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dimanche 23 octobre 2022

Bucarest : Le muzeul Colectiilor de Arta ou musée des Collections d'art (5)

Le musée Collectiilor ou musée des Collections : jardin et intérieur/ statue de de Cornel Medrea (1888_1964)/Balescu/Iser

La collection du musée Colectiilor de Arta est installée dans un immense palais qui a appartenu au trésorier Grigore Romanit. En 1940, le régime communiste y a entreposé des collections confisquées aux familles riches. Je n'ai pas pu le visiter entièrement car j'y suis arrivée vers 16h30 après la visite du musée Zambaccian (et autres déconvenues devant des musées fermés) et il ferme à 18H. Je me suis fait mettre à la porte ! 

Il est difficile de visiter les musées de Bucarest si vous ne restez que quelques jours dans la capitale car ils sont pour la plupart fermés le Lundi ET le mardi, de plus certains sont en restauration : en ce mois de septembre 2022,  c'est le cas pour le musée Taranului ou musée du paysan roumain et le palais Georghe Cantacuzino dédié au musicien George Enescu. Impossible de trouver ces renseignements dans mon guide, donc j'y suis allée pour trouver porte close. Le métro qui n'est pas très étendu vous laisse loin du lieu que vous voulez visiter et je n'ai pas pris le temps de me renseigner sur les lignes de bus.  J'aime bien me promener à pied dans la ville pour mieux découvrir. Je me suis perdue dans le quartier du musée Zambaccian, ce qui a été intéressant du point de vue architectural, belles maisons de style divers, mais j'ai raté à cause de tout cela de nombreux musées dont le musée contemporain (près du parlement), celui que je regrette le plus. 

Le musée national de Arta al Romanei, le musée Colectiilor de Arta, le palais Cantacuzino ou musée George Enescu, la salle de concert Atheneul Roman, de même que le musée national d'Histoire de la Roumanie ( intéressant surtout pour la copie de la colonne trajane que l'on peut voir de près, ce qui n'est pas possible à Rome !) se situent tous dans la Calea Victorei sur quelques kilomètres, de part et d'autre du boulevard Regina Elizabeta depuis la ville historique jusqu'à la place Victorei.

Mais revenons à ma visite incomplète du musée des Collections d'art avec tout d'abord ce que j'ai le plus aimé, les icônes de verre et l'exposition des oeuvres de la japonaise Shizuko Onda.

Les icônes sur verre

Bucarest Muzeul Colectiilor de Arta : icônes sur verre


L'Art des icônes sur verre se répand en Transylvanie au XVIII siècle, puis dans le reste du pays. Elles sont l'oeuvre de paysans qui expriment leur foi avec naïveté, sans souci des règles et des symboles qui régissent l'art savant des icônes en bois traditionnelles. Ils peignent des sujets religieux, la Vierge Marie, le Christ, pour les paysans qui veulent emporter Dieu dans leur foyer et prier devant des images saintes à bon marché. Ce qui explique que dès le XIX siècle les icônes sur verre ont été mal vues par les évêques de l'église orthodoxe et par les milieux intellectuels qui méprisent cet art populaire. C'est un prêtre, le père Zosim Oancea,  qui va les remettre à l'honneur dans les années 1960 en pleine période communiste.
Cet art se répand en Transylvanie et varient en fonction de leur provenance. Il y a un important musée d'icônes sur verre à Sibiel, en Transylvanie, au centre de la Roumanie.   

Bucarest Muzeul Colectiilor de Arta : icônes sur verre

La collection du musée Colectiilor, limitée à une seule salle, est éblouissante. Les couleurs, la lumière qui émanent de ces tableaux, le dessin simple, presque enfantin et élaboré à la fois, transmettent  une émotion artistique quel que soit le sentiment religieux que portent les oeuvres.




Icône sur verre musée des Collections d'art Bucarest


Les icônes sur verre de Roumanie relèvent d'une technique ancienne introduite après l'annexion de la Transylvanie à l'empire des Hasbourg (1699). 

J'ai trouvé un site expliquant la technique de la peinture des icônes sur verre et je vous y renvoie  ICI : "La peinture des icônes suivait une méthode qui devrait être définie comme peinture « sous » plutôt que « sur » verre. En effet, le peintre dessinait et peignait l’icône sur ce qui, à la fin, aurait été le dessous du verre, pendant que la partie opposée, c’est-à-dire celle exposée au regard de l’observateur, servait d’écran de protection pour le tableau. Ce procédé oblige le peintre a dessiner à l’envers, pour que, une fois le verre retourné, l’image se présente correctement. Le dessin des contours à l’aide d’un fin pinceau – la première phase technique de la réalisation de l’icône – fournissait le schéma de la composition, puis on procédait au coloriage des figures et du fond. Pour certaines réalisations on utilisait de fines pellicules de couleur or et argent. Une fois peinte, après une couche de vernis sur la face postérieure du tableau pour le préserver contre l’humidité, l’icône était encadrée et protégée à l’arrière par un panneau, d’habitude en sapin."




