Flamboyante Zola de Jean-Louis Milesi. Voilà un livre qui rend bien justice à madame Zola.
J'ai vu, en 2023, une pièce de théâtre au Festival d'Avignon, Les Téméraires, sur Zola et Meliès et leur lutte contre l'anti-dreyfusisme, une pièce qui montrait bien la place tenue, entre autres, par madame Zola. J'ai lu aussi le Zola de Henri Troyat bien trop patriarcal pour accorder une place importante à madame. Il me reste encore à découvrir le livre Madame Zola d'Evelyne Bloch-Dano.
Ce livre consacré à madame Zola, commence par la
nouvelle qui va être une blessure indélébile et un coup de tonnerre dans
la vie conjugale d’Alexandrine : une lettre anonyme qui lui est
adressée et qui lui révèle que son mari a une double vie, qu’il a eu une
fille Denise et un fils, Jacques, avec son ancienne lingère Jeanne
Rozerot ! La douleur de madame Zola est si violente qu’elle en perd
presque la raison, éprouve des envies de meurtre, en tombe malade et
sa vie s’effondre.
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Le déjeuner sur l'herbe de Manet |
Par des retours en arrière, le lecteur est introduit dans la vie passée de Gabrielle, c’est ainsi que la jeune fille se faisait appeler à l’époque, quand elle posait comme modèle pour les peintres impressionnistes. C’est elle qui figure au second plan dans Le déjeuner sur l’herbe Manet. Elle est issue d’une classe sociale défavorisée, laissée à la rue par ses parents, exécutant des petits métiers dès son plus jeune âge pour survivre. Elle a eu une fille illégitime qu’elle a été obligée d’abandonner faute de moyens financiers et qui meurt peu après. Elle fait la connaissance d’Emile Zola par l’intermédiaire de Cézanne et se marie avec lui. Son origine sociale lui vaut moqueries et condescendance de la part de la « bonne » société parisienne et de certains amis de son mari.
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Peu à peu, le portrait de madame Zola prend de la netteté et nous découvrons une femme blessée mais forte, courageuse, intelligente, qui se tient dans l’ombre du Grand Homme et lui est indispensable. Elle n’est pourtant pas effacée, fière, le verbe haut, et tient tête à toutes les difficultés, et même aux avanies que Zola lui inflige, encore une fois, avec son dernier livre des Rougon-Macquart où le docteur Pascal, le double de Zola, met en scène son adultère avec Jeanne.
Flamboyante, madame Zola ! C’est elle qui, encourage Zola et le soutient lorsqu’il lance son J’accuse, qui lui reste fidèle quand de nombreux amis le trahissent, qui affronte l’adversité quand les menaces de mort pèsent sur lui et sur elle, qui organise la vente aux enchères pour payer les dettes et les frais de justice quand il est accusé de traîtrise, qui planifie son exil à Londres, et se montre d’une grande générosité envers les enfants, avant comme après la mort de son mari.
Jean-louis Milesi nous présente -comme probable bien que non prouvé- l’assassinat de Zola, après son retour d’exil, par le fumiste Henri Buronfosse. Il n’y a pas eu d’enquête véritable et on a tout fait pour étouffer l’affaire. Ce qui est certain, c’est que l’ouvrier, notoirement antisémite, était sur le toit voisin de la maison des Zola la veille de sa mort. Il aurait eu la possibilité de boucher la cheminée qui a provoqué la mort d’Emile Zola par intoxication à l’oxyde de carbone. Alexandrine a survécu.
Même si l’auteur s’appuie sur les fait historiques, la correspondance des époux et des extraits de journaux, l'écrivain revendique son livre comme un roman, non comme une biographie… Et c’est ainsi qu’on le lit, avec plaisir et intérêt.