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vendredi 30 août 2013

Victor Hugo : L'homme qui rit





Avec L'homme qui rit, Victor Hugo écrit un roman-somme qui se veut historique, philosophique et poétique, un énorme livre de plus de 700 pages qui draine sur son chemin, comme un fleuve immense et puissant, toutes les idées de l'écrivain sur l'oligarchie, sa suffisance et son égoïsme féroce, et sur la misère du peuple représenté ici par le personnage de Gwynplaine qui en est l'allégorie. Pour la force de l'évocation, il n'y a qu'un Hugo pour parvenir ainsi au sommet. Quant aux excès du roman, ils sont le revers de la médaille en quelque sorte. Il s'agit, en effet, d'une oeuvre complexe, touffue, démesurée - ou plutôt à la mesure du génie de Hugo - de son immense érudition, de sa puissance visionnaire. Le lecteur peut lui reprocher ses longues digressions qui coupent le récit au moment les plus pathétiques, ses répétitions, une systématisation des effets de style, ses redites dans les idées, son insistance toujours amplifiée et même certaines lourdeurs. Il est probable que si je l'avais lu plus jeune, j'aurais envoyé le bouquin promener car il demande de la bonne volonté. Si c'est un roman d'aventures, en effet, il est aussi beaucoup plus et bien autre chose!  Il faut donc le lire en prenant son temps, en goûtant les richesses, sans impatience, sans avoir envie de courir au récit. Il est alors passionnant malgré certaines faiblesses. Et puis comme toujours le style riche, foisonnant de Victor Hugo mis au service de son engagement politique, de son indignation devant l'injustice, de sa compassion pour les opprimés, me fait vibrer.

L'Histoire et l'actualité du roman
 
Gravure de Daniel Vierge :  Gwynplaine , un monstre fabriqué pour divertir la foule
J'ai pris le temps de m'intéresser d'un point de vue historique au système l'aristocratie anglaise au XVII ème siècle, à l'époque de Gwynplaine dont il reste encore de vives survivances au XIX siècle : le patriciat anglais, c'est le patriciat dans le sens absolu du Mot. Pas de féodalité plus illustre, plus terrible, plus vivace. Terribles, en effet, sont les lois qui écrasent le peuple, stupéfiant le système de hiérarchie et de préséances qui règle les rapports des nobles entre eux, illimités les droits des lords sur les roturiers. Et comme la misère n'a jamais été éradiquée de ce monde, comme les puissants ont toujours su s'enrichir sur le dos des plus faibles, j'ai ressenti l'actualité du roman. De nos jours les rois sont les multinationales et l'oppression se nomme mondialisation, le mot-clef, le profit.

Le vrai titre de ce livre, affirme Hugo, serait l'Aristocratie. Un autre livre, qui suivra, pourra être intitulé La Monarchie. ces deux livres, s'il est donné à l'auteur d'achever ce travail, en précèderont et en amèneront un autre qui sera intitulé : Quatre-vingt-treize. 

Autrement dit les deux premiers entraînent la Révolution. Et on sent bien à travers L'Homme qui rit, toute l'empathie que Victor Hugo éprouve envers le peuple qui souffre, toute l'indignation qu'il ressent devant la misère des uns et la férocité des autres; un souffle révolutionnaire passe dans le roman dans le discours, accueilli par des rires, que Gwynplaine tient à la chambre des lords.

Je suis celui qui vient des profondeurs, Milords, vous êtes les grands et les riches. C'est périlleux. Vous profitez de la nuit. Mais prenez garde, il y a une grande puissance, l'aurore. L'aube ne peut être vaincue. Elle arrive. Elle a en elle le jet du jour irrésistible. Et qui empêchera cette fronde de jeter le soleil dans le ciel? Le soleil , c'est le droit. Vous, vous êtes le privilège. Ayez peur. Le vrai maître de la maison va frapper à la porte.

Et comme Victor Hugo même lorsqu'il agit en historien est aussi poète, il convoque une allégorie de ce pouvoir illimité, le wapentake,  apparition terrifiante dont on ne sait trop si elle est réelle ou du domaine du fantastique, ce représentant de la loi des Grands qui désigne avec l'iron-weapon celui que la justice réclame, sans autre sommation ni explication.

L'homme sans dire une parole, et personnifiant cette Muta Themis des vieilles chartes, abaissa son bras droit par-dessus Dea rayonnante, et toucha du bâton de fer l'épaule gauche de Gwynplaine, pendant que, du pouce de sa main gauche, il montrait derrière lui la porte de Green-Box. Ce double geste doublement plus impérieux qu'il était silencieux, voulait dire : Suivez-moi.

Un roman philosophique

Daniel Vierge : Gwynplaine et Dea

La philosophie du roman s'exprime à travers le personnage d'Ursus, bateleur, guérisseur et savant. Vieux misanthrope, vêtu d'une peau d'ours, mi humain-mi bête :

 Il possédait une peau d'ours dont il se couvrait les jours de grande performance; il appelait cela se mettre en costume. Il disait : J'ai deux peaux; voici la vraie. Et il montrait la peau d'ours 
Il a pour cher compagnon un loup baptisé Homo car le loup n'est-il pas finalement plus humain que les hommes?
Le loup avait été dressé par l'homme, ou s'était dresse tout seul, à diverses gentillesses de loup qui contribuaient à la recette. -Surtout ne dégénère pas en homme, lui disait son ami.
En effet, la misanthropie d'Ursus au grand coeur vient de sa constatation de la cruauté des hommes entre eux. Il apporte ici une réflexion sur la nature humaine dont il voit la noirceur, il est lucide face aux injustices, à l'écrasement des faibles par les puissants. Pourtant s'il s'en indigne, il accepte la destinée humaine. Il offre un curieux mélange entre ces deux termes qui le caractérisent : "indigné et résigné" ce qui donne à son discours une coloration bizarre, entre dénonciation et acceptation, et conférer ainsi une plus grande force à la dénonciation. 

