Le moins que l'on puisse dire
c'est que l'incipit du roman de l'écrivaine suédoise Maria Ernestam, Les oreilles de Buster est
en forme de coup de poing :
"j'avais sept ans quand j'ai décidé de tuer ma mère. Et
dix-sept ans quand j'ai finalement mis mon projet en exécution."
Au moins on est tout de suite dans l'ambiance! Voilà qui illustre bien
le thème du blogoclub de Silyre et Lisa pour lequel j'ai lu ce livre sur "l'amour maternel"!
Le thème principal
A l'occasion de son 56ème anniversaire Eva reçoit de la part de sa petite-fille un journal intime et elle commence à écrire ses souvenirs. Sa mère, une femme très belle, ne l'aime pas et ne cesse de l'humilier. C'est donc l'absence d'amour maternel qui est décrit ici et la souffrance puis la haine que Eva va finir par éprouver pour cette mère froide, indifférente, sarcastique. S'ajoute un grand amour brisé mais que Eva n'a jamais pu oublier, voilà quelle est la matière de ce roman.
Ce livre a eu la malchance de tomber après ma lecture de l'auteure norvégienne Herbjorg Wassmo Le livre de Dina qui met aussi en scène une meurtrière mais... quelle force dans ce portrait et dans la vie de cette femme! Cela m'a presque fait paraître fade l'histoire d'Eva.
Des personnages peu convaincants
C'est que, en dehors de l'incipit, j'ai trouvé le roman peu convaincant. Même s'il raconte des faits assez horribles, il manque de force. Peut-être parce que je n'ai pas pu complètement croire à cette petite fille de sept ans qui nourrit sa vengeance et s'exerce au crime sur son entourage dès qu'il se montre désagréable, humains ou animaux (de là le titre les oreilles de Buster : il faut savoir que Buster est un chien). Peut-être aussi parce que la mère d'Eva, en dehors de son manque d'amour, est un personnage assez convenu et manque de force. Une femme qui préfère ses amants à sa fille, qui n'aime pas son enfant, est une mauvaise mère, mais est somme toute assez banale ! Et si en plus elle préfère travailler parce qu'elle ne s'épanouit pas dans son foyer, là, je suis de tout coeur avec elle! En fait, elle ne prend une autre dimension qu'au moment de sa mort, quand on en apprend un peu plus sur elle mais c'est un peu tard! Bref! Je n'ai pu complètement adhérer à cette histoire parce que les personnages manquent d'épaisseur et de vérité psychologiques. A la limite, c'est Eva qui me paraît plus inquiétante que sa mère et pathologiquement atteinte. Son imagination n'a d'égale que sa perversité quand elle cherche à faire le mal! C'est un personnage glauque et qui aurait pu être très fort mais... Il y a trop d'invraisemblances! Très avertie sur la sexualité, machiavélique et sadique envers Bjorn, on la voit jouer ensuite les pucelles effarouchées et sortir les violons pour romancer sa rencontre avec l'homme qu'elle aime. Comment a-t-elle pu avoir une vie normale après son crime? Comment l'auteur peut-elle la peindre en mère et en grand-mère aimante? Je me demande aussi comment l'on peut éprouver de l'empathie pour un pareil personnage lu! Le problème c'est que Eva - pas plus que sa mère- ne se hisse jamais au niveau d'un héros tragique, elle n'éveille pas en nous ce sentiment mêlé d'effroi et d'admiration. Eva n'est ni une Electre ni un Oreste! On a plutôt l'impression que c'est une boutiquière qui tient mesquinement le compte des méchancetés de sa mère pour mieux pouvoir se venger et justifier son meurtre!
Des rebondissements gratuits
Je n'ai pas aimé, non plus,
certains artifices utilisés par Maria Ernestam pour créer des coups de théâtre
qui me paraissent sans grand intérêt : ainsi lorsque l'auteur joue sur
l'identité d'Eric et sa fiancée Lisa (ridicule) ou plus gênant sur l'identité
de Sven (irritant). Non seulement ces "rebondissements" n'apportent
rien au roman mais ils sont gratuits et peu crédibles. Ils n'ont surtout aucune
raison d'être quand ils ne sont pas trop amenés, trop prévisibles, comme l'insistance tout au long des pages sur l'amour d'Eva pour ses rosiers. Si on ne comprend pas pourquoi, c'est que l'on y met de la mauvaise volonté!
