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vendredi 20 mai 2022

Anton Tchekhov : Le Moine noir et Kirill Serebrinnokov au festival d'Avignon 2022


Cette année, au festival de théâtre d’Avignon 2022, la Cour d’honneur accueillera Le moine noir, une nouvelle d'Anton Tchekhov, adaptée par le metteur en scène russe Kirill Serebrinnokov.

Le récit

Egon Schiele: autoportrait

Kovrine, jeune professeur de philosophie, promis à un avenir brillant, souffre d’un épuisement nerveux lié à un excès de travail. Un ami médecin lui conseille de partir se reposer à la campagne et, justement, le jeune universitaire reçoit une lettre de Tania, la fille de son vieil ami Igor Siemonytch Pessotski, un célèbre horticulteur, qui a été son tuteur à la mort de ses parents et qui l’aime beaucoup. Le jeune homme se rend chez eux. Il y est accueilli chaleureusement. La jolie et vive Tania n’est plus une petite fille et il sera facile d’en tomber amoureux. C’est le voeu le plus cher de son père ! Le jardin provoque l’admiration de Kovrine. Tout semble pour le mieux. Mais une créature fantastique, un moine noir, apparaît au jeune homme comme surgi du vaste univers, inquiétant, obsédant. Dès lors le jeune homme ne cesse de le voir partout. Rêve ou réalité? Intervention du fantastique ou hallucination ? Folie ?  

  La nouvelle devient une descente aux enfers au cours de laquelle Kovrine, hanté par le Moine noir, se perd entraînant ceux qui l’entourent dans la mort et la souffrance.

La genèse de l’oeuvre

Anton Tchekhov

La nouvelle Le moine Noir a été rédigée dans la propriété de Tchekhov, à Mielikhovo, et publiée en 1893. A cette époque, Anton Tchekohv est très angoissé, victime d’un épuisement nerveux. Il ne dort plus et rêve bien souvent d’un moine noir qui le hante et l’effraie. Cette vision tourne à l’obsession et l’écrivain ne pourra y échapper qu’en écrivant cette nouvelle. Même s’il se défend d’avoir créé le personnage de Kovrine à son image, il est certain que Tchekhov y a mis beaucoup de lui-même. Il s’intéresse particulièrement à cette époque à la psychiatrie et à la maladie mentale. Il reçoit d’ailleurs chez lui un ami, psychiatre célèbre, et c’est à cette période qu’il écrit la nouvelle Salle n° 6 sur ce thème. N'oublions pas qu'il est lui-même médecin et coordonne à la même époque les mesures sanitaires pour lutter contre l'épidémie de choléra et soigne les paysans de Mielikhovo.
D’autre part, comme il a acquis sa propriété en 1892, il s’intéresse à la botanique, et découvre, entre autres, la technique des greffes et aussi des fumées contre le gel. Il n’est donc pas étonnant de retrouver ces préoccupations dans le domaine de Pessotski ou Kovrine va se reposer et où le jeune homme admire le magnifique jardin de son hôte, son savoir faire et celui de sa fille, la jeune Tania.

Le jardin

Claude Monet : Giverny
 

Le jardin est un des thèmes importants de la nouvelle. Plus qu’un simple décor, c’est un paysage mental, oscillant entre la tristesse, l’étrangeté, propices aux hallucinations, et la beauté, le calme, lieu où le bonheur semble possible.

Dès l’arrivée du jeune homme, la description de la demeure et du paysage alentour présente, en effet, un aspect inquiétant, sombre, dégradé,  reflétant peut-être les tourments intérieurs du jeune homme, son état psychique.

"La maison des Piessotski était une énorme bâtisse à colonnade et à têtes de lion dont le plâtre s’écaillait, un laquais en habit se tenant à l’entrée. Un vieux parc tracé à l’anglaise, sévère et triste, s’étendait sur près d’une verste de la maison à la rivière, se terminant par une berge abrupte et argileuse où poussaient des pins aux racines dénudées ressemblant à des pattes velues ; en contrebas, l’eau brillait, farouche, des courlis voletaient en poussant des cris plaintifs et l’on s’y sentait toujours d’humeur à s’asseoir pour composer une ballade."

L’écrivain décrit ensuite le jardin dans un style poétique, riant, par petites touches de couleurs qui rappelle un tableau impressionniste. Un paradis ?

« Mais à proximité de la maison, dans la cour et dans le verger qui, avec les pépinières, faisait une trentaine d’hectares, c’était gai, rempli de joie de vivre, même par mauvais temps. Nulle part ailleurs Kovrine n’avait vu des roses, des lis et des camélias aussi admirables, de telles tulipes de toutes les couleurs possibles, du blanc éclatant au noir de suie, une si grande richesse florale. On était seulement au début du printemps, et la splendeur des parterres se cachait encore dans les serres, mais ce qui fleurissait déjà le long des allées et dans divers massifs ça et là suffisait à donner le sentiment, en se promenant dans le jardin, de se trouver dans un royaume de couleurs tendres, surtout aux premières heures, quand la rosée brillait sur chaque pétale.