Mon Dieu, je sais bien que tout le monde n'a pas vingt-quatre carrosses de gala, mais il ne faut point déclamer. Parce que tu as eu froid cette nuit, ne voilà-t-il pas? Il n'y a pas que toi. D'autres aussi ont eu froid et faim. Et puis si tous les gens qui sont épars se plaignaient, ce serait un beau vacarme. Silence voilà la règle. Je suis convaincu que le bon Dieu ordonne aux damnés de se taire, sans quoi ce serait Dieu qui serait damné d'entendre un cri éternel. Le bonheur de l'Olympe est au prix du silence du Cocyte.

Le vieux misanthrope d'Hugo rejoint parfois le jeune Candide de Voltaire :

Les pairs ont fait une foule de lois sages, entre autres celle qui condamne à mort un homme qui coupe un peuplier de trois ans. p376

La philosophie d'Ursus est en gros "pour être heureux vivons cachés" et c'est pourquoi c'est lui aussi qui mène une réflexion sur le bonheur. Dea, la jeune aveugle, et Gwynplaine, le monstre, dans leur pauvreté connaissant le bonheur parce qu'ils s'aiment. La cécité de Dea lui permet de voir la beauté intérieure de Gwynplaine.

Une seule femme sur terre voyait Gwynplaine. C'était cette aveugle.
-Tu es si beau, lui disait-elle.
C'est que Dea, aveugle, apercevait l'âme.

Ursus en tire la leçon, nous sommes aveuglés par nos sens et trompés par l'apparence :
 -L'aveugle voit l'invisible
Il disait
-La conscience est vision.

Ainsi, c'est le malheur des jeunes amoureux qui est la cause de leur bonheur. Si Gwynplaine n'était pas mutilé, il ne pourrait gagner sa vie comme histrion en faisant rire les foules et ainsi subvenir aux besoins de Dea et de son père adoptif Ursus. Si Dea n'était pas aveugle, elle ne pourrait aimer Gwynplaine. Mais ce qui est résignation chez Ursus devient révolte chez Gwynplaine et la prédictions d'Ursus se réalise, il ne pourra être qu'écrasé.

Un roman poétique  

Dessin de Victor Hugo

Roman poétique, L'homme qui lit est bâti sur des antithèses selon un procédé cher à Victor Hugo qui lui permet de frapper l'imagination et de faire naître des images évocatrices. Ces antithèses sont nombreuses entre la cécité et la clairvoyance, entre les faibles et les puissants, le peuple et les aristocrates, l'histrion et le lord, le mal et le bien, entre l'amour spirituel et l'amour charnel.
Mais l'une de ces antithèses est une constante dans l'oeuvre de Hugo romancier et poète. Elle repose sur le contraste entre l'ombre et la lumière, la nuit et le jour. Le Livre premier s'intitule La nuit moins noire que l'homme et la conclusion du roman La mer et la nuit; certains chapitres eux aussi présentent ces jeux  d'ombre : Bataille entre la mort et le nuit,  Face à face avec la nuit, L'enfant dans l'ombre. Ces contrastes d'ombre et lumière permettent à Victor Hugo de splendides effets de clair-obscur dans des descriptions qui correspondent à son tempérament artistique et que l'on retrouve dans sa peinture. Ces notions symbolisent la mort. Dans le premier livre c'est le naufrage de la Matutina, l'ourque des voleurs d'enfants, les comprachicos, dans le dernier, c'est le suicide de Gwynplaine. La lumière qui disparaît est un présage de la fin. Ainsi lorsque les comprachicos voient apparaître le phare des Casquets, ils ont un moment d'espoir mais qui se révéle dérisoire :

La phare, reculant, pâlit, blémit, puis s'effaça.
Cette extinction fut morne. Les épaisseurs de brume se superposèrent à ce flamboiement devenu diffus. Le rayonnement se délaya dans l'immensité mouillée. La flamme flotta, lutta, s'enfonça, perdit forme. On eût dit une noyée. Le brasier devint lumignon, ce ne fut plus qu'un tremblement blafard et vague. C'était comme un écrasement de lumière au fond de la nuit.

La nuit et la lumière sont donc bien synonymes de la mort dans les trois premiers livres. Dans le livre 8, elles sont par contre le symbole du triomphe du bien sur le mal, de la justice sur l'oppression, de l'espoir sur le désespoir comme on l'a vu dans le discours du Gwynplaine aux lords.

Vous profitez de la nuit. Mais prenez garde, il y a une grande puissance, l'aurore.

Victor Hugo met en aussi en relief l'opposion entre la mer et la terre dans le premier livre. D'un point de vue dramatique, il établit, en effet, un parallèle entre ce qui se passe sur l'océan et sur la pointe de Portland : La Matutina des comprachicos est prise dans une tempête de neige en pleine mer, évite à plusieurs reprises une mort annoncée pour sombrer enfin lorsqu'elle se croit sauvée. Gwynplaine, abandonné par les bandits, marche dans la neige, le froid et la tourmente au prix de mille souffrances, se retrouve face à un pendu devant un gibet, et sauve le bébé Dea d'une mort certaine à l'arrachant au cadavre de sa mère. L'écrivain tire  de cette opposition de splendides effets picturaux et poétiques qui renforcent l'intérêt dramatique :
La mer comme la terre était blanche; l'une de neige, l'autre d'écume. Rien de mélancolique comme le jour que faisait cette double blancheur. Certains éclairages de la nuit ont des duretés très nettes; la mer était de l'acier, les falaises de l'ébène. De la hauteur où était l'enfant, la baie de Portland apparaissait presque en carte géographique, blafarde dans son demi-cercle de collines; il y avait du rêve dans ce paysage nocturne...

Un romantisme tardif

Dessin de Victor Hugo

En 1869, le mouvement romantique est éteint depuis longtemps mais le roman de Gwyplaine par bien des aspects appartient encore au romantisme.

