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lundi 18 juillet 2016

Festival OFF d'Avignon 2016 : D'autres vies que la mienne d'Emmanuel Carrère au théâtre du Centre



D’autres vies que la mienne  au théâtre du Centre est l’adaptation d’un roman d’Emmanuel Carrère.

L’auteur se met en scène avec sa compagne Hélène et leurs fils lors de vacances au Sri Lanka au moment où le Tsunami de 2004 dévaste la région. Bien vite, ce n’est plus de lui-même que va parler Emmanuel Carrère mais des autres, -d’autres vies que la mienne- en particulier de ce couple avec lequel il s’est lié d’amitié et qui a perdu sa petite fille Juliette emportée par la vague monstrueuse.
La deuxième partie de la pièce parle aussi de la mort d’un être cher, une autre Juliette atteinte d’un cancer, la soeur d’Hélène dont nous apprendrons qu’elle était magistrate et qu’elle a lutté avec un ami, juge comme elle, contre les profits abusifs et les pratiques usurières de certaines compagnies de crédit, Cofinoga et Cofidis.
Je n’ai pas lu le roman mais je suppose qu’il manque parfois à la pièce de théâtre le temps du déroulement, le développement nécessaire pour parler de ces deux vies fauchées, enlevées si brutalement à ceux qui les aiment.  Ainsi, j’ai eu l’impression que le texte était inégal et que, dans la première partie, je n’avais pas le temps d’entrer vraiment dans l’histoire. L’épisode du Tsunami raconte des évènements terribles mais nous n’avons pas le temps de faire connaissance avec l’enfant, ses parents et son grand père. Ils demeurent donc des silhouettes, des inconnus victimes d’une affreuse tragédie mais pas des personnages. La mort de l’autre Juliette m’a beaucoup plus touchée dans ses rapports avec ses enfants, son mari, on prend conscience de sa souffrance, de sa lucidité et aussi de son absolue sincérité, son refus de tricher face à sa mort imminente. Grâce  à l'acteur, David Nathanson, qui fait passer l’émotion nous voyons le personnage et il se met à vivre devant nos yeux. Le comédien est seul sur scène dans une mise en scène que Tatiana Werner a voulu dépouillée. Il conte d’une manière sobre mais avec conviction ces « autres » vies et nous entraîne bien loin des nôtres! Un bon spectacle.

dimanche 17 juillet 2016

Festival OFF d'Avignon 2016 : Livret de famille de Eric Rouquette au théâtre Essaïon



Décidément le festival d’Avignon est d’une grande qualité cette année tant au niveau des pièces que par le talent des comédiens! C’est le cas pour Livret de famille d’Eric Rouquette, pièce interprétée par Christophe de Mareuil et Guillaume Destrem.

Au milieu de la nuit, Jérôme se rend chez Marc, son frère aîné. Il est sans nouvelles de leur mère depuis plusieurs jours. Si Jérôme est affolé, Marc accueille cette disparition avec indifférence. Les deux frères ne se voyaient plus et leur mère n’est pas étrangère à cet éloignement. Le temps d’une nuit où les secrets se disent, ils vont se retrouver.

Cette rencontre entre deux frères séparés que tout oppose est traitée avec beaucoup de finesse. Eric Rouquette connaît l’âme humaine! Jérome est le préféré de sa mère. En apparence, il a réussi, il est cadre dans une entreprise, a une vie familiale épanouie entre son épouse, Mireille, et ses trois enfants. Marc, est considéré comme le raté de la famille. Il est écrivain mais n’a encore jamais publié ; il est solitaire et il est tellement fauché qu’il ne peut payer le loyer de son appartement miteux.
Mais tout n’est pas aussi simple et la réalité est complexe comme le sont aussi les rapports familiaux entre une mère et ses fils et les liens qui unissent une fratrie. Au cours de cette nuit, entre affrontements et disputes, bagarres et confidences, moments d’émotions, coups de gueule et entente pacifique, les deux frères vident leur sac. Ce qu’il y a à l’intérieur du sac? Des souvenirs d’enfance communs faits de complicité et de fraternité mais aussi des sentiments mêlés, jalousie et admiration, dévouement et rivalité, incompréhension, chacun s’enfermant dans son égoïsme et dans les drames de sa vie. Et puis, dans chacun des deux frères, bien cachée, inavouée, mais éclatant par inadvertance, la part du petit enfant qui existe en chacun de nous et qui réclame l’amour d’une mère, sa compréhension, l'acceptation de ce que l’on est. Et qu’il est difficile de guérir des plaies de l’enfance, notre existence entièrement ne se construit-elle pas avec ou contre nos parents?
Ce beau texte si juste, si vrai, est un moment de bonheur. Le spectateur est suspendu aux lèvres des comédiens qui en rendent les moindres nuances avec humour, émotion et subtilité. Un excellent spectacle !

 La Belle Equipe/ Coproduction Batala
Interprète(s) : Christophe De Mareuil, Guillaume Destrem 
Mise en scène : Eric Rouquette 
Décor : Olivier Hébert 
Lumière : Arnaud Dauga 
Régie générale : Charlotte Dubail 
Création graphique : Marie-Hélène Guérin 
Diffusion : Cathie Simon-Loudette

Festival IN d'Avignon 2016 : Tigern, La Tigresse de Gianina Carbunariu salle Benoît XII


