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jeudi 26 mars 2020

Sophie Kovaleskaïa : une nihiliste


Sophie Kovaleskaïa dans ce roman La Nihiliste raconte l’histoire de Vera, princesse Barontsova. Elevée à la campagne, son enfance est perturbée par l’abolition du servage décidé par le tsar Alexandre II. Les parents, grands propriétaires de la noblesse terrienne, sont obligés de réduire leur train de vie et l’éducation de la fillette est négligée jusqu’au jour où leur voisin Vassilitsev, un homme d’âge mûr, assigné à la campagne à cause de ses idée libertaires, propose de devenir son professeur. L’enfant grandit sous la houlette de son maître et est peu à peu gagnée par ses idées libertaires. Jeune fille, elle tombe amoureuse de Vassilisetv, mais il est exilé, loin d’elle, ayant attiré les foudres du pouvoir pour son comportement envers les paysans qu'il essaie d'instruire et de sortir de leur obéissance passive. Lorsqu’il meurt en exil, Vera Barontsova est malade de chagrin. Elle veut pourtant continuer son oeuvre. A la mort de son père, ruiné, Vera part à Saint Pétersbourg pour essayer de rejoindre les nihilistes mais ce n’est que lorsque s’ouvrira le procès de plusieurs d’entre eux, qu’elle pourra les approcher et saura comment se dévouer. Ce qui fera dire d’elle :  «  C’est une folle » ou«  C’est une sainte ! »

Le récit est raconté par une narratrice qui a bien des points communs avec Sophie Kovaleskaïa. Elle rencontre Vera à Saint Pétersbourg lorsque la jeune fille cherche à tout prix à joindre les groupes révolutionnaires pour servir la « cause » et nous raconte sa vie.
 Vera est un personnage fictionnel mais qui a eu bien des modèles pris sur le vif. Son histoire est aussi, en partie, celle de Sophie Kovaleskaïa et de bien d’autres jeunes filles comme Vera Gontcharova, la nièce de Pouchkine. Le roman présente cette  période de la Russie des années 1870/1880 à partir de l’abolition du servage en 1861, période pendant laquelle les jeunes gens instruits, souvent appartenant à la noblesse, deviennent des  « nihilistes » selon l’appellation donnée par Tourgueniev, terme qui a un sens très précis dans cette Russie de la fin du XIX siècle. Le Nihilisme, c'est la "négation, dit Stepniak, au nom de la liberté individuelle, de toutes les obligations imposées à l'individu. Le nihilime fut une réaction puissante et passionnée, non pas contre le despotisme politique, mais contre le despotisme moral, qui pèse sur la vie privée intime de l'individu"

Dans Père et fils que j’ai commenté dans mon blog ici  ou dans Terres vierges dont je dois encore rédiger le billet, on voit ces jeunes gens gagnés par ces idées libertaires. Ils refusent l’autorité de l’état, du père et de la religion mais ils ne sont pas violents. Ils exaltent la science, la médecine, le positivisme, luttent contre la superstition, et se tournent vers le peuple qu’ils veulent éduquer et libérer de sa mentalité primitive. Les jeunes filles ne rêvent plus de mariage mais d’études universitaires, qui leur sont, le plus souvent, refusées.

Le roman m’a intéressée d’un point de vue historique mais j’ai trouvé la première partie qui raconte  la vie de la fillette plus vivante, plus animée. Les personnages sont plus captivants que dans la seconde partie à Saint Petersbourg où tout est traité si rapidement que le personnage de Vera en est un peu sacrifié. Comme, elle ne parvient pas prendre contact avec les nihilistes, on ne la voit jamais dans l'action. De ce fait,  sa manière de leur venir en aide paraît un peu surprenante et pas tout à fait convaincante.


Sophie Kovalevskaïa (1850-1891). fille de général, féministe, communiste, nihiliste et mathématicienne de génie (elle sera la première femme docteur d'université dans cette discipline), admirée par Dostoïevski, George Eliot et Darwin, doit une bonne part de sa réputation à ce petit roman largement autobiographique paru après sa mort, aussitôt traduit en plusieurs langues, bientôt interdit par quelques censeurs grincheux

Voir le portrait de Sophie Kovaleskaïa , mathématicienne ICI  :

"Les équations aux dérivées partielles étaient le domaine de Sophia. Le mathématicien Cauchy avait travaillé sur ce sujet, puis Sophia en généralisa la portée pour aboutir à un théorème fondamental propre à une certaine classe d’équations aux dérivées partielles. Le théorème de « Cauchy-Kovalevskaïa » établit, sous certaines conditions, l’existence et l’unicité de solutions à une équation aux dérivées partielles assez générale."



7 commentaires:

  1. voilà un domaine où je ne connais RIEN ;-)
    (tant, tant de choses à découvrir!)

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  2. Un sujet très tentant, je le note. Merci & bonne journée.

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  3. J'ai croisé ce roman, je le note cette fois, notamment pour le point de vue historique que tu soulignes ( et puis pour cet aspect autobiographique aussi ).

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  4. Excellente idée de chronique même si je sens que ton enthousiasme est plus mesuré. J'avais bien noté ton grand enthousiasme pour Pères et Fils à l'époque, et je privilégierai ce dernier. Récemment, les éditions des Syrtes ont republié le livre de Nikolai Tchernychevski, Que faire?, qui est aussi un livre typique de cette époque et de ce mouvement, si je ne me trompe pas. (Patrice - Et si on bouquinait)

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  5. J'avais beaucoup aimé ce livre, lu juste avant le Tourgueniev. En effet, la première partie est beaucoup plus intéressante que celle qui se déroule à Moscou.

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  6. Il me semble que je l'avais déjà repéré sur le blog de lilly... Ca me tente toujours :-)

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  7. Enfin une dame russe! et féministe ce qui ne gâche rien! Cela m'interpelle.

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