Et d'abord, par le choix du personnage Gwynplaine qui comme Hernani est un proscrit, un être voué au malheur, qui ne trouve sa place nulle part sur terre.  Gwynplaine est un monstre mais à la différence de Quasimodo, c'est un monstre fabriqué par les comprachicos pour amuser la foule.

Cette fabrication de monstres se pratiquait sur une grande échelle et comprenait divers genres.
Il en fallait au sultan; il en fallait au pape. A l'un pour garder ses femmes; à l'autre pour faire ses prières. C'était un genre à part ne pouvant se reproduire par lui même.Ces à-peu-près humains étaient utiles à la volupté et à la religion. Le sérail et la chapelle Sixtine consommaient la même espèce de monstres ici féroces, là, suaves .

C'est en cela qu'il incarne l'Humanité souffrante. Il est l'allégorie du peuple misérable qui comme lui est le jouet  des grands, il  n'est pas maître de son destin. Pourtant, il représente aussi l'espoir et la révolte. En devenant lord il se fait le porte-parole du peuple et annonce la naissance d'une autre ère, où la justice sera possible. Gwynplaine, l'histrion devenu lord est donc bien un héros romantique.

Ce rire qui est sur mon front, c'est un roi qui l'y a mis. Ce rire exprime la désolation universelle. Ce rire veut dire haine, silence contraint, rage , désespoir. Ce rire est un rire de force. Si Satan avait ce rire, ce rire condamnerait Dieu. Mais l'éternel ne ressemble point aux périssables; étant l'absolu, il est le juste; et Dieu hait ce que font les rois. Ah! vous me prenez pour l'exception! Je suis un symbole!
Je représente l'humanité telle que ses maîtres l'ont faite. L'homme est un mutilé. Ce qu'on m'a fait on la fait au genre humain. p 696

Autre thème romantique, celui de la femme idéalisée qui représente l'Esprit, la part de Dieu qui est en tout homme. Déa, aveugle qui sait voir l'invisible, est dans son innocence et sa fragilité, l'incarnation de l'amour idéal, loin des tentations de la chair, à l'opposé de la duchesse Josiane, qui représente le désir charnel et la dépravation. C'est pourquoi l'amour de Gwynplaine et de Dea ne peut se résoudre que dans la mort.
Pas de pureté comparable à ces amours. Dea ignorait ce que c'était qu'un baiser, bien que peut-être elle le désirât; car la cécité, surtout d'une femme a ses rêves, et, quoique tremblante devant les approches de l'inconnu, ne les hait pas toutes. Quant à Gwynplaine, la jeunesse frissonnante le rendait pensif; plus il se sentait ivre, plus il était timide.
À la fin du XVIIe siècle, un jeune lord est enlevé sur ordre du roi et atrocement défiguré, la bouche fendue jusqu'aux oreilles. Abandonné une nuit d'hiver, il parvient à rejoindre la cahute d'un philosophe ambulant, et devient saltimbanque. Quinze ans plus tard, rétabli dans ses droits, il est pair d'Angleterre. Mais sa mutilation ne s'effacera pas, et celui qui se serait voulu prophète à la Chambre des lords restera condamné à n'être qu'un bouffon.


ET voilà la lecture commune faite avec Miriam et Rosamond sur L'Homme qui rit de Victor Hugo



jeudi 29 août 2013

Victor Hugo : L'homme qui rit (citation), La vie n'est qu'un pied à terre...


Gwinplaine, Dea, Ursu et Homo, le loup (musée de Villequier)

Victor Hugo a toujours eu l'art de la formule. C'est le cas dans L'homme qui rit :

 La vie n'est qu'un pied à terre.

Un vieil homme est une ruine pensante; Ursus était cette ruine-là

Quand on demandait à Démocrite : comment savez-vous? il répondait : je ris. Et moi, si l'on me demande : Pourquoi riez-vous? je répondrai : je sais.
 
Gwynplaine avait rencontré l'embuscade du mieux, ennemi du bien.

 Sur Dieu

Vous pouvez croire en Dieu de deux façons, ou comme la soif croit à l'orange, ou comme l'âne croit au fouet.

J'avoue franchement que je crois en Dieu, même quand il a tort.

Sur l'amour

Ursus :
- Bah! ne te gêne pas. En amour le coq se montre.
-Mais l'aigle se cache, répondit Gwynplaine


A propos de Dea, l'aveugle, et de Gwynplaine, le mutilé
 
 Avec leur enfer, ils avaient fait du ciel :  Telle est votre puissance, amour!

La difformité, c'est l'expulsion. La cécité, c'est le précipice. L'expulsion était adoptée. Le précipice était habitable.

A propos des Grands : 

S'ils te demandaient : De quel droit es-tu heureux? tu ne saurais que répondre. Tu n'as pas de patente, eux ils en ont une.

Quel dommage qu'il ne soit pas lord! Ce serait une fameuse canaille!

C'est de l'enfer des pauvres qu'est fait le paradis des riches…

Le bonheur de l'Olympe est au prix du silence du Cocyte.



mardi 27 août 2013

Victor Hugo : L'homme qui rit (citations) C'est de l'enfer des pauvres...

Dessin de Victor Hugo


Sais-tu qu'il y a un duc en Ecosse qui galope trente lieux sans sortir de chez lui? Sais-tu que le lord archevêque de Canterbury a un million de France de revenus? Sais-tu que sa majesté a par an sept cent mille sterlings de liste civile, sans compter les châteaux, forêts, domaines, fiefs, tenances, alleux, prébendes, dîmes et redevances, confiscations et amendes, qui dépassent un million sterling? Ceux qui ne sont pas contents sont difficiles.
- Oui, murmura Gwynplaine pensif, c'est de l'enfer des pauvres qu'est fait le paradis des riches.



dimanche 25 août 2013

Victor Hugo : L'homme qui rit (citation) Le genre humain existe...