Voir l'origine de cette photo Ici

Gianina Carbunariu, l’auteure de Tigern est roumaine. C’est un fait divers, un tigre échappé d’un zoo dans une petite ville de Roumanie, qui lui a inspiré cette pièce. A travers cet animal en liberté dans la ville, Gianina Carbunariu pose le problème de la peur de l’autre, de la haine de l’étranger dans son pays. Mais ceci est vrai dans toute l’Europe où la montée de l’extrême-droite et le développement des discours populistes attisent les haines raciales. Sofia Jupither qui a assuré la mise en scène est suédoise et elle a reconnu dans la pièce la Suède et les Suédois confrontés à des phénomènes similaires.
«  Le détour par l’animal, explique Sofia Jupither permet de parler des humains. C’est un procédé typique de la fable »
La pièce est conçue comme un documentaire avec un décor neutre, un grand mur contre lequel sont alignées des chaises, une table avec un micro, studio de radio ou de télévision, ou micro-trottoir dans une rue. Les témoins racontent ce qu’ils ont vécu car, après la mort de l’animal, les médias se sont emparés de l’histoire. Ce sont des marginaux comme ce couple de SDF qui exploite la tigresse, des personnes modestes comme ce vieillard solitaire qui lui viendra en aide. Mais il y a aussi ce riche bourgeois qui fait acte de violence envers elle et tant d’autres, du touriste qui la photographie à l’infirmier qui la soigne jusqu’aux animaux du zoo qui lui reprocheront de payer les conséquences de son choix, la liberté.
Sofia Jupither a choisi de faire jouer ses comédiens d’une manière distanciée, sans émotion, et d'utiliser une arme redoutable, l'humour. Car la situation est absurde si l’on imagine tous ces gens parlant à une tigresse mais ce qui est dit est d’une violence extrême si l’on a conscience que les mots s’adressent à un être humain. La pièce explore les réactions de peur face à l’altérité, la haine de l’autre, le mépris du riche envers le pauvre, le rejet, la violence qui va jusqu’à la mise à mort.  Une violence qui culmine sur les cris de ceux qui regrettent jusqu’à la dictature et réclament un nouveau Ceausescu!
Les comédiens sont excellents. J’ai aimé, entre autres, le trio du corbeau, du moineau et du pigeon. Le spectateur rit beaucoup tout en étant pénétré par la signification de la fable! La pièce est un appel à la réflexion, à la compréhension de l’autre. C’est une sonnette d’alarme qui nous dit qu’il ne faut pas céder à la haine sous peine de sombrer dans le chaos.
Olivier Py a voulu que le théâtre soit une arme cette année et il l’est : Les Damnés, Tristesses dont je n’ai pas encore parlé ici et maintenant Tigern sont des questionnements forts sur ce que nous sommes en train de vivre en Europe!

samedi 16 juillet 2016

Festival OFF d'Avignon 2016 : La valse du hasard de Victor Haïm au théâtre l'Arrache-coeur


La valse du hasard de Victor Haïm au théâtre de l’Arrache-coeur est un texte étrange, original où humour et drame se côtoient.
Imaginez-vous à la place de cette femme qui vient de mourir dans un accident de voiture (plutôt de sa faute, d’ailleurs, elle allait à 200 km heure et elle avait bu!) et qui, propulsée au ciel, rencontre un ange! Il la soumet à une sorte d’examen de passage dont l’issue n’est autre que le paradis ou la damnation éternelle! Vous imaginez le stress? Surtout quand l’ange paraît des plus capricieux, pour ne pas dire pervers, et vous retire des points sans que vous parveniez à comprendre les règles du jeu si cela en est un!
L’antichambre de l’éternité est encombrée de valises qui représentent l’âme des morts et l’ange est en contact direct avec dieu par une machine qui a les fonctions du fax mais… divin!
Cette rencontre est l’occasion d’un duo éblouissant entre deux comédiens de talent. Patrick Courtois, machiavélique à souhait, nous entraîne dans ce jeu du chat et de la souris au cours duquel il semble se délecter, - le spectateur aussi- , ramenant d’un coup de griffe sa victime, au moment où elle s’y attend le moins et croit pouvoir s’échapper ! Victime, oui, mais pas sans ressource ! La comédienne Marie Delaroche est de taille à disputer, face à cet ange cruel, une joute oratoire savoureuse pour le spectateur qui compte les coups.
Mais au cours de cette lutte la femme est obligée d’abandonner peu à peu les règles sociales en vigueur sur la terre :  ici le jeu de la séduction n’est pas de mise, le mensonge non plus, ni la flatterie, ni le calcul. Ici les lieux communs, les phrases toutes faites, les préjugés n’ont plus cours. Aucun échappatoire. Au fur et à mesure qu’elle nous conte son histoire, elle se dépouille de tout ce qui la retient à sa vie terrestre, et se révèle telle qu’elle est jusqu’à l’aveu final, douloureux mais salvateur.  Au total, c’est l’histoire d’une vie que nous venons de voir défiler devant nous, celle d’une femme fragile, avec ses défauts et ses faiblesses, souvent une proie dans le monde des hommes et qui a beaucoup souffert!
Un excellent spectacle!
 Fam Prod
Interprète(s) : Marie Delaroche, Patrick Courtois 
Mise en scène : Carl Hallak, Patrick Courtois 
Lumières : Philippe Quillet 
Costumes : Rick Dijkman 
Décors : Bernard Bourdeu 
Musique : Sylvain Gazaignes 
Régie : Rodrigue Louisar



Festival OFF d'Avignon 2016 : Quand je serai grande... Tu seras une femme, ma fille au théâtre l'Arrache-coeur




Être une femme. Avec les rêves que l’on avait petite fille. Avec les rêves que l’on a pour nos filles.
La comédienne seule en scène incarne 4 générations de femmes, avec leurs doutes, leurs espoirs, leurs contradictions.

