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mercredi 10 mai 2017

Laponie -Sapmi : le pays des samis Laponie Norvégienne

Finnmark : Le vidda, haut plateau du pays sami (Printemps)

 Le Vidda

Le vidda , lac 

Aujourd'hui une grande virée dans le Finmarkvidda, ces hauts plateaux couverts de lichens et de neige où paissent les rennes en hiver. En Mai, au "printemps", la transhumance des rennes vers la côte ouest du pays a déjà eu lieu mais nous avons vu quelques rennes en enclos, trop jeunes pour partir. Il paraît qu'il n'y a plus de neige et qu'il fait chaud. C'est vrai, cette après midi la température oscillait entre entre zéro et deux degrés.
Les rennes en enclos
Mais le Vidda encore tout couvert de neige, couronné de montagnes rondes et peu élevées, hérissé de petits bouleaux rabougris aux branches noircies, avec ses lacs en plein dégel, donnent une impression d'immensité... un véritable désert arctique à perte de vue. C'est impressionnant, comme l'est cette route toute droite qui la traverse et se divise, l'une vers Kautokeino, l'autre vers Karasjok, les seules voies qui permettent de traverser le Vidda. Un campement same abandonné, le squelette en bois des huttes d'éleveurs sans leur toile...

Campement same abandonné

 Kautokeino

Kautokeino, capitale same
 Kautokeino est considérée comme la "capitale" des Sames. L'élevage des rennes continue à y être l'activité traditionnelle et l'on compte plus de 1000 000 bêtes dans cette région. 
 Tout est fermé à cette époque de l'année, les musées, les restaurants (sauf un qui nous a sauvés de la famine). Pas de touristes ! Nous avons mangé à côté d'autochtones, aussi, avons-nous pu entendre la langue des sames. 

La ville elle-même paraît assez austère et l'on comprend sans peine ce que peut-être la nuit polaire dans ces contrées !  Je me suis imaginée avec Klemet et Nina, les deux policiers  des rennes dans les livres d'Olivier Turc.  La neige en fondant découvre une végétation brunâtre et rêche et  devient  de la  boue dans les chemins.
 
Kautokeino, capitale same
Kautokeino
Musée de kautokeino
Pas de costumes traditionnels à cette époque de l'année. Les grandes fêtes de mariage à Pâques et celle de la Transhumance sont terminées. Pour le moment les seuls costumes samis que j'ai vus étaient portés par un couple à Alta le jour de mon arrivée, vu aussi à Alta des personnes en costumes norvégiens qui préparent la fête nationale du 17 Mai.

J'écris devant la fenêtre de la maison où nous logeons. Il est 24H. Il fait encore jour et le fjord d'Alta est gris, parcouru de courants argentés. La neige commence à fondre depuis ce matin. Le bonhomme de neige de Léonie a survécu mais a perdu le nez et les yeux. Demain nous irons au Cap Nord.


Le bonhomme de neige d'Alta ! Jour de l'arrivée

le Ford d'Alta vue de notre maison

le Ford d'Alta vue de notre maison :  Hier 1 heure du matin

le Ford d'Alta vue de notre maison :  Hier 4 h du matin


dimanche 7 mai 2017

Gunvor Hofmo : Tout de la nuit est sans nom (2)

Gunvor Hofmo en 1949

J’ai publié dans mon blog deux poésies de Gunvor Hofmo ICI.
 Voici maintenant une présentation du recueil : Tout de la nuit est sans nom, préface de Ole Karlsen, édition bilingue, traduit du norvégien par Pierre Grouix et Grete Kleppen, aux éditions Rafael de Surtis, 2009 collection Pour une Rivière de vitrail.
Ce recueil est une anthologie de plusieurs autres de Gunvor Hofmo :   je veux revenir habiter chez les hommes (1946) ou D’une autre réalité (1948)  Invité sur la terre (1971)  Il est tard (1978) et  sans doute de bien d’autres… Il est très difficile pour qui n’a pas lu l’intégralité de son oeuvre (et pour cause ! non traduite en français) de savoir à quel recueil appartient chaque poème et à quelle date chacun a été écrit. C’est le reproche que je ferai à cette édition, car ces précisions et la chronologie des oeuvres permettraient mieux encore de saisir le sens d’une poésie si liée au vécu de l’auteure tant par le traumatisme de la guerre que par son enfoncement dans le mutisme pendant seize ans, puis sa résurrection.