Gwynplaine dessin de Victor Hugo


 Un extrait de L'homme qui rit de Victor Hugo en attendant la lecture commune du 30 août.
Discours de Gwynplaine à la chambre des lords : Livre 8 chapitre VII .

Milords, vous êtes en haut. C'est bien. Il faut croire que Dieu a ses raisons pour cela. Vous avez le pouvoir, l'opulence, la joie, le soleil immobile à votre zénith, l'autorité sans borne, la jouissance sans partage, l'immense oubli des autres. Soit. Mais il y a au-dessous de vous quelque chose. Au-dessus peut-être. Milords, je viens vous apprendre une nouvelle. Le genre humain existe.

Avouez que ce discours a du panache!


jeudi 22 août 2013

Victor Hugo : citation de L'homme qui rit , Une habitude idiote qu'ont les peuples...


J'ai fini ma lecture commune L'homme qui rit  de Victor Hugo prévue pour le 30 août  avec Aifelle, Miriam, Rosamond. Mais avant de publier mon billet,  j'ai eu envie de mettre en valeur par une citation une des idées que présente ce roman-fleuve, bien certaine que je ne pourrai tout de dire de cet énorme roman en une seule fois. Alors, en attendant, voilà ce que pense Hugo des peuples et de leur admiration "idiote" (ce n'est pas moi qui le dis) des rois.


Une habitude idiote qu'ont les peuples, c'est d'attribuer au roi ce qu'ils font. Il se battent. A qui la gloire? Au roi. Ils paient. Qui est magnifique? Le roi. Et le peuple l'aime d'être si riche.  Le roi reçoit des pauvres un écu et rend aux pauvres un liard.  Qu'il est généreux! Le colosse piedestal contemple le pygmée fardeau. (..) Un nain a un excellent moyen d'être plus haut que le géant, c'est de se jucher sur ses épaules. Mais que le géant laisse faire, c'est là le singulier; et qu'il admire la grandeur du nain, c'est là le bête. Naïveté humaine.



lundi 12 août 2013

Brassée d'images : Une Pause pendant le mois d'aôut : Je suis là!

Arrière plan : Ma maison ; premier plan le cimetière familial  protestant

Le château du pape Urbain V 



La bruyère est belle!

La montagne aussi!

et le coucher de soleil !


Au revoir! A bientôt!

dimanche 11 août 2013

Mouvements, spectacle du Ballet de L'opéra-théâtre d'Avignon

Pas de deux de Romeo et Juliette Ballet de l'Opéra-Théâtre d'Avignon
Je finis ma revue des spectacles d'Avignon vus avec ma petite fille, Léonie, trois ans, avec le ballet de l'Opéra-Théâtre d'Avignon : Mouvements donné en nocturne au cloître des Célestins (encore un très beau lieu théâtral d'Avignon) dans le cadre des Nuits estivales du Grand Avignon. Un riche initiative qui se poursuit jusqu'au 14 août  dans Avignon et les villages tout autour avec des spectacles variés et pour tous les goûts. Un prolongement agréable au festival de théâtre d'Avignon.

Mouvements comprend trois ballets chorégraphiés  par Eric Belaud, directeur du ballet de l'opéra-théâtre d'Avignon : Le pas de deux de Roméo et Juliette, les Quatre saisons de Vivaldi et  Nuit transfigurée d'Arnold Schönberg .

Présentation :
Célébrissimes, les deux premières œuvres n’ont nul n’est besoin d’être présentées. « Verklärte Nacht » amène quant à elle un commentaire. D’après un poème de Richard Dehmel, cette œuvre fut composée en trois semaines seulement par Arnold Schönberg. Elle relate un dialogue amoureux entre un homme qui déclare son sentiment et une femme qui avoue attendre un enfant d’un autre homme. L’œuvre s’inspire largement des modes dramatiques utilisés par Brahms, Wagner ou Richard Strauss. Schönberg démontre magistralement son souci de variation continue avec utilisation de grands sauts d’intervalles et des tournures mélodiques, qu’en son temps les tenants de la « tradition » ne percevaient que comme « extravagances », mais qu’aujourd’hui on peut considérer comme le chef d’œuvre de musique de chambre « romantique».

J'y ai amené Léonie, en pensant qu'elle regarderait le pas de deux de Roméo et Juliette (que je pensais être en début de spectacle) et que nous partirions discrètement ensuite. Bien sûr, je lui avais raconté l'histoire des deux jeunes amoureux contrariés par la haine que se voue leur famille. Elle était donc très motivée!

 Or le spectacle a débuté par La Nuit transfigurée d'Arnold Schönberg, une sombre histoire d'après un poème de Richard Dehmel. On y voit une jeune fille agressée par un bande de jeunes gens et forcée par l'un d'eux. Plus tard elle est courtisée par un homme qui lui avoue son amour. Elle lui dit qu'elle est enceinte d'un autre et il ne se détourne pas d'elle.

Ce ballet est très beau. La  violence des faits et des sentiments est  évoquée par une chorégraphie contemporaine mais qui reste proche du classique.  Les interprètes transmettent une profonde émotion encore exacerbée par la musique.  Ma petite fille était accrochée à son siège, absolument passionnée par le drame qui se passe devant elle, frémissante aux accents tragiques de la musique.. Elle ne comprend pas tout mais elle donne son explication car elle se croit dans Roméo et Juliette: "les méchants" attaquent Juliette parce qu'ils ne veulent pas qu'elle se marie avec Roméo". 