Quel beau spectacle que ce Quand je serai grande, discrètement et sympathiquement féministe, plein d’humour et de nostalgie et si bien interprété par la comédienne Catherine Hauseux !
Celle-ci fait revivre pour nous quatre générations de femmes et elle est tour à tour Isabelle, Françoise, Maeva, Henriette, incarnant avec une vérité étonnante tous les âges de la femme de milieux sociaux et d'époques différentes, du XX siècle à nos jours. Une mention spéciale pour sa prestation de jeune fille beur, résolue à faire son chemin dans la vie grâce aux études et à échapper à la tyrannie du grand frère, ou encore pour la charmante et émouvante vieille dame qui, même en fin de vie, a le regard tournée vers l’avenir, c'est à dire vers sa petite fille, celle qui ne s’en laissera pas compter et qui représente l’espoir de liberté pour la femme.
La structure de la pièce écrite par Catherine Hauseux d’après des témoignages de femmes de 18 à 90 ans, mise en scène par Stéphane Daurat, n’est pas chronologique. C’est c’est peu à peu, au cours de ces monologues, avec des retours en arrière et des avancées dans le temps, que l’on assiste à la lente évolution de la condition féminine, que l’on passe des rêves avortés des unes à la libération des autres, de la grossesse obligée à la maîtrise des moyens de contraception, évolution qui correspond aussi à celle des hommes, du père lointain au papa concerné! J’ai aimé aussi la scénographie, ce linge blanc étendu sur des cordes, symbole de La corvée féminine par excellence, sur lesquels sont projetées des images du temps passé.
Ne ratez pas ce spectacle intelligent, alliance réussie entre un beau texte chargé d’émotion et d’humour et une interprète pleine de sensibilité.

Et bien sûr, pour le sous-titre Tu seras une femme, ma fille, vous avez reconnu le poème de Kipling mis au féminin.

vendredi 15 juillet 2016

Festival OFF d'Avignon 2016 : La reine de beauté de Leelane au théâtre des Corps Saints



L'action de La reine de beauté de Leelane de Martin McDonagh se situe dans un village pauvre du  Connemara, de nos jours ! La région offre peu de perspectives d’avenir, le chômage est important et les jeunes partent travailler en Angleterre où ils sont méprisés et exploités. C’est à travers quatre personnages que McDonagh fait revivre cette région d’Irlande qu’il connaît bien et ce milieu rural populaire dont il utilise la langue assez pittoresque bien servie par la traduction. Celle-ci rend, en effet, le côté primaire des personnages qui ont peu de vocabulaire et appartiennent à une classe sociale défavorisée. Pourtant, malgré la maladresse et la simplicité du ton, j'ai été émue par la lettre de Pato à Maureen et par la manière touchante dont il exprime son amour.

Maureen est une femme de quarante ans qui doit s’occuper de sa mère Mag, une femme méchante, exigeante, égoïste, qui fait tout pour la maintenir à son service en l’empêchant de vivre sa vie.  Maureen est amoureuse de Pato, son ami d’enfance, qui la proclame Reine de beauté de Leelane. Il lui écrit pour lui demander de la suivre dans son exil aux USA et confie sa lettre à son petit frère Ray. Mag va tout mettre en oeuvre pour faire échouer ce projet.

Les thèmes de la pièce sont riches et révèlent l'Irlande profonde, celle qui n'a pas encore totalement évolué.  La pauvreté, le chômage et l’exil en sont les thèmes majeurs ainsi que le poids de la religion qui prive Maureen d’une sexualité normale et la maintient auprès de sa mère malgré la haine réciproque qu’elles éprouvent l’une envers l’autre; portée à son paroxysme, cette haine peut déboucher à tout moment sur la folie et Sophie Parel qui interprète Maureen a un jeu exacerbé qui exprime la tension extrême de ce personnage et la fait paraître prête à basculer dans la violence.
La reine de beauté de Leelane est une pièce pessimiste qui touche et remue et il faut tout l’humour de McDonagh son auteur et la mise en scène enlevée, rapide, incisive voire coup de poing de Sophie Parel pour faire passer la pilule! Car on rit beaucoup au cours de cette pièce, un humour noir, corrosif qui ne laisse pas indifférent! Et puis il y a, outre Sophie Parel, les trois autres comédiens, Catherine Salviat qui est Mag, Gregori Baquet, Pato, et Arnaud Dupont, Ray, qui  interprètent magistralement tous ces personnages et provoquent le rire, font naître l’émotion. Un très bon spectacle!

Festival OFF d'Avignon 2016 : Tous contre tous d'Arthur Adamov et Les bêtes de Charif Ghattas au théâtre des Halles


Tous contre tous

Tous contre tous est une pièce interprétée en coréen (surtitrée en français) par les jeunes comédiens de l’Université nationale des Arts de Corée et mise en scène par Alain Timar. La pièce écrite en 1952 a pour thème les réfugiés. C’est un sujet que Arthur Adamov connaît bien : russo-arménien il a dû lui-même quitter la Russie avec ses parents, en 1914, quand il était enfant, pour l’Allemagne et la Suisse. Dans Tous contre tous, à la fin de la seconde guerre mondiale, Adamov fait allusion à la déportation des juifs et des minorités mais aussi aux déplacements de population liés aux nouvelles frontières de 1945. Mais, bien sûr, ce thème repris de nos jours est plus que jamais au centre de l’actualité contemporaine. 
Le sujet m’intéresse mais je n’ai pas été entièrement accrochée. Tout d’abord  la mise en scène me rappelle trop celle que Alain Timar avait concoctée pour Ubu Roi et que d’ailleurs j’avais énormément aimée ! Les comédiens sont tous en scène et changent des costumes pour incarner l’un ou l’autre des personnages. Leur manière d’évoluer très symétrique, un peu mécanique, pour souligner l’oppression, la dictature, le racisme, est justifiée, certes, mais met en valeur ce qui ne m’a pas plu dans la pièce, son aspect démonstratif. En effet, sa structure repose sur une symétrie : lorsque  la population du Sud émigre vers le Nord, il est pris en haine par ceux qui les accusent de leur prendre leur travail, mais lorsque le Nord fuit vers le Sud, la même situation se reproduitb! Histoire de montrer comme le disait Cavanna qu’on « est toujours le Rital de quelqu’un » ! Mais on avait compris, merci ! Comme souvent dans les pièces « engagées » d’une certaine époque, le dramaturge enfonce le clou pour se faire comprendre, d’où une insistance et un aspect répétitif assez ennuyeux et ceci d’autant plus que les personnages ne sont pas vraiment des êtres humains mais servent à la démonstration.