Mais ce jardin idéalisé peut-être aussi présenté d’une manière très réaliste, source d’inquiétude et de disputes entre l’horticulteur et sa fille, source d’un travail constant, pénible, comme le prouvent ces nuits passées à lutter contre le gel dans le jardin, ou la cueillette des fruits intense, harassante, sans répit, ou l’obligation d’écraser à la main des chenilles qui dévore les fruits, ce qui rebute un peu notre héros. Le jardin est une source de revenus considérables, il faut l’envisager aussi d’un point de vue économique. Il n’est en rien un Eden. Mais il est aussi une oeuvre d’art servi par l’amour. Seul l’amour permet une telle beauté affirme Igor Siemonytch Pessotski.

La maladie mentale :  la mégalomanie

Edward Munch : le cri

A propos de cette nouvelle Tcheckhov explique qu’il a voulu montrer ce qu’est la mégalomanie à travers son personnage, ce sentiment d’être l’élu, d’être distingué par Dieu, supérieur aux autres et destiné à surpasser l’humanité. C’est ce que le Moine affirme à Kovrine dans un dialogue ou le personnage tout en conversant avec sa vision et en doutant de sa  réalité semble se parler à lui-même  en proie à un délire de grandeur.

« Vous, les hommes, un grand, un brillant avenir vous attend. Et plus il y aura de gens comme toi sur terre, plus vite cet avenir ce réalisera. Sans vous, qui êtes au service d’un principe supérieur, qui vivez en conscience et librement, l’humanité serait quantité négligeable ; en se développant de façon naturelle, elle aurait encore longtemps à attendre la fin de son histoire terrestre. Mais vous la conduirez au royaume de la vérité éternelle en gagnant plusieurs milliers d’années – c’est là votre grand mérite. Vous incarnez la bénédiction de Dieu qui s’est répandue sur les hommes. »
 

Ce délire mégalomane est une véritable et grave maladie. Le personnage est déconnecté de la réalité et s’attribue des capacités hors du commun. Peu à peu, son mal semble s’aggraver et il se sent plein de mépris pour le reste de l’humanité.

Le fantastique 


Le Moine Noir est l'une des figures fantastiques du roman gothique anglais de M.G. Lewis, Ann Radcliff ou d'un certain romantisme noir. Et il faut bien dire que dès qu'il apparaît, dans la nouvelle de Tchekhov,  il a un aspect effrayant qui l'apparente à cette littérature mais seulement sur le moment :

"Ses pieds nus ne touchaient pas le sol. Quelque trois sagènes plus loin, il se retourna vers Kovrine, le salua de la tête et lui fit un sourire à la fois amical et malicieux. Mais quel visage blême, effroyablement maigre et blême ! Il se remit à grandir, vola par-dessus la rivière et se heurta sans bruit à la berge argileuse et aux pins qu’il traversa pour disparaître comme une fumée."

Mais bien vite l’on ne doute plus de la maladie mentale du personnage et l’on sait que sa vision est de l’ordre de l’hallucination. Pourtant, le ton, le style de la nouvelle, la puissance des apparitions introduisent un climat fantastique qui crée un malaise. Tchekhov a réellement été en proie à ces mêmes visions qui l'ont certainement fait douter de sa santé mentale. Il sait en rendre toute l’horreur et nous faire perdre le contact avec la réalité.

« J’ai écrit Le moine noir sans être mélancolique, j’ai voulu représenter la mégalomanie. Le moine volant au-dessus des champs, j’en ai rêvé. »  (25 janvier 94)

Le lecteur voit  le moine noir comme une projection du réel et éprouve la fascination du héros envers cette apparition fantastique.  

« Mais voici que le seigle était parcouru de vagues et qu’une petite brise du soir venait effleurer la tête nue de Kovrine. Une minute après, nouveau coup de vent, déjà plus fort, qui fit bruire le seigle tandis que, derrière, s’entendait sourdement le murmure des pins. Kovrine s’arrêta, stupéfait. À l’horizon, comme un tourbillon ou une tornade, une grande colonne noire s’élevait de la terre jusqu’au ciel. Ses contours étaient flous mais on comprenait tout de suite qu’elle ne restait pas en place mais se mouvait avec une effrayante rapidité, se dirigeant tout droit sur Kovrine, et plus elle avançait, plus elle rapetissait et se précisait. Il eut à peine le temps de se jeter de côté, dans le seigle, pour lui laisser le passage… 

 Un moine vêtu de noir, à la tête chenue et aux sourcils noirs, les bras en croix sur la poitrine, passa en coup de vent à côté de lui…

Ainsi si l’écrivain a voulu observer et analyser la dégradation mentale d’un homme qui peu à peu, en proie à des hallucinations récurrentes, finit par perdre la raison et sombrer dans la folie, il n’en reste pas moins qu’il a su jouer avec le fantastique et introduire l’étrange  et le surnaturel dans son récit. 

La beauté du style de Tchekhov, l’efficacité avec laquelle il fait intervenir la nature pour décrire les phénomènes fantastiques, l'analyse des troubles mentaux et de ses conséquences tragiques, font de cette nouvelle une réussite !

***

Kirill Serebrinnokov au festival d'Avignon


C'est donc le metteur en scène russe Kirill Serebrinnokov qui va présenter ce spectacle dans la Cour d'Honneur du festival  d'Avignon. J'attends avec impatience de pouvoir y assister.
 