Ruth Maïer, l'amie de Gunvor Hofmo

Nous savons, en effet, grâce à la notice biographique de la préface de Ole Karseln que la vie de Gunvor Hofmo, norvégienne née à Oslo en 1921 a été marquée définitivement pendant la deuxième guerre mondiale par l’arrestation de Ruth Maïer, une réfugiée juive autrichienne dont elle est amoureuse. Celle-ci fut déportée le 26 novembre 1942 avec tous les juifs norvégiens et envoyée à Auschwitz où elle est tuée dès son arrivée.

J’ai veillé

Edvard Munch : Angoisse

Ami, j’ai veillé –
traversé de maléfiques montagnes.
Sommeil – qu’est-ce,
est-ce une danse de trolls,
des cœurs arrachés d’eux-mêmes
qui sombrèrent dans les marécages de l’angoisse.

Ami, j’ai toujours veillé
même quand j’ai dormi.
Toujours, même dans le rêve,
l’ouverture fut ma loi.
J’ai bu des myriades de visions,
sans défense – voyant tout.

J’ai vu ma mère dans la pièce,
pauvre, simple, lasse.
Et derrière, derrière elle
les respirations éternelles
des mères qui soufflèrent sur moi
à travers l’odeur de la nuit.

J’ai vu mon père dans la pièce,
sage, mais aussi dur.
Et derrière lui
une houle
d’hommes aux armes dressées,
des assassins, eux-mêmes couverts de blessures.

J’ai vu ma sœur
autour de moi, et mon frère prodigue.
(Et derrière eux tous les Étrangers –)
Ma solitude au-delà des mots
trouva son reflet en eux.

J’ai vu mon amie,
l’unique, je l’ai vue
partir pour la mort.
Et depuis, les arbres sont en deuil,
et depuis, la Mort a tiré
mon corps, mon âme, ma voix
dans l’océan du désespoir !

A la fin de l’été 1947, Gunvor Hofmo, voyage  à travers l’Allemagne détruite, en direction de Paris, où elle restera jusqu’au début de l’année 1948.

Je veux rentrer


Emil Nolde : ciel étoilé


Je veux lever les yeux vers les étoiles
sur une mer brillante dans la nuit
qui chante, chante :
belle est la nuit
beau est le jour,
aucun d’eux ne périra !

Je veux revenir habiter parmi les hommes-
tel un aveugle
transpercé dans l’obscurité
par l’éclat interstellaire du deuil.

Mais si dans la première strophe  le souhait du retour à la vie, s’exprime dans des mots qui portent la lumière et la joie pour illuminer et révéler la beauté de la nuit : « Les étoiles » « une mer brillante »  « chante », la seconde strophe en antithèse ne laisse aucun espoir : celle qui « lève les yeux «  se révèle « aveugle », à la lumière s’oppose « l’obscurité », l’éclat des étoiles est éteint par le «deuil » qui s’oppose lui aussi à « ne périra », toute une série d’oxymores qui marque l’impossibilité du retour pour la jeune femme. 

 D'une autre réalité

Edvard Munch : le cri

C’est que Gunvor Hofmo est d’une sensibilité extrême; elle ressent avec intensité la souffrance de l’autre: elle est de ces êtres qui savent voir au-delà de l’apparence. Dans le poème D’une autre réalité (1948), titre du recueil du même nom en 1948, elle dit ce passage de la réalité à un autre monde.

On tombe malade à force d’appeler la réalité.
J’étais trop près des choses,
à m’en brûler à travers elles,
à me retrouver de leur autre côté,
où la lumière n’est pas disjointe de l’obscur,
où nulle frontière n’est posée, rien qu’un silence
qui me jette dans l’univers de la solitude,
l’incurable solitude.

Elle ne peut éviter de passer de l’autre côté, là où se révèlent l’angoisse, la solitude, le silence des choses et des êtres. Et ce passage est terriblement douloureux car il est synonyme de lucidité. La réalité laisse place à une autre réalité de la profondeur, celle qui ne dit pas son nom mais qui est la seule réelle. Le poète est visionnaire.