 Les bêtes


L’autre pièce mise en scène par Alain Timar est de Charif Ghattas. C’est une satire de la bourgeoisie qui se veut féroce : un couple Line et Paul collectionnent à eux deux tous les défauts de cette classe sociale aisée mais vide, intéressée seulement par l’argent et sans conscience, sans état d’âme quant à la manière de le gagner ! Superficiels en amitié, snobs quand il s’agit de relations humaines ou d’oeuvres d’art mais finalement peu cultivés, ils ne sont qu’apparence, une façade sans rien derrière ! Mais tout va changer quand ils font entrer chez eux un SDF.
Et c’est là que la pièce m’a déçue. J’espérais que l’histoire allait introduire un homme du peuple, un vrai, un personnage de chair non une idée, quelqu’un qui menacerait - même momentanément - l’équilibre du couple en lui opposant une réalité sociale. Il n’en est rien ; le SDF est du même milieu, il n’introduit pas une dimension humaine dans l’action. En fait, il est aussi pourri qu’eux et couchera avec tout le monde donnant ainsi à la pièce un petit air de vaudeville, de théâtre de boulevard. Dommage ! Tous ces personnages sont peu intéressants. La pièce est brillante, peut-être ? Méchante, sûrement ! Mais superficielle ! Un exercice de style qui fait rire mais ne me touche pas ! Par contre les comédiens qui interprètent les trois personnages sont excellents et nul doute qu’ils n’obtiennent beaucoup de succès.

lundi 11 juillet 2016

Festival Off d'Avignon 2016 : Une heure avec Montaigne au théâtre Carnot par Delphine Thellier



L’ami de toujours, l’amoureux de la gaité, de la volupté, le philosophe du peuple se confie en direct... 
Où il est question de renard sur la glace, de fourmis, de cannibales, de chute de cheval, de branloire pérenne, de fève dans le gâteau, de tintamarre philosophique, de soleil flamboyant...

Je suis allée ce matin voir Une heure avec Montaigne au théâtre Carnot. Vous comprenez combien ce spectacle m’attire puisque mon blog Ma librairie est dédié à ce philosophe.


Delphine Thellier a choisi de donner une version en langue moderne, tout en conservant certains termes du XVIème siècle  si évocateurs et truculents. Quel bonheur un texte pareil quand vous le connaissez parfois par coeur et que vous attendez avec délectation les mots qui vont venir, retenant votre envie de les dire à la place de la comédienne ! Elle est seule, assise sur une chaise, dans ce que j'ai imaginé être "la librairie" du château de Montaigne, avec ses poutres gravées de maximes grecques ou latines, et l'on entend les chants d'oiseaux dans le jardin alentour. Le spectacle s'apparente à une causerie ou plutôt à un soliloque au cours duquel Montaigne, comme il aime le faire, laisse divaguer sa pensée, nous entretient de sujets divers et d'abord nous invite à jouir de la vie.

Notre grand et glorieux chef d'oeuvre, c'est de vivre à propos. Toutes les autres choses, régner, thésauriser, bâtir n'en sont, tout au plus, que de petits appendices et des accessoires.

Une heure passée avec l’ami Montaigne est toujours enrichissante et comme Delphine Thellier met en valeur avec simplicité les moindres nuances du texte, en distille l’humour, nous laisse en savourer le sens, il ne nous plus qu’à nous laisser séduire par cette pensée si riche, si actuelle et si pleine d’une sagesse que nous ferions bien de faire nôtre, quand il s’agit de tolérance, de modération, et d’amour de la vie.

Delphine Thellier est aussi le Candide de Voltaire dans le spectacle suivant à 11H30 au Théâtre Carnot. je vous laisse admirer la beauté et la sobriété des affiches de ces deux spectacles. Il y a tant d’affiches laides et criardes dans le festival qu'il est agréable d'apprécier celles qui ne le sont pas.



samedi 9 juillet 2016

festival OFF d'Avignon 2016 J'ai hâte d'aimer au théâtre du Balcon/ Casablanca 41 au théâtre du Centre


J’ai hâte d’aimer.

J’avais vraiment beaucoup aimé l’année dernière le spectacle de la Compagnie interface : L’oubli des anges, entre danse, théâtre et musique. ( voir billet ici) je suis donc allée voir aujourd’hui J’ai hâte d’aimer.

« J’ai hâte d'aimer est le fruit de la rencontre extraordinaire entre la Cie INTERFACE et Francis Lalanne.
Un spectacle aux multiples langages, hymne à la naissance, hymne à ces instants où l'univers se présente à soi dans toute sa splendeur et sa force.
Après avoir vécu J'ai hâte d'aimer, on se souvient que tout part du rêve et que quand le rêve disparaît, la vie s'éteint. »
J’avoue que j’ai été un peu déçue par la prestation de la compagnie Interface cette année. j’ai trouvé le spectacle un peu brouillon, pas toujours clair au niveau du sens et surtout il manque cette esthétique épurée, cette précision de la gestuelle, ce dépouillement qui, dans le spectacle L’oubli des anges, ouvrait sur l’émotion. J’ai hâte d’aimer présente, cependant, de beaux moments, la danseuse Géraldine Lonfat est très harmonieuse et l’ensemble des chanteurs et des danseurs est de qualité. Mais l’univers que j’avais tant aimé dans la compagnie a disparu.


