Il y avait longtemps que je n’avais pas lu Laurent Gaudé et c’est avec La porte des enfers que j’ai repris ma lecture de cet auteur. Il faut dire que le thème traité, celui du mythe d’Orphée, me passionne. Orphée, tout comme Ulysse, sont les seuls hommes à être entrés vivants aux Enfers. Ce mythe fascinant nous concerne tous, et touche particulièrement à ce que nous sommes... mortels ! Il parle de notre humanité, de nos chagrins, de nos deuils, de la perte d’êtres chers qui nous dépossède un peu, chaque fois, de ce que nous sommes. Il raconte notre révolte contre les dieux. L’être humain rêve de pouvoir inverser le cours du temps, de pouvoir lutter à armes égales avec la divinité, de pouvoir revoir vivant l’enfant, le père, l'épouse… qui ont disparu pour toujours. Mais le mythe nous rappelle aussi notre petitesse et notre impuissance car nul ne peut faire revenir quelqu’un d’entre les morts à moins d’être Dieu.
Laurent Gaudé transpose le mythe d’Orphée à Naples, à l’époque actuelle. Au cours d’une fusillade, Pippo, le petit garçon de Matteo est tué alors que son père l’amène à l’école. Au sens figuré, c’est alors la descente aux Enfers pour Matteo comme pour Guliana, sa femme : comment accepter l’inacceptable, comment ne pas se sentir coupable, envahi de regrets, de doutes, de colère, comment ne pas être anéanti par le chagrin ou secoué par la révolte ? Aussi, lorsque dans le petit café de Gariboldo, le mystérieux professeur Provolone lui dit connaître la véritable porte des Enfers, Matteo ne résistera pas longtemps et partira à la recherche de l’enfant. Mais Matteo parviendra-t-il à faire sortir son fils ? Si le livre est celui de la mort, des ombres et du chagrin, il est aussi celui de l’amour, un amour paternel si fort, si total qu’il permettra, peut-être, l’impossible.
J’avoue que j’ai été complètement happée dès le début par la scène où la fusillade éclate, si puissante, si juste et si précise, qu’il m’a semblé la vivre moi-même ! Tout se passe rapidement et pourtant paraît long! Le père se jette par terre pour protéger Pippo, puis découvre la mort de son enfant. On a l’impression de vivre comme lui la scène, au ralenti, comme lui de découvrir en différé la réalité et d’être incapable de l’accepter.
Il y a une force, une violence dans les réactions de la mère, dans son reniement de Dieu, un désespoir chez le père partagé entre faiblesse et détermination, qui font de ce roman une oeuvre pleine et poignante. Une adaptation très réussie du mythe.
depuis la lecture du soleil des scorta que j'avais pas trop apprécié, j'hésite avant de me replonger dans un autre roman de l'auteur...
RépondreSupprimerJ'avais aimé Le soleil des Scorta, alors...
RépondreSupprimerIl est dans ma Pile À Lire depuis un moment mais j'ai peur que ce soit trop éprouvant à lire. Il faudra que je surmonte cette crainte.
RépondreSupprimerOui, bien sûr, les thèmes sont durs mais le livre est bon et puis le fantastique se mêle au réalisme.
Supprimermoi aussi j'avais aimé le Soleil des Scorta (mais quelle violence, toujours, chez cet auteur)
RépondreSupprimerOui, mais enfin, le monde étant ce qu'il est, on peut dire que rien n'est exagéré dans les livres de L. Gaudé.
SupprimerChaque livre de Laurent Gaudé que j'ai lu m'a profondément marquée - en particulier Ecoutez nos défaites. Je note celui-ci, merci.
RépondreSupprimerJe pense que celui-ci vous plaira.
SupprimerJ'ai été complètement happée par ce roman aussi, longtemps après lecture, j'en garde encore des images. La ville de Naples était sans doute pour quelque chose dans cet engouement mais pas seulement.
