit pas bien observé.

« Bashele avait l’intention d’inviter ma mère et Moishe soit à déjeuner, soit à dîner, mais ma mère me déclara sans détour qu’elle ne mangerait pas chez Bashele, parce que ni elle ni Moishe ne pouvaient être sûrs que ce qu’elle nous donnerait serait casher. »

Sa méfiance extrême envers tout étranger même juif, son intolérance et la conscience de sa prétendue supériorité de classe l’éloignent de son frère Arele.

« … Je crois en Dieu dit Arele à Shosha mais je ne crois pas qu’il se soit révélé et ait donné aux rabbins toutes ces règles mesquines qu’ils se sont empressés de multiplier de génération en génération. »

Dans l’épilogue, treize ans après, nous apprenons ce qui est arrivé à chacun de la bouche d’Arele qui vit à présent à NewYork. De cette conclusion se dégage un pessimisme amer. Et on le comprend ! Le livre a été écrit dans les années 1970, et après l’Holocauste, les millions de victimes de la seconde guerre mondiale, le carnage qui a ravagé toute la planète, Isaac Singer présente une philosophie désabusée, d’une lucidité glaçante  :

"Il m’était parfois arrivé de croire, ne serait-ce qu’une fois au libre arbitre, mais ce matin-là j’eus la certitude que l’homme était aussi libre de choisir que la montre à mon poignet ou la mouche posée sur le bord de ma soucoupe. Les forces qui faisaient agir Hitler et Staline, le pape, le rabbi de Gur, une molécule au centre de la terre, une galaxie à des millions d’années lumière de la Voie Lactée, étaient les mêmes. Des forces aveugles ? Des forces clairvoyantes ? Cela n’avait pas d’importance. Nous étions condamnés à jouer à nos petits jeux - puis à être écrasés."

Un roman riche, prenant, qui questionne et dérange !
 


jeudi 3 février 2022

Douglas Preston : La cité perdue du dieu singe : Honduras

 Douglas Preston, écrivain américain, journaliste au New Yorker et au National Geografic, est l’auteur du livre La cité perdue du Dieu Singe, récit de la découverte archéologique d’une ancienne cité disparue dans la forêt vierge de la Mosquitia en Honduras. Il s’agit de la légendaire Ciudad bianca, la Cité blanche, dédiée au Dieu Singe, dont Cortès se faisait déjà l’écho en 1526 dans une lettre adressée à Charles Quint. Depuis, l’existence de cette cité abandonnée, édifiée par un peuple inconnu, - car ce ne sont pas des Mayas - est devenue le centre de récits et de croyances populaires qui, au cours des siècles, l’ont élevée au rang de mythe.

Nombreux ont été les explorateurs partis à sa recherche et dont certains ont prétendu l’avoir trouvée jusqu’à cette année 2012 où les progrès de la technologie vont permettre de la localiser.

L'emplacement de site archéologique dans le Mosquitia Honduras

Au coeur de la Mosquitia, la jungle la plus dense du monde tapisse des chaînes de montagnes infranchissables, parfois hautes de mille cinq cents mètres, entaillées de ravins escarpés, de cascades vertigineuses et de torrents rugissants. Arrosée par des précipitations diluviennes - plus de trois mètres d’eau chaque année- cette zone est régulièrement victime de crues subites et de glissements de terrain. On y trouve des sables mouvants capables d’engloutir un homme. Le sous-bois est infesté de serpents mortels, de jaguars, de fourrés de griffes de chat, une liane hérissée d’épines crochues qui lacèrent la peau et les vêtements. Dans la Mosquitia, un groupe d’explorateurs aguerris, équipés de machettes et de scies, peut espérer en dix heures de labeur acharné progresser d’un à deux kilomètres.
Mais les dangers liés à son exploration ne sont pas tous d’origine naturelle. Le Honduras connaît, en effet, l’un des plus forts taux d’homicide de l’échelle planétaire. 80% de la cocaïne en direction des Etats-Unis transitent par ce pays, principalement à travers la Mosquitia. Les cartels règnent sur les zones rurales et les villes environnantes.


La cité perdue  ici forêt vierge de la Mosquitia Honduras
 
Evidemment avec cette entrée en matière, vous allez croire ce qui est annoncé dans la quatrième de couverture :  Ce récit, digne des aventures d’Indiana Jones… Mais non ! Cette relation de voyage est tout autre chose !

Enfin, pourtant, en un sens,  oui… Ainsi quand l’auteur se retrouve face à un énorme Fer de lance, un serpent extrêmement agressif, et dont le venin est mortel, ou quand, obligé de se lever dans la nuit, il met le pied sur une couche grouillante de scorpions et d’araignées dont les yeux brillent dans l’obscurité … Brrr!  La pluie ne cesse de tomber transformant en boue le campement, les mésaventures sont nombreuses, dont les pires sont peut-être dues aux insectes piqueurs qui transmettent d’horribles maladies, comme la leishmaniose appelée « lèpre blanche » qui ronge les muqueuses, le nez et les lèvres, ne laissant que des trous béants.