Compagnie Interface
auteurs : Géraldine Lonfat / André Pignat / Francis Lalanne 
  • Interprète(s) : Francis Lalanne, Géraldine Lonfat, Thomas Laubacher, Paul Patin, Virginie Quigneaux, Daphné Rhea Pélissier, David Faggionato
  • Chorégraphe : Géraldine Lonfat
  • Metteur en scène et compositeur : André Pignat
  • Auteur : Francis Lalanne
  • Régisseur : Jérôme Hugon

Casablanca 41


Casablanca 41 semblait me promettre une atmosphère semblable à celle du film de Michael Curtis même si je savais que la pièce de théâtre était autre chose… Il s’agit, en effet, de l’histoire de réfugiés qui attendent leur départ vers l’Amérique sur un paquebot dans le port de Casablanca. Certains n’ont pas de papiers, d’autres ont de fausses identités et sont dans l’angoisse d’être découverts et arrêtés par la Gestapo ou la police de Vichy avant même d’avoir pu partir !
En fait, je n’ai pas aimé le texte de la pièce. L’auteur, Michal Laznovsky, d'origine tchèque, règle surtout ses comptes avec les communistes de son pays et Casablanca, le climat délétère qui y règne à l’époque semblent moins l’intéresser. L’histoire est un peu confuse et les personnages aussi : qui est le mari de Martha ? Est-ce celui qui est parti ? Et si oui, alors, qui est le mort caché sous son lit, qu’elle dit être son mari ? Qui est réellement celui qui se dit être un « cueilleur » d’informations ? Un espion ? Et Olinka ? Qui est cette femme? Une Mata Hari comme elle le suggère en plaisantant et comme semble l'indiquer les messages codés qu'elle capte ? Et pourquoi cette piste est-elle abandonnée ?
 De plus, la mise en scène manque un peu d’inventivité.  Ainsi on aurait pu attendre de l’humour (noir) lorsqu’ils se débarrassent du cadavre ou lorsque le non-juif dit qu’il est juif pour échapper aux communistes, à une époque où, pourtant, rien n’est plus dangereux que de se reconnaître juif! Là où tout est sur le même plan, un changement de ton aurait été le bienvenu.
J’ai donc trouvé la pièce décevante par rapport à mon attente.

 

Compagnie Golem théâtre
Casablanca 41 auteur : Michal Laznovsky 
  • Interprète(s) : Bruno La Brasca, Jacques Pabst, Muriel Sapinho, Frederika Smetana
  • Mise en scène : Michal Laznovsky
  • Scénographie : Daniel Martin
  • Univers sonore : Gilbert Gandil
  • Lumières : Guillaume Jargot
  • Costumes : Hélène Battais
  • Chargée de diffusion : Linda Journet


vendredi 8 juillet 2016

Festival IN d'Avignon 2016 : Les damnés Ivo Van Hove à la cour d'Honneur

photo de Arnold Jerockiu dans le Huffington Post Voir  critique ICI

Je voulais voir Les damnés en souvenir du film de Visconti et puis pour découvrir le metteur en scène Ivo Van Hove, directeur artistique d’une grande compagnie théâtrale d’Amsterdam. Enfin, c’était la Comédie française qui « s’y collait », si j’ose dire, et comme j’étais restée sur le souvenir d’une prestation médiocre de leur part dans un Goldoni, il y a quelques années, lors d’un séjour à Paris, je voulais voir ce qu’il adviendrait des comédiens du Français entre les mains de Ivo Van Hove.
Et bien je le dis tout de suite, c’est une réussite! Les comédiens sont tous excellents et la mise en scène est belle, inventive, et le moins que l'on puisse dire c'est qu'elle secoue le public.

Ivo Van Hove, pour monter cette pièce crépusculaire sur une famille d’industriels allemands, les Essenbeck, qui devient peu à peu le soutien du nazisme, utilise la vidéo dans le théâtre non comme simple support et illustration mais comme partie intégrante de l’action. Une sorte de prolongement de la scène jamais gratuite, toujours signifiante. La caméra est multiple, filmant les réactions des comédiens en gros plan alors que c’est un autre personnage qui occupe la scène si bien que le spectateur a le don d’ubiquité et peut suivre plusieurs scènes à la fois. La caméra s’installe dans les cercueils, témoignant de l’agonie des morts sacrifiés à l’intérêt de la famille et du parti nazi par leurs proches, tandis que, sur scène, les assassins continuent à vivre leur vie dans une lutte âpre pour le pouvoir et l’argent; elle nous fait aussi pénétrer à l’intérieur du palais agrandissant encore l’espace scénique déjà immense de la cour d’Honneur. Un espace immense, oui, mais intimiste aussi (et ceci est un tour de force!) qui nous permet de suivre en direct tous les sentiments qui s’inscrivent sur le visage des personnages, colère, mépris, haine, désespoir… Mariage heureux où le film est vraiment au service du théâtre! La multiplication des prises de vue, la caméra filme de dos, de face, latéralement mais aussi du dessus, à l’intérieur comme à l’extérieur, donne plus d’ampleur et de force à l’action. Parfois, un film tourné avant la représentation se mêle aux images prises en temps réel; ainsi pendant « La nuit des longs couteaux », deux personnages (dont Konstantin, un des fils de Joachim) sont seuls sur la scène tandis qu’un film, derrière eux, les montre entourés de leurs camarades de beuverie. L’absence des compagnons sur scène alors que nous les voyons sur l’écran  en train d'être exécutés est hallucinante et préfigure leur mort. Ce sont déjà des fantômes.
La violence est toujours présente au cours de la pièce, elle couve d’abord sous-jacente lors de la fête d’anniversaire du patriarche, le vieux baron Joachim, puis elle se révèle insidieuse pour éclater aussi bien au niveau familial que national : la pièce commence avec l’incendie du Reichstag, se poursuit avec la Nuit des longs couteaux et atteint son apogée avec le début de la guerre quand le public est fusillé par Martin Essenbeck. Pendant ce temps les membres gênants de la famille sont supprimés et l Martin, assassin pédophile, incestueux, tue des enfants et achève sa mère, tandis que le parti nazi referme son emprise sur les membres restants de la famille. 