"Quand Kirill Serebrennikov adapte cette nouvelle fantastique, il se souvient qu'Anton Tchekhov dépeint des personnages pris dans « le cercle infernal » de vérités particulières. Rien de moins pour rétrécir leur champ de vision. Le metteur en scène se souvient également que le récit est composé d’une multitude de récits personnels qui se percutent et se tissent en un ensemble complexe : celui d’une vérité qu’aucun n’est capable de détenir seul. Un enjeu que l’artiste dissident traduit en montant la même histoire du point de vue de chacun des protagonistes et en multipliant les perspectives et points de fuites. Tous sont observés par Hécate, la déesse des lunes maléfiques qui hantent le plateau…" voir programme du festival ici

Kirill Serebrennikov s'interroge sur le désir humain et irrépressible de liberté, sur l'art, le génie et l'autodestruction à laquelle ces tentations peuvent mener. 

 


 

dimanche 20 février 2022

Honoré de Balzac : La messe de l'athée

 

La messe de l’athée est une courte nouvelle de Balzac qui met en scène le chirurgien Desplein, un homme de sciences passionné, honnête, dévoué aux pauvres, mais dont l’excentricité fait scandale dans la société ainsi que certaines incohérences dans son comportement. Cependant son génie médical n’a pas d’égal. Il se distingue par son athéisme qui ne laisse place à aucun doute, et il est, selon l’expression de Balzac, «invinciblement athée». Le second personnage est le médecin Horace Bianchon, (personnage récurrent de La Comédie Humaine) dont Desplein a été le maître. Tous deux se sont liés d’amitié. Or, un jour, Bianchon voit le chirurgien entrer dans une église, il le suit, et, à son grand étonnement, il s’aperçoit que l’athée suit la messe dans une petite chapelle. Après une enquête, il se rend compte que ce n’est pas la première fois. Pourquoi ? C’est ce qu’il apprendra de la bouche même de son ami qui lui raconte son histoire. Ce que je vous laisse découvrir.

Evidemment pour Balzac qui voit dans le christianisme « et surtout dans le catholicisme » « un système complet de répression des tendances dépravées de l’homme » et « un grand élément d’ordre social » être athée est suspect voire rédhibitoire. Mais Desplein lui est manifestement sympathique et la découverte de son histoire, dit l'auteur, doit venger le médecin des « quelques sottes accusations » que lui réserve la société jalouse de son succès. Si Balzac égratigne au passage certains personnages politiques de son siècle, tels de nouveaux Tartuffe, il devient vite évident que Desplein n’en est pas un à ses yeux.
Le récit raconté par Desplein lui-même est, en fait, une belle histoire d’amitié et de fidélité. Il nous livre le beau portrait d’un vieil homme, le troisième personnage de la nouvelle et pas des moindres, l’Auvergnat Bourgeat, modeste porteur d’eau, qui sait ce que c’est que la solidarité et le dévouement et vient en aide au jeune homme alors étudiant. Bourgeat qui devient pour lui comme un père !
Il nous parle de la misère du peuple, de l'habitat insalubre , et surtout de ces jeunes gens, ces étudiants, qui cherchent à s’élever au-dessus de leur classe sociale, en continuant leurs études, malgré la faim, le froid, l’isolement. Thème récurrent chez Balzac.
"J’étais seul, sans secours, sans un sou ni pour acheter des livres ni pour payer les frais de mon éducation médicale; sans un ami : mon caractère irascible, ombrageux, inquiet me desservait. Personne ne voulait voir dans mes irritations le malaise et le travail d’un homme qui, du fond de l’état social où il est, s’agite pour arriver à la surface."

Balzac dénonce l’égoïsme et la dureté des hautes sphères de la société parisienne :
"A Paris, quand certaines gens vous voient prêts à mettre le pied à l’étrier, les uns vous tirent par le pan de votre habit, les autres lâchent la boucle de la sous-ventrière pour que vous vous cassiez la tête en tombant; celui-ci vous déferre le cheval, celui-là vous vole le fouet ; le moins traître est celui que vous voyer venir pour vous tirer un coup de pistolet à bout portant."

Le ton enflammé et amer de la diatribe nous révèle non seulement les souffrances du personnage mais le vécu personnel de l’auteur, Balzac ayant connu, lui aussi, de difficiles débuts.

La défense de l’athée Desplein, pourtant, s’accompagne d’un regret que le catholique Balzac exprime par cette conclusion édifiante :

"Bianchon qui soigna Desplein dans sa dernière maladie, n’ose pas affirmer aujourd’hui que l’illustre chirurgien est mort athée. Des croyants n’aimeraient -ils pas penser que l’humble Auvergnat sera venu lui ouvrir la porte du ciel, comme il lui ouvrit jadis la porte du temple terrestre au fronton duquel se lit : aux grands hommes la partie reconnaissante."

Lecture commune avec Maggie ICI

Miriam : ICI  

Rachel ICI

Pativore ICI

vendredi 26 mars 2021

Léon Tolstoï : Maître et serviteur

 

J’ai re/relu la nouvelle de Léon Tolstoï intitulé Maître et serviteur. C’est un texte que j’aime beaucoup parce qu’il est fondamentalement russe, je veux dire qu’il présente tout ce j’aime dans la littérature russe, dans l’âme russe, dans le paysage russe. Et il est aussi typiquement tolstoïen avec ses thèmes préférés, la paysannerie, la neige, le froid, la peur de la mort,  le mysticisme ! Donc, un petit texte-régal, dans une tonalité sombre et grave.

