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Le roi Pierre 1er et Inez de Castro/ Alfonso IV/ Alfonso-Henriques, 1er roi du Portugal
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J'avoue que j'ai calé parfois à la lecture de Os Lusiadas, ce long poème (8816 vers) de Luis Vaz Camoes. C'est un peu ardu quand on ne connaît pas l'histoire du Portugal, ses batailles, ses dynasties, ses rois, ses hommes célèbres, qui, parfois, ne sont nommés que par le prénom tant ils étaient célèbres à l'époque. La plupart d'entre eux me sont inconnus et il m'a fallu chercher à tout moment les noms, vérifier l'histoire, la géographie. Je me suis particulièrement intéressée aux chants III et IV dans lesquels Luis Vaz Camoes, toujours en donnant la parole à Vasco de Gama, fait un retour dans le passé pour présenter l'histoire de son pays. Ces chants nous apprennent beaucoup sur les grandes tragédies historiques du Portugal. Les récits qu'ils présentent sont devenus les mythes fondateurs de l'identité nationale des Portugais et ont souvent inspiré l'art et le littérature.
Un retour dans L'histoire du Portugal
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Jean 1er du Portugal
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Dans Aljubarota vois l'intrépide Jean Terrassant
sous ses coups l'orgueilleux Castillan; Vois Alfonse premier, fléau des
infidèles, Conquérant d'Ourika les palmes immortelles, Et trois Alfonse
encor, ses vaillants héritiers, De leurs lauriers nouveaux accroissant
ses lauriers.
En 1139 la Bataille de l'Ourique menée par Alfonso-Henriques contre les Sarrazins marque la naissance du Portugal; Celui-ci se proclama roi sous le nom d'Alfonso 1er et régna jusqu'à sa mort en 1185.
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Le siège de Lisbonne (1147)
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Le siège de Lisbonne (qui inspira le titre du roman de Saramago) a eu lieu en 1147 et chassa de Lisbonne les suzerains mauresques, Almoravides.
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Bataille d'Aljubarrota (1385) permit au
Portugal d'assurer son indépendance vis à vis de l'Espagne .
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Au cours de la fameuse bataille d'Aljubarrota (1385) les troupes
portugaises aidées par leurs alliés anglais et commandées par le roi
Jean 1er du Portugal et son connétable Nuno Alvares Pereira affrontent
les troupes espagnoles de Jean 1er de Castille alliées des français.
Leur victoire évite au Portugal de passer sous la domination
Castillane. En effet, Jean 1er de Castille, en tant qu'époux de
Béatrice, fille du roi Ferdinand 1er du Portugal, voulait faire valoir
ses droits au trône du Portugal.
L'intrépide Alvarès entre tous se signale;A mille combattants sa vaillance est fatale;De mourants et de morts il couvre loin ce solOù prétendait régner l'insolent Espagnol.Partout sifflent dans l'air les flèches acérées,Les dards, les javelot et les piques ferrées;Le champ, sanglant témoin de ce combat affreux,tremble sous les sabots des coursiers belliqueux;Et d'un bruit sourd, pareil aux accents de tonnerre,L'airain avec l'airain fait retentir la terre
La description de ce combat avec son grossissement épique, à la manière de la chanson de Roland, est là pour produire un effet de terreur tout en magnifiant la bravoure des héros lusitaniens. Le mouvement doublé par le son prend de l'ampleur : puissance de la description qui nous fait non seulement voir mais aussi entendre ! Les vers de Camoes sont si évocateurs que des images s'imposent à moi. Il me renvoie à des oeuvres picturales, en particulier celle de Paolo Ucello : La bataille de San Romano ( XV siècle)
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La Bataille de San Romano, de Paolo Ucello |
Le
récit le plus célèbre est celui qui relate l'histoire du prince
Pedro et de sa maîtresse Inez de Castro qu'il épouse à la mort de sa
femme. Son père, le Roi Alfonso IV, furieux de cette alliance qui ne
sert pas ses desseins politiques fait assassiner Inez. Devenu roi à la mort de son père, Pedro
1er exhume le corps de la reine morte, l'assoit sur le trône du
Portugal et oblige ses nobles à lui rendre hommage en lui baisant la main. C'est du moins ce
que dit la légende qui a été reprise dans de nombreuses oeuvres
artistiques ou littéraires :
La reine mort de Henri de Monterlhant.