Photo Télérama voir critique  ICI

Le décor nu avec le beau mur de scène du palais forme le cadre austère et recherché de cette histoire dans l’Histoire. Les éclairages et les couleurs chaudes, l’orange du tapis de scène, le rouge du sang qui jaillit lors de l’assassinat des SA, le noir et blanc à l’intérieur des cercueils, sont esthétiques mais pas seulement; ils soulignent violemment ce drame politique et familial.
Et parfois la caméra s’intéresse à nous et nous filme et nous devenons personnages nous-mêmes, comme témoins, peut-être? Mais aussi, je pense, pour nous rappeler la responsabilité de chacun face à la montée des nationalismes, pour nous dire que si nous avons le choix, au début, nous ne l’avons plus quand il est trop tard, quand la démocratie est morte!

La cour d'Honneur jeudi 7 juillet avant le spectacle

jeudi 7 juillet 2016

festival OFF d'avignon 2016 : Medina Merika de Abdelwaheb Sefsaf au théâtre Gilgamesh



Quand je vous dis que, au festival off d’Avignon, l’on ne va jamais tout à fait voir ce que l’on avait prévu! Hier, une invitation, dans la rue, pour Medina Merika et ce matin -pourquoi pas?- nous voilà au théâtre Gilgamesh pour voir cette pièce librement adaptée d’un roman de Orhan Pamuk, écrivain turc, Mon nom est rouge. Nous ne l’avons pas regretté!
Dans le roman policier de Pamuk, il est question du meurtre d’un homme dont le cadavre a été jeté dans un puits. L’action se passe au XVI siècle chez le Maître, un miniaturiste qui a accepté de traiter les miniatures à la manière de la Renaissance italienne allant ainsi contre la tradition, réveillant les fanatismes. Conflit entre l’Occident et l’Orient, entre la tradition et le modernisme, entre deux croyances et deux cultures opposées.
Le titre de la pièce Medina Merika de Abdelwaheb Sefsaf : Médina - le quartier ancien de ville- et Merika -l'Amérique- illustre cette opposition.

Abdelwaheb Sefsaf, français d’origine algérienne, nourri des deux cultures dans la banlieue de Saint Etienne, a adopté ce roman en conservant le thème central initial si actuel, en le transposant notre époque. Est né ainsi un spectacle intelligent, enlevé, original, interprété sur les chapeaux de roue par des comédiens et des musiciens inspirés où toutes les musiques orientales ou occidentales, modernes ou traditionnelles, les chants, les langues se confondent. Les danses aussi et notons au passage la grâce de la comédienne, la beauté de ses mains, dansant en ombre chinoise sur l’écran où sont projetées des vidéos qui servent de support au récit.

Celui-ci se déroule à plusieurs voix :

Ali, le Mort, père comblé et mari heureux de la tendre Lili, qui nous parle du fond de son puits et que l’adaptation contemporaine a transformé en cinéaste renommé, amoureux du cinéma américain, épris des idées nouvelles, dangereux aux yeux des traditionnalistes.

Le Borgne, l’assassin, qui a deux mobiles à son meurtre, l’amour de la belle Lili qui lui a préféré Ali et sa haine de ce qui n’est pas conforme à la religion traditionaliste.

Lili, la femme aimante, à la recherche de son mari disparu, fragile et forte à la fois et qui pose le problème de la femme orientale à la recherche de la liberté, de l’égalité et de sa consoeur occidentale qui n’est pas toujours plus heureuse dans un monde d’hommes dont elle ne fixe pas les règles et sur lequel elle doit s’aligner. Un Occident qui a bien des choses à se reprocher aussi, donnant sa bénédiction à l’assassinat par le peuple (les victimes s’érigeant en bourreaux) des dictateurs dont il veut se débarrasser.
Et puis il y le chien aussi, le chien qui parle et, si vous vous en étonnez, il vous répondra que vous gobez tout cru l’histoire du mort qui parle alors pourquoi pas du chien? Et oui, car il y a beaucoup d’humour dans cette pièce, un humour noir, bien sûr, (vous y apprendrez la différence entre un rat oriental et un rat occidental, entre le poids de la tête d'un innocent et celle d'un coupable!) avec un beau texte qui passe sans arrêt du rire aux pleurs, le comique et la tragédie se mêlant étroitement.

 Notons que les comédiens sont tous excellents et la mise en scène inventive remet en cause les rapports faussés entre l'Orient et l'Occident, entraînant un questionnement des deux côtés. Le spectacle qui baigne dans les deux cultures semble être une réponse car il ouvre la voie vers une possible entente qui réconcilie les différences et en révèle la richesse.



mercredi 6 juillet 2016

Festival OFF d'Avignon 2016 : Fabrice Luchini et moi de Olivier Sauton au théâtre du Rempart



Je sors du théâtre du Rempart et je suis encore tout imprégnée par la pièce d’Olivier Sauton, Fabrice Luchini et Moi