Le maître, c’est Vassili Andréitch Brekhounov, marchand de bois, matérialiste,  presque uniquement préoccupé par son métier, par l’appât du gain. Il est prêt à tout pour s’enrichir, pour emporter une bonne affaire au détriment des autres. C’est un homme qui est assez imbu de lui-même et qui a bonne conscience malgré sa malhonnêteté envers son serviteur. Marchand cossu, il pourrait se contenter de ce qu’il a mais il en veut toujours plus. C’est ce trait de caractère qui est à l’origine du drame.

Le serviteur Nikita, moujik de 50 ans, a passé sa vie au service des autres. Il est travailleur, habile, vigoureux, doux avec les bêtes, et doté d’un heureux caractère, ne s’énervant jusqu’à devenir violent, que lorsqu’il est saoul. Mais pour l’heure, il a fait voeu de ne plus s’enivrer « ayant bu son caftan et ses bottes », ce qui dans un pays aussi froid que le sien est lourd de conséquence. Son maître l’exploite, ne lui donne jamais son dû, mais il reste toujours d’humeur égale.

Le maître entreprend un voyage en traîneau, avec Nikita, pour aller acheter du bois à un propriétaire terrien dans un village voisin. La tempête se lève et bientôt l’attelage s’égare dans la neige, parvenant à retrouver son chemin et  trouvant refuge par deux fois dans une maison qui l’accueille. Mais chaque fois, le maître veut repartir pour ne pas manquer son affaire. La dernière fois, c’est vers la mort qu’il se dirige.
Si la nouvelle montre les rapports entre maître et serviteur et les injustices sociales, elle est avant tout un récit sur la mort et interroge sur ce qui fait la valeur de la vie.

La Peinture des paysans russes

Poêle dans une isba de paysan aisé

L’un des aspects passionnant de la nouvelle est la peinture des paysans russes dans laquelle on sent toute l’empathie que Tolstoï porte aux humbles. Les petits détails de la vie quotidienne, leur manière de parler, de penser, leur hospitalité forment un tableau savoureux :

Nikita avec le traîneau pénétra dans la cour, dont Pétrouchka venait de lui ouvrir la porte, et se dirigea vers le hangar, où on lui offrait d’abriter son cheval. Le sol de ce hangar était couvert, pour plus de chaleur, d’une épaisse couche de paille, aussi la douga, qui du reste était assez haute, heurta-t-elle une poutre de la charpente. Aussitôt le coq et les poules, qui perchaient sur la poutre, gloussèrent, indignés qu’on les secouât ainsi de leur sommeil. Les moutons, effarés, se pressèrent dans le coin le plus reculé. Un jeune chien hurla éperdu.
Nikita adressa à la société quelques mots aimables, s’excusant à l’égard des poules et promettant de ne plus les déranger, reprochant doucement aux moutons leur frayeur peu raisonnable, et s’expliquant avec le chien tout en attachant Moukhorty.
« Voyons, cesse donc, petit niais. Nous ne sommes pas des voleurs, et tu te fatigues pour rien. 

 
Il n’y a pourtant aucune idéalisation dans cette  description. Ainsi Nikita qui sait si bien parler aux animaux, qui aime les enfants, fait peur à sa femme qu’il bat lorsqu’il est ivre.
Le roman est paru en 1895. Le servage est aboli depuis des années. Les paysans sont libérés, mais beaucoup d’entre eux, n’ayant plus assez de terre, vivent dans la misère. Tolstoï choisit de nous introduire dans une famille de paysans aisés car ils n’ont pas divisé la propriété. Une sensation de chaleur, de douceur, imprègne la scène de l’isba  du Vieux Tarass où tous sont réunis autour du poêle et du samovar.

La compagnie, après avoir mangé un morceau arrosé de vodka, se préparait à prendre le thé. Le samovar chantait déjà par terre près du poêle. Les enfants étaient sur celui-ci et sur la soupente, et une femme assise sur le lit de camp balançait un berceau. La vieille maman, dont le visage était sillonné en tous sens de petites rides qui plissaient jusqu’à ses lèvres, s’empressait auprès de Vassili Andréitch, à qui elle présentait un verre de vodka au moment où Nikita pénétra de la cour dans l’isba.

Cette scène de lumière et de vie va faire ressortir par contraste la scène de désolation, de froid et de mort qui attend les voyageurs quand ils poursuivent leur voyage.

 Les paysages


La neige est omniprésente dans ce texte et la description de la tempête donne lieu à des scènes de fin du monde. Tout le paysage est en blanc et noir. Blancs, les flocons qui fouettent le visage, aveuglent, ont le pouvoir d’égarer, de détourner le voyageur de sa route. Noirs, les touffes d’armoise, les arbres, les joncs, battus par la tempête et qui sont là pour donner de faux espoirs car le voyageur les confond avec les maisons d’un village et se croit sauvé. Le bruit étouffé par l’amoncellement de la neige laisse place au silence. Celui-ci n’est troublé que par les hurlements du vent, le cri du loup et donne lieu à des hallucinations auditives comme le hennissement du cheval qui apparaît comme un cri monstrueux jaillit de la gorge d’un monstre, le chant du coq que croit, en vain, entendre le maître espérant la venue de l’aube.  Dans ce décor d’outre-tombe, l’on ne sait plus qui est encore vivant, qui est déjà mort.