Un Fer de lance
 
Donc oui ! … mais non,  Douglas Preston n’écrit pas un roman mais un document sérieux, détaillé de ce voyage dont les membres sont d’éminents savants, archéologues, professeurs d’université spécialistes des civilisations latino-hispaniques, ethnographes américains ou honduriens… qui sont tous mus par un intérêt passionné pour l’archéologie, pour l’histoire de ce pays et ne sont surtout pas à la recherche d’un trésor mais de la connaissance ! Des cinéastes, un photographe, un écrivain (Douglas Preston) chargés de rendre compte de la mission les accompagnent, des soldats assurant la sécurité. 
 
Chris Fisher anthropologue et ethnologue et Douglas Preston (en tête) sur le site de la Cité

Preston relate les différentes étapes de la recherche de cette ville ancienne et explique comment l’existence de ruines extrêmement importantes est révélée en 2012 grâce à une technologie dernier cri, le Lidar, sorte de radar « qui bombardait au rayon laser une jungle dans laquelle aucun être humain n’avait pénétré depuis peut-être cinq cents ans. ». En Février 2015 a lieu la première expédition sur le site et le début des fouilles. Il y en a eu d'autres par la suite.
Nous découvrons d'abord les villes contemporaines du Honduras où l’équipe fait halte et la situation économique et politique du pays qui vient de subir un coup d'état (un nouveau !). Nous survolons la forêt luxuriante, si incroyablement dense et belle, impressionnante dans sa majesté malgré la déforestation illégale qui gagne certains coins. Nous participons aux premières fouilles du site vers lequel les explorateurs sont héliportés et qui révèlent l'existence de pyramides de terre, d'esplanades aménagées, places, terrains de jeu (?), d'un réservoir d'alimentation en eau pour les cultures. De nombreux objets sont détectés témoignant de la grande habileté d'une civilisation vieille d'un millier d'années. 


Pour autant les chercheurs n'affirment pas qu'il s'agit de la cité légendaire. Prudents, ils insistent cependant sur le caractère extraordinaire de cette découverte archéologique majeure et sur l'importance des vestiges qu'ils ont retrouvés. Depuis cette date les fouilles ont continué. 


L'homme-jaguar

Dans la livre de Douglas Preston, nous partageons les recherches érudites pour déterminer ce qu’était cette civilisation pré-hispanique qui a érigé la Cité blanche et la raison de leur départ brutal. Avec, bien sûr, une incursion vers les Mayas et  le site de Copan. L'intérêt du groupe ne se limite pas à l'archéologie mais englobe aussi les espèces végétales et animales et montre l'incroyable biodiversité de ce lieu où les hommes n'avaient plus pénétré depuis des siècles. Toute une foule de détails nous est donnée aussi sur le retour de l'expédition et ce qui arrivé à l’équipe de chercheurs par la suite. Preston présente les attaques et les controverses, souvent partisanes semble-t-il, que les chercheurs ont  subi de la part de détracteurs dont certains sont des universitaires.

Copan : site Maya

L'écrivain observe et note les évènements dont il est lui-même le témoin. Il tient un journal au jour le jour. Il dresse le portrait vivant, parfois haut en couleurs (comme l'ex-trafiquant de drogue d'un cartel colombien aux méthodes expéditives !) de chaque membre du groupe. Il procède aussi par interviews auprès de scientifiques, d'historiens, de médecins, sur des sujets variés pour les approfondir, il enquête avec une curiosité qui embrasse toutes les aspects de la recherche. Il élucide pour nous tout ce qui pourrait paraître obscur et nous apporte une foule de connaissances.

Je vous laisse découvrir les détails de ce documentaire intéressant qui nous fait découvrir plusieurs facettes de l’Honduras et de ses richesses patrimoniales.

             La Cité blanche recréée suite à la première expédition en 2015. Source site Gaia Merveille


Dans une sorte de large bassin qui dépassait à peine du sol, on pouvait voir le haut de dizaines de sculptures en pierre incroyablement élaborées. Au milieu des feuilles et des lianes, des objets recouverts de mousse prenaient forme dans la lumière crépusculaire de la forêt. La première chose que je vis fut la tête d’un jaguar rugissant, puis le rebord d’un pot orné d’une tête de vautour et d’autres grands récipients en pierre gravés de serpents; à côté d’eux se trouvaient un ensemble d’objets qui ressemblaient à des trônes ou à des tables, dont les bords et les pieds étaient pour certains, gravés de ce qui ressemblait à première vue à des inscriptions et des glyphes.



dimanche 16 janvier 2022

Jean Hagland : Apaiser nos tempêtes

 

J’avais bien aimé Dans la forêt de Jean Hegland même si j’avais quelques restrictions quant à sa conclusion. J’ai donc eu envie de lire Apaiser nos tempêtes, (windfalls, titre anglais), son nouveau roman paru en Juillet 2021.