Olivier Sauton est un grand admirateur de ce comédien. Il y a dix-huit ans, alors qu’il n’est qu’un jeune homme inculte, il rencontre Fabrice Luchini dans Paris, à trois heures du matin, et lui demande de lui réciter une fable de La Fontaine. A partir de cette anecdote vraie et inoubliable, il écrit une histoire  « réelle mais qui n’a jamais existé » dans lequel Fabrice Luchini devient son professeur et lui insuffle son amour du mot juste et du Bien Dire mais aussi son culte des grands auteurs classiques.
Une déclaration d’amour à la littérature et au théâtre pendant lequel le spectateur est partagé entre le rire et l’émotion.
Car l’on rit beaucoup dans cette pièce tant le mimétisme d’Olivier Sauton qui devient Luchini est étonnant voire hallucinant : transformation du visage, les yeux s’arrondissent, la bouche s’affaisse, découvre les dents et laisse tomber les mots en les détachant avec délectation, les tics apparaissent, sidérants de vérité, la voix aussi est celle de l’acteur.
 Mais la ressemblance n’est pas seulement visuelle et extérieure, ce qui intéresse Olivier Sauton c’est de nous faire partager les idées de Luchini ( et les siennes!) sur la littérature, la grande, celle qui peut transformer une vie, lui donner un sens. Le rire alterne avec l’émotion. Le sens du texte s’approfondit avec cette interprétation à la fois iconoclaste et magistrale de La cigale et la fourmi dans lequel Luchini-Sauton prennent le parti du travail sérieux et intense comme seul moyen d’accéder au génie; car celui-ci nous disent-ils est le fait d’un peu de talent et de beaucoup de travail. Vive la fourmi, donc!  Quant au Enivrez-vous de Baudelaire, il est un appel vibrant, une invitation à la vie et ce poème prend toute sa saveur avec cette « leçon » dispensée devant nous tandis que les extraits du Misanthrope sont d’une belle sobriété, vraie et touchante. Ainsi naissent de grands moments d’émotion comme seule la littérature peut nous procurer. De même lorsque Luchini engage son élève à écouter le silence d’un théâtre, le recueillement qui y règne, le théâtre comme une cathédrale sans prêtres et touristes, le théâtre comme lieu de communion et de partage.
Vous aimez la littérature et le théâtre, vous aimez Fabrice Luchini, vous aimez rire? Ne ratez pas cette pièce. C’est un régal!


 Fabrice Luchini et moi 
 Olivier Sauton auteur et interprète
 théâtre du Rempart 10H10
durée 1H15


Et pour le plaisir...
Enivrez-vous Baudelaire
 
Il faut être toujours ivre, tout est là ; c'est l'unique question. Pour ne pas sentir l'horrible fardeau du temps qui brise vos épaules et vous penche vers la terre, il faut vous enivrer sans trêve.
Mais de quoi? De vin, de poésie, ou de vertu à votre guise, mais enivrez-vous!
Et si quelquefois, sur les marches d'un palais, sur l'herbe verte d'un fossé, vous vous réveillez, l'ivresse déjà diminuée ou disparue, demandez au vent, à la vague, à l'étoile, à l'oiseau, à l'horloge; à tout ce qui fuit, à tout ce qui gémit, à tout ce qui roule, à tout ce qui chante, à tout ce qui parle, demandez quelle heure il est. Et le vent, la vague, l'étoile, l'oiseau, l'horloge, vous répondront, il est l'heure de s'enivrer ; pour ne pas être les esclaves martyrisés du temps, enivrez-vous, enivrez-vous sans cesse de vin, de poésie, de vertu, à votre guise.
Spleen de Paris (In Les petits poèmes en prose)

mardi 5 juillet 2016

Festival OFF d'Avignon 2016 : Ma folle otarie de Pierre Notte au théâtre des Halles

Brice  Hillairet

Nous avons pu assister aujourd’hui à l’avant-première de Ma folle otarie de Pierre Notte. Si je tenais absolument à voir ce spectacle, c’est que j’avais été séduite par La Pédagogie de l’échec du même auteur, pièce mise en scène par Alain Timar, donnée au festival d’Avignon l’année dernière, satire cruelle en même temps qu’hilarante du monde de l’entreprise, de ses hiérarchies, de ses férocités.

Ma folle Otarie est une pièce d’un tout autre genre, plus noire car l’humour n’y joue pas le rôle de soupape de sécurité ! Nous sommes plongés dans un univers où il nous faut découvrir la réalité sous l’image, la cruauté de la vie sous la fantaisie et l’imaginaire le plus débridé! Une invitation à l’imagination.
Le personnage -brillamment  interprété- par Brice Hillairet est un homme timoré, qui n’a jamais pu vivre sa vie, qui n’a jamais osé élever le ton, jamais osé s’affirmer, voire se révolter. Son seul amour épistolaire, Esmaralda, est morte dans un accident d’avion, avant de l’avoir connu, en venant le rejoindre de son pays lointain.
Or voilà que le postérieur du jeune homme se met à enfler jusqu’à atteindre un diamètre impressionnant.  Cette affreuse disgrâce qui le rend frère de l’otarie est comme la métaphore d’une vie ratée, la matérialisation de tout ce qui va mal dans l’individu, de tout ce qui conduit à la la marginalisation, à la différence. Voilà notre héros viré de son travail, au chômage, provoquant l’hilarité des employés de Pôle Emploi et les moqueries des enfants et des adultes. Cruauté devant la différence, exclusion de tous ceux qui sortent des normes. Il devient un "freak" présenté comme un monstre de foire pour satisfaire la curiosité malsaine du public.
Le texte est parfois d’une grande fulgurance poétique et fait naître de belles images. Après son suicide quand l’homme au « gros cul » flotte dans l’eau, nous voyons les vagues qui le secouent, les herbes marines qui se révèlent être les longs cheveux de sa bien-aimée Esméralda, un univers marin ou brille le diamant noir qu’il lui a offert. Et puis il y a la demoiselle-otarie aux yeux ronds qu’il va secourir, éprouvant pour la première fois le bonheur d’être utile à quelqu’un, le premier pas vers la délivrance.
Quant à la mise en scène, très serrée, précise, elle exige du comédien quelques prouesses. Celle de jouer dans un petit carré de lumière, tour à tour ascenseur, rame de métro où il est bloqué mais aussi représentation de son univers mental, enfermement dans ses angoisses et dans son monumental physique.
Un très bon spectacle donc à voir et à savourer!

lundi 4 juillet 2016

Festival d'Avignon 2016 : Les spectacles Victor Hugo/Le challenge Victor Hugo


Victor Hugo est toujours, chaque année, un des grands auteurs du festival Off d'Avignon. Cette année les spectateurs pourront assister à sept spectacles qui lui sont consacrés.


Hugo : espace Saint Martial 10H10

Et si l'on pouvait aujourd'hui, le temps d'une émission, convoquer l'esprit de Victor Hugo, un esprit au fait de l'actualité, qui nous donnerait son avis éclairé sur notre époque ?