Regarde, je rafraîchis ma main dans l’herbe fraîche:
c’est bien la réalité,
c’est bien une réalité suffisante pour tes yeux,
mais je suis de l’autre côté, là où les brins d’herbe
sont des cloches qui sonnent de deuil, d’attente amère.
je tiens la main d’un être humain,
mais je suis de l’autre côté,
là où l’être humain,
 regarde dans les yeux d’un autre être humain,
mais je suis de l’autre côté,
là où l’être humain est une brume d’angoisse et de solitude.

Et l’on ne peut passer sans danger d’une rive à l’autre, comme Orphée, au risque de n’en jamais revenir. C’est ce qui arrive à Gunvor Hofmo.

Ah! si j’étais une pierre
capable d’accueillir le poids de ce vide,
si j’étais une étoile
capable de boire la douleur de ce vide,
mais je suis un être humain jeté aux confins,
 et j’entends bruire le silence,
j’entends crier le silence
depuis des mondes plus profonds que celui-ci.

 Après avoir écrit cinq recueils jusqu’à en 1955, elle sombre dans le mutisme et est enfermée dans un hôpital psychiatrique. Pendant seize ans, elle n’écrira plus et on la croit définitivement perdue pour la littérature et la poésie. Mais à l’initiative d’un médecin, on lui donne à nouveau de quoi écrire. C’est la renaissance. Elle sort de l’hôpital, publie un premier recueil en 1971, Invité sur la terre. Après voir publié une quinzaine de recueils nouveaux, elle s’éteint en 1995. Elle est l'une des plus grandes figures de la poésie norvégienne.

Invité sur la terre (1971)

Gustaf Fjaestad : Arbres gelés au crépuscule

L’invité qui attend,
immobile, loin dans l’espace fourmillant de Sa beauté,
immobile, comme les mouettes au bord des falaises,
Loin dans l’espace blanc de soleil et de Sa beauté.
Dieu qui laisse attendre son invité,
Dieu qui laisse attendre son mendiant
à présent, après toutes ces années,
avec un billet d’admission tout en métamorphoses.
Toi qui attends, toi mort profonde faite de rues,
de la lumière d'un printemps
 de visages écrits dans la poussière
qu'apportes-tu avec toi, ici à l'intérieur
où tout est profondeur,
tout est incessante création: de nouveaux arbres,
de nouvelles pluies, un murmure neuf du néant.
Au milieu de tout, nues dans la lumière,
le défilé devant toi de millions d'années;
au fond de la matière tu devines des lois
que ton âme suit.

A présent ton âme se faufile à travers l'éternel 

Regarde bien les roses du chemin
regarde bien les croix sur les tombes en ruines
et vois : dans le jour d'hiver un brasier allumé
dont la fumée de vie défunte
s'immobilise au-dessus de toi, et toi
immobile, au fond de son Espace de beauté
blanc de soleil

vendredi 5 mai 2017

Olivier Truc : Le dernier lapon


Avant de partir en Laponie norvégienne, il est logique que je lise les livres de Olivier Truc, journaliste et écrivain français installé à Stockholm, spécialiste des pays nordiques et baltes. Et s’il y a quelqu’un qui connaît bien l’histoire, la culture et le mode de vie des Samis, c’est bien lui !  Je rappelle que le mot lapon étant péjoratif, c’est le terme politiquement et historiquement correct de Sami (ou Same) qui est employé de nos jours en Norvège pour désigner les habitants et de Sapmi pour le territoire qui s’étend sur quatre pays : Norvège, Suède, Finlande et Russie.

La Laponie ou Sapmi

Le pays Sapmi en Hiver

Rennes sur le vidda (source)

C’est par Le dernier lapon que je commence. Le récit se déroule en hiver, au mois de janvier,  entre la Laponie norvégienne, le Finnmark, dans les villes de Kautokeino et Alta et la Laponie suédoise à Kiruna. Nous sommes en pleine nuit polaire mais le lundi 11 Janvier, précisément, le soleil va faire sa réapparition de 11H24 à 11H41 soit 27 minutes d’ensoleillement, vécues comme un miracle par les habitants plongés dans l’obscurité complète depuis 40 jours.

