Le Caravage : Judith et Holopherne |
Il y a longtemps que je voulais lire le livre de Dominique Fernandez sur le Caravage : La course à l’abîme. Et bien voilà, c’est fait ! Le roman date de 2002 mais il reste l’une des meilleures approches de la vie et de l’oeuvre du peintre, roman historique qui fait appel à l’imagination de l’auteur, mais qui est aussi le travail d’un érudit, agrégé d’italien, professeur d’université, amoureux inconditionnel de Rome et du baroque, l'art de la contre-réforme.
Rome, 1600. Un jeune peintre inconnu débarque dans la capitale et, en quelques tableaux d’une puissance et d’un érotisme jamais vus, révolutionne la peinture. Réalisme, cruauté, clair-obscur : il bouscule trois cents ans de tradition artistique. Les cardinaux le protègent, les princes le courtisent. Il devient, sous le pseudonyme de Caravage, le peintre officiel de l’église. Mais voilà : c’est un marginal-né, un violent, un asocial ; l’idée même de « faire carrière » lui répugne. Au mépris des lois, il aime à la passion les garçons, surtout les mauvais garçons, les voyous. Il aime se bagarrer, aussi habile à l’épée que virtuose du pinceau.
Condamné à mort pour avoir tué un homme, il s’enfuit, erre entre Naples, Malte, la Sicile, provoque de nouveaux scandales, meurt à trente-huit ans sur une plage au nord de Rome. Assassiné ? Sans doute. Par qui ? On ne sait. Pourquoi ? Tout est mystérieux dans cette vie et dans cette mort. (quatrième de couverture)
Condamné à mort pour avoir tué un homme, il s’enfuit, erre entre Naples, Malte, la Sicile, provoque de nouveaux scandales, meurt à trente-huit ans sur une plage au nord de Rome. Assassiné ? Sans doute. Par qui ? On ne sait. Pourquoi ? Tout est mystérieux dans cette vie et dans cette mort. (quatrième de couverture)
La vie de Michelangelo Merisi qui prend pour nom d’artiste celui du village où il est né en 1571, Caravaggio, dans le duché de Lombardie, est si mouvementée, si violente, pleine de vicissitudes, de gloire et de déchéance, entre palais et prison, qu’il pourrait sembler le héros type de tout roman d’aventures ! Entre échauffourées et rixes, l’épée et le poignard faciles, fréquentant les tavernes avec ses amants, riche un jour, endetté le lendemain, meurtrier, mourant lui-même de mort violente, il est l’image par excellence du « mauvais garçon » sauvé chaque fois par l’un de ses riches et puissants protecteurs conscients de son talent, amateurs d’art et collectionneurs avides. C’est du moins l’image que l’on a toujours voulu voir de lui. Mais si cet aspect de sa personnalité existe, Dominique Fernandez donne un tout autre éclairage de l’artiste, entre ombre et lumière, à l’image de ses tableaux. Comment le peintre qui est mort à l’âge de 39 ans, dont l’activité ne s’étend que sur une période de dix-huit ans, aurait-il pu accomplir une oeuvre aussi dense, plus de cent tableaux, aussi réfléchie et minutieuse, s’il était ce personnage vivant uniquement dans le désordre et la dépravation ?
Et comme le roman est à la première personne, c’est Michelangelo Merisi qui nous raconte sa vie et rétablit la vérité : « Comment ai-je passé la plus grande partie de ma vie? Assis devant mon chevalet ».
Le Caravage : garçon mordu par un lézard |
Le Caravage suscite l’admiration des grands qui le protègent mais n’hésitent pas à le spolier. Pourtant ses tableaux qui rompent avec la tradition de la Renaissance pour trouver son inspiration dans la rue et qui défient la morale, lui attirent les foudres de l’église et de l’Inquisition. Loin de l’imitation des Anciens et de l’idéalisation des sujets, ses modèles sont des êtres réels qu’il ne cherche pas à embellir, parfois ses amants, de jeunes garçons des rues un peu vulgaires ou ses amies, les prostituées. J'aime bien le personnage de Mario qui a été le véritable amour de Michelangelo et a beaucoup de personnalité .