« Un arbre se dresse sur un versant de colline battu par les vents. Seul entre les cieux qui s’assombrissent et la terre caillouteuse, il tend vers elle haut ses branches noueuses, qui sont en pleine floraison. Un soleil bas embrase les nuages lourds, réchauffe son tronc brisé, enflamme ses milliers de fleurs.
L’arbre a presque été fendu en deux - peut-être par la foudre, peut-être par le vent, ou par le poids de ses fruits lors d’un automne trop fécond il y a longtemps. Une moitié gît au sol à présent stérile. Mais la moitié vivante se tient fière, parée de fleurs blanches si nombreuses qu’elles semblent en suspens dans l’air lourd. Même les plus petites branches en sont recouvertes, et sur la photo, chaque pétale luit, telle la flamme d’une bougie. »

Cet arbre à moitié mort et qui renaît, chargé de fleurs blanches porteuses de lumière, est la métaphore des deux femmes, Anna et Cerise, qui sont les personnages principaux du roman. Toutes les deux subiront des moments difficiles voire tragiques, des saisons où la vie devient un hiver mais avec la résurrection du printemps. Comme dans Dans la forêt, la nature joue donc un grand rôle dans ce roman et la ville avec sa démesure participe au malaise de l’individu sur cette Terre en proie aux dérives des êtres humains.
 Anna et Cerise, se révèlent à la fois semblables et différentes :  L’une, Anna, d’un milieu aisé, qui a continué ses études, est artiste photographe; l’autre, Cerise, d’un milieu défavorisé, abandonne le lycée pour élever sa fille lorsqu’elle est enceinte par accident. Anna, elle, préfère avorter que de subir une grossesse indésirable. Elle ne connaîtra la maternité que lorsqu’elle le souhaite, mariée à un homme qui, lui aussi, veut être père.

Apaiser ma tempête explore plusieurs thèmes intéressants qui rendent le roman passionnant. A travers les épreuves parfois communes de deux femmes, l’écrivaine dépeint l’inégalité sociale entre elles, inégalité qui pèse sur Cerise comme un déterminisme. Celle-ci ne peut pas être maîtresse de sa vie et subit plus qu’elle n’agit, souvent sous influence, manipulée par l’un ou l’autre, privée d'avenir, ne recevant aucune aide sociale pour les mères célibataires dans un pays individualiste et indifférent,  jusqu’au drame final qui la jette, sans argent, dans la rue puis dans un foyer de femmes sans-abri.  Pourtant, elle est courageuse, n’abandonne pas la lutte et donne beaucoup aux autres, avec générosité.

A travers Cerise comme à travers Anna, Jean Hegland parle de la maternité et des transformations qu’elle génère dans chaque femme, elle analyse les sentiments de la mère vis à vis de l’enfant entre bonheur et fatigue. Elle écrit l’amour peau-contre peau, sensuel, des échanges entre mère et nourrisson, ce qui nous ramène, dans le meilleur sens possible, à notre condition animale. Mais elle montre aussi la fragilité des mères, leurs craintes, les interrogations et doutes sur l’éducation, les désillusions qui parfois marquent l’entrée de l’enfant dans adolescence. L’amour-rejet qui parfois en résulte. Ce qui lui a valu d’ailleurs un refus de son éditeur et une rupture de son contrat sous prétexte que « les mères n’éprouvent pas autant d’ambivalence qu’Anna et Cerise vis-à-vis de leurs enfants. » Et oui, le mythe bien entretenu car confortable (en particulier pour les hommes) de l’amour maternel inné, de la mère aimante et lisse, heureuse et sans faille...  est toujours à la mode de nos jours ! Parodiant  Simone Beauvoir, il faudrait pourtant affirmer  «  on ne naît pas mère, on le devient! ». Et oui, monsieur l’éditeur !

L’écrivaine défend aussi celles qui choisissent de ne pas être mère tout en montrant que ce n’est pas un geste anodin et en analysant l’état de vide, de manque, ressenti par Anna après l’avortement ( très belle scène avec la grand-mère). La critique du couple bien-pensant qui influence Cerise pour qu’elle garde le bébé mais l’abandonne au moment où elle va accoucher et va devoir élever son bébé toute seule, sans argent, est virulente. De même la scène où Anna doit se frayer un chemin dans la foule haineuse, massée devant l’hôpital, brandissant des pancartes contre l’avortement, dégage une grande violence.

A travers Anna la photographe, Jean Hagland pénètre aussi dans la conscience de l’artiste et avec elle s’interroge sur l’Art. Quelle place tient-il dans notre société? Est-il susceptible d’influer sur le cours de la vie, de changer les êtres humains ? Elle découvre pour nous le sentiment de déréliction éprouvé par l’artiste quand il se sent dans l’impossibilité de créer, quand le papier de la photo reste blanc comme la page de l’écrivain.

Un beau livre donc ! Les analyses de l’état de mère « sans sentimentalisme ni cynisme » « au-delà des clichés méprisants » (dixit J Hegland dans la préface)  sont si justes que bien des fois j’ai éprouvé un sentiment de vécu et je me suis sentie concernée. Mais le roman est assez riche en dehors de ce thème de la maternité, ne serait-ce que par ces deux personnages féminins attachants, pour plaire à tous et la langue de l’écrivaine se révèle d’une grande beauté.