« C’était la journée la plus extraordinaire de l’année, celle qui portait tous les espoirs de l’Humanité; demain, le soleil allait renaître. Depuis quarante jours, les femmes et les hommes du vida survivaient en courbant l’âme, privés de cette source de vie. »

Bien sûr, c’est le moment des aurores boréales, magnifiques, mais aussi d’un froid intense, des  - 40 ° avec un vent venu de Sibérie. C’est un endroit où l’on peut dire que le temps est redevenu « clément » lorsqu’il ne fait plus que -17 !
Nous sommes dans un pays d’éleveurs de rennes. Dans ces hauts plateaux désertiques, le vidda, qui s’étendent entre les fjords et les vallées, les rennes se nourrissent de lichens mais causent bien des problèmes aux éleveurs qui doivent surveiller constamment leurs troupeaux pendant l’hiver avant la grande transhumance vers les côtes au printemps. La création des frontières entre les quatre pays qui divisent désormais la Laponie créent des difficultés supplémentaires !
Les personnages principaux, Klemet Nango, policier sami, et Nina Nansen, nouvelle recrue norvégienne, venue du sud, qui appartiennent à la police des rennes, sont chargés d’arbitrer les litiges entre propriétaires quand les bêtes de troupeaux différents se mélangent, disparaissent ou franchissent les frontières.

L’intrigue policière

Un tambour de Chaman
L’intrigue policière est basée sur la géologie de la région extrêmement riche en minerais et qui excite dont la convoitise des grandes compagnies internationales. Des lois encadrent les éventuelles exploitations de mines qui vont à l’encontre des modes de vie des éleveurs nomades, d’où l’intérêt d’être le premier et d’agir dans l’ombre. Mais c’est aussi l’Histoire des Samis qui sous-tend toute l’histoire et c’est ce qui est passionnant pour qui veut connaître ce peuple.

Tout commence avec le vol d’un tambour de chaman dans le musée de Kautokeino, ce  qui cause un grand émoi dans la population same. En fait, les Samis, ont été christianisés depuis le XVII siècle,  peu à peu colonisés puis soumis à une assimilation forcée, par le gouvernement norvégien et par l’église. Les tambours de chaman ont été régulièrement confisqués et brûles par le clergé qui les considérait comme des instruments diaboliques, opposés à la vraie foi. Les persécutions ont été rudes dans le passé mais à l’heure actuelle, les conflits ne sont pas réglés. Certes, la Sapmi a gagné son autonomie, elle a son parlement, son université, sa police, la langue same est reconnue mais le racisme existe toujours incarné un parti d’extrême-droite, le parti du Progrès, qui attise la haine. Un collègue policier de Klemet et Nina, Lars Brattsen, un riche paysan Karl Olsen et le pasteur de la ville, sont les représentants de cette tendance. Le parti des Samis s’oppose à eux.
A ce vol, vient s’ajouter un meurtre, celui d’un pauvre éleveur Mattis que l’on retrouve mutilé.
Klemet et Nina qui jusque là n’avait eu à régler que des problèmes d’élevage, vont devoir résoudre cette double énigme, ce qui les amènera bien loin dans le temps et le passé du peuple same.

Mon avis

Mari Boine chanteuse de Joïk, chant traditionnel sami

Dans ce roman, on s’intéresse, à l’histoire policière qui présente bien des rebondissements. Mais la connaissance approfondie d’un pays et d’un peuple, l’abondance de détails, par exemple sur le symbolisme des tambours, les précisions sur la vie quotidienne, sur la religion, les coutumes, sur l’art - en particulier le chant, les joïks-, sur la géologie de la région, donnent à ce roman une densité particulière.
Les personnages de Klemet et Nina, d’abord un peu flous au début, se précisent peu à peu. j'espère que cela continuera dans le roman suivant. Mais ceux que j’ai préférés, ce sont les portraits saisissants que brosse Olivier Truc de certains éleveurs Samis, qu’ils soient apparemment frustres et pourtant complexes comme Mattis ou primitifs, durs, courageux et altiers comme Aslak. Le personnage du « méchant », le français Racagnal, est aussi réussi.

Un bon roman que je suis ravie d’avoir découvert juste avant mon départ pour le pays Sapmi. Je vais maintenant lire Le détroit du loup du même auteur. Il se passe au printemps et commence avec la migration des rennes vers la côte. On y retrouve les mêmes personnages.

mercredi 3 mai 2017

Challenge Victor Hugo : Bilan 4 et proposition de lectures communes.