Icône sur verre : Saint Georges terrassant le dragon


Shizuko Onda : Fantaisies


Shizuko Onda : détail des oeuvres exposées au musée Colectiilor de Bucarest

La donation au musée Colectiilor, en 1994, de Shikuzo Onda, artiste, sculptrice et décoratrice,  diplômée  de l'université japonaise de Tokyo, est composée de dix-neuf oeuvres réalisées dans du plexiglas.

Plexiglas ! Je ne sais pourquoi, j'éprouve un certain préjugé pour ce matériau, si l'on m'avait dire verre, oui ... mais plexiglas ! Un  peu dubitative, je regarde les oeuvres, blocs transparents intégrant de vives couleurs,  je m'approche d'elles, et là, l'enchantement opère ! S'approcher, c'est entrer dans un univers qui n'est plus limité dans l'espace.  On se perd dans des profondeurs, celle de la mer ou du ciel. On y décèle des formes mystérieuses, humaines, visages, femme agenouillée, végétales, animales. Il faut tourner autour de l'oeuvre pour y découvrir d'autres formes, d'autres mondes.  C'est vraiment magique ! Les lumières jouent avec les couleurs, traversent la transparence et nous transportent dans l'irréalité ! L'imagination  prend le pouvoir !


Shizuko Onda Bucarest musée Colectiilor Bucarest


Shizuko Onda Bucarest musée Colectiilor Bucarest


Shizuko Onda Bucarest musée Colectiilor


Shizuko Onda  : Bucarest musée Colectiilor Bucarest (détail collage de deux photos)


   Shizuko Onda :  Bucarest musée Colectiilor Bucarest


Iosif Iser (1881-1958)

 

Iosi Iser musée des Collection de Bucarest

 
Il y a abondance d'oeuvres du peintre roumain Iosif Iser  au musée Colectiilor. De nombreuses montrent un intérêt pour l'orientalisme qui me semble bien tardif. Ces peintures, en effet, semblent ignorer les  mouvements picturaux du XX siècle.
 
 
 
Odalisque voilée Iosif Iser

 
 
Iosif Iser : odalisques

 
 

J'ai lu qu'on le classait dans les peintres d'expressionnistes mais ce que j'ai vu  ne m'a pas convaincue. Peut-être cette femme à la cigarette ou le couple ci-dessus à gauche Paulina et Arlequin ? Il est loin de l'avant-garde d'un  d'un Munch ou d'un Otto Dix.
 
 
Iosif Iser : femme à la cigarette/ Femmes turques couchées


Otto Dix (1891- 1957)


Je ne connaissais absolument pas la peinture roumaine avant ce voyage, aussi il m'est parfois difficile de juger mais j'ai l'impression que la peinture de Iosif Iser et les autres peintres roumains me semblent coupés des grands mouvements picturaux du XX siècle. Certains peignent encore comme les impressionnistes, d'autres sont nettement influencés par Cézanne, mais comme je les connais peu,  je ne sais pas s'ils ont trouvé, par la suite, un style personnel.

 

Corneliu Baba (1906-1997))

Corneliu Baba : autoportrait musée Collectiilor de Bucarest

 
Ah! Les Cornéliu Baba du musée Colectiilor ! Ces oeuvres sont celles de la dernière partie de sa vie : "une peinture de la solitude s'adressant surtout à  une humanité éternelle et anonyme." 
Elles offrent une vision cauchemardesque de la vie. Les titres de ces oeuvres parlent d'eux-mêmes : l'Effroi, avec tous ces visages déformés sous l'effet d'une terreur  illimitée; la Pieta, visages hallucinés au-dessus du cadavre du Christ, qui ne semblent même plus appartenir à la vie et dont les traits se dissolvent dans la corruption de la  mort. 
Corneliu Baba a peint tout une série de Rois fous, tous plus hallucinants les uns que les autres.  Le Roi fou, représente pour lui, tous les pauvres gens torturés par un pouvoir autoritaire, "victimes de tant de rois, de dictateurs atteints de maladie mentale."
Evidemment, en les voyant pour la première fois j'ai pensé aux peintures noires de Goya à la fois pour la forme et le fond. Mais elles m'ont aussi rappelé Munch, cette fois-ci pour le fond, non pour la forme. Les critiques ont reproché son classicisme à Corneliu Baba. C'est vrai quand on pense qu'il est mort en 1997, sa peinture n'a rien de contemporain, mais quelle puissance dans ce qu'il veut transmettre !