 

jeudi 2 décembre 2021

Heather Young : Un été près du lac


Le récit Un été près du lac de Heather Young se déroule sur deux époques : Celle de Lucy, une vieille dame, qui, sentant venir la fin, écrit l’histoire de cet été tragique 1935, à l’intention de sa petite-nièce Justine. Lucy avait onze ans à l’époque et ces vacances avec ses parents et ses soeurs, Lilith, l’aînée, et Emily, la cadette,  représentaient pour elle une grande source de bonheur.
Mais cette année, rien n’est comme avant.  Lilith délaisse sa soeur pour flirter avec les garçons et est en rébellion contre son père. Sa mère surprotège sa cadette Emily … mais de quel danger ? Et pourtant celle-ci disparaît dans la forêt et l’on ne la retrouve jamais
Enfin, l’époque de Justine, 1999, qui après une rupture avec le père de ses filles, cherche à s’extraire de la relation nocive qu’elle entretient avec un compagnon la fois infantile et trop possiesif et pour tout dire phagocyteur. Justement, à la mort de sa grand-tante qui lui lègue sa maison au bord du lac du Minnesota, elle quitte tout et va s’installer dans ce chalet inconfortable et glacial mais qui lui paraît d’abord synonyme de libération.

Au premier abord, mon entrée dans le roman m’a laissé une impression de déjà lue : l’adolescente rebelle, la fin de l’enfance sur fond de vacances et bord de plage… Puis je me suis laissée entraîner par ces pages qui font sentir avec profondeur les non-dits pesants qui règnent dans cette famille prétendument exemplaire. Et même si un lecteur averti comprend vite de quoi il s’agit, il n’en est pas moins vrai que l’auteur parvient à créer une atmosphère lourde, insécure, et à analyser avec finesse les noirs tourments qui agitent l’âme de ce père religieux, confit en dévotion, à la morale étriquée et rigide, et de cette mère, effacée, voire inexistante, et lâche. Quant à la disparition d’Emily, le suspense entretenu autour de ce mystère nous accompagne pendant le récit tout en générant une mélancolie sourde, jusqu’à la révélation finale qui nous laisse sans voix.
En ce qui concerne Justine, sa vie est intéressante et nous suivons avec attention les péripéties de son combat pour devenir une femme indépendante, tout en découvrant le passé de sa famille dont elle s’était éloignée. Malgré tout, j’ai préféré la première période dont les personnages m’ont paru plus fouillés, plus approfondis et qui m’a donc plus accrochée.
Un premier roman intéressant, agréable à lire, avec des qualités d’écriture, qui a été sélectionné pour le meilleur premier roman policier américain.

vendredi 8 octobre 2021

Anne Tyler : Leçons de conduite


Dans Leçons de conduite d'Anne Tyler,  Maggie Moran se rend à l’enterrement du mari de sa meilleure amie Serena. Son mari Ira l’accompagne. Le trajet en voiture, les retrouvailles avec les amis d’enfance dans le cadre de cette cérémonie peu banale, Serena étant toujours aussi excentrique, vont être le prétexte d’une remise en cause de leur couple. Il ne peut pas y avoir plus dissemblables, en effet, que Maggie, bavarde, insouciante, légère et Ira, introverti, taciturne, sérieux. Une occasion de faire le point sur leur couple. Remontent alors à la surface les différents, les reproches, les regrets accumulés au cours des années de vie commune.
 Au départ le récit est assez classique et il m’a fallu un moment pour y adhérer mais peu à peu j’ai découvert la subtilité de l’analyse psychologique des rapports entre mari et femme, mais aussi des autres personnages qui se retrouvent, vieillissants, après des années d’absence. Perte des illusions, des espoirs de la jeunesse, de la passion que l’on croit inconditionnelle.
Tout au long du voyage et des échanges du couple,  apparaît l’usure de cette longue vie matrimoniale, les déceptions, les malentendus. Non pas vraiment la fin de l’amour mais plutôt la naissance d’un consensus qui s’établit et qui finit par une acceptation de l’autre, un lien moins exaltant mais réel qui n’a plus rien à voir avec les rêves de la jeune fille qu’était Maggie.

Anne Tyler mène cette analyse tout en nuances et d’une grande perspicacité avec beaucoup de finesse tout en sachant nous amuser même si le rire se révèle grinçant. Bien que ce ne soit pas un thème qui m’attire, j’ai été prise par le grand talent de cette écrivaine et par sa chronique caustique, ironique, mais aussi nostalgique, qui est faite de petits riens et nous laisse une impression de désenchantement tant les travers et les faiblesses de la nature humaine nous sont révélés au grand jour.

Prix Pulitzer 1989

mardi 5 octobre 2021

Madeline Miller : Circé

 

Madeline Miller nous donne avec Circé un récit mythologique passionnant sur la magicienne Circé, fille du tout puissant dieu Hélios et de la nymphe Persé ou Perséis, cette dernière elle-même fille d’Océan et de Thétys. Circé est un personnage proche de nous. En effet, une relecture contemporaine nous la montre humaine malgré sa divinité.
Différente de ses frères et soeur, elle est une déesse mineure, considérée comme inférieure dans la hiérarchie des Dieux dont elle dénonce la cruauté, l’abus de pouvoir et la mesquinerie. Mais elle prend conscience de ses dons de magie qui fait d’elle une puissante sorcière. Ce pouvoir qui dérange Zeus, ainsi que son intérêt pour les humains - c’est la seule qui vient au secours de Prométhée - et son amour pour un mortel, lui valent son exil solitaire sur une île. Mais les hommes qu’elle idéalise révèleront leurs bas instincts et elle les transforme en porcs jusqu’au moment où elle rencontre des humains dignes d’être aimés.
Cette dualité de sentiments, entre rejet des Dieux et amour des humains, fait de Circé un personnage à part qui va être obligée de faire un choix quitte à refuser son immortalité.  