Voici le bilan N° 4  de Victor Hugo
Le challenge est au point mort depuis quelque temps mais si vous êtes d'accord je vous propose quelques lectures communes.

Vous pouvez vous inscrire dans les commentaires de ce billet.

Pour le 16 Juin je propose une pièce de théâtre extraite du recueil Le Théâtre en liberté  : Mille francs de récompense   Margotte Nathalie Caroline Claudialucia

Pour le  16 Juillet :  dans Le Théâtre en liberté : une toute petite pièce intitulée : L'intervention. Quant à moi,  au festival d'Avignon, je présenterai, en plus de L'Intervention une pièce de Victor Hugo au choix dans le festival OFF.  Nathalie Caroline Laure Claudialucia

 Pour le 15 Septembre : je propose de remettre à l'honneur un rendez-vous  du mois de novembre 2016 en partie manqué : Il s'agit de lire une biographie de Victor Hugo aucun choix imposé.

 Caroline, Laure, Miriam , Nathalie, Claudialucia

Quant à moi j'avais présenté celle de Giorda pour la jeunesse mais je lirai volontiers une autre biographie du poète.

 Ensuite nous ferons le point au mois de Septembre pour voir si nous sommes motivés pour continuer. 

Vous pouvez aussi nous proposer des lectures communes!

 NATHALIE VOUS PROPOSE LA LECTURE DE LES MISÉRABLES cet été . Qui veut la rejoindre? Pour ma part, je déclare forfait car c'est un roman que j'ai "trop" lu et relu et étudié.

 

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Aaliz blog Cherry livres

Annonce du challenge Victor Hugo :

Nouvelles acquisitions et autres joyeusetés


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Claudialucia  blog Ma librairie

Annonce du challenge Victor Hugo de Moglug et claudialucia




Victor Hugo : Souvenir de la nuit du 4

Victor Hugo : Exposition Les arcs-en-ciel du noir(musée Victor Hugo)
Victor Hugo : Les misérables

Victor Hugo et les surréalistes : la cime des rêves (musée Victor Hugo)

Victor Hugo : L'homme qui rit

Victor Hugo : l'homme qui rit (citation) La vie n'est qu'un pied à terre...

Victor Hugo : L'homme qui rit (citation) C'est de l'enfer des pauvres...

Victor Hugo L'homme qui rit (citation) : le genre humain existe...

Victor Hugo : L'homme qui rit (citation) : une habitude idiote qu'ont les peuples...
L'homme qui rit au festival d'Avignon 2016 compagnie Chaos vaincu

Hugo : Les travailleurs de la mer(LC)

Victor Hugo : Quatre-vingt treize(LC)

Victor Hugo : Bug-Jargal (LC)
Victor Hugo : Notre- Dame de Paris (LC)
Victor Hugo : Claude Gueux (LC)
Demain dès l'aube : poésie préférée(LC)
Lart d'être grand-père
La rose de l'infante La légende des siècles
Vieille chanson du jeune temps poésie (je ne pensais pas à rose...) Julos Beaucarne
Hernani (LC )
Ruy Blas LC
Représentation de Mangeront-ils? au bois de Boulogne
Mangeront-ils? festival d'Avignon 2016 compagnie Les Barriques
Les spectacles Victor Hugo au festival d'Avignon 2016
Victor Hugo : Mangeront-ils? Lecture commune
Victor Hugo : Mazeppa et Marcus Malte dans le Garçon
Biographie de Juliette Drouet de Henri Troyat
Victor Hugo ou La légende d'un siècle de GIorda Lecture commune
Torquemada LC théâtre Victor Hugo
Victor Hugo Bon conseil aux amants
Judith Perrignon : Victor Hugo vient de mourir

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Cleanthe blog Dans la bibliothèque de Cléanthe

 

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 Eimelle blog les carnets d'Eimelle








 L'annonce du challenge
http://lecture-spectacle.blogspot.fr/2014/11/challenge-victor-hugo.html


Lucrèce Borgia

Ruy Blas

Le roi s'amuse
 

 Tempête sous un crâne d'après les misérables: Lecture spectacle

L'homme qui rit


Hernani

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Laure  blog Mic-Mélo

 

 

 Bug-Jargal (LC)