Voir ici le billet de Miriam
Telle apparaît Inez, froide et décolorée;
Sous la main
de la mort son doux regard s'éteint
Et la pâleur succède aux roses de
son teint.
Nymphes du Mondégo, longtemps inconsolables,
Vous pleurâtes d'Inez les
destins lamentables;
Et le flot de vos pleurs forma dans ce Vallon
La
fontaine qu'Amour consacra de son nom.
Celle source à jamais conserve à
la mémoire
Et les attraits d'Inez et sa tragique histoire;
En vain ses
bords charmants sont émaillés de fleurs;
Fontaine des Amours, ses ondes
sont des pleurs.
Mais don Pèdre bientôt s'arme pour la vengeance.
Inez de Castro supplie Alfonso IV d'épargner ses enfants;
Le style et la traduction
Le texte rend compte des questions que soulève (déjà!) la traduction dès le XIX siècle : faut-il être fidèle à l'original au mot près ou, au contraire, faut-il garder l'esprit du texte quitte à s'en éloigner si besoin est ? Et surtout dans le cas de la poésie faut-il passer à la prose pour ne pas trahir l'auteur ou bien le vers est-il le seul moyen de conserver l'essence du texte ? Le traducteur François-Félix Ragon, écrivain et historien du XIX siècle, a choisi. Il conserve le vers mais passe de l'octosyllabe à l'alexandrin. Pourquoi pas ? Ce que j'apprécie moins, c'est lorsqu'il se permet de supprimer des strophes, les jugeant peu intéressantes ou de mauvais goût ! Il se sent souvent supérieur au créateur qu'il traduit. Les traducteurs n'auraient pas cette outrecuidance de nos jours.
Donc, il est très possible qu'il ait trahi l'auteur mais ceci dit (et comme je suis incapable de juger l'original) je dois dire que je suis sensible dans cette traduction au rythme, aux sonorités, aux images. Il y a de l'élan, de la musique... Une érudition qui baigne dans l'Antiquité et la Renaissance, deux périodes que j'aime beaucoup, et l'on sent toutes les références qui donnent une densité, une richesse aux vers. De belles descriptions qui parlent à l'imagination. Mais des moments aussi où je me suis mortellement ennuyée et où j'ai couru sur les pages en attendant d'être à nouveau happée ! N'aurais-je pas la fibre épique ? Enfin, je suis tout de même heureuse d'avoir lu - bien qu'imparfaitement - ce poème qui est, pour le Portugal, ce que La Divine Comédie est pour l'Italie, et Don Quichotte pour L'Espagne. Ceci dit j'ai de beaucoup préféré Dante et Cervantès !
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Benezzo Gozzoli Renaissance italienne : Les Rois mages |
Ainsi les descriptions des foules lors d'une bataille ou d'une fête sont toujours
très réussies. Les personnages, leur habillement, leur
maintien, les sentiments qui les animent, angoisse, orgueil, fierté,
férocité ou allégresse, composent des scènes vivantes,
évocatrices, comme si elles se déroulaient devant nos yeux, et donnent vie à l'épopée. Dans les strophes suivantes, le poète a l'art de mettre en marche la multitude, joyeuse et solennelle à la fois, et d'en montrer le mouvement irrésistible, de nuancer les couleurs, de jouer avec la lumière ; et par dessus tout, l'introduction du bruit, chants, intruments de musique, cris ou vacarme, nous place au coeur de la foule, à l'intérieur de la scène. Les couleurs dans la description
des habits somptueux, le mouvement, celui d'une foule qui avance, et le
bruit qui achève la description sont d'une telle précision que l'on a
l'impression de voir un tableau, raffiné et éclatant, d'un peintre de la
Renaissance dans lequel, de nos jours, le cinéma permettrait d'intégrer
le son des trompettes et le tonnerre du canon.