Circé
 
A travers la vie de Circé nous revisitons les grands récits et personnages mythologiques antiques, Dieux ou Hommes, Hélios, Zeus, Hermès, Athéna, Ulysse, bien sûr, et son séjour dans l’île de la magicienne, sa visite aux Enfers, son fils Télémaque… Pasiphaé, la perverse soeur de Circé et son époux Minos, la naissance du Minotaure, Dédale et Icare, Scylla, le monstre avaleur de navires et tant d’autres…

Scylla

Scylla nymphe transformée en monstre par Circé

 Un livre très addictif, agréable à lire ! Il remet à jour nos connaissances de la mythologie grecque tout en nous intéressant à ce personnage complexe, attachant, Circé, à la fois déesse et femme, redoutable et vulnérable, amoureuse, mère, libre, indépendante et courageuse… Circé qui nous interpelle par ses questions sur l’éphémérité de la condition humaine face à l’immortalité, cette dernière n’étant pas obligatoirement synonyme de bonheur.


jeudi 12 août 2021

Challenge Jack London : cinquième et dernier bilan

 

 Et voilà le dernier bilan du challenge Jack London que j'avais laissé ouvert pour ceux qui avaient manquéde temps et pour les passionnés. C'est Ta loi du ciné blog de Dasola qui a été le plus assidu et a clôturé la dernière lecture. Merci à lui ! Et merci à toutes et tous d'avoir participé à ce challenge et d'avoir partagé avec moi vos découvertes sur ce grand écrivain américain.

Nous avons été nombreux à découvrir toutes les facettes de son oeuvre et son étendue, oeuvre que l'on croit bien souvent limitée à ses récits du Grand Nord. Nombreux aussi à avoir été frappés par ses contradictions, socialiste engagé qui prône la fraternité et la solidarité mais raciste, marqué par le colonialisme, égalitaire mais qui a le culte de la survie du plus fort. Féministe pourtant et très en avance sur son temps  quant à sa manière d'envisager le rôle de la femme. Son épouse Charmian en est l'exemple ! Une oeuvre riche et prolixe écrit par un homme tourmenté, qui meurt jeune, détruit par ses excès !

Les participants au challenge 

 


Aifelle   Le goût des livres   

 
 
 
 
 
 

 

 

 


 
 
 
 
 

   



 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 





 
 
 
 
 




  Electra La plume d'Electra




 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
  
 
 
 
 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

 

mardi 10 août 2021

Festival d'Avignon OFF 2021 : bilan partiel du festival (1)

 Voici, en vrac quelques unes des pièces du festival d'Avgnon 2021. Il y en aura d'autres et j'espère aussi pouvoir vous présenter quelques spectacles vus avec ma petite-fille

La Grande musique de Stéphane Guérin

Présentation

D’un bal de mariage à un studio de télévision, de Munich à Mauthausen, six personnages vont essayer de décrypter les secrets de leur drame familial via la psychogénéalogie.

 Entre le présent et le passé, entre l’Autriche et la France, Marcel, Nelly, Georges, Esther, Pierre et Hervé tentent de réunir les pièces éparses d’un même puzzle.

 Et si les traumatismes vécus par nos parents, nos grands-parents, voire nos arrières grands-parents laissaient une trace sur leur descendance ? Le corps a une mémoire dont on n'a pas toujours conscience.


Mon avis : Le thème :  les traumatismes liés à l'histoire familiale et aux non-dits, aux secrets familiaux. Dans cette pièce, Stéphane Guérin, inscrit le récit et les faits dans l'histoire de l'holocauste. Sans le savoir, nous subissons ces blessures qui - comme la mariée de la pièce-  empêchent de vivre normalement, le cerveau portant inconsciemment le souvenir de l'horreur qu'ont vécu nos ancêtres. Une pièce bien interprétée et au sujet intéressant.

Voir Eimelle ICI

La Grande musique 19H15 durée 1h10  Théâtre Buffon

Auteur :  Stéphane Guérin 

  Metteuse en scène : Salomé Villiers
  Interprète(s) : Hélène Degy, Raphaëline Goupilleau, Pierre Hélie, Brice Hillairet, Étienne  Launay, Bernard Malaka
  Collaborateur artistique : Frédéric de Brabant
  Assistant mise en scène : Pablo Haziza
  Musique originale : Raphaël Sanchez
  Scénographie : Georges Vauraz
  Lumière : Denis Koransky
  Régie : Mathilde Monier
Cie PrismoL-D-21-1126

Dorothy de Zabou Breitman 

 

 C’est l’histoire d’une femme, Dorothy Parker. 
C’était il y a longtemps. C’est maintenant. 
Les histoires d’une femme américaine.
 L’histoire des femmes américaines au temps de la prohibition, qui est aussi, incroyablement, le temps de leur accès au vote. 
L’histoire d’une résistante, d’une autrice, romancière, critique de théâtre, scénariste, grande plume du fameux New Yorker. Dorothy doute, elle boit, elle se débat, elle s’ennuie à mourir, elle est, quelle que soit son histoire, effroyablement seule. 
Elle est poétique et dramatique. 
Et de là vient le rire. Et de là viennent les larmes. 