La mort

Léon Tolstoï

 La mort mène l’attelage, elle donne d'abord sa chance aux hommes, deux fois elle a pitié d’eux, mais la cupidité du maître provoque sa perte. Elle orchestre le bal macabre, elle s’insinue dans les consciences.
Tolstoï a connu lui aussi au cours d’une nuit de cauchemar, l’angoisse terrible de la mort, la prise de conscience du possible anéantissement de son corps. C’est un thème que l’on retrouve dans La mort d’Ivan Illytch. Il est persuadé que les moujiks savent mieux mourir parce que ce ne sont pas des intellectuels et qu’ils restent proches de la nature. L’écrivain montre, effectivement, que Nikita accepte la mort comme la fin naturelle de ses souffrances, de sa vie misérable, avec l’espoir d’une vie meilleure. C’est curieusement une expérience que j’ai retrouvé dans Montaigne qui a éprouvé l’angoisse physique de la mort et conclut, lui aussi, que les paysans savent mieux mourir. Mais l’un arrive à cette conclusion en mystique, l’autre en philosophe.

« Comme tous les hommes vivant en pleine nature et en proie permanente au besoin, Nikita était d’une endurance à peu près illimitée. Les heures, les jours même, pouvaient passer sans qu’il s’irritât, s’impatientât ou s’inquiétât.
La mort imminente ne lui parut ni trop regrettable, ni trop effrayante. Sa vie n’était pas si joyeuse : pure servitude qui commençait à lui peser. D’autre part, il se disait qu’au-dessus des maîtres terrestres comme Vassili Andréitch, il y avait le Maître des maîtres qui l’avait envoyé ici-bas, et qui saurait compenser pour lui les vicissitudes de sa triste existence. » 

 
C’est avec beaucoup de justesse que Tolstoï analyse la montée progressive de la peur dans l’âme du maître. D’abord, il est contrarié d’avoir raté la vente du bois qu’il convoitait, puis en proie à des préoccupations égoïstes, des intérêts assez sordides :

ll n’avait guère envie de dormir. Il réfléchissait, et toujours à la même chose, à l’unique, à ce qui était le but, le sens, la joie et l’orgueil de sa vie : l’argent ; ce qu’il en avait gagné déjà et ce qu’il en pouvait gagner encore ; ce que d’autres en gagnaient ou auraient pu gagner ; les moyens enfin d’en gagner.
lL regarda le cheval. Moukhorty, la croupe contre le vent, tremblait de tout son corps. La toile, couverte de neige, s’était relevée d’un côté et l’avaloire avait glissé. Puis Vassili Andréitch se pencha et jeta un coup d’œil derrière la capote. Nikita n’avait pas bougé. La toile dont il s’était enveloppé, ainsi que ses jambes, disparaissaient sous une épaisse couche de neige.
« Pourvu que le moujik ne meure pas gelé ! Ses vêtements ne sont guère chauds. Et puis il est si exténué. Avec ça qu’il n’a pas le coffre trop solide… Je serais encore responsable de sa mort. »
Il eut l’idée d’enlever la toile du cheval pour la mettre sur Nikita. Mais décidément il faisait trop froid pour sortir du traîneau. Et puis Moukhorty en eût souffert, et c’était une bête qui avait coûté gros.


Mais peu à peu l’idée de la mort provoque un sentiment d'angoisse de plus en plus obsédant dans l’esprit de Vassili Andréitch, une peur qui d’abord le paralyse, puis lui fait commettre une ultime lâcheté : il s’enfuit avec le cheval, abandonnant son serviteur. Mais le  pire, est ce sentiment de déréliction qui  survient lorsque le cheval s’enfuit et qu’il se retrouve seul, perdu dans la neige. Aussi lorsqu’il retrouve le traîneau et son serviteur, il se sent soulagé et comprend que le seul moyen de lutter, c’est de s’occuper d’autrui : du cheval qu’il couvre d’une couverture et de Nikita qu’il couvre de son corps et de sa pelisse. Tout en lui désormais est joie et une évidence s'impose à lui :  « Maintenant, je sais ! »

C’est la conclusion de Tolstoï qui croit que tout homme à la possibilité de sauver son âme par le don de soi.  Le rachat est toujours possible.

 


mercredi 24 mars 2021

Honoré de Balzac : Adieu

 