 Le dernier jour d'un condamné

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Margotte :  blog Le bruit des pages

 

 

Bug-Jargal (LC)

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Miriam  blog Carnets de voyage


Victor Hugo : Les travailleurs de la mer

Victor Hugo : l'homme qui rit

Victor Hugo : l'enfant grec 

Victor Hugo : la maison de Victor hugo à haute ville

Bug-Jargal  (LC)

Hernani

 Notre-Dame de Paris (LC)

 Ruy Blas LC

Mangeront-ils ? lecture commune 

Torquemada LC

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Moglug  Blog Synchronicité et sérendipité

 

Annonce du challenge Victor Hugo de Moglug et de claudialucia

Emmanuel Godo : Victor Hugo et dieu

Bug-Jargal (LC) 

Les oiseaux : poème

 Hernani 

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Nathalie Blog Mark et Marcel

 

 

 

 


Extraits du discours prononcé aux funérailles de Balzac

Quatre-vingt-treize

Les Travailleurs de la mer

Notre-Dame de Paris

 Burg-Jargal  LC

Hernani LC

Ruy Blas LC

Mangeront-ils? LC

Torquemada : LC

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Ont aussi participé à la LC Victor Hugo pour le choix du poème préféré : 

 

 

mardi 2 mai 2017

Maren Uthaug : La petite fille et le monde secret



Lorsque j’ai commencé à lire La petite fille et le monde secret de Maren Uthaug dont l’action se déroule entre le nord de la Norvège en pays same et le sud du Danemark, je pensais en me fiant au  titre que ce récit allait me faire pénétrer dans un monde mystérieux à mi-chemin entre réalité et féérie, un monde peuplé d’êtres surnaturels qui m’amèneraient au coeur de la mythologie des peuples samis. Il n’en est rien et si, effectivement, il est question des croyances et des êtres légendaires de ce peuple, le roman est très réaliste et le monde décrit est très dur aussi bien dans les rapports entre membres d’une même famille qu’entre les minorités ethniques et les Norvégiens.

Les Sames ou Lapons

Les Samis de Suède
 Une note du traducteur Jean-Baptiste Coursaud est appréciable pour mieux comprendre le récit qui commence en Norvège du Nord. On y apprend que les Sames (ou samis) peuplent la Sapmi, région qui s’étend sur plusieurs territoires de Norvège, Suède, Finlande et Russie : c’est ce que nous nommons la Laponie. Si pour nous le mot lapon n’a aucune connotation péjorative, il n’en est pas de même en Norvège puisque Lapon vient du substantif lapp qui signifie "haillons",  "guenilles", "lambeaux" et désigne d’une manière méprisante le vêtement traditionnel des Sames. C’est pourquoi ce vocable à été aujourd’hui abandonné. Les Sames ont été victimes d’une assimilation forcée par l’administration et l’Eglise d’Etat de ces pays. Ce « génocide  culturel » n’a cessé qu’en 1945. A l’heure actuelle, les Sames sont 40 000 en Norvège et disposent maintenant d’un parlement autonome. Leur langue finno-ougrienne, de la même famille que le finnois, l’estonien et le hongrois, est reconnue comme langue nationale depuis 1987. Malgré tout, le racisme entre les peuples sames et les norvégiens est toujours bien vif et les problèmes restent nombreux en particulier pour ce peuple d’éleveurs de rennes resté nomades alors qu’une partie d’entre eux s’est sédentarisée.
Les Sames ont leur propre religion panthéiste caractérisée par le chamanisme mais ont été christianisés au XVIII siècle et sont devenus luthériens. A partir de 1848, un prédicateur suédois Lars Levi Laestadius a suscité un mouvement religieux conservateur le laestadianisme, basé sur le luthérianisme, qui développe une morale très stricte et austère.
Il est aussi question dans le roman des Kvènes, une autre minorité de la Norvège du Nord, venus de Finlande au XVI siècle.