Zabou Breitman fait revivre cette femme hors du commun en s’appuyant sur cinq de ses plus fortes nouvelles.

Mon avis : Zabou Breitman toujours aussi belle et parfaite. L'écrivaine et critique de théâtre dont elle nous parle, Dorothy Parker, a la dent dure et l'humour vache : jugez en par vous-mêmes  : « Il y a au moins une chose qu’on ne peut pas retirer à l’épidémie de grippe espagnole - elle a fourni à certains directeurs de théâtre une très bonne excuse.
 Dès qu’ils voient qu’une pièce ne marche pas, ils cachent leur coeur saignant derrière un visage noble et ils annoncent que la pièce s’arrête, en raison de la pandémie.
 Si vous faites partie de ceux qui veulent toujours voir le bien partout, (ou le verre à moitié plein) gardez en tête que la grippe espagnole a fourni une fin honorable à de nombreuses pièces de théâtre ».
 Humour noir aussi comme en témoigne l'épitaphe qu'elle souhaitait faire inscrire sur son urne : "Excusez-moi pour la poussière !";

J'ai bien aimé le récit vivant et plein d'humour de Zabou sur les tribulations de l'urne contenant les cendres de cette écrivaine, oubliée pendant tant d'années au fond d'un placard. Mais, par contre, bien souvent, j'ai trouvé les textes de Dorothy Parker longs et répétitifs, et c'est pourquoi certains ne m'ont pas touchée comme celui de la femme qui attend vainement un coup de téléphone d'un amoureux qui ne veut plus d'elle.


Auteurs : Zabou Breitman, d'après Dorothy Parker
    •    Metteuse en scène : Zabou Breitman
    •    Interprète(s) : Zabou Breitman
    •    Lumières : Stéphanie Daniel
    •    Costumes : Zabou Breitman Bruno Fatalot
    •    Accessoires : Amina Rézig
    •    Son : Yoann Blanchard
    •    Regard extérieur : Antonin Chalon

Cabotine - Compagnie Zabou BreitmanL-R-20-11716


 To be or not to be Avignon de Stephan Caso 


Présentation
Avignon se raconte à travers 20 personnages : 2000 ans d’une autobiographie féroce, mordante et provocatrice... Mais ce récit trouble, violent, grotesque et chaotique, qui s’arrange de la vérité, est-ce l’histoire d’une ville ou bien un miroir qui nous est tendu? Qui se cache derrière ces masques, avec ses lâchetés, ses trous de mémoire, ses grandeurs et ses misères? Qui se cache en pleine lumière sur la scène?

Paris-Match Suisse - "Beauté et précision du texte : c’est féroce, envoûtant et drôle!"
RegArts - "Une fresque fort bien écrite! Bravo à Stephan Caso, comédien remarquable et inventif!" 
Les Trois Coups - "Une désopilante autobiographie de la Cité des Papes racontée par elle-même... qui sait atteindre à l'universel, au poignant."

Mon avis : un survol de la cité des Papes avec un Stéphan Caso qui campe à lui tout seul tous les grands personnages qui ont fait l'Histoire d'Avignon, de l'antiquité jusqu'au la création du Festival.  Des moments graves comme ceux où sont rappelées la collaboration avec le régime nazi et la déportation des enfants juifs. D'autres, au contraire, franchement amusants. Mention spéciale pour César (l'empereur!)qui nous parle avec la voix de Jean-Pierre Marielle ou pour les festivaliers qui hantent la ville en Juillet, plus vrais que nature !

14 h To be or not to be Avignon  Chêne noir durée 1H15
Auteur
Stephan Caso
Metteur en scène : Christophe Barbie

 Interprète(s) : Stephan Caso
 Lumières : Florian Derval

Théâtre du Chêne Noir

 Le portrait de Dorian Gray Wilde/ T. Le Douarec



Présentation :

Plus de 100 000 spectateurs, 4 ans de succès à Paris: ils reviennent pour leur 5 ème festival avec l'adaptation de l'unique roman de Wilde.

 Par la magie d'un voeu, Dorian conserve la beauté de sa jeunesse. Seul son portrait vieillira et sera marqué par ses péchés. Le jeune Dandy s'adonne alors à toutes les expériences. Il nous entraîne dans une quête de plaisirs et de beauté sous toutes ses formes.


TÉLÉRAMA TT : Très réussi.
FIG MAG : Excellent!
MARIANNE : À ne pas rater.
LE MASQUE ET LA PLUME : Il faut y aller!
ELLE : Haletant ! 
FIGARO : Brillant !
CHOIX DE L'OBS : **** Remarquable ! 
PARISCOPE : Envoûtant ! 
VALEURS ACTUELLES : *****Passionnant ! 
FIGAROSCOPE : ***** la salle est suspendue !