L'homme qui rit de Victor Hugo Présence Pasteur 12H30

Fin 17ème siècle, par une nuit d’hiver, le misanthrope Ursus recueille dans sa roulotte deux enfants abandonnés au froid et à la faim : une petite fille aux yeux gelés, et un garçon au visage horriblement défiguré par des trafiquants d’enfants : Gwynplaine. Il devient bientôt L'Homme qui rit, vedette incontestée des foires de la vieille Angleterre… jusqu’au jour où la Chambre des Lords le réclame !


Voyage dans une mémoire Chapelle du Verbe incarné à 13H15

Je vous invite à voyager en compagnie de ces "bâtisseurs de langage" que sont Glissant, Vigny, Césaire, Hugo, Chamoiseau, Rostand, Racine, Walcott et d'autres... Ils ont marqué ma vie depuis l’enfance, peuplé mon imaginaire et probablement déterminé ma vocation d’acteur.
Ils n’ont pas de frontières et sillonnent ce spectacle au gré de la musique des mots. 

 

Le dernier  Jour d'un condamné de Victor Hugo  Au magasin 17H

Un homme, qui a commis un crime, est condamné à mort et attend son exécution."L'oeuvre culte des abolitionnistes. Stéphane Dausse est magnifique dans le rôle de ce condamné à mort. Et le verbe de Hugo fait merveille."

FIGAROSCOPE, Jean-Luc Jeener Spectacle retenu dans la sélection du journal "le Monde" lors de sa création au Théâtre de l'Ile Saint-Louis à Paris.

 

 Mangeront-ils de Victor Hugo  Théâtre les Barriques 18H45

 Dans une forêt profonde, deux amants pourchassés par un roi jaloux ont trouvé asile dans un cloître où poussent des plantes vénéneuses. Non loin d'eux vivent deux proscrits: la sorcière Zineb, qui ne demande qu'à mourir en paix loin des hommes, et le voleur Aïrolo. Ce dernier, vagabond épris de liberté, touché par la pureté de l'amour des deux fugitifs, vient à leur secours, car depuis trois jours les tourtereaux rebelles ne mangent ni ne boivent.
Ils s’aiment, mais ils ont faim : mangeront-ils?

Une sorcière âgée de cent ans, un talisman qui protège de la mort, une forêt empoisonnée, tous les ingrédients sont réunis pour nous transporter dans une fable onirique servie par la puissance de l'écriture de Victor Hugo. 



Victor Hugo, mon amour Condition des Soies  19H30

La plus belle des histoires d'amour. Victor Hugo et Juliette Drouet se sont aimés pour la vie et ont échangé 23 653 lettres. D'après leurs écrits, une suite de scènes met en lumière les grands moments de leur vie intime, littéraire et politique.


Claude Gueux de Victor Hugo  Isle 80  21H15

L'histoire commence dans une prison. Claude Gueux, détenu modèle y est enfermé pour un vol mineur. Il y finira la tête tranchée pour le meurtre de son geôlier. Que s'est-il passé? Qu'est-il arrivé à cet homme intelligent et doux? Celui que les prisonniers les plus durs écoutent et respectent? Celui qui a volontairement choisi d'appliquer sa justice au prix consenti de sa propre vie?
C'est le lent glissement vers une personnalité nouvelle née du harcèlement d'un homme sur un autre qui va être raconté là. Davantage qu'un pamphlet contre la peine de mort, cette lente transformation née de l'enfermement est une exhortation à l'éducation du peuple plutôt qu'à sa répression qui habite ce texte de Victor Hugo écrit en 1834.



La Fin de Satan Victor Hugo : Fabrik'théâtre 22H05

Le thème du mal s’est posé à chaque époque et gagne en acuité à chaque pas de l’histoire.
Qu’est-ce que le mal ? Pourquoi le mal ? A-t-il un sens ? Victor Hugo développe une vison grandiose où le théâtre des démons intérieurs devient théâtre cosmique. Il ne place pas le Mal à côté du Bien, comme une chose qu’il faudrait tout simplement anéantir, non, il fait naître de ce détachement, de cette dérive face au Bien divin, la « possibilité » de l’expérience de la liberté. La liberté – conquête de l’homme- ne peut exister sans cette possibilité du Mal.
La Fin de Satan est une œuvre immense. Elle dépeint la chute de Satan dans l’abîme, la naissance de l’être Liberté, et la longue descente de celui-ci à la rencontre du Mal. 

 CHALLENGE VICTOR HUGO  LECTURE COMMUNE

Un beau programme! Je propose que nous reprenions le Challenge Victor Hugo au mois de Septembre avec quelques uns des titres de ce programme que nous n'avons pas encore lus ensemble :

 Le 20 Septembre : MANGERONT-ILS? Livre de poche  

 Miriam, Nathalie, Margotte, Claudialucia

Le 20 Octobre : LETTRES DE JULIETTE DROUET  Une bio de Henri Troyat :  Juliette Drouet  OU Juliette Drouet : Mon grand petit homme mille et une lettres d'amour (Gallimard) OU  tout autre livre de correspondance entre Drouet-Hugo  

Miriam, Margotte(?), claudialucia

Le  20 Novembre :  BIOGRAPHIE DE VICTOR HUGO  : Un été avec Hugo de Laura El Makki (Equateurs/ Parallèles) OU Victor Hugo de Sandrine Filipetti (livre de poche) Ou Olympio ou la vie de Victor Hugo de Maurois. Bref! une biographie de Hugo au choix.

Miriam , Nathalie,   Claudialucia

Eimelle (?)

 Rejoignez-nous dans le challenge Victor Hugo. Incrivez-vous dans les commentaires.  Si vous n'avez pas lu les autres titres du festival L'homme qui rit; Claude Gueux, Le dernier jour d'un condamné, La Fin de Satan, vous pouvez nous accompagner en choisissant ces titres.