Romeo et Juliette chorégraphie d'Eric Belaud
Bien entendu plus question de la "décrocher" du spectacle! Le pas de deux de Roméo et Juliette  qui suit, la scène du balcon, plus romantique, douce et joyeuse, l'éblouit. Elle ne s'endort finalement que sur le deuxième mouvement des Quatre saisons de Vivaldi, vaincue par la fatigue. Depuis elle nous parle toujours avec enthousiasme de ce spectacle.
Quant à moi j'ai vraiment beaucoup aimé ces trois ballets. Contemporaine, cette danse reste proche du classique et exprime sentiments et émotions sans mièvrerie. Cette chorégraphie inspirée possède une énergie et une force intérieures que servent très bien les quatorze bons interprètes, sept danseuses et  sept danseurs. En un mot, j'ai été frappée par la qualité du ballet de l'opéra-théâtre d'Avignon.

samedi 10 août 2013

festival Off d'Avignon : L'Avare Molière/ Alain Bertrand; Racine par la Racine/ Serge Bourhis; Salle 6 Tchekov/Gérard Thebault

L'avare de Molière

L'avare de Molière Compagnie  Alain Bertrand

L'Avare de Molière compagnie Alain Bertrand qui est aussi le metteur en scène, cour du Barouf
L'adaptation de la comédie de Molière L'Avare par Alain Bertrand et Carlo Boso  pour la Commedia Dell'arte est un spectacle agréable. Les acteurs sont dynamiques et la mise en scène amusante. Les actes sont interrompus par des chants, ponctués par des allusions à l'actualité et les spectateurs sont appelés à participer.  Le jeu des acteurs est homogène, leur enthousiasme communicatif. Je pense que cette production est un moyen idéal pour faire découvrir la pièce à des ados  (il y a en avait dans la cour du Barouf ce jour-là) et leur prouver que les classiques ne sont pas obligatoirement empesés.

Racine par la Racine




Racine par la Racine  La caravane rouge metteur en scène Serge Bourhis à l'Essaïon Théâtre d'Avignon.
Vous ne verrez pas une pièce de Racine si vous allez voir Racine par la Racine mais des extraits de onze pièces reliées entre elles par une mise en scène amusante et parodique mais pas que… Si le metteur en scène Serge Bourhis et les comédiens s'amusent (et nous avec eux) et pastichent volontiers le grand dramaturge, ils sont aussi des amoureux de ses vers. Et cela se sent quand l'humour cède la place à la tragédie. Les comédiens sont bons et nous réservent des surprises agréables comme la scène de Phèdre jouée par un rôle masculin ou celle du songe d'Athalie, toutes deux interprétées avec beaucoup d'émotion. L'ennuyeux c'est que nous vient une nostalgie du théâtre de Racine et qu'on aimerait voir des extraits plus larges!  J'en suis sortie avec l'envie de revoir une pièce de Racine entière sur scène. Et c'est là la réussite de la compagnie, nous faire aimer Racine!

 Salle 6 d'Anton Tchekhov



Salle 6 d'Anton Tchekhov  Compagnie l'Etincelle à l'Essaïon Théâtre Avignon

Salle 6 est une pièce inédite d'Anton Tchekhov, un auteur que j'aime beaucoup, c'est pourquoi je n'ai pu résister à aller la voir. Je ne pouvais pas encore une fois aller revoir La Mouette! Il faut découvrir autre chose!

La salle 6 est une annexe de l'hôpital psychiatrique d'une province russe dans laquelle les fous sont enfermés. Le docteur Raguine  ne se fait aucune illusion sur la possibilité de guérir ses malades  et laisse tout aller dans cet hôpital qui n'est rien d'autre qu'une prison à peine améliorée. Il préfère méditer et boire un verre  en solitaire. Pourtant, lorsqu' il découvre l'intelligence et la sensibilité de Gromov, un des patients, il  est impressionné et son indifférence l'abandonne, sa quiétude le quitte.
Voilà de quoi le faire passer pour fou lui aussi, surtout quand on a, comme ses collègues, de bonnes raisons de vouloir se débarrasser de lui!

Le sujet est intéressant à priori mais la pièce est bavarde et démonstrative. Je comprends pourquoi elle est restée inédite. Je me suis ennuyée. Je n'ai ni aimé la mise en scène, ni les acteurs qui débitaient leur texte d'un ton monocorde.


Challenge Eimelle

vendredi 9 août 2013

Théâtre enfants au festival Off d'Avignon : Les coups de coeur de Léonie et de sa grand mère (3): Si Loin, Si haut, Gudulliver



Si loin, si haut :  metteur en scène Laurence Belet

Avec Léonie, ma petite fille âgée de 3 ans et 4 mois (il ne faut pas que je les oublie ces mois si je ne veux pas la vexer) nous avons vu 10 pièces pour enfants, plus un spectacle (qu'elle a adoré) donné par le ballet de l'Opéra d'Avignon, en direction d'un public adulte, chorégraphié par Eric Bellaud. Et parmi ces pièces, les petits  bijoux dont je vous ai parlé précédemment ICI et ICI . Ce qui est amusant c'est que pour nous deux, la première et la dernière pièce dans l'ordre des préférences sont les mêmes. Pour les autres, il y a des variantes, légères.

Parmi les spectacles que nous aimons toutes les deux, il y a encore : 

Si loin, si haut par la compagnie Rouges les Anges

Le beau castelet de Pierre Gosselin pour Si loin, si haut



Si loin si haut par la compagnie Rouges les Anges s'inspire des albums pour enfants de W. Van Reek : "Mauvais temps" et "La grande échelle". Les personnages sont Grand-Bec, un drôle d'oiseau qui ressemble un peu à un humain et Touki qui est un chien. Ce sont deux adorables marionnettes qui sont manipulées à vue, avec délicatesse et humour, par les comédiens qui interviennent aussi en tant que personnages, clowns maladroits, un peu lunaires. Les histoires sont très simples, à la portée des tout-petits à partir de trois ans. Léonie à particulièrement aimé le premier récit et la construction de la cabane en toile dans la forêt inondée par la pluie. J'ai trouvé personnellement que le second récit manquait un peu de rythme et traînait en longueur.  Les décors qui jouent sur les différents espaces délimités par les ouvertures d'un grand castelet-maison en bois et métal (magnifique) crée l'illusion de la profondeur et nous fait voyager d'un lieu à l'autre. L'utilisation de la vidéo et du dessin animé est ingénieuse et très belle.  Un très bon spectacle.