19H45 Le portrait de Dorian Gray Les Lucioles durée 1H40
Auteurs
Thomas Le Douarec, D'après Oscar WILDE
Interprètes / Intervenants
    •    Metteur en scène : Le Douarec
    •    Interprète(s) : Mickael Winum, Fabrice Scott, T. Le Douarec, Caroline Devismes
    •    Lumières : Stéphane Balny
    •    Musiques : Medhi Bourayou

Cie Le DouarecL-R-20-6300

Mon avis  : Une bonne adaptation de la pièce d'Oscar Wilde, de bons interprètes.

Vivaldi, l’âge d’or

 

Après le succès de "Vivaldi-Piazzolla", Marianne Piketty et le Concert Idéal reviennent à Avignon avec leur nouvelle création "Vivaldi, l’âge d’or".
À l’âge d’or de la musique italienne, durant l’ère baroque des XVII et XVIIIème siècles, Venise brille de mille feux.
Des fièvres virtuoses de Vivaldi et d’Albinoni à la solennité de Ziani, des affects de Barbara Strozzi aux danses de Turini, Marianne Piketty et Le Concert Idéal, huit musiciens mis en mouvement et en lumière célèbrent l'Ecole Vénitienne avec des œuvres rares, pour certaines inédites de Vivaldi et dévoilent la mosaïque sonore et le foisonnement artistique de la cité italienne

Mon avis : Une heure de bonheur avec ce concert qui permet de réécouter mais aussi de découvrir les compositeurs de la cité vénitienne, beauté de la musique et des jeux de lumière, virtuosité des musiciens :  violons, alto, violoncelle, contrebasse, théorbe. Les interprètes, tout en jouant, évoluent sur scène dans une chorégaphie pleine de grâce.

11h 45 Vivaldi, l’âge d’or Girasole durée 1H05  Le Girasole

Antonio Vivaldi, Tomaso Albinoni, Claudio Monteverdi, Barbara Strozzi, Domenico Gallo, Marc'Antonio Ziani, Francesco Turini

  • Interprète(s) : Marianne Piketty, Le Concert Idéal
  • Mise en espace et en mouvement : Olivier Fourés
  • Création lumière : Thomas Jacquemart
  • Robes : Nathalie Chaize
Le Concert IdéalL-R-21-1390

Coréalisation : Le Théâtre du Girasole

Jupe courte et conséquences de Hervé Devolder 

 

Un homme, assis sur un banc, lit son journal. Une femme passe. Il la regarde. Exaspérée, elle le remet violemment à sa place.
Mais les choses ne vont pas s’arrêter à un incident aussi tristement banal. Car l’un comme l’autre entendent bien profiter de cette rencontre imprévue pour défendre les valeurs qui l’animent. Aussi compliqué cela soit -il !

Mon avis : Une dispute entre un homme et une femme dont c'est la première rencontre. Dans la première partie, féminisme agressif de la femme, puis retournement de la situation quand l'homme contre-attaque. Est-ce un prélude à une histoire d'amour ? Mais l'amour peut-il résister à l'usure quotidienne d'une vie commune ? Faut-il s'y risquer ? De l'humour et de bons interprètes !

13H05 Jupe courte et conséquences  Théâtre les Trois Soleils
Auteur
Hervé Devolder
 Interprète(s) : Carole Deffit, Hervé Devolder
Scène et PublicL-R-21-469
Coproduction : Label équipe

 Les fables de La Fontaine de Isabelle Aboulker


Présentation
La Compagnie In-Sense vous invite dans son cabinet de curiosités dont la collection hétéroclite sert d'écrin aux Fables mises en musique par Isabelle Aboulker. 
Dans cet espace rempli de surprises et source de rêverie, les interprètes donnent voix au célèbre fabuliste ainsi qu'à ses personnages hauts en couleur.
 Grâce à la musique ciselée de ces opéras miniatures, petits et grands (re)découvriront les textes de La Fontaine, divertissants et profonds, dont le propos acéré trouve écho en chacun de nous.

 Télérama TT : "À savourer en famille !" 

Mon avis :  Ecouter les fables bien connues de La Fontaine non pas dites mais chantées, chacune comme un petit opéra, sous forme d'échanges entre la mezzo-soprano Marie Blanc et le baryton Philippe Scagni. De petits accessoires, des éléments de coiffure, de vêtements, cols en fourrure, chapeaux, permettent de faire apparaître les différents personnages, animaux ou êtres humains.

14H Les fables de La Fontaine Les lucioles durée 1H05
Auteurs
Jean De La Fontaine, Isabelle Aboulker

Interprètes / Intervenants

    •    Mise en scène : Léna Rondé
    •    Mezzo-soprano : Marie Blanc
    •    Baryton : Philippe Scagni
    •    Piano : Ernestine Bluteau
    •    Violoncelle : Marina Nguyen The
    •    Clarinette : Maïté Atasay
    •    Lumières : Agathe Patonnier
    •    Costumes : Madeleine Lhopitallier
    •    Collaborateur artistique : David Tholander

Compagnie In-Sense2-1056950
Coproduction : Opéra de Massy
La Cie In-Sense crée des spectacles d’opéra et de musique classique. Soutiens : Opéra de Massy, Spedidam, Sacem, Théâtre de Talange, Arcal Lyrique.