Le prince de Mélinde*, en appareil royal,
Descendit sur la
plage, où se pressait d'avance
D'un peuple curieux la multitude immense.
Au loin étincelaient les pompeux vêtements,
Les longs manteaux de
pourpre et les beaux dolimans;
(...)
Dans son habillement tissu d'or et de soie
Du faste oriental
tout l'orgueil se déploie;
Un superbe turban sur son front s'arrondit;
Des couleurs de Sidon son manteau resplendit;
De son collier d'or pur la beauté singulière
Joint le fini de l'art au prix de la matière; (...)
Cependant, sur la proue, aux flots retentissants
La trompette mauresque envoyait ses accents,
Dur et bruyant concert, dont l'oreille s'offense,
Mais qu'anime une vive et joyeuse cadence.
Tandis qu'ainsi voguait le monarque africain,
Gama, pour recevoir l'auguste souverain,
Sur un léger bateau sillonnant Amphitrite,
S'avance, environné d'un cortège d'élite.
La France a préparé sa tunique de lin ;
Son habit espagnol est d'un riche satin
Dont Venise a fourni l'étoffe renommée
Qu'empourpre du kermès la teinture enflammée.
Aux manches, des boutons d'un or pur et vermeil
Brillent, réfléchissant les rayons du soleil.
(...)
Les barques de Mélinde au loin couvrent la mer;
Leurs pavillons flottants rasent le flot amer.
Dans le bronze tonnant le salpêtre s'allume
Et par noirs tourbillons dans l'air éclate et fume.
La formidable voix de cent bouches d'airain
Ebranle les échos du rivage africain,
Et le Maure, au fracas des bombes résonnantes,
Presse en vain de ses mains ses oreilles tremblantes.
il y a aussi de beaux portraits pleins de sensualité comme celui de Vénus secondée par Mars, suppliant Jupiter de venir en aide aux Portugais poursuivis par le courroux de Bacchus.... La déesse semble être sortie du cadre d'un tableau de la Renaissance, je vois Boticelli, Le Tintoret, le Titien.
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Le Tintoret Vénus
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Le sein tout palpitant de son rapide essor, Elle apparaît plus belle et plus aimable encor. Un doux frémissement agite l'Empyrée Et chaque étoile aux cieux d'amour est enivrée. Foyer des passions, ses yeux éblouissants Lancent des traits de feu qui pénètrent les sens Et qui d'émotions puissantes et profondes Font transir et brûler les astres et les mondes. Chère dans tous les temps au souverain des dieux, Pour le mieux captiver, elle s'offre à ses yeux, |
Boticelli : Vénus
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Autour de son beau col aux contours amoureux En longues tresses d'or flottent ses blonds cheveux; De son sein aussi blanc que la neige et l'albâtre Les globes, où l'amour invisible folâtre Et prépare en jouant ses traits victorieux, Tremblent au mouvement de ses pas gracieux.
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Le Titien : Vénus
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Padrao dos Decobrimentos : le monument des Découvertes
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Le monument des Découvertes ou Padrao des Decobrimentos 1 (image Wikipédia) |
Le monument des Découvertes a été érigé sur les rives du Tage, non loin de la tour de Bélem, sur l'ordre du dictateur Salazar en 1960. Henri le Navigateur se tient fièrement sur la proue, tenant dans ses mains une caravelle. Il est suivi de tous les grands navigateurs et rois des Découvertes, personnages qui figurent dans Les Lusiades et je trouve passionnant de les retrouver ici.
Le monument ne fait pas l'unanimité puisqu'il est le symbole de la dictature et aussi du colonialisme mais il est le témoin de l'Histoire du Portugal et, à ce titre, très intéressant.
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Le monument des Découvertes ou Padrao des Decobrimentos (image Wikipédia) |
Quel courage de te coltiner les textes fondateurs! Déjà en Finlande le Kalevala! Chapeau ! Merci pour le lien (la Reine Morte)Tu dois être savante en histoire du Portugal
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