La nouvelle de Balzac, Adieu, publiée en 1830, intégrée aux Etudes philosophiques de la Comédie Humaine, nous ramène  en 1812 pendant la retraite de Russie, au passage de la Bérézina.
Le récit se déroule au moment où le major Philippe de Sucy, est rentré en France après avoir été fait prisonnier pendant cinq ans par les cosaques. Devenu colonel, Philippe semble assombri par un lourd passé.  Au cours d’une partie de chasse, il aperçoit à travers la grille d’une propriété, une jeune femme qui a un comportement étrange. Il reconnaît sa bien-aimée Stéphanie, comtesse de Vandières, qu’il avait perdue en lui faisant franchir la Bérézina. Recueillie par son oncle , à son retour de Russie, la jeune femme n’a plus toute sa raison et répète inlassablement un mot : « Adieu ».
Le récit effectue un retour en arrière qui nous ramène aux pires heures vécues par l’armée française lors de la retraite de Russie, lorsque la Grande Armée napoléonienne, décimée par le froid et la faim, poursuivie par les armées russes, se retrouve devant la Bérézina, affluent du Dniepr, sans pouvoir la franchir, le pont ayant été détruit par l’ennemi. Napoléon ordonne de construire des ponts provisoires pendant que les russes se rapprochent et que les canons tonnent de plus en plus près.
Philippe de Sucy s’emploie à assurer la survie de Stéphanie qui a suivi son époux, le comte de Vandières, un vieux général. Il parvient à la faire passer, elle et son mari, de l’autre côté de la rivière, sur un radeau construit à la hâte,  mais ne trouve pas de place pour lui. C’est alors qu’elle lui lance ce mot  ultime : « Adieu » et qu’il sera fait prisonnier par les cosaques.
"Stéphanie serra la main de son ami, se jeta sur lui et l’embrassa par une horrible étreinte. – Adieu ! dit-elle. Ils s’étaient compris. Le comte de Vandières retrouva ses forces et sa présence d’esprit pour sauter dans l’embarcation, où Stéphanie le suivit après avoir donné un dernier regard à Philippe.
 – Major, voulez-vous ma place ? Je me moque de la vie, s’écria le grenadier. Je n’ai ni femme, ni enfant, ni mère.
 – Je te les confie, cria le major en désignant le comte et sa femme.
– Soyez tranquille, j’en aurai soin comme de mon œil.
Le radeau fut lancé avec tant de violence vers la rive opposée à celle où Philippe restait immobile, qu’en touchant terre la secousse ébranla tout. Le comte, qui était au bord, roula dans la rivière. Au moment où il y tombait, un glaçon lui coupa la tête, et la lança au loin, comme un boulet. "

Le colonel va tout faire désormais pour aider la comtesse à  recouvrer la raison mais l’issue sera tragique. Comment survivre après une telle tragédie ?  La nouvelle traite donc de la folie et montre comment l’esprit, lorsqu'il qui ne peut en supporter davantage, s’évade dans un autre monde où rien ne peut l’atteindre.

Le passage de la Bérézina

Le maréchal Ney : passage de la Bérézina  Adolphe Yvon

Le grand morceau de bravoure de l’écrivain est la description de cette bataille. Après l’avoir lue nous comprenons d’autant plus le sens de l’expression employée devant un échec, une défaite : «  C’est la Bérézina ! »

L’apathie de ces pauvres soldats ne peut être comprise que par ceux qui se souviennent d’avoir traversé ces vastes déserts de neige, sans autre boisson que la neige, sans autre lit que la neige, sans autre perspective qu’un horizon de neige, sans autre aliment que la neige ou quelques betteraves gelées, quelques poignées de farine ou de la chair de cheval. Mourant de faim, de soif, de fatigue et de sommeil, ces infortunés arrivaient sur une plage où ils apercevaient du bois, des feux, des vivres, d’innombrables équipages abandonnés, des bivouacs, enfin toute une ville improvisée.
 

Lecture commune initié par Maggie

avec  : 

dimanche 28 février 2021

La littérature latino-américaine

 

Le mois de la littérature Latino-américaine d'Ingammic et Goran vient de se terminer. Je suis loin d'avoir lu tous les livres que j'avais mis de côté mais déjà commence le mois de la littérature des pays de l'Est de Goran, Eve et Patrice. Alors il me faut arrêter pour aller vers d'autres horizons, non sans remercier les initiateurs de cette incursion vers l'Amérique latine, des belles et fortes découvertes que j'ai pu faire au cours de ce mois de Février !

 Je fais ici le bilan des livres lus non seulement pendant ce mois mais aussi avant, dans le passé. C'est une littérature que je connais mal mais, bien sûr, j'y retournerai ! Je note en vert les livres que j'ai lus ce mois-ci,  mes deux coups de coeurs, plus les trois livres que je préfère à côté de ces deux coups de coeur. Ce qui n'empêche pas que les autres soient intéressants.


Argentine

 


Salva Almeda : Les jeunes mortes

Hernan Diaz : Au loin

César Aira : Le testament du magicien Ténor

 Alberto Manguel : dans la forêt du miroir (citation)

 Silvia Baron-Supervielle : Lectures du vent

 Brésil


 

 

 

 

 

 


Paulo Coelho : Le pèlerin de Compostelle (2)

Paulo Coelho : le pèlerin de Compostelle (1)

Betty Mindlin : Carnets sauvages chez les Surui du Rondônia



Chili


Pablo Neruda (avec Rimbaud et Gamboa) Nous entrerons aux splendides villes

Pablo Neruda : Oh ! longs trains de nuit

Francis Coloane : Le dernier mousse

 

Colombie



 

 

 

 

 

 

Santiago Gamboa : retourner dans l’obscure vallée (4)

William Ospina : Le pays de la cannelle

Cuba

Alejo Carpentier : Le siècle des lumières (coup de coeur 2)

Leonardo Padura : Les brumes du Passé (Citation)

Leonardo Padura : Les brumes du passé


Guatemala



 

 

 

 

Eduardo Halfon : Deuils

Haïti 





Mexique

 

Carlos Fuentes :  En inquiétante compagnie

Guillermo Arriaga  : Le sauvage (5)

Guillermo Arriaga : Mexico quartier sud 

Homero Arejdis :  Le temps des anges

Pérou



 

 

 

 

 

 

 

Mario Vargas Llosa : la fête au bouc (3)
 

Jose Maria Arguerdas : Diamants et silex (coup de coeur 1)