 Gudulliver
Spectacle pour grandes personnes à partir de trois ans

Gudulliver cueille un fruit et arrache l'arbre. Fureur du lilliputien!

Gudulliver est l'adaptation pour les enfants du Gulliver de Jonathan Swift  par la Compagnie Danglefou. 
Emporté par la tempête, Gulliver se retrouve dans une île où vivent de petits êtres. Tous vont apprendre à se connaître, à ne pas avoir peur les uns des autres jusqu'à ce que Gulliver commette une bévue de trop et se fasse chasser. Il arrive alors sur l'île des géants ou c'est lui désormais qui va devenir le petit, objet de curiosité des Grands. Une réflexion sur la relativité et l'acceptation de la différence.

Gulliver et les lilliputiens

Dans la première partie, Gulliver est interprété par le comédien Serge d'Angleterre et les petits hommes sont des personnages-objets manipulés par  Kham-Lhane Phu qui leur insuffle la vie et les fait parler. Le début de la pièce est un peu trop bavard, mais l'arrivée de ces petites personnages attendrissants, les soldats, le général, la reine, leurs gesticulations amusantes, la visite du village miniature sont tout à fait réussies. Ils parlent un drôle de langage proche de l'onomatopée mais qui exprime tous les sentiments, la peur, la colère, l'indignation, l'étonnement devant l'apparence, les agissements et les bévues du grand homme! Léonie a adoré ce langage inarticulé qu'elle s'amuse maintenant encore à imiter. Elle s'est beaucoup amusée lorsque Gulliver veut cueillir un fruit et déracine l'arbre lilliputien! Le propriétaire qui arrive et abreuve d'insultes le géant la fait tordre de rire. Elle a eu peur quand la maison s'est mise à brûler! Bref! elle a vécu pleinement l'émotion théâtrale!
Dans la seconde partie les géants sont incarnés par les deux acteurs et Gulliver, lui, est une petite marionnette à la ressemblance de Serge Dangleterre. C'est une très bonne idée mais je ne sais pourquoi cette partie est moins réussie que la première. Peut-être y-a -t-il beaucoup trop de paroles et moins d'action, moins d'humour. Il aurait fallu que Gulliver-marionnette devienne, comme s'est annoncé dans le résumé de la pièce, un jouet pour les enfants peut-être en invitant les petits spectateurs à venir sur scène? Le comique aurait pu venir alors du mécontentement de Gulliver  qui ne veut pas être considéré comme une poupée? Bref! quand Léonie nous parle de cette pièce qui  occupe une place chère à son coeur, c'est toujours de la première partie.
Des qualités donc dans ce ce spectacle qui montre que l'on peut mettre les grandes oeuvres classiques à la portée des enfants.


Léonie a vu aussi  :


La flûte enchantée de Mozart adapté  pour les enfants à partir de quatre ans par le Théâtre du corbeau blanc .... Papageno  a un très joli masque et de jolies plumes que Léonie aurait bien aimé emporter. Elle a été très attentive mais n'a pas manifesté ses sentiments.

Peter Pan et le pays imaginaire  mis en scène par Elric Thomas. Tout repose sur l'imagination de deux écoliers qui veulent partir pour le pays imaginaire. Les pupitres deviennent crocodiles, Wendy est représentée par un manteau rose, le crochet du capitaine est un rapporteur cassé... Léonie a été déçue parce qu'elle voulait voir la "vraie" fée clochette,  le "vrai" capitaine Crochet ... L'imagination n'a pas fonctionné contrairement à son habitude!




Je veux voir mon chat par la compagnie Arthéma : Robin par à la recherche de son chat avec son chien. Mais celui-ci est mort. Il croit le reconnaître dans la forme des nuages. Mais c'est le souvenir que nous conservons d'eux qui permet à ceux qu'on aime de rester en vie.  De très jolis marionnettes et décors. Mais le sujet, la mort, n'a pas touché Léonie ou ne lui a pas fait plaisir. Elle a refusé d'en parler. Il me semble que c'est une pièce qui demanderait une préparation pédagogique comme c'est manifestement le cas pour le public scolaire.


Challenge théâtre d'Eimelle



jeudi 8 août 2013

Festival Off d'Avignon : Mon Nom est rouge de Orhan Pamuk/; Le mariage de Figaro de Beaumarchais/ Jean hervé Appéré


Mon nom est rouge Orhan Pamuk Compagnie Papierthéâtre

Mon nom est rouge Orhan Pamuk à La Caserne des pompiers par la compagnie Papierthéâtre .

J'ai lu Mon nom est rouge, le long roman de Orhan Pamuk, prix Nobel de littérature, il y a quelques années et j'ai donc éprouvé l'envie d'aller voir cette adaptation à La Caserne des pompiers par la compagnie Papierthéâtre .

Le récit se déroule dans l'empire ottoman du XVI° siècle. L'intrigue peut être considérée comme policière puisqu'il y est question d'un cadavre jeté au fond d'un puits qui parle aux lecteurs/spectateurs pour mieux guider la recherche. Mais il est aussi tout autre chose! Il présente une histoire d'amour et  surtout il est une réflexion sur les différences fondamentales entre l'art occidental et l'art oriental, sur l'influence de l'un, l'occidental, sur l'autre, et les passions exacerbées que ces interférences déchaînent puisque cela peut aller jusqu'au crime.

Le théâtre de papier et d'ombres présente une belle recherche esthétique, les personnages sont des formes découpées qui évoluent dans des décors de papier. Le spectacle est accompagné par la musique d'un maître iranien mais l'animation reste limitée et répétitive. Le découpage de ce roman complexe en tableaux ne permet pas une mise en scène dynamique. J'ai trouvé l'ensemble assez lent et ennuyeux. Seules les interventions d'un des acteurs présentant les réflexions sur l'art mises en scène d'une manière originale, relancent l'intérêt et rompent la monotonie de ce spectacle.