RépondreSupprimerLa ville et le talent du conteur ! La force est aussi dans les sentiments ressentis et dans le fait que le lecteur est dans l'impossibilité de prendre du recul par rapport à ce qui se passe, d'où cette impression de vivre l'histoire.
Supprimerun mythe que j'apprécie dans les textes antiques mais pas certaines de me laisser prendre dans un roman moderne
RépondreSupprimerJ'y ai bien adhéré !
SupprimerJ'ai découvert cet auteur avec "La mort du roi Tsongor", plein de poésie; son écriture a une puissance étonnante, toujours entre mythe et réalité.
RépondreSupprimerJe n'ai pas encore lu La mort du roi Tsongor mais cela viendra !
SupprimerOrphée ou Ulysse n'étaient pas tout à fait des hommes, ils avaient maille avec les dieux. Hercule aussi est descendu aux enfers pour vaincre Cerbère, Hercule était un demi-dieu. La mort a toujours tracassé les hommes, de même que l'alternance des jours et des nuits, la ronde des saisons (Proserpine, épouse de Pluton). Alors l'enfer a été inventé, ainsi que son corollaire le paradis)
RépondreSupprimerJe ne me souviens plus du film "Orfeu Negro" pour l'avoir vu il y a trop longtemps mais il traduit bien l'universalité du thème
Que j'avais aimé ce film à l'époque où il est sorti! Je me demande s'il n'a pas vieilli ?
SupprimerJ'aime beaucoup ton premier paragraphe en particuliers la fin qui exprime si bien ce que l'on peut ressentir de plus en plus le temps passant...
RépondreSupprimerComme a écrit Victor Hugo "la vie n'est qu'une longue perte de tout ce qu'on aime".... Cependant elle amène des gains aussi. C'est ainsi que l'on peut continuer à avancer en âge....
Tu as raison et les gains sont, entre autres, dans ce petits enfants qui nous continuent.
SupprimerUn thème difficile en effet mais qui semble avoir été parfaitement maîtrisé par l'auteur. Oui c'est ainsi lorsque un évènement violent se passe. Quelques fractions de seconde et pourtant dans notre tête et notre souvenir de longs longs moments.
RépondreSupprimerC'est ce que nous fait ressentir le roman.
SupprimerJe n'ai jamais lu cet écrivain (Goran : https://deslivresetdesfilms.com)
RépondreSupprimerC'est dommage ! Je pense qu'il pourrait te plaire.
SupprimerJ'avais beaucoup aimé ce roman comme la plupart des romans de cet auteur.
RépondreSupprimerJe ne les aimes pas tous mais certains comme celui-ci oui !
SupprimerQue j'aime cet auteur et que j'ai aimé ce roman ! Même si ce n'est pas mon préféré. Ah Le soleil des Scorta ! Une pure merveille
RépondreSupprimerJe suis comme toi, en particulier le soleil des Scorta !
SupprimerC est mon préfère même si j aime tous les autres. Sans doute suis je encore plus sensible au mythe d Orphee. Autrefois nous avions monté Orpheo Negro en ombres et marionnettes au college
RépondreSupprimerPour moi aussi, le mythe d'Orphée m'a beaucoup attirée.
SupprimerUn spectacle sur ce mythe avec des marionnettes, génial.
Nous en classe de cinquième on avait aussi travaillé un spectacle avec des marionnettes mais sur Le roman de renard.
Un de mes auteurs favoris ! Je ne m'en lasse pas. j'ai beaucoup aimé ce roman même si Le soleil des Scorta reste mon favori.
RépondreSupprimerComme toi !
SupprimerUn livre tiré d'un mythe... voilà qui a de quoi me tenter! Et moi aussi, j'avais beaucoup aimé "le soleil des scorta"
RépondreSupprimerDaphné
Je n'ai jamais lu cet auteur, mais la réécriture de ce mythe, que je trouve très beau, m'attire. Tu me conseilles plutôt "Le Soleil des Scorta" pour découvrir Gaudé ?
RépondreSupprimerC'est mon préféré mais je n'en ai pas beaucoup lu !
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