 



mercredi 24 février 2021

Balzac : La maison du chat qui pelote


Une formidable pièce de bois, horizontalement appuyée sur quatre piliers qui paraissaient courbés par le poids de cette maison décrépite, avait été rechampie d’autant de couches de diverses peintures que la joue d’une vieille duchesse en a reçu de rouge.
Au milieu de cette large poutre mignardement sculptée se trouvait un antique tableau représentant un chat qui pelotait. Cette toile causait la gaieté du jeune homme. Mais il faut dire que le plus spirituel des peintres modernes n’inventerait pas de charge si comique. L’animal tenait dans une de ses pattes de devant une raquette aussi grande que lui, et se dressait sur ses pattes de derrière pour mirer une énorme balle que lui renvoyait un gentilhomme en habit brodé. Dessin, couleurs, accessoires, tout était traité de manière à faire croire que l’artiste avait voulu se moquer du marchand et des passants. (…) À droite du tableau, sur un champ d’azur qui déguisait imparfaitement la pourriture du bois, les passants lisaient Guillaume; et à gauche, Successeur du sieur Chevrel.

Cet extrait donne l’explication du titre de la nouvelle de Honoré de Balzac paru en 1830 dans Scènes de la vie privée : La maison du chat qui pelote, enseigne de la  boutique du drapier Guillaume et de son honorable épouse. Le couple a deux filles, Virginie (28 ans), l’aînée, aussi laide et dévote que sa mère et Augustine (18 ans), jolie à croquer. Mais dans l'esprit de Sieur Guillaume, l’aînée doit se marier avant la cadette et c’est pourquoi le commerçant propose Virginie en mariage à son premier commis, Joseph, bon commerçant, qu’il a en estime et à qui il veut laisser son commerce.
Las ! Ce dernier est amoureux de la cadette. Il n’est pas le seul ! car Théodore de Sommervieux, jeune et riche aristocrate et peintre de génie l’aime aussi. La rivalité se termine bien vite : Augustine épouse Théodore et Joseph, Virginie et la boutique ! 

Un conte de fée pour la fille du marchand épousée par un duc ? Mais l'union de Théodore et Augustine se révèle bien vite mal assortie ! La jeune fille est ravissante mais elle manque d’instruction, elle n’a pas les manières du monde et détone dans cet univers de la noblesse parisienne et du milieu artistique. Et même si elle cherche à plaire à son mari en s’intéressant à l’art, elle n’a pas l’instruction nécessaire, ni l’éducation du goût et de la sensibilité, elle qui n’a été instruite qu’aux livres de compte et aux soins du ménage. Son mari a honte d’elle et la délaisse.
Le drame va se jouer autour du tableau de la jeune femme peinte par Théodore et que celui-ci offre à sa maîtresse la duchesse de Carigliano, image de la coquette parisienne de noble lignée.

« Elle commença par offenser la vanité de son mari, quand, malgré de vains efforts, elle laissa percer son ignorance, l’impropriété de son langage et l’étroitesse de ses idées »  

 Le milieu social

Monsieur Guillaume

Le propos de Balzac le plus évident dans cette nouvelle est que l’on ne doit pas se marier hors de « sa sphère »; une union ne peut être réussie que si l’on sait se tenir à sa place, se contenter du milieu social qui est le sien. Les (més)alliances entre la noblesse d’ancien régime désargentée et la bourgeoise d’argent au XIX siècle sont au coeur de plusieurs romans de Balzac. C’est déjà ce que démontrait Molière en stigmatisant les bourgeois qui s’alliaient à la noblesse et en peignant le triste portait du riche paysan Dandin cocufié par sa femme, fille de gentilhomme. Ainsi, dans la nouvelle de Balzac, le mariage de raison de Joseph et Virginie qui ont la même conformité de goûts, d’intérêts et d’éducation est solide et leur donne du bonheur.
« Une femme devait épouser un homme de sa classe; on était toujours tôt ou tard puni d’avoir voulu monter trop haut; l’amour résistait si peu aux tracas du ménage, qu’il fallait trouver l’un chez l’autre des qualités solides pour être heureux… »

L’art et le commerce 

 

Atala au tombeau l'un des tableaux le plus célèbre de Girodet

Mais la classe sociale n’est pas le seul obstacle au bonheur de Théodore et Augustine. Il y a pire aux yeux de Balzac. C’est l’incompatibilité entre l’art, le « sublime », « les épanchements de l’âme », « les effusions de pensée » qui sont l’apanage de l’artiste Théodore, et le commerce, ce monde des marchands sans fantaisie, lié à une économie sévère où l’on connaît « le prix des choses », des « travaux obstinés », où règne une « propreté respectable » et où l’on mène « une vie exemplaire » mais ennuyeuse, sans plaisirs. Augustine qui a été habituée «  à n’entendre que des raisonnements et des calculs tristement mercantiles » représente cette classe : « Elle marchait terre à terre dans le monde réel alors qu’il avait la tête dans les cieux ».

Balzac malmène, non sans un certain mépris, la bourgeoisie marchande, ses préoccupations mercantiles, son manque de culture, de sensibilité artistique, mais il respecte sa probité et ses moeurs honnêtes.

«  De la résultait la nécessité de recommencer avec plus d’ardeur que jamais à ramasser de nouveaux écus, sans qu’il vînt en tête à ces courageuses fourmis de se demander : A quoi bon ? »

On voit où va l’admiration de Balzac. L’art est partout dans la nouvelle, on y parle de David, de Raphael, de Michel Ange, du Titien, de Léonard de Vinci. L’ami de Théodore de Sommervieux n’est autre que Girodet, disciple de David, peintre néo-classique mais déjà préromantique.