Le mariage de Figaro Comédiens et compagnies au théâtre des Lucioles mis en scène Jean Hervé Appéré

La pièce de Beaumarchais Le mariage de Figaro est une pièce immense, d'une importance primordiale dans la littérature par sa critique sociale des grands, son annonce de la révolution française, mais aussi par la complexité psychologique des personnages, par sa portée philosophique. Quand Mozart la reprend pour en faire un opéra, il subit la censure de la cour de Joseph II et doit faire en sorte que le livret soit expurgé de tous les passages jugés révolutionnaires parce qu'ils remettent en cause la noblesse et la société monarchique. Qu'à cela ne tienne c'est dans sa musique que Mozart mettra tout le sens de la pièce.
La pièce présentée par Comédiens et compagnie est entrecoupée d'airs de cet opéra mais subit des coupes sombres dans les monologues de Figaro qui contiennent le sens de la pièce. Et finalement ce n'est ni la pièce, ni l'opéra qui sont représentés ici. La mise en scène de Jean Hervé Appéré gomme toute la puissance du Mariage de Figaro pour en faire un divertissement sympathique mais sans grande portée. Certes, il tire le maximum de ses acteurs mais si Figaro bouge bien et peut être comique, il n'est pas à la hauteur pour incarner le tragique de Figaro, ce personnage hors du commun, ni sa portée révolutionnaire; quant au comte  c'est un nigaud  dont on rit mais qui devrait aussi nous effrayer! Il n'a rien du grand seigneur méchant homme que Beaumarchais a imaginé. Alors, pourquoi ne pas monter une pièce plus légère? Pour moi, une grosse déception!

mercredi 7 août 2013

Festival Off d'Avignon 2013 : Building de Léonore Confino / Regardez mais n'y touchez pas! de Théophile Gautier


Building Compagnie Productions du sillon

Building de Léonore Confino : Compagnie productions du Sillon metteur en scène Catherine Schaub au théâtre du Balcon
Sujet :
Un Building. 13 étages. Nous sommes chez Consulting Conseil, une entreprise qui a pour absurde mission de coacher les coachs, de conseiller les conseillers.
Le président directeur général amorce la pièce en motivant ses employés avec un discours démagogique, superposant avec éloquence  banalités et techniques de communication.
Puis, suivant la chronologie d’une journée de travail, on se hisse dans le building au rythme soutenu d’une scène par étage ..
...

On le comprendra cette pièce est une satire du monde l'entreprise avec ses méthodes absurdes, son absence d'éthique, ses actionnaires cupides, ses directeurs inhumains..  Les ridicules  de cet univers étouffant sont ici soulignés, les noirceurs aussi, la concurrence entre collègues, la hiérarchie étouffante et  méprisante, l'inhumanité des rapports humains ... 
La mise en scène est inventive, drôle, animée, légère et cruelle à la fois. Les interprètes sont excellents et plus vrais que nature dans les rôles de chef outrecuidant, de stagiaire naïve, de collègue hypocrite, de  subalterne humilié ou de macho immonde. Un bon moment de théâtre!

Regardez mais n'y touchez pas !Théophile Gautier Compagnie Abraxas

Regardez mais n'y touchez pas! de Théophile Gautier mise en scène par Jean-Claude Penchenat Compagnie Abraxas au théâtre du Chien qui fume

Montée en 1847 et jamais plus rejouée depuis, cette pièce de Théophile Gautier est un pastiche du drame romantique en même temps qu'une comédie de cape et d'épée avec cape... mais sans épée comme le veut la mise en scène de Jean-Claude Penchenat qui renchérit dans le pastiche pour le plus grand plaisir des spectateurs.
 Admirateur idolâtre de Hugo, Jeune France au gilet rouge de la bataille d'Hernani, Théophile Gautier n'en fait pas moins preuve d'un humour ravageur quand il raconte dans son Histoire du romantisme les frasques et les enthousiasmes juvéniles et romantiques de lui-même ou de ses amis, Gérard de Nerval, Pétrus Borel, Jehan du Seigneur... Il en est de même dans cette pièce complètement échevelée, à l'intrigue loufoque, que le spectateur aurait tort de vouloir prendre au sérieux. 
Pastiche de l'action du drame romantique avec des poursuites, des amours contrariés, un héros maudit marqué par le destin, une reine espagnole, des Hidalgos au coeur généreux ou fourbe, (on sait l'engouement de Hugo pour l'Espagne), Regardez mais n'y touchez pas est un "remake" (mais oui!) de  Hernani mâtiné  de Ruy Blas jusque dans le style! Mais pour faire rire!  Je me demande ce qu'en  a pensé Hugo s'il l'a vu! Le drame romantique, dix sept ans après le triomphe de Hernani (1830) était sur son déclin après l'échec des Burgraves de Hugo en 1843.
Une Espagne de convention voire de pacotille apparaît, ce que les décors et les costumes de ce spectacle rendent plaisamment : Les personnages drapés dans leur cape noire et masqués ressemblent à des Zorros et les espagnoles manient l'éventail avec fougue. Un spectacle léger et divertissant pour passer un bon moment à rire au dépens de notre grand Totor!

Comédie de cape et d'épée... sans épée!

Challenge d'Eimelle








mardi 6 août 2013

Théâtre enfants au festival d'Avignon 2013 : Les coups de coeur de Léonie et sa grand mère(2) : Grat'moi la puce que j'ai dans l'do, La Baba Yaga et la Sorcière Latrouille


Grat'Moi la puce que j'ai dans l'do Cie Minute papillon

Avec Léonie, ma petite fille âgée de 3 ans et 4 mois (il ne faut pas que je les oublie ces mois si je ne veux pas la vexer) nous avons vu 10 pièces pour enfants, plus un spectacle (qu'elle a adoré) donné par le ballet  de l'Opéra d'Avignon en direction d'un public adulte chorégraphié par Eric Bellaud. Et parmi ces pièces, des petits  bijoux. Je vous parle d'abord de nos coups de coeur à toutes les deux pour le théâtre enfants :

Petite divergence entre Léonie et sa grand mère : si le N° 1 est Pogo pour toutes les deux, (voir Ici)

               le  N° 2 est La Baba Yaga  de Carabistouilles et Cie pour Léonie et  pour moi Grat'moi la puce que j'ai dans l'Do  de la Cie Minute papillon. Pas étonnant que la Baba Yaga tienne une telle place dans l'imaginaire de Léonie qui adore les histoires de sorcières. C'est tellement bien d'avoir peur quitte à faire des cauchemars toute la nuit après le spectacle!