Risten ou Kristen

 
Famille sami en vêtement traditionnel de nos jours (source)

Risten dont le père Knut est norvégien et la mère Rithha est same, vit une partie de son enfance en pays same. Entre Knut et la famille de sa femme règnent une inimitié profonde. La grand mère de Risten, Akkhu, ne parle jamais directement à son gendre parce qu'elle hait les norvégiens et son oncle, un laestadianien rigoriste, le méprise. Mais Ahkku aime sa petite fille qu’elle nourrit des croyances de son peuple. Ainsi Risten apprend à se méfier des sous-terriens, ces êtres maléfiques,  cachés au fond de la terre où ils entraînent les humains et elle sait qu’il ne faut jamais regarder une aurore boréale de peur d’être aspirée par elle. C’est nourrie de ces croyances et de ces terreurs que la petite fille va être amenée au Danemark chez la nouvelle compagne de son père. Séparée de sa mère qu’elle ne retrouvera qu’à l’âge adulte, elle ne reverra jamais sa grand-mère.

L’enfance et l’adolescence de Risten ainsi déracinée, soudainement arrachée à son pays et à sa famille, obligée de se plier à la langue et aux coutumes d’un autre pays, en proie à des terreurs superstitieuses qu’elle cache aux adultes sont  éprouvantes. Son seul ami est Niels, un petit vietnamien exilé qui a vu sa mère noyée au cours de son voyage dans un boat-people, et qui est tout aussi perturbé qu’elle.
Même si son père et sa nouvelle « mère », Grethe, sont des parents affectueux, il y a une incompréhension totale entre eux et cette enfant secrète, renfermée, rageuse, vindicative. D’autre part, la langue danoise et norvégienne sont proches mais la prononciation très différente, ce qui va expliquer, entre autres, les difficultés d’intégration de Risten devenue Kristen, prénom danois. Si l’on y ajoute les mésententes sexuelles du couple qui rejaillissent indirectement mais d’une manière sordide sur les enfants, Niels et Kristen, qui vont être séparés, l’on voit que l’enfance n’est pas un long fleuve tranquille pour eux! Ce n’est qu’à la mort de Rithha que Risten apprendra le secret qui pèse sur sa famille.
La petite fille et le monde secret est donc un roman initiatique  au cours duquel l’enfant abandonnée à une solitude et une grande détresse morales va atteindre l’âge adulte et finir par se reconstruire malgré ses blessures.


Ce roman est aussi intéressant en ce qu’il nous fait découvrir le peuple same, ses croyances, cette vie difficile souvent misérable, vouée au froid et à la nuit. Contrairement à ce qu’il est dit dans le résumé de la quatrième de couverture, je n’ai pas trouvé que ce « portrait de la communauté same »  était « tendre et subtil »; au contraire, je l’ai ressenti comme violent, dur et sévère, sans demi-teintes, un peu à la mesure de ce pays où les êtres humains plongés dans l’obscurité polaire pendant des mois sont obligés de s’endurcir pour survivre.

Maren Uthaug

Né en 1972 d'une mère norvégienne et d'un père sami, Maren Uthaug est une auteur de BD et illustratrice danoise reconnue. Nominé pour le prestigieux prix danois BogForum qui consacre une révélation, La Petit Fille sami est son premier roman. Le livre est écrit en danois et traduit en français par Jean-Baptiste Coursaud.
J'ai oublié de préciser que Risten est passionnée de dessin et que c'est une fine illustratrice comme l'écrivaine. il y a peut-être beaucoup de Maren dans ce personnage.
Chez Actes Sud une très belle première de couverture ! Illustration de Brad Kunkle




Quelques oeuvres de Brad Kunkle artiste américain (1978- )

Brad Kunkle

lundi 1 mai 2017

Stendhal : Nouvelle : Mina de Vanghel



 "Mina de Vanghel naquit dans le pays de la philosophie et de l'imagination, à Kœnigsberg. Vers la fin de la campagne de France, en 1814, le général prussien comte de Vanghel quitta brusquement la cour et l'armée. Un soir, c’était à Craonne, en Champagne, après un combat meurtrier où les troupes sous ses ordres avait arraché la victoire, un doute assaillit son esprit : un peuple a-t-il le droit de changer la manière intime et rationnelle suivant laquelle un autre peuple veut régler son existence matérielle et morale? "

Voilà un doute fâcheux pour un militaire qui vaut au comte de Vanghel d’être surveillé de très près par la police de Berlin et d’être confiné dans ses terres où il s’occupe en bon philosophe de l’éducation de sa fille Mina.
Après cela, à la mort du comte, vous comprendrez quel va être le caractère de la jolie Mina et ses idées peu conventionnelles et indépendantes que la lecture des romans a encore exaltées. Aussi lorsque le Grand-duc de C. qui l’a attirée à la cour veut lui faire faire un mariage d’argent, la belle qui ne veut épouser qu’un homme digne d'une grande passion s’enfuit à Paris avec sa mère. Malgré ses nombreux soupirants, lorsqu’elle tombe amoureuse, c’est d’un homme marié, Monsieur de Larcay. Après la mort de sa mère, elle est prête à tout pour conquérir cet homme et rien ne saura l’empêcher de vivre sa passion.