Le portrait 

Augustine chez la duchesse de Carigliano : le portrait
 

 Le portrait peint de mémoire par Théodore, amoureux d'Augustine, alors qu'elle ne le connaît pas encore, va jouer un grand rôle dans le récit. Je ne peux m'empêcher de penser qu'il est à la limite du fantastique comme la peau de chagrin du même Balzac ( 1831) qui rétrécit à chaque désir de son propriétaire ou le portrait de Dorian Gray de Wilde qui se corrompt à chaque vice de celui qu'il représente.

On ne peut peindre ainsi que si l'on aime. Les amis de Théodore devinent immédiatement qu'il est amoureux de la jeune fille. Ils le comparent aux plus grands atistes peignant leur bien-aimée, Raphael, Le Titien...  Le portrait est donc doté d'une magie que tous ressentent. Théodore refuse de le vendre même si on lui en offre des sommes énormes.

Plus tard, il le donne à la duchesse de Carigliano parce que celle-ci en a exprimé le désir. Cette  trahison a une portée symbolique grave. La duchesse ne le lui a demandé que pour tester jusqu'où il irait dans son amour pour elle ou comme elle le dit avec cynisme : "Je ne l'ai exigé que pour voir jusqu'à quel degré de bêtise un homme de génie peut atteindre." : Elle le rend à Augustine pour qu'elle retrouve son mari. Pour elle, il n'est pas question d'amour ou de passion dans le mariage mais de domination.

Si armée de ce talisman, vous n'êtes pas maîtresse de votre mari pendant cent ans, vous n'êtes pas une femme, vous méritez votre sort".

En le nommant "talisman", la duchesse reconnaît le pouvoir de ce tableau.

Enfin la destruction de ce portrait à la fin de la nouvelle précipite la fin de la jeune femme. C'est comme si le peintre avait porté des coups à Augustine elle-même et avait tué leur amour..

La nouvelle a donc de l’intérêt en ce qui concerne l’étude de la vie privée, des moeurs et des classes sociales. Les personnages sont bien campés et complexes. Les rapports entre hommes et femmes sont aussi finement analysés.
Ce qui m’a un peu gênée, c’est le caractère abrupt de du dénouement. Sans transition, on passe à la scène finale si rapidement que j’ai cru qu’il manquait une partie du texte. Mais non, il n'en est rien ! D'où un moment de flottement et d'inachevé à la fin. Mais souvent, dans ses nouvelles, Balzac aime ce genre de dénouement !


LC  BALZAC  initiée par  Maggie 

avec  Myriam
 

mercredi 20 janvier 2021

Jack London : quatrième bilan


Voici le quatrième bilan du challenge Jack London. Merci  à tous et toutes pour vos participations! je pensais qu'il était peut-être temps de fermer ce challenge, certains d'entre vous avouant leur lassitude. Et  puis non ! Beaucoup soufflent un peu mais ont l'intention de continuer leur lecture. 
Donc avis aux participants et à ceux qui auraient envie de s'inscrire maintenant, il est toujours temps, l'aventure London continue jusqu'à la fin Mars 2021 et plus si vous le désirez.
 
Pour ma part, j'aimerais bien relire les livres de mon enfance, L'appel de la forêt et Croc blanc, que j'ai laissés de côté au début du challenge pour découvrir le London qui m'était inconnu.

Je rappelle en quoi consiste ce challenge  :  Il s'agit de découvrir et de commenter des romans, des nouvelles et des essais de Jack London. On peut aussi lire des BD, voir des films qui sont des adaptations de ses oeuvres, et s'intéresser à sa biographie.
 
  La seule contrainte est de venir mettre un lien dans mon blog pour que je puisse noter les oeuvres lues et venir vous lire. (Pour trouver la page ou déposer les liens, cliquez sur la vignette du challenge Jack London dans la colonne de droite de mon blog).
 

 Les  titres les plus lus

Dans les livres les plus lus et les plus appréciés il y a son roman en partie autobiographique Martin Eden considéré bien souvent comme son chef d'oeuvre. 6 billets  Miriam a présenté aussi la critique du film de Pietro Marcello, l'adaptation moderne du livre.

Sa nouvelle Construire un feu  6 billets dont deux sur la BD de Chabouté, magnifique adaptation de cette nouvelle.

 Son essai Le peuple d'en bas ou le peuple de l'abîme, un témoignage réaliste et poignant de la misère du peuple à Londres 5 billets 

Le vagabond des étoiles, le roman qui a permis la réforme les conditions de détention dans les pénitenciers. Marylin présente une belle adaptation du livre avec la BD de Riff Reb. 5 billets 

 Lu pendant la pandémie son roman d'anticipation La peste écarlate a frappé les esprits et la comparaison avec notre époque a été très intéressante. 4 billets 

Et puis...

 Lili, elle est la seule a voir lu ce roman La vallée de la lune,  a peiné à le terminer et les idées de Jack London lui ont donné la nausée !

Les participants au challenge 

 


Aifelle   Le goût des livres   

 
 
 
 
 
 

 

 

 


 
 
 
 
 
 

   



 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 





 
 
 
 
 




Electra La plume d'Electra