mercredi 4 août 2021

Benoît Solès : La maison du Loup La rencontre avec Jack London au festival d'Avignon 2021

 

Été 1913. Depuis sa sortie de prison, Ed Morrell se bat pour que son ami Jacob Heimer échappe à la peine de mort. Impressionnée par la détermination de cet homme dans son combat, Charmian London, l’épouse du célèbre écrivain Jack London, invite Ed dans leur ranch, La Maison du Loup, dans l’espoir que la rencontre entre les deux hommes provoquera chez Jack, en mal d’inspiration, une étincelle.
Il n’est guère étonnant que la nature insoumise d’Ed Morrell, sorte de Robin des Bois ayant purgé quinze ans dans les geôles de San Quentin et devenu, après sa libération, un activiste engagé dans la réforme du système pénitentiaire, ait attiré Jack London l’écrivain de la liberté. Benoit Solès qui s’est déjà mesuré à des figures hors du commun a eu l’excellente idée de réunir sur scène ces trois personnages d’autant que, maintes fois portées à l’écran, les œuvres et la vie de Jack London n’ont que rarement fait l’objet d’adaptations théâtrales.


En 2019, la pièce de Benoît Solès, auteur et comédien : La machine de Turing (4 Molières 2019), et du metteur en scène Tristan Petitgirard, avait obtenu un tel succès que je n’ai pu aller la voir, le spectacle étant complet jusqu’à la fin du festival !  C'est la première motivation pour que j’aille voir cette pièce La maison du loup représentée au théâtre Le Chêne Noir, cette année, où ils étaient à nouveau réunis !
 Et puis, après le challenge Jack London, ici, dans mon blog, et ma lecture de sa dernière oeuvre Le vagabond des étoiles, j’avais très envie d’assister à ce récit qui imagine la genèse du roman !
 

Benoît Solès raconte la rencontre de Jack London avec Edward Morell, repris de justice, condamné à perpétuité pour avoir cambriolé la Southern Pacific Railroad, enfermé dans la prison de Saint Quentin, Californie. Victime des sévices infligées aux réfractaires, il est gracié en 1908. Il milita ensuite à sa sortie de prison pour la réforme des pénitenciers.
Invité par Charmian, l’épouse de Jack London, Ed Morell arrive à la Maison du loup, domaine californien des London. Charmian porte à bout de bras son grand homme, accro à la morphine et qui sombre dans l’alcool, incapable d’écrire une ligne, l’imagination tarie, la volonté annihilée. Elle cherche ainsi à ranimer la flamme de l’écriture, seule survie possible pour l’écrivain. Effectivement, Jack London se remet à écrire et c’est la parution de The Star Rover en 1915, dont l’influence considérable provoqua la réforme du système judiciaire et carcéral californien, véritable chant du cygne littéraire et politique de London qui meurt en 1916.
Mise en scène par Tristan Petitgirard, La maison du loup, est un spectacle qui m’a beaucoup touchée tant on sent la souffrance de ces personnages tourmentés, Charmian qui ne peut avoir d’enfant après la mort de son bébé, Jack London, en pleine auto-destruction, en proie à ses démons. Superbement interprétés, ils nous touchent par la violence de leurs propos, leur désespoir,  par  leur courage, leur engagement pour le bien, mais aussi leurs faiblesses et leurs contradictions :  Jack London, le socialiste, et ses folies de grandeur, qui se fait construire une maison de 26 pièces avec neuf cheminées… qui parle de justice et d’égalité mais développe le culte de la volonté, légitimant ainsi la survie du plus fort.
 
A souligner la beauté des jeux de lumière et des projections sur une toile de fond qui nous transporte avec les chercheurs d’or dans les neiges du Konklide, sur l’océan déchaîné où vogue le Snark, sur la chaloupe des pêcheurs de perles, sur laquelle le jeune London s’est fait pilleur d’huîtres - musique de l’opéra de Bizet en leitmotiv - ou dans les dédales des couloirs du pénitencier, retraçant ainsi la vie de l’écrivain, son humanité torturée, et ses oeuvres majeures !
Un très beau spectacle, un coup de coeur !

 14 h 30  La maison du loup  Le chêne Noir festival 2021

Auteur
Benoit Solès
Interprètes / Intervenants
    •    Metteur en scène : Tristan Petitgirard
    •    Interprète(s) : Benoit Solès, Amaury de Crayencour, Anne Plantey
    •    Scénographie : Juliette Azzopardi
    •    Illustrations : Riff Reb's
    •    Animation : Mathias Delfau
    •    Musique : Romain Trouillet
    •    Costumes : Virginie H
    •    Lumières : Denis Schlepp
    •    Assist. m. en sc. : Léa Pheulpin
    •    Assist. scéno. : J.-B. Thibaud

Atelier Théâtre ActuelL-R-20-1927
Coproduction : Morcom Prod, Théâtre Rive Gauche, Fiva Productions, Label Cie. Coréalisation Théâtre du Chêne Noir

 

Les pêcheurs de Perles de Bizet "Je crois entendre encore" Alain Vanzo, l'opéra préféré de Jack London

Voir les billets sur le roman : Le Vagabond des étoiles 

 Lilly ICI

Marilyn ICI

Miriam ICI

Claudialucia ICI