Le Caravage : Bacchus |
Et l’artiste révèle par la sensualité de sa peinture et son érotisme étalé au grand jour, ses préférences sexuelles qui, à cette époque, peuvent le conduire à la mort. Pourtant, le pire ennemi du peintre, c’est lui-même. Dominique Fernandez le peint sous les traits d'un homme tourmenté, qui ne peut accepter le succès, remettant toujours en jeu sa réussite, trop passionné pour se satisfaire de ce qu'il a. Il se détruit lui-même par une pulsion de mort qui le conduit jusqu’à cette plage où il fut assassiné, véritable course à l'abîme. Si l’auteur fait appel à son imagination pour nous expliquer la fin tragique du Caravage, c’est dans ses oeuvres qu’il a trouvé une réponse, puisant dans leur analyse une connaissance de l’homme.
Car si Fernandez a un talent réel pour brosser un tableau haut en couleurs de ce XVII siècle houleux, des personnages célèbres que côtoie le peintre, des âpres rivalités qui l’opposent aux autres artistes, il nous offre, de plus, une étude intéressante de ses oeuvres, à la lumière de sa vie, analysant les motivations profondes qui guident l’artiste.
Un livre passionnant pour tout amoureux de l’Italie, du Caravage et de l’art en général ! Un roman historique d’un grand intérêt.
Le Caravage : Garçon à la corbeille de fruits (Mario) |
Le garçon à la corbeille de fruits : " sujet unique, célébration d'un seul instant : l'épanouissement de la volupté physique sur le visage de Mario. La tête penchée, la bouche entrouverte, la paupière lourde, le regard vague, l'épaule nue, l'air languide que souligne l'éclairage indirect, l'offrande des fruits -clair symbole de cadeau érotique - , tout, ici, n'est que la traduction imagée de la physionomie de Mario tel qu'il m'apparaissait dans l'intimité..."
"Je suis le premier à avoir mis en évidence que la force érotique déborde de l'endroit du corps où notre paresse mentale, nos préjugés, nos frayeurs la cantonne. Elle irradie où elle veut, avec une impudence souveraine, qui transfigure celui qui en est possédé "
Le Caravage est à l'origine d'un type de peinture, véritable révolution dans l'art, que l'on a appelée le caravagisme et qui présente des caractéristiques communes : Technique du clair obscur, Réalisme, et scène prise sur le vif.
Le Caravage : Emmaus ( clair obscur) |
Les caravagistes, amis ou rivaux du Caravage, font partie des personnages du roman. Ainsi Orazio Gentileschi (le père d'Artemisia) à la fois ami et disciple.
Orazio Gentileschi : Judith et sa servante |
Ah oui ça peut être intéressant, en Italie entre autres j'en ai vu, de ses tableaux.
RépondreSupprimerOui, il est intéressant et même si l'on n'aime pas particulièrement ce peintre, on comprend mieux, par le biais de ce livre, son importance dans l'histoire de l'art et combien il a été déterminant dans l'évolution de la peinture.
SupprimerTrès très tentant... depuis que j'ai vu le triptique de Saint-Sébastien à Saint-Louis des Français à Rome, je suis fascinée par ce peintre !
RépondreSupprimerces tableaux sont impressionnants, en effet ! Et encore je ne connais le triptyque dont tu parles que par des reproductions!
Supprimerj'ai aimé ce livre même si je préfère le fernandez voyageur
RépondreSupprimerJ'ai lu Le Piéton de Rome qui est d'une grande érudition (indispensabe pour la connaissance de Rome) mais je trouve qu'il est conçu plutôt comme un guide que comme un carnet de voyageur.
SupprimerJ'ai lu beaucoup de livres de Fernandez, mais pas celui là!
RépondreSupprimerMon préféré reste Porporino ! Tu l'as lu ?
Supprimermoi qui connaît bien peu ce peintre, je note cette étude :-)
RépondreSupprimerToi qui détestes l'art contemporain, tu devrais être séduite par cet art qui a une force incontestable. Je n'ai jamais aimé le Caravage mais depuis que j'ai lu ce livre, je m'intéresse à lui, à ce qu'il a voulu exprimer, à son refus de l'académisme.
Supprimerça m'intéresse énormément, ce livre-là!
RépondreSupprimermerci, ClaudiaLucia!
J ai lu à deux reprises ce livre avant un voyage à Naples oui un autre amante. J y suis revenue avant notre séjour à Rome cela fait trois fois! J aime chaque fois plus Le Cara
RépondreSupprimervahe
J'aime beaucoup les romans historiques qui évoquent la vie des artistes... quand ils sont bons, ce qui semble bien être le cas de celui-ci. J'avais été l'an dernier très intéressée par les "Mémoires de Giorgione", de Claude Chevreuil, certainement moins flamboyant que celui-ci ,mais qui m'avait beaucoup plu.
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