L’ironie stendhalienne

« Un peuple a-t-il le droit de changer la manière intime et rationnelle suivant laquelle un autre peuple veut régler son existence matérielle et morale? » Stendhal exprime ici son attachement bonapartiste et son hostilité à la restauration d’une monarchie française qui appelle à l’aide une armée étrangère pour se battre contre son propre peuple.. Il y a une certaine ironie de la part de Stendhal d’attribuer à un officier allemand cette révélation soudaine surtout après une bataille aussi sanglante !

L’ironie, Stendhal l’exerce aussi au dépens de la bonne société française. Si la politesse des  grandes dames est parfaite, il n’y aucune possibilité de faire des progrès dans leur amitié. C’est ce qu’il nomme la « sauvagerie polie » des françaises
« Au travers de toutes ces imaginations allemandes, Mina, qui avait dix-huit ans, commençait à avoir des éclairs de bon sens; elle remarqua qu’elle ne pourrait parvenir à se lier avec aucune femme française. »
 Quant aux français, voilà ce qu'en pense Mina  :
 J’admire leur esprit brillant, chaque jour leur ironie si fine me surprend et m’amuse ; mais ne les trouvez-vous pas empruntés et ridicules dès qu’ils essaient de paraître émus ? Est-ce que jamais leur émotion s’ignore elle-même ?

A la froideur et la superficialité  de ce peuple, il faut ajouter l’hypocrisie : « Alfred, sans croire beaucoup à la religion, trouvait qu’il était de mauvais ton de n’en pas avoir. »

Mais Stendhal ne ménage non plus la société allemande, du moins celle des courtisans lorsque, au début de la nouvelle, il remarque que ces derniers, malgré les beaux yeux de Mina, sont beaucoup moins empressés auprès d’elle quand ils apprennent qu’elle a attiré l’inimitié du grand-duc.

Une héroïne romantique

Film de Maurice Calvel : Mina de  Vanghel/ Odile versois

Si Stendhal est critique envers la société française, il s'intéresse aussi à l'analyse psychologique de son personnage principal Mina de Vanghel. La nouvelle paraît en 1827. Son héroïne annonce déjà Mathilde de la Mole dans Le Rouge et le Noir (1830). Comme elle, elle est issue de la noblesse et très consciente de sa caste, de sa richesse et de sa beauté; comme elle, elle est très orgueilleuse et prête à tout braver pour aller jusqu’au bout de sa passion. Ce sont deux tempéraments exaltés qui placent les sentiments au-dessus des conventions, de la morale et de la bienséance. Mais contrairement à Mathilde dont l’orgueil ne pourrait s’abaisser au mensonge et à la bassesse, Mina est capable de tout, même d’actes vils et mesquins pour se venger.
 Stendhal attribue à l’âme allemande le grain de folie qui est celui de Mina quand elle se déguise en servante pour parvenir à ses fins : « Mina n’était nullement agitée par les idées de voir et la crainte du ridicule »; Alors que, dit-il, un français manquerait dans la même situation "de courage ou de constance". Le trait de caractère principal de Mina semble bien être la déraison comme le prouve la suite du récit.

Une fin lapidaire

 
film de Maurice Barry, Maurice Clavel : Mina  en servante

Comme je l’ai déjà noté dans les nouvelles de Stendhal, la fin la nouvelle est d’une rapidité déconcertante. Après un long développement  qui brosse un tableau de la société, peint le caractère de l'héroïne et raconte la naissance de sa passion,  ses intrigues, le dénouement intervient en cinq lignes d’une brutalité totale. La dernière phrase met un point final au destin de Mina d’une manière lapidaire dans un refus de l’émotion et de l’effet, à l’opposé de l’épanchement romantique.