Reste que récit est bien
menée, que certains passages accrochent, que Maria Ernestam écrit bien... Je comprends que l'on puisse se
laisser prendre par la lecture. Moi, chaque fois que je me laissais emporter, un détail venait tout casser, m'agacer et je ne pouvais plus adhérer à l'intrigue!
Blogoclub de Sylire et Lisa |
Le roman proposé par le blogoclub sur le thème de l'amour maternel était La promesse de l'aube de Romain Gary, une oeuvre que j'aime beaucoup mais que j'ai déjà lue deux fois. J'ai préféré choisir le livre qui avait obtenu un peu moins de voix mais que je ne connaissais pas.
J'avais plutôt aimé ce livre, mais je reconnais que c'est souvent une histoire de moment... passer après Le livre de Dina, ça n'aide pas ! ;-)
RépondreSupprimerC'est là le problème : lire ce livre après celui de Dina, cela fait apparaître toutes les faiblesses! J'y suis allé peut-être un peu fort dans ma critique de "les oreilles de Buster"! Mais c'est vrai que Dina est un personnage tragique, qu'elle a une autre dimension que Eva.
RépondreSupprimerUn abandon pour moi, ouf, je vois que je ne suis pas la seule à ne pas avoir accroché à cette histoire (d'ailleurs elle déclare se sentir âgée à 50 ans, ça m'a tuée!)
RépondreSupprimerOui, elle parle d'elle comme d'une vieille femme! Je comprends que ça t'ait "tué"! Et moi donc!
SupprimerQuant au livre, je suis encore à me demander si je n'ai pas été trop sévère. mais que veux-tu, c'est ce que j'ai ressenti!
On en a beaucoup parlé sur les blogs, mais je n'ai jamais été réellement tentée. Je crois que je vais en rester là.
RépondreSupprimerLis Le livre de Dina de Wassmo. C'est vraiment un livre à découvrir! Et au moins si l'on met en scène une meurtrière que celle-ci soit digne d'intérêt!
SupprimerMa lecture du "Livre de Dina" date de plusieurs années pourtant, je me retrouve parfaitement dans ton avis sur "Buster ..." : j'ai aussi été très gênée par les fausses pistes laissées par l'auteur ... Et le tout manque cruellement de réaliste, en effet. Bref ! c'est un roman que j'ai regretté d'avoir acheté ...
RépondreSupprimerTon mot me conforte dans ce que j'ai éprouvé! En fait, j'avais peur que mon jugement ait été faussé par cette lecture sur Dina si forte!
SupprimerUne lecture que je n'avais pas trouvée désagréable, mais je me souviens que comme toi certaines choses m'avaient agacée...
RépondreSupprimerJe crois que ce sont les invraisemblances qui agacent et la gratuité de certaines scènes.
Supprimermerci de l'avoir lu pour nous, je passerai mon chemin!
RépondreSupprimerJe n'ai pas l'impression que ce serait un livre pour toi!
SupprimerAie, je l'ai dans ma PAL ! Bon, je sens qu'il ne va pas en sortir de si tôt.
RépondreSupprimerPeut-être te plairait-il!!
SupprimerOups, j'avais prévu de lire Toujours avec toi de Maria Ernestam pour un challenge ABC... J'espère qu'il sera plus intéressant que Les oreilles de Buster !
RépondreSupprimerD'ailleurs, je ne me suis toujours pas décidée pour la lettre W de ce challenge, pour pas Herbjorg Wassmo ;)
Grande admiration pour Wassmo. Je ne sais si tu la partageras mais cela vaut le coup d'essayer!
SupprimerJe me souviens l'avoir vu en librairie l'année passée et, après ton avis, je passe sans regret.
RépondreSupprimerIl y a des lecteurs qui aiment mais moi j'ai eu vraiment des difficultés à adhérer à cette histoire.
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