La Baba Yaga

La Baba Yaga d'Héloïse Martin

La Baba Yaga d'Héloïse Martin (qui interprète aussi la conteuse et Baba Yaga), mis en scène par Philippe Ferran, est la sorcière des contes russes. Elle est méchante, bien sûr, puisqu'elle croque les enfants, mais pas entièrement méchante... Rassurez-vous tout de suite, elle ne mangera pas Vassilissa, la petite fille envoyée par sa marâtre dans la forêt pour chercher du feu.  La fillette a une poupée magique donnée par sa maman pour lui permettre de surmonter les épreuves. Elle finira par apprécier la vieille sorcière et par la secourir. Grâce à son aide, Vassilissa se libèrera de sa marâtre, grandira et et sortira de ces épreuves plus forte. 

Le conte est destiné aux enfants à partir de quatre ans, peut-être est-ce pour cela que les énigmes données par la Baba Yaga n'ont pas beaucoup marquée Léonie du haut de ses trois ans. Mais ce qui l'a enchantée (et terrifiée) c'est Baba Yaga elle-même ...  que l'on ne voit pas, en fait, car elle reste cachée dans la cabane. Son nez tordu et ses mains d'araignée sortent de la maison par des trous et lorsqu'elle se soulève, ses pattes de poules lui permettent de se déplacer.  (Dans le conte russe, c'est la maison qui a des pieds de poules).  Et ses yeux flamboient! Voilà de belles trouvailles! Succès assurée chez les tous les petits quand ils la voient arriver! Léonie saute dans mes bras et replie ses jambes sous elle de peur d'être attrapée. Les décors et les costumes d'inspiration russe sont très réussis, les couleurs chaudes, les lumières créent une belle ambiance.

Grat'-moi la puce que j'ai dans l'do

Compagnie Minute papillon mise en scène de Margot Dutilleul

Do Ré Mi fa sol la si do
 Gratte-moi la puce que j'ai dans le dos
Si tu m'lavais gratté plus tôt,
Elle ne n'serait pas monte si haut.

Léonie n'était pas peu fière de chanter cette chanson à son grand père en revenant de ce spectacle musical au cours duquel elle est restée bouche bée, étonnée, tout ouïe aussi car les airs d'opéra défilent gaiement, chantés, fredonnés, transformés en onomatopées, rythmés avec des cuillères en bois,  accompagnés à l'accordéon par trois comédiens, chanteurs d'opéra et musiciens très plaisants.

Le prétexte de la pièce est la journée des tout-petits, du réveil au petit déjeuner, au départ à l'école, en passant par les jeux de récréation, le bain, le coucher... La mise en scène est inventive, amusante, animée, à la fois douce et enlevée. L'imprégnation musicale où l'enfant découvre Bizet, Brahms, Mozart, Offenbach, Vivaldi...  s'accompagne d'une découverte picturale, d'un bain de couleurs et de formes qui rappellent Joan Miro et ses personnages insolites.  La  poésie des décors créés par des images, des projections de taches de couleurs, des silhouettes d'ombre  fait de ce spectacle une belle initiation à l'art. Un coup de coeur!


             La sorcière Latrouille




Dans la famille sorcière, il faut que je vous présente un autre coup de foudre de Léonie : La Sorcière Latrouille de (et avec) Frédérique Bassez ,  Compagnie Apremont Musithéa. J'y suis allée un peu à reculons, ayant peur que la pièce ait un humour un peu lourd et puis non, le spectacle était agréable et a bien amusé les enfants.

 Le sujet  : Maman est une sorcière renommée. Elle voudrait que sa fille lui succède.
Mais la petite Latrouille a peur de tout : des cafards, des araignées, des grenouilles, des souris, des crapauds et de toute la panoplie des sorcières. Le grand bal des sorcières approche, elle doit préparer une potion. Parviendra-t-elle à vaincre ses peurs ?

La jeune actrice, Frédérique Bassez, est charmante et amusante. Elle n'en fait pas trop, tour à tour petite sorcière trop gentille qui rêve de robes de princesse et a peur de tout puis "concocteuse" de  potion magique dégoûtante à base de crottes de nez de limaces, baves de crapaud, pattes d'araignée et j'en passe. Berk! Les enfants sont dégoûtés et ravis, ils adorent! Mais comme Latrouille a peur de tout et qu'elle attire la sympathie des jeunes spectateurs qui la prennent sous leurs ailes, ils doivent monter sur la scène pour attraper les araignées géantes et les cafards albinos. Un spectacle interactif donc et qui fonctionne très bien car la comédienne rebondit avec aisance selon les réactions des gamins et les intègre bien dans la pièce.
 La mise en scène de Patrick Wessel tire le maximum de la scène exiguë du Théâtre des Amants qui est l'ancienne (et très jolie) chapelle du XVIII siècle des Pénitents Violets d'Avignon. J'ai juste trouvé la dernière scène un peu longue après le bal des sorcières quand la petite Latrouille est amoureuse et qu'elle doit à nouveau subir les interdictions de sa terrible maman.  Belle idée cependant que la représentation de la mère! Mais c'est peut-être parce que c'est là que Léonie a décroché. Il faut dire que la pièce s'adresse aux enfants à partir de cinq ans. Un spectacle amusant qui a mis en joie le jeune public.

Challenge d'Eimelle