Corneliu Baba : Le roi fou musée Collectiilor Bucarest


Corneliu Baba : La Piéta  musée Collectiilor Bucarest

Corneliu Baba : La Pieta  (détail ) musée Collectiilor


Corneliu Baba : L'Effroi musée Collectiilor Bucarest


Expressionnisme : Edvard  Munch : le cri



Francisco Goya XIX siècle
 

Alexandru Phoebus (1899-1954)


Phoebus : autoportrait  musée Colectiilor

J'aime bien le Adam et Eve de Phoebus.




Phoebus : Adam et Eve  musée Colectiilor


Phoebus :marché au puce musée des Collections des Arts Bucarest


Dimutru  Ghiata 1888-1972)


Dimutru  Ghiata 1888-1972) (détails) musée Colectiilor de Arta Bucarest


Magdelena Radulescu (1902-1983)


Magdelena Radulescu : musée Colectiilor de Arta de Bucarest


Alexandru Padina (1904-1992)


Alexandru Padina (1904-1992) (détails) musée Colectiilor de Arta Bucarest

Lucia Demetriade Balacescu (1895-1979)


Lucia Demotriade Balacescu Musée Colectiilor ou musée des Collections d'art de Bucarest

Comme Iser et Baba, Lucia Demotriade Balacescu est une des grandes artistes du musée Colectiilor et deux salles lui sont consacrées.

Lucia Balacescu

 
Bucarest : le musée Satului : musée du village roumain ( à ne pas confondre avec le musée Taranului, musée du paysan roumain, fermé pour restauration en 2022)  (6)

9 commentaires:

  1. Incroyable ce Corneliu Baba ! J'aimerais bien voir une expo sur lui. Pas plus classique que Garouste. C'est une certaine histoire de l'art qui s'imagine que le XXe siècle est une marche irrésistible vers l'abstraction et que toute peinture figurative, surtout quand elle est religieuse, est un "retour à". En réalité, les peintres tracent leur sillon !

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    1. Je pense qu'il n'a pas toujours peint de cette manière. C'est à la fin de sa vie qu'il peignait ainsi. Je ne connais que cet aspect et, le moins que l'on puisse dire, c'est qu'il n'avait pas une vision très optimiste de la vie !

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    2. Classique ou non la peinture de Corneliu Baba a une grande puissance et ne peut laisser indifférent. Ceci dit, sans parler du figuratif, il y a des mouvements picturaux au XX siècle, en particulier l'expressionnisme, auxquels Corneliu est resté indifférent comme s'il était retiré du Monde. C'est ce que je voulais dire en le comparant à Munch ou Dix qui n'ont pas, non plus, une vision très réjouissante de la vie. Il faut dire que le XX siècle, entre les deux guerres mondiales, la bombe atomique, les camps de concentration, les dictatures (dont celle de la Roumanie) ne peuvent pas inspirer la joie !!

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  2. Je me suis arrêtée longuement sur le verre et le plexiglas. Comme toi, ces peintures, un peu naïves, sur (ou sous) verre m'enchantent. Pleines de vie et de couleurs, elles sont pour nous tellement hors du commun, merci!!!
    Pour Shizuko Onda, j'ai essayé d'imaginer ce que tu as vu en vrai. Même si tes photos sont excellentes, je suis sûre que cette impression d'un univers non limité par l'espace est plus forte. Mais j'ai perçu ta sensation.

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    1. Tu as raison, impossible de traduire cet univers par une photo. Il faut approcher son visage du bloc qui enserre les couleurs et les formes et c'est là que tu perds pied, que tu entres dans une autre dimension. Mais pour toi qui aimes la poésie, il n'y aurait qu'un pas à faire, c'est l'imaginaire, le pouvoir de percevoir ce qui se cache derrière l'objet (ou le mot) qui sont sollicités, comme pour la poésie.

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  3. "Le cri" ! J'ignorais qu'il existait une seconde version en peinture.

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    1. Il existe plusieurs versions ! Je m'en aperçue quand je suis allée en Suède.

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  4. En lisant tes impressions, il semble que le rendu du plexiglas n'est pas loin de celui du verre. Je suis fascinée par ce genre de travail artistique où ce que l'on découvre est sans fin et toujours différent. Les icônes sont merveilleuses. Au final, il va falloir que tu retournes à Bucarest, tu as raté trop de choses !

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    1. Oui, finalement on dirait du verre. Moi aussi je suis attirée par ce genre de travail artistique. C'est ce qui me plaît le plus dans l'art contemporain. Effectivement, j'ai raté beaucoup de choses. Y retourner ? Peut-être ? J'ai aimé Bucarest mais ce n'est pas un coup de coeur comme pour Prague